Texte intégral
ELIZABETH MARTICHOUX
Bonjour et bienvenue, Franck RIESTER.
FRANCK RIESTER
Bonjour Elizabeth MARTICHOUX.
ELIZABETH MARTICHOUX
Merci en effet d'être avec nous. Sur le conflit des retraites, la CGT annonce trois jours d'action encore cette semaine : mardi, mercredi, jeudi avec un point d'orgue donc jeudi. Le gouvernement a-t-il pris le risque de céder face aux grévistes sans toutefois faire stopper la grève ?
FRANCK RIESTER
On n'a pas cédé face aux grévistes. On s'est inscrit dans un compromis pour faire en sorte de sortir de la grève et mener à terme cette réforme essentielle, la création d'un régime universel qui garantit le financement du système de répartition des retraites. Ça, ce n'est pas céder. C'est travailler main dans la main avec les organisations syndicales qui veulent sortir par le haut de ce conflit. Et je m'étonne toujours de voir un certain nombre d'organisations syndicales vouloir aller jusqu'au bout de l'entêtement alors même que nous sommes déterminés à réformer en profondeur le système de retraite pour qu'il soit plus équitable, plus juste et qu'il permette de relever les défis qui sont les défis de demain du système de retraite en France par répartition. Et je crois qu'on doit, comme l'a très bien dit le Premier ministre, à un moment donné savoir mettre fin à un conflit, à une grève au service d'abord des usagers. Moi je pense à toutes celles et ceux dont la vie est perturbée par ces grèves et je pense aussi que nous avons suffisamment pris le temps d'écouter, de discuter, de dialoguer pour que la grève cesse.
ELIZABETH MARTICHOUX
Tellement pris le temps pour discuter et caetera et pour faire des concessions pour arriver au compromis que Gérard LARCHER, le président du Sénat que vous connaissez bien, qui n'est pas précisément un ultra de la droite, Franck RIESTER, disait hier : « Il n'y a plus de réforme des retraites. Nous ne sommes pas loin de l'abandon. » Ce qu'il dit, c'est que vos électeurs de droite doivent se dire ce matin : « Mais tout ça pour ça ! » Quarante jour de grève.
FRANCK RIESTER
Mais vous voyez, vous dites : « Ce n'est pas un ultra » mais il est la démonstration de ce que sont devenus Les Républicains, c'est-à-dire un parti qui n'est plus un parti capable de se positionner en responsabilité face à des enjeux comme celui de la réforme des retraites. C'est l'opposition systématique. Quand j'entends effectivement un certain nombre de dirigeants de la droite nous accuser de ne pas faire une réforme des retraites. Mais vous avez vu que la rue a été bloquée, enfin les transports ont été bloqués pendant des semaines : c'est parce que justement on a pris la décision de faire une réforme en profondeur que n'a pas eu le courage de faire les gouvernements de droite quand ils étaient en responsabilité. Alors j'entends certains qui disent : « Il faudrait pour ne plus bloquer et pour que la réforme se fasse, il faudrait aller jusqu'à un report de l'âge légal à 65 ans. » Et d'abord pourquoi ces gouvernements de droite ne l'ont pas fait quand ils étaient en responsabilité ? Et franchement, est-ce que vous croyez qu'en repoussant d'une façon systématique le départ légal d'âge de la retraite à 65 ans, on facilitera le retour au travail des gens ? Non. Donc est-ce qu'on peut avoir dans ce pays les partis de droite républicaine…
ELIZABETH MARTICHOUX
C'est de l'incohérence ? C'est de l'incohérence ?
FRANCK RIESTER
Qui soient dans un niveau d'état d'esprit de responsabilité pour permettre que les réformes qu'elles ont toujours appelées ces formations politiques de droite à être mises en œuvre puissent se faire ? On a besoin d'avoir des oppositions qui, à un moment donné, disent : « OK, on vous suit. On voulait depuis longtemps la fin des régimes spéciaux, vous les supprimez, on vous suit. On est tout le temps favorable à ce qu'il y ait un équilibre financier, vous vous engagez à ce qu'il y ait un équilibre financier à terme des régimes de retraite. Vous laissez le temps aux partenaires sociaux de travailler. Dont acte, on vous suit. » Ça serait quand même plus constructif, ça serait quand même plus à la hauteur des enjeux de notre pays. Cette droite telle qu'elle est devenue chez Les Républicains, parce qu'il y a une autre droite : moi, je suis président d'un mouvement qui s'appelle Agir-la droite constructive, qui est un mouvement de droite et qui travaille avec le Premier ministre, avec le président de la République aux réformes que la droite a toujours défendues. Eh bien sur le régime des retraites de cette réforme si importante, j'aimerais que Les Républicains se comportent de la même façon.
ELIZABETH MARTICHOUX
Un appel aux Républicains ce matin pour qu'ils réagissent en responsabilité.
FRANCK RIESTER
Tout à fait.
ELIZABETH MARTICHOUX
Vous dites : « Ça n'est pas le cas. » Franck RIESTER, ceux qui souffrent à cause de la grève, il n'y a pas seulement les commerçants dont on parle régulièrement sur LCI, il y a aussi, et on a parlé d'ailleurs, les théâtres, les musées, les troupes qui sont en tournée. Est-ce que vous savez à combien, est-ce que vous avez une idée de l'évaluation du manque à gagner pour eux ?
FRANCK RIESTER
Non, c'est très difficile. Alors on le sait pour les établissements qui sont sous la tutelle directe du Ministère de la Culture comme l'Opéra de Paris par exemple où on est aujourd'hui entre douze et quatorze millions d'euros.
ELIZABETH MARTICHOUX
Plus près de quatorze que de douze d'ailleurs maintenant.
FRANCK RIESTER
Oui, vraisemblablement.
ELIZABETH MARTICHOUX
Quatorze millions de pertes.
FRANCK RIESTER
Et encore, les chiffres ne sont pas affinés. Beaucoup plus difficile pour les théâtres privés ou les troupes comme vous le disiez tout à l'heure. Alors nous allons rencontrer très prochainement les représentants par exemple des différentes associations du théâtre pour voir avec elles comment on peut les accompagner comme sont accompagnés par exemple des commerçants. Je vais les rencontrer avec Agnès PANNIER-RUNACHER qui, avec Bruno LE MAIRE, accompagne celles et ceux qui sont le plus touchés par ces grèves.
ELIZABETH MARTICHOUX
Pourquoi ? Pour des aides fiscales ?
FRANCK RIESTER
Oui. Des aides fiscales, sociales.
ELIZABETH MARTICHOUX
Il peut y avoir du soutien direct ? Une espèce de caisse, un fonds d'urgence qui aiderait les plus petits ? Parce que tout le monde n'a pas les reins solides.
FRANCK RIESTER
L'idée, c'est d'accompagner comme on accompagne les commerçants ou les artisans qui sont touchés directement par le conflit.
ELIZABETH MARTICHOUX
D'accord. Elle est quand cette rencontre avec eux ?
FRANCK RIESTER
La semaine prochaine.
ELIZABETH MARTICHOUX
La semaine prochaine vous les rencontrez. Comment les aider.
FRANCK RIESTER
Mais il y aura déjà eu des échanges avec les représentants d'une façon plus technique.
ELIZABETH MARTICHOUX
Alors l'Opéra, l'Opéra de Paris. Vous avez dit presque quatorze millions. Il y a eu des images qui ont émerveillé le monde entier, c'est quand on les a vus, les danseurs, sur le parvis le 24 décembre donner quelques extraits du Lac des cygnes. C'était un moment magique mais c'était tout à fait inédit comme mode d'expression, comme contestation. Vous vous rappelez évidemment.
FRANCK RIESTER
Quand les danseurs ou les danseuses de l'Opéra de Paris se produisent, ça créé toujours une émotion exceptionnelle. C'est l'excellence même des ballets ou de l'art lyrique que nous avons la chance d'avoir à l'Opéra.
ELIZABETH MARTICHOUX
L'excellence que vous, disent-ils, que vous compromettez parce que vous supprimez leur régime spécial. Alors qui date de Louis XIV, c'est inouï ! Les danseurs partent à 42 ans ce qu'on comprend, parce qu'après à 42 ans, on ne peut plus trop danser.
FRANCK RIESTER
Alors ils peuvent partir à partir de 40 ans mais ils sont d'une certaine façon en retraite d'office à 42 ans.
ELIZABETH MARTICHOUX
Vous supprimez leur régime Franck RIESTER ?
FRANCK RIESTER
Oui, comme tous les régimes spéciaux. Il y aura un régime universel unique en France, mais ce qui ne veut pas dire qu'on ne tient pas compte comme d'ailleurs dans un certain nombre d'autres professions des spécificités.
ELIZABETH MARTICHOUX
Mais comment se reconvertir quand on a fait que danser dans sa vie ?
FRANCK RIESTER
Les carrières longues, les questions de pénibilité qui sont à prendre en compte. Et d'ailleurs, ça fait partie des discussions que nous avons avec les organisations syndicales de l'Opéra de Paris. Ensuite ce qui compte, c'est la reconversion, c'est l'accompagnement. C'est de permettre à ces femmes et à ces hommes qui ont consacré leur vie à la danse pour représenter l'excellence de la danse telle qu'elle est représentée à l'Opéra de Paris puissent se reconvertir jusqu'à leur retraite à l'âge prévu par la retraite pour tous.
ELIZABETH MARTICHOUX
Vous ne céderez pas sur la suppression du régime spécial ?
FRANCK RIESTER
Mais non puisque nous sommes déterminés à ce qu'il y ait un seul régime universel en France.
ELIZABETH MARTICHOUX
Et vous dites à partir de 2022 ?
FRANCK RIESTER
Et pour autant, on regardera ces spécificités des danseurs mais aussi de toutes les équipes et de tous les métiers qui ont des spécificités au sein de l'Opéra de Paris pour permettre que toutes les spécificités soient prises en compte.
ELIZABETH MARTICHOUX
Oui. A partir de 2022 ce changement de régime ?
FRANCK RIESTER
Alors à partir de 2022, mais en qui concerne les danseurs, étant donné qu'ils partent évidemment très tôt en retraite aujourd'hui et pour prendre en compte ce qui est le système qui est de dire : « On ne peut pas pénaliser des gens qui n'ont pas pu anticiper ce changement dans le contrat social », l'idée concernant les danseurs c'est qu'on ne prenne en compte que les danseurs qui rentreront à partir du 1er janvier 2022 dans le système.
ELIZABETH MARTICHOUX
Donc ce sera à partir de 2022 pour les nouveaux entrants.
FRANCK RIESTER
A partir de 2022 pour les nouveaux entrants.
ELIZABETH MARTICHOUX
Donc tous ceux qui sont déjà dans ce régime actuel, eux garderont leurs acquis. C'est ce que vous leur proposez. Pour l'instant, ça ne les convainc pas.
FRANCK RIESTER
J'espère malgré tout qu'à partir du moment où il y a eu cette décision du gouvernement, ce compromis, que les représentations de l'Opéra de Paris pourront recommencer. Normalement Le Barbier de Séville demain soir qui a été annulé samedi et j'espère que…
ELIZABETH MARTICHOUX
Vous les appelez ce matin ?
FRANCK RIESTER
Oui. Je les appelle ce matin à reprendre le chemin du public. C'est important et ils peuvent compter sur ma détermination pour prendre en compte leur spécificité et pour continuer à donner à l'Opéra à Paris et à ses équipes les moyens de son excellence.
ELIZABETH MARTICHOUX
Leur grève n'a plus de raison d'être.
FRANCK RIESTER
Leur grève n'a plus raison d'être…
ELIZABETH MARTICHOUX
A l'Opéra de Paris. A l'Opéra de Paris.
FRANCK RIESTER
Je suis déterminé à, encore une fois, faire en sorte que les spécificités de l'Opéra de Paris soient prises en compte d'une façon globale. Que ce soit dans la pénibilité, les conditions de travail, l'organisation du temps de travail et la reconversion des équipes qu'elles soient danseurs ou autres.
ELIZABETH MARTICHOUX
Vous vous y engagez personnellement.
FRANCK RIESTER
Oui, oui.
ELIZABETH MARTICHOUX
Les syndicats vous reprochent d'ailleurs de ne pas être assis sur ce conflit. Ce matin, vous les appelez à reprendre le travail.
FRANCK RIESTER
Ecoutez, j'ai rencontré les organisations syndicales. Mes équipes sont contact en permanence avec les dirigeants de l'Opéra de Paris qui eux-mêmes sont en contact en permanence avec les organisations syndicales. Je suis très mobilisé sur le conflit.
ELIZABETH MARTICHOUX
La réforme des retraites, elle percute la très attendue réforme de l'audiovisuel annoncée initialement en 2018. On va de retard en retard. Elle devait arriver enfin, entre guillemets, au Parlement en février et puis il faut laisser la place à une réforme des retraites. Elle arrive quand au Parlement ?
FRANCK RIESTER
Alors ça ne change rien sur le calendrier final. On va passer en commission le texte début mars et ça sera début avril dans l'hémicycle, à l'Assemblée nationale, puis au Sénat pour, on espère, un vote définitif à l'été.
ELIZABETH MARTICHOUX
Mais en avril, j'allais dire…
FRANCK RIESTER
Après les municipales.
ELIZABETH MARTICHOUX
Là, vous signez. C'est sûr qu'il arrive donc en commission, ce texte, fin mars.
FRANCK RIESTER
Ça devait être effectivement fin février. Ça sera finalement tout début avril.
ELIZABETH MARTICHOUX
Remarquez, depuis le temps que vous l'attendez cette réforme, vous pouvez attendre quelques semaines de plus. Vous me dites vote définitif quand ?
FRANCK RIESTER
A l'été, j'espère.
ELIZABETH MARTICHOUX
« A l'été, j'espère » ?
FRANCK RIESTER
Oui. Parce qu'après, ça dépend des discussions, ça dépend des votes.
ELIZABETH MARTICHOUX
Parce que vous vous rappelez que le Parlement est fermé pendant trois mois à cause des travaux.
FRANCK RIESTER
Oui. Ça dépend des discussions et ça dépend des votes.
ELIZABETH MARTICHOUX
Et si ce n'est pas l'été, ce sera reporté à l'automne. Il y aura de la place ?
FRANCK RIESTER
Ecoutez, l'idée ce n'est pas de reporter. L'idée c'est de suivre le calendrier. C'est a priori donc – enfin, ce n'est pas a priori - c'est début avril dans l'hémicycle à l'Assemblée nationale mais début des discussions en commission début mars. Et ensuite, mai ou juin au Sénat pour ensuite une commission mixte paritaire a priori en juillet.
ELIZABETH MARTICHOUX
Donc votre objectif ce matin, c'est adoption définitive avant la fermeture de l'Assemblée.
FRANCK RIESTER
Avant la césure de l'été.
ELIZABETH MARTICHOUX
La césure de l'été qui commence très tôt cette année encore une fois
FRANCK RIESTER
Oui.
ELIZABETH MARTICHOUX
Mais il peut y avoir effectivement des réunions en commission mixte parlementaire pendant les travaux.
FRANCK RIESTER
Exactement, exactement.
ELIZABETH MARTICHOUX
Et donc une entrée en vigueur quand, Franck RIESTER ?
FRANCK RIESTER
2021, début 2021 après évidemment les processus classiques de promulgation de la loi et quelques décrets d'application, sachant qu'une partie du projet global de réforme de l'audiovisuel qui permet d'inscrire finalement l'audiovisuel public dans l'avenir, de permettre et l'audiovisuel en général puisque ce n'est pas qu'une réforme de l'audiovisuel public : c'est une réforme je dirais de l'environnement de l'audiovisuel dont il s'agit pour qu'on puisse inscrire la télévision et la radio dans le XXIème siècle. C'est préparer l'audiovisuel de demain finalement, ce texte de loi, en allégeant un certain nombre de contraintes, en tenant compte de la révolution des usages. Nos compatriotes regardent la télévision, écoutent la radio différemment qu'il y a quelques années.
ELIZABETH MARTICHOUX
Alors justement il y a un grand enjeu dont je voulais vous parler ce matin, c'est de protéger la création française face à l'hyperpuissance des plates-formes. Les plateformes les Français, c'est très grand public, ils savent ce que. C'est AMAZON…
FRANCK RIESTER
NETFLIX.
ELIZABETH MARTICHOUX
C'est NETFLIX, c'est DISNEY.
FRANCK RIESTER
Absolument. C'est demain DISNEY.
ELIZABETH MARTICHOUX
DISNEY qui est arrivé aux Etats-Unis et qui, en une journée, a capté dix millions d'abonnés aux Etats-Unis et on prévoit une déferlante dans quelques semaines. DISNEY TV, je ne sais pas comment ça va s'appeler, DISNEY+. Bref, une offre très puissante, pas cher, sans contrainte. Sans la contrainte que subissent aujourd'hui les diffuseurs, les créateurs, les producteurs. Comment vous faites pour protéger ça, Monsieur le Ministre ?
FRANCK RIESTER
Alors d'abord, nous sommes conscients de ce que ça apporte à nos compatriotes en termes de service. C'est vrai que ces plateformes apportent un service nouveau et il faut s'en réjouir. Et en même temps, il faut effectivement veiller à ce que le système de financement de la création française, tant du cinéma que l'audiovisuel, qui a permis à ce que notre pays puisse être leader en Europe en matière de cinéma et en matière de création audiovisuelle, puisse continuer en intégrant ces acteurs de l'Internet au système de financement et de diffusion de la création française. Donc ces plates-formes, elles vont pouvoir évidemment continuer de diffuser en France, mais elles devront participer au financement de la création avec des obligations de pourcentage d'investissement dans les contenus français.
ELIZABETH MARTICHOUX
Que vous situez à ?
FRANCK RIESTER
Plus de 20 % finalement, on va voir. Ça va être le fruit de discussions. C'est dans le… du CSA…
ELIZABETH MARTICHOUX
Vous comptez sur le Parlement pour fixer où vous avez besoin encore de plus de temps ?
FRANCK RIESTER
Non, non. Ça sera… Il y a un certain nombre de discussions à conduire entre le CSA, le gouvernement, les producteurs, les plateformes pour arriver à un système gagnant-gagnant.
ELIZABETH MARTICHOUX
Ça veut dire 20 % du chiffre d'affaires ? C'est une taxe ? C'est quoi ?
FRANCK RIESTER
Exactement. Du chiffre d'affaires devra…
ELIZABETH MARTICHOUX
20 % du chiffre d'affaires sera affecté à…
FRANCK RIESTER
Du chiffre d'affaires de ces plateformes devra être investi dans les contenus français ou européens. Ça, c'est un point très important parce que ça va permettre que des nouveaux financements viennent renforcer la création française. Et en plus, ils devront exposer ces contenus. C'est-à-dire qu'ils devront les financer et ils devront les exposer.
ELIZABETH MARTICHOUX
Ça veut dire quoi les exposer ?
FRANCK RIESTER
Les exposer, ça veut dire qu'ils soient plus accessibles sur les plateformes. Que pour quand on regarde une plateforme, on n'ait pas simplement des séries américaines mais qu'il puisse y avoir aussi des séries françaises, qu'il puisse y avoir des films français.
ELIZABETH MARTICHOUX
D'accord. Vous voulez aussi donc…
FRANCK RIESTER
Il y a des contraintes aussi sur l'exposition. Comme il peut y avoir des quotas à la radio pour avoir des chansons françaises, il pourra y avoir l'obligation d'exposer les contenus français sur les plates-formes. Et l'objectif, c'est de renforcer les investissements dans la création et c'est aussi de faire en sorte que les acteurs français de la télévision notamment puissent être à armes égales dans la compétition avec ces nouveaux acteurs de l'Internet. Parce que ce combat, c'est un combat culturel majeur. Et donc nous devons…
ELIZABETH MARTICHOUX
L'exception culturelle française.
FRANCK RIESTER
Exactement. Et donc nous devons alléger les contraintes d'un certain nombre d'acteurs, renforcer les contraintes sur d'autres acteurs, les nouveaux de l'Internet, pour faire en sorte qu'il y ait une concurrence équitable et qu'on puisse avoir des véritables champions français de la télévision, de la radio et de la production cinématographique et audiovisuelle.
ELIZABETH MARTICHOUX
A propos de cinéma, j'ai encore plein de questions à vous poser donc je vous demande d'être le plus rapide possible.
FRANCK RIESTER
D'accord.
ELIZABETH MARTICHOUX
Avant même la loi, il y a des dispositions qui concernent la pub.
FRANCK RIESTER
Oui.
ELIZABETH MARTICHOUX
Qui vont entrer en vigueur quand par décret ?
FRANCK RIESTER
Dans les semaines qui arrivent.
ELIZABETH MARTICHOUX
Avant la fin du mois ou…
FRANCK RIESTER
Non, non, dans le trimestre.
ELIZABETH MARTICHOUX
Dans le trimestre.
FRANCK RIESTER
Qui va permettre, qui va libérer…
ELIZABETH MARTICHOUX
Alors le cinéma va être autorisé dans les écrans de pub ? C'est nouveau.
FRANCK RIESTER
Oui. On veut que nos compatriotes accèdent davantage aux films de cinéma à la télévision. Aujourd'hui on a des jours interdits, notamment le mercredi soir. On a le vendredi soir, le samedi soir, le dimanche toute la journée. On veut changer ça et ouvrir la possibilité aux chaînes gratuites de la télévision, de la TNT, de pouvoir diffuser du cinéma à la télévision tout le temps. Et donc c'est ce qu'on va faire là dans les semaines qui viennent.
ELIZABETH MARTICHOUX
Vous avez dit à la fin du trimestre.
FRANCK RIESTER
Ça va changer véritablement - ou peut-être même avant - ça va changer la façon dont on va regarder la télévision. Ça, c'est très important.
ELIZABETH MARTICHOUX
Ensuite… Ça me fascine - on n'a pas le temps - mais la pub segmentée. La pub segmentée, c'est de la pub personnalisée comme sur Internet.
FRANCK RIESTER
Oui.
ELIZABETH MARTICHOUX
C'est-à-dire que vous prenez deux voisins de palier et ils n'auront pas les mêmes écrans…
FRANCK RIESTER
Publicitaires.
ELIZABETH MARTICHOUX
C'est possible techniquement ça ? Parce que ce sera en fonction de leur profil et cœtera.
FRANCK RIESTER
Ça nécessite un travail entre les opérateurs de télécommunications et les chaînes de télévision notamment, pour permettre justement de pouvoir collecter un certain nombre de données d'habitudes de consommation de ces téléspectateurs pour, ensuite, utiliser ces données pour mettre la publicité adaptée, comme c'est le cas sur…
ELIZABETH MARTICHOUX
C'est de l'intrusion.
FRANCK RIESTER
Mais comme c'est le cas…
ELIZABETH MARTICHOUX
C'est économique comme enjeu.
FRANCK RIESTER
Oui, c'est un enjeu…
ELIZABETH MARTICHOUX
L'intérêt, il est économique.
FRANCK RIESTER
Non, pas qu'économique.
ELIZABETH MARTICHOUX
Il y a une forme quand même de…
FRANCK RIESTER
Non. Ecoutez, des fois on préfère avoir de la publicité sur les produits qui nous intéressent que sur des produits qui ne nous intéressent pas. Et quand il y a eu des réflexions… C'est ce qui se passe d'ailleurs sur Internet. Sur Internet vous allez sur FACEBOOK, sur GOOGLE, vous avez une publicité qui correspond en gros à vos goûts et à votre sensibilité.
ELIZABETH MARTICHOUX
C'est exactement pareil. Comme sur FACEBOOK, comme sur GOOGLE.
FRANCK RIESTER
Exactement. Donc c'est pour qu'il y ait une concurrence équitable entre les acteurs de la télévision et les acteurs de l'Internet. Pour que ces ressources financières viennent financer et conforter des acteurs français qui, en plus, ont une démarche vertueuse puisqu'ils contribuent au financement de la création cinématographique et audiovisuelle. Et en même temps, de permettre finalement un meilleur agrément pour les téléspectateurs quand ils regardent des publicités. Parce qu'on l'a vu avec des études qui ont été faites sur les acteurs de l'Internet qui font de la publicité, les Français préfèrent - ou les citoyens - préfèrent avoir une publicité qui leur correspond plutôt qu'une publicité qui ne leur correspond pas.
ELIZABETH MARTICHOUX
Ce sera le cas donc très vite puisque vous dites même peut-être avant la fin de ce premier trimestre.
FRANCK RIESTER
Alors il y aura besoin d'avoir des travaux quand même avec les opérateurs de télécommunications pour caler techniquement les choses. Mais c'est dans les semaines et les mois qui viennent.
ELIZABETH MARTICHOUX
Oui. Et puis aussi la répartition, j'imagine, aussi de la valeur qui sera produite entre les opérateurs et les diffuseurs.
FRANCK RIESTER
Exactement, tout à fait. C'est vrai.
ELIZABETH MARTICHOUX
Très vite, une grève qui dure et qui est aussi dans votre secteur, qui n'a rien à voir avec les retraites : c'est une question de suppressions de postes. Trois cents postes supprimés RADIO FRANCE sur 4 400 CDI. La grève dure depuis quarante jours. Quarante jours ! Est-ce que vous soutenez Sybile VEIL dans la fermeté ? Les syndicats disent : « Elle tape trop fort. On n'a pas besoin de ces économies ou alors faisons-les autrement. »
FRANCK RIESTER
Ecoutez, nous on a fixé une trajectoire financière 2018-2022 à l'audiovisuel public, notamment à RADIO FRANCE. On demande vingt millions d'euros… On baisse de vingt millions d'euros la contribution à l'audiovisuel public pour RADIO FRANCE. Et dans la réflexion, sa réflexion stratégique, Sibyle VEIL prend en compte cette réalité-là et l'autre réalité qui est la nécessité de transformer l'organisation de l'entreprise pour tenir compte de la révolution des usages et des technologies.
ELIZABETH MARTICHOUX
Est-ce qu'elle doit assouplir son texte ?
FRANCK RIESTER
Ce n'est pas à moi de rentrer en détail dans l'organisation du plan de transformation de la direction de RADIO FRANCE.
ELIZABETH MARTICHOUX
Oui. Est-ce que vous l'encouragez ?
FRANCK RIESTER
Je fais confiance à la direction de RADIO FRANCE pour trouver les voies et moyens de mener cette transformation nécessaire et de sortir de la grève.
ELIZABETH MARTICHOUX
Juste par parenthèse, vous ne regrettez pas le tweet que vous avez publié la semaine dernière, le jour de Charlie Hebdo du 7 janvier ? Vous avez fustigé le syndicat, la CGT en l'occurrence, qui perturbait les antennes ou un autre…
FRANCK RIESTER
Je n'ai pas fustigé…
ELIZABETH MARTICHOUX
Je vais vous dire exactement.
FRANCK RIESTER
Oui.
ELIZABETH MARTICHOUX
Je crois qu'on peut le voir là : « Jour anniversaire, les grévistes font annuler sur les antennes des émissions traitant de la liberté. »
FRANCK RIESTER
Il se trouve qu'aujourd'hui effectivement ce sont quelques grévistes…
ELIZABETH MARTICHOUX
Ç'a beaucoup choqué à RADIO FRANCE.
FRANCK RIESTER
Ce sont quelques grévistes qui aujourd'hui peuvent bloquer les antennes. Et je suis convaincu qu'il y a une vraie mission de service public pour le service public de l'audiovisuel, sinon à quoi sert d'avoir un service public de l'audiovisuel ? Et ce que j'ai voulu dire avec ce tweet, c'est que quand même le jour où il s'avère que c'est un peu un symbole de la liberté d'expression, ce 7 janvier, où un certain nombre d'émissions devaient parler de liberté d'expression notamment, que le service public de l'audiovisuel n'arrive pas à faire une petite parenthèse dans la grève au service de ce qu'attendent nos compatriotes du service public - c'est notamment parler de ces sujets-là - je trouve que c'était un symbole dommageable. C'est ce que j'ai voulu dire avec mes mots. Je continue de penser que le service public a une mission spécifique qui doit être prise en compte et que chacune et chacun qui a bien évidemment le droit de grève - je ne remets évidemment pas en cause le droit de grève qui est un droit constitutionnel - de pouvoir faire parfois la différence et de se rassembler autour de combats communs.
ELIZABETH MARTICHOUX
Franck RIESTER, un tout dernier mot très rapide. Gabriel MATZNEFF, il avait droit à une allocation. On ne revient pas sur le scandale, tout le monde est au courant presque ; j'espère. Gabriel MATZNEFF, l'écrivain, vous souhaitez la suppression de son allocation annuelle qui lui est donnée par le Centre national du livre, mais c'est un opérateur du Ministère.
FRANCK RIESTER
C'est une allocation qui ne concerne que très peu d'auteurs.
ELIZABETH MARTICHOUX
Quatorze auteurs vieillissants si je peux dire ça.
FRANCK RIESTER
C'est ça, quatorze auteurs. Qui a été donnée d'une façon discrétionnaire. J'ai pris deux décisions. L'une de créer une commission qui va statuer sur les conditions de renouvellement de ces allocations en tenant compte de deux critères : la question effectivement du dénuement financier et la question de la contribution à la vie artistique française et j'ai dit une deuxième chose. J'ai dit qu'en ce qui concernait Gabriel MATZNEFF, tant sur le critère du dénuement puisque souvent il dit qu'il est dans des beaux lieux et qu'il vante son train de vie, je pense qu'il ne coche pas la case du dénuement financier. Et deuxièmement, la contribution à la vie artistique française quand on voit ses propos autobiographiques et ses interviews dans la presse sur en se faisant le chantre de la pédocriminalité, je ne pense pas que ça contribue au rayonnement artistique de notre pays.
ELIZABETH MARTICHOUX
C'est dit. Merci Franck RIESTER d'avoir été ce matin sur LCI.
FRANCK RIESTER
Merci à vous.
Source : Service d'information du Gouvernement, le 15 janvier 2020