Texte intégral
MARC FAUVELLE
Bonjour Agnès BUZYN
AGNES BUZYN
Bonjour.
MARC FAUVELLE
Il aura fallu 38 jours finalement pour que le Premier ministre retire l'âge pivot qui braquait notamment la CFDT. Est-ce qu'on n'a pas perdu beaucoup de temps, dans ce dossier des retraites ?
AGNES BUZYN
Il a fallu du temps pour arriver à un compromis, parce qu'il faut faire des pas, l'un vers l'autre, et ce compromis c'est un compromis gagnant-gagnant. Personne ne renonce à ses fondamentaux, et à la fois nous avons trouvé un terrain d'entente pour travailler, parce que maintenant l'objectif c'est d'aboutir effectivement à une conférence d'équilibre et de financement, qui permette d'assurer l'équilibre financier du système au moment où il débutera, c'est-à-dire d'ici 2027, en l'occurrence, l'équilibre nous l'atteindrons en 2027 et nous allons pouvoir avancer sur la base de ce compromis, et du courrier qui a été adressé par le Premier ministre.
MARC FAUVELLE
Pourtant, aucun des syndicats qui appelaient à la grève, n'a levé ses préavis pour l'instant, pas même l'UNSA. Comment vous l'expliquez ?
AGNES BUZYN
Alors, l'UNSA est favorable à cette conférence de financement, ainsi que la CFDT et la CFTC, donc les trois syndicats réformistes s'inscrivent dans cette démarche, maintenant de trouver eux-mêmes une solution financière qui permette d'aboutir…
MARC FAUVELLE
Mais sans arrêter la grève.
AGNES BUZYN
Mais il y a, au sein de ces fédérations, de ces confédérations, il peut y avoir des syndicats qui représentent les cheminots et qui continuent à vouloir le retrait complet de cette réforme, parce que cette réforme acte la fin des régimes spéciaux. Les cheminots, nous le savons, sont concernés, et donc les personnels de ces grandes entreprises peuvent être poussés par certains à une forme de logique jusqu'au-boutiste que nous regrettons, car nous ne retirerons pas la réforme. Aujourd'hui, elle est sur des rails, nous allons…
MARC FAUVELLE
Vous avez dit la même chose de l'âge pivot il y a quelques semaines.
AGNES BUZYN
L'âge d'équilibre reste dans le projet final, c'est-à-dire dans la réforme, une fois qu'elle sera mise en oeuvre, la notion d'âge d'équilibre qui est une notion qui est un fait, qui est une notion rationnelle, qui veut dire que le système s'équilibre lorsque nous travaillons un peu plus longtemps, cette réalité-là figure dans le projet final de réforme.
MARC FAUVELLE
Et on va en reparler de ce deuxième âge pivot qui lui est bien toujours dans cette réforme des retraites.
RENAUD DELY
Vous venez de dire, Agnès BUZYN, que vous étiez toujours déterminés à mener jusqu'au bout cette réforme, et qu'elle passait notamment par la suppression des régimes spéciaux. C'est justement ce qu'a expliqué hier soir Edouard PHILIPPE sur le plateau de France 2.
EDOUARD PHILIPPE, PREMIER MINISTRE – HIER 20H00 FRANCE 2
Cette détermination chez nous est complète, totale, j'ai eu l'occasion de le dire. Ça passe par la suppression des régimes spéciaux, et c'est vrai qu'il y a encore beaucoup de gens qui ne sont pas convaincus de l'intérêt de la réforme ou qui n'ont pas envie que ces régimes soient supprimés. Je leur dis à ceux-là, que nous allons aller au bout et que donc au fond, tous ceux qui les incitent à poursuivre la grève, les envoient peut- être dans une impasse. Vous connaissez cette phrase : il faut savoir terminer une grève. On n'en est pas loin.
RENAUD DELY
Selon vous, il faut aujourd'hui terminer cette grève ? On voit, on le disait à l'instant, qu'à la SNCF ou à la RATP, la base de la CFDT ou la base de l'UNSA, ne suit pas les consignes venues d'en haut. Est-ce qu'il y a un risque à vos yeux de radicalisation du mouvement de grève ?
AGNES BUZYN
C'est déjà le cas, car en réalité d'abord je pense que les Français sont épuisés de cette grève, notamment les Franciliens. Nous savons que beaucoup, notamment d'indépendants, de restaurateurs, ont perdu un chiffre d'affaires considérable. Il est maintenant nécessaire d'aller tous ensemble vers une réforme profondément juste. C'est une réforme de justice sociale. Elle apporte de nouveaux droits, elle permettra à chacun d'être éclairé sur ses droits et donc elle est très lisible pour chacun d'entre nous, quels que soient les métiers que nous ferons à l'avenir, nous saurons exactement le nombre de points que nous avons. Aujourd'hui, demandez à quelqu'un à 10 ans de la retraite s'il sait comment il partira à la retraite, avec quels droits, c'est très compliqué. La plupart des Français émargent à 3 ou 4 régimes différents. La réforme future va être simple, elle va permettre une robustesse du système, c'est-à-dire la certitude que le système sera équilibré, et que nous ne vivrons pas à crédit, et c'est une réforme profondément juste, notamment pour les femmes les plus précaires.
RENAUD DELY
Vous évoquiez Agnès BUZYN le compromis qui avait nécessité du temps pour retirer temporairement, selon la lettre du Premier ministre, l'âge pivot de la réforme, et pourtant il y a un deuxième âge pivot dans la réforme, un âge pivot en cache un autre, puisqu'en l'occurrence il y en a un second qui figure toujours dans le texte aujourd'hui de la réforme, qui n'entrerait en vigueur qu'à compter de 2037, pour les générations nées à partir de 1975. Donc il demeure, l'âge pivot, dans la réforme.
AGNES BUZYN
Non, ce qu'on appelle un âge d'équilibre, c'est un indicateur…
MARC FAUVELLE
C'est la même chose, non ? On joue sur les mots, âge pivot, âge d'équilibre, non ? Franchement.
AGNES BUZYN
On peut en faire un âge pivot général, mais en réalité…
RENAUD DELY
En tout cas il correspond à un allongement de la durée de cotisation pour ces générations-là, qui seront nées à partir de 1975.
AGNES BUZYN
Oui, avec la possibilité pour la future gouvernance, et c'est ce que nous leur confions dans le texte de loi, la possibilité évidemment de faire de cette référence collective, quelque chose qui peut être modulé en fonction des parcours de chacun, en fonction du métier que l'on fera, de la pénibilité, du début par exemple de carrière, donc les carrières longues vont être reconsidérées et partiront plus tôt. Les métiers les plus pénibles pourront partir plus tôt, mais cette fois-ci…
MARC FAUVELLE
Comment on fera la différence entre un couvreur zingueur, par exemple, et un cadre installé dans son bureau ? Qui va décider qui pourra partir avant l'autre ?
AGNES BUZYN
Donc, les critères de pénibilité aujourd'hui sont en train d'être retravaillés, notamment avec la ministre du Travail Muriel PENICAUD. Et donc ça c'est un premier point, c'est-à-dire qu'on travaille collectivement avec les partenaires sociaux, sur la bonne définition de ce que doit être la pénibilité au travail. Moi j'ai la charge, ainsi qu'Olivier DUSSOPT, d'étendre les critères de pénibilité dans la Fonction publique, et en ce qui me concerne dans la Fonction publique hospitalière, ce qui veut dire que par exemple les aides-soignantes ou les infirmières qui travaillent de nuit, aujourd'hui, vont être reconnues comme ayant un métier de pénibilité, du fait de ce travail de nuit, ce qui aujourd'hui n'existe pas dans la Fonction publique. Donc on voit bien qu'on étend…
MARC FAUVELLE
Et donc elles pourront partir plus tôt…
AGNES BUZYN
Elles pourront partir plus tôt…
MARC FAUVELLE
... plusieurs mois, plusieurs trimestres, plusieurs années ?
AGNES BUZYN
C'est ce qui va être discuté avec les partenaires sociaux, et ça sera la main de la gouvernance de définir justement qui pourra partir plus tôt, mais cet âge d'équilibre est une référence collective, qui veut dire que, aujourd'hui si tout le monde travaillait uniquement jusqu'à 62 ans, nous savons qu'avec le même niveau de pension et le même niveau de cotisation, le système n'est pas équilibré, il est déficitaire, et donc cet âge d'équilibre c'est la référence collective qui est proposée par le Comité d'orientation des retraites, c'est-à-dire des gens qui travaillent autour de l'équilibre financier, et cet âge équilibre il va être modulé en fonction des métiers et des travaux…
RENAUD DELY
Profession par profession. Ça va être un travail extrêmement précis.
MARC FAUVELLE
Branche par branche, comment ça se passera ?
AGNES BUZYN
Alors, c'est ce que travaille Muriel PENICAUD aujourd'hui, mais aujourd'hui la pénibilité et notamment le droit de partir plus tôt, en tous les cas dans les régimes spéciaux, est lié à un statut, il n'est pas lié au métier et à la fonction que vous occupez. Or, ce que nous souhaitons, c'est que ce soit lié aux métiers, mais pas aux statuts, au fait d'appartenir à une entreprise, parce qu'aujourd'hui, nous le savons, un expert-comptable d'une grande entreprise de transport, comme la SNCF, fait le même métier qu'un expert-comptable dans le privé, et pourtant il part beaucoup plus tôt à la retraite. Donc c'est cela que nous voulons évidemment éviter, ces phénomènes de statut, et par contre tenir compte des pénibilités des métiers de la vie réelle des gens.
MARC FAUVELLE
Agnès BUZYN, vous restez avec nous, on va continuer à aborder la question difficile du financement des retraites. Le plus dur commence désormais, disait hier le patron de la CFDT, Laurent BERGER. On parlera également de la crise qui secoue depuis des mois et sans doute aussi depuis des années, un secteur qui est le vôtre, c'est celui de l'hôpital. Mais d'abord le rappel de l'actualité, il est 8h40, c'est Mélanie DELAUNAY.
-Flash info-
MARC FAUVELLE
Agnès BUZYN, le gouvernement donne donc 3 mois aux partenaires sociaux pour négocier le futur financement de la réforme des retraites avec deux lignes rouges fixées dans sa lettre de cadrage aux syndicats par le Premier ministre, Edouard Philippe : il ne doit pas y avoir de baisse des pensions des retraités, et il ne doit pas y avoir d'augmentation du coût du travail en France, voici ce qu'en disait, il y a quelques minutes, le président du MEDEF Geoffroy ROUX DE BEZIEUX.
GEOFFROY ROUX DE BEZIEUX, PRESIDENT DU MEDEF
Tous les pays en Europe comparables ont un âge de la retraite qui a augmenté, pourquoi, parce que la démographie fait que dans des retraites par répartition, on n'a pas le choix. Après, qu'on discute pendant 3 mois des modalités de cette mesure d'âge, qu'on essaie de trouver quelque chose qui soit plus juste en fonction de la durée de carrière des métiers, plus individualisé, pourquoi pas, du moment que ça boucle financièrement.
MARC FAUVELLE
Il y aura bien une mesure d'âge comme on dit d'une manière un peu technique, ça veut dire qu'il va falloir cotiser plus longtemps, travailler plus longtemps, quelles que soient les pistes retenues.
AGNES BUZYN
Alors, effectivement, dans la lettre de cadrage du Premier ministre, deux points sont exclus, et il faut les rappeler, d'abord, la baisse des pensions des retraités actuels, on aurait pu imaginer que certains envisagent cela. Fort heureusement, aucun des syndicats, et l'Etat évidemment non plus, ne souhaite que les retraités actuels ne voient leurs pensions baisser, donc je peux les rassurer, l'équilibre du système ne se fera pas sur le dos des retraités, nous ne touchons pas aux pensions. Ensuite, le Premier ministre ne veut pas une perte de compétitivité des entreprises françaises, et donc il a demandé que cela ne se fasse pas avec une hausse du coût du travail, parce que notre économie repart, notre chômage baisse, et nous avons besoin de cette dynamique évidemment. La création d'emplois permet aussi d'équilibrer le système…
MARC FAUVELLE
A partir du moment où vous coupez ces deux robinets, il en reste un autre, en tout cas, c'est celui qui rapporte le plus, ce sont les mesures d'âge…
AGNES BUZYN
Alors, les mesures d'âge ne sont pas exclues, mais nous laissons les partenaires sociaux voir s'ils utilisent évidemment ce levier. D'autres veulent prendre des réserves…
RENAUD DELY
Est-ce qu'une hausse des cotisations des plus hauts revenus, Agnès BUZYN, est-ce qu'une hausse des cotisations des plus hauts revenus, comme le demande l'UNSA par exemple, c'est envisageable ?
AGNES BUZYN
Aujourd'hui, en dehors de ce qui a été exclu, nous laissons la main aux partenaires sociaux, et nous verrons bien ce sur quoi…
MARC FAUVELLE
Les plus hauts revenus fait partie du champ de l'exclusion ?
AGNES BUZYN
Sincèrement, ça n'est plus à l'Etat de le dire, l'Etat donne la main aux partenaires sociaux, l'Etat sera présent dans la concertation, pourquoi, parce que l'Etat est quelque part l'employeur des fonctionnaires, donc il participe au futur système de retraite et il est garant de l'équilibre financier pour les générations futures. Maintenant, la palette de possibilités est importante, certaines ne trouveront certainement pas une majorité, certains voudront augmenter les impôts, je ne suis pas certaine qu'une mesure de ce type-là trouve une majorité. Aujourd'hui…
MARC FAUVELLE
Mais pour être très clair, la taxation des Français les plus riches n'est pas exclue, elle est entre les mains des partenaires sociaux ?
AGNES BUZYN
Ce n'est pas à moi de le dire…
MARC FAUVELLE
Est-ce que ça fait partie de…
RENAUD DELY
Vous confirmez que ce n'est pas exclu ? Vous confirmez que ce n'est pas exclu ?
AGNES BUZYN
Evidemment, tout ce qui n'est pas clairement dans la lettre de cadrage n'est pas exclu, il me semble cependant qu'une taxe supplémentaire, c'est-à-dire qu'un impôt supplémentaire ne soit pas aujourd'hui à l'ordre du jour dans notre métier et je ne pense pas que nous trouverons une majorité, c'est-à-dire un consensus, un compromis sur cette question. Par contre, un certain nombre de syndicats proposent d'utiliser un peu les réserves, peut-être que là-dessus, nous pourrions trouver un consensus.
RENAUD DELY
Aller piocher dans le fonds de réserve des retraites, ça, c'est envisageable.…
AGNES BUZYN
Après, cela dépend évidemment de la somme sur laquelle on pourrait s'entendre, certains proposent évidemment d'augmenter l'âge de départ à la retraite, je pense que là, nous verrons si nous trouvons un consensus sur la façon d'augmenter un peu l'âge de départ. Les leviers sont sur la table, je laisse maintenant les partenaires sociaux s'emparer de ce sujet, les négociations commenceront fin janvier, nous avons 3 mois pour trouver un accord, et j'ai bon espoir, j'ai bon espoir, réellement, quand j'ai vu la volonté des syndicats de s'inscrire dans cette dynamique, j'ai bon espoir que nous trouvions un compromis sur cet équilibre financier indispensable au démarrage la réforme.
MARC FAUVELLE
Un mot encore avant de parler de l'hôpital, est-ce qu'un recours au 49.3, c'est-à-dire un passage en force devant le Parlement est possible, envisageable ou pas ?
AGNES BUZYN
Je ne vois pas l'intérêt.
RENAUD DELY
Si le débat s'enlise au Parlement ?
AGNES BUZYN
Il n'a pas de raison de s'enliser, c'est une très belle réforme, elle a énormément de points positifs pour les Français, notamment les plus précaires, elle apporte de nouveaux droits, notamment le minimum contributif pour toutes les personnes aujourd'hui, les indépendants, les agriculteurs qui partent avec de toutes petites retraites. Elle sécurise les pensions de reversion pour les femmes ou les hommes veufs ou veuves, elle apporte de nouveaux droits familiaux dès le premier enfant, elle va être très bénéfique aux carrières hachées…
RENAUD DELY
Donc ce serait une faute politique le recours au 49.3 ?
AGNES BUZYN
Ah pour moi, je ne vois pas l'intérêt. Je pense que le débat démocratique est nécessaire sur un système qui va concerner 100 % des Français, la totalité, et chacun d'entre nous va s'inscrire dans cette réforme, c'est une réforme de solidarité entre tous les Français, c'est une magnifique réforme, je ne comprends pas pourquoi l'on évoquerait le 49.3. Aujourd'hui, nous souhaitons que le Parlement s'empare de ce débat.
RENAUD DELY
Oui, la crise à l'hôpital dure maintenant depuis de très longs mois, et même effectivement plusieurs années, un millier de médecins, dont 600 chefs de service ont publié une tribune et menacent de vous déposer une lettre de démission dès demain, en l'occurrence, de démissionner de leurs tâches administratives, je propose d'écouter ce que Jean-Luc JOUVE, qui est le chef du pôle pédiatrie de l'hôpital de la Timone, à Marseille, dit de cette crise aujourd'hui qui touche l'hôpital.
JEAN-LUC JOUVE, CHEF DU POLE PEDIATRIE DE LA TIMONE
On vit des situations tout à fait incroyables, comme le fait par exemple que lorsqu'une infirmière a une grossesse, ce qui est une chose tout à fait normale, elle n'est pas remplacée, les conséquences, c'est qu'on ferme des lits, les conséquences, c'est qu'on décommande des interventions, les conséquences, c'est que tout le monde est en stress.
RENAUD DELY
On ferme des lits, on manque de personnels, et les médecins se découragent, Agnès BUZYN.
AGNES BUZYN
Oui, le découragement des soignants à l'hôpital est connu, il est ancien, et je suis là pour améliorer la situation de l'hôpital public, c'est vraiment le sens de mon action depuis que je suis au gouvernement, j'ai ré-augmenté, c'est la première fois depuis dix ans, les budgets des hôpitaux, c'est ce qu'on appelle les tarifs hospitaliers dans notre jargon, donc les budgets des hôpitaux sont de nouveau en augmentation depuis l'année dernière, je me suis engagée à ce qu'ils augmentent pour les trois prochaines années, c'est une sécurité, donc je donne de la visibilité aux hôpitaux. Et j'ai dégagé…
RENAUD DELY
Vous avez présenté un plan d'urgence à l'automne, mais qui ne suffit pas visiblement, 600 chefs de service menacent de démissionner demain, qu'est-ce que vous leur dites ?
AGNES BUZYN
Il leur faut des réponses concrètes, le budget et le plan ont été votés notamment par les parlementaires dans les lois de Finances en décembre, je dégage les financements dès ce mois de janvier, par exemple, 150 millions d'euros ont été alloués aux hôpitaux depuis ce mois-ci, déjà, pour l'achat du matériel du quotidien pour rendre le quotidien plus acceptable, parfois, que…
MARC FAUVELLE
Car vous dites : patientez quelques mois, l'argent arrive, il est débloqué aujourd'hui…
AGNES BUZYN
Quelques mois, absolument, j'apporte un calendrier de mesures sur lequel je vais communiquer très clairement, donc un calendrier où tous les mois, on voit les avancées notamment financières qui vont permettre aux hôpitaux qui en ont besoin de réouvrir des lits ou d'embaucher du personnel, car nous savons que dans certains endroits, la pression financière a été trop importante depuis 10 ou 15 ans, et elle a dégradé les conditions de travail considérablement, nous sommes dans une dynamique inverse, nous sommes dans une dynamique où je réaugmente les budgets.
RENAUD DELY
Justement, en termes de nombre de lits et en termes de quantité de personnel, ça correspond à quoi globalement, cette enveloppe, elle pourrait permettre selon vous d'ouvrir combien de lits à terme ?
AGNES BUZYN
Mais en réalité, personne n'est capable de dire un chiffre, parce qu'il y a des endroits, parce que tous les endroits ne sont pas équivalents en France, il y a des endroits où un certain nombre de services ne sont plus nécessaires, alors qu'il y a, au contraire, des villes dans lesquelles il y a une progression de la population et où il faut ouvrir des lits en aval des urgences notamment, donc il y a une dynamique d'ouverture de lits, je ne peux pas donner un chiffre clef puisque chaque hôpital…
RENAUD DELY
Mais il y a donc des endroits où on va continuer à en fermer, si je vous écoute ?
AGNES BUZYN
Ça peut arriver, ça peut arriver, ça peut arriver, ça a toujours été le cas en réalité. Parce que l'évolution de l'hôpital est une dynamique. Mais l'engagement que nous prenons, c'est qu'aujourd'hui, j'ai demandé à tous les hôpitaux de me faire parvenir leurs besoins en nombre de lits, notamment, c'est un indicateur, c'est chiffré, qui existe et que j'ai donné à tous les hôpitaux depuis le mois de décembre, qui est un indicateur des besoins quotidiens en lits après les urgences. Nous leur demandons de faire remonter leurs besoins. Et j'ai demandé aux agences régionales de santé d'accompagner les hôpitaux, pour ouvrir des lits, recruter du personnel partout où il y en a besoin. Et surtout, il y a une mesure qui va se mettre en oeuvre simplement au deuxième semestre, c'est la reprise de la dette, c'est quelque chose d'énorme, que nous n'avons jamais obtenu auparavant, les hôpitaux se sont considérablement endettés parce que leurs budgets ont diminué, et que leurs dépenses ont continué à s'accroître…
RENAUD DELY
Donc c'est un tiers de la dette…
AGNES BUZYN
Donc c'est un tiers de la dette, mais c'est énorme, nous reprenons dix milliards de dette hospitalière sur trois ans, cela va dégager à peu près entre 800 millions et un milliard d'euros par an de trésorerie pour les hôpitaux pour qu'ils puissent de nouveau réengager du personnel, mieux payer les personnels notamment en tension, qui font des efforts importants, et réinvestir, rénover et réinvestir, parce que je regardais ce reportage sur la Timone, ils sont dans des locaux vétustes à Marseille, c'est un hôpital qui est incroyablement endetté, et notamment Marseille devrait très bien bénéficier de la reprise de la dette.
-Flash info-
MARC FAUVELLE
Un site Internet propose depuis quelques jours, aux Français qui le souhaitent, de se faire arrêter jusqu'à 3 jours, par un médecin grâce à la téléconsultation. Je ne sais pas si vous l'avez testé, mais est-ce que c'est légal ?
AGNES BUZYN
Alors, nous essayons de trouver les moyens de bloquer ce site puisque c'est un dévoiement complet de ce que doit être une consultation médicale.
MARC FAUVELLE
Il y a un vrai médecin de l'autre côté.
AGNES BUZYN
Il y a un vrai médecin, mais on ne va pas chez le médecin pour se faire arrêter, on va chez le médecin parce qu'on a des symptômes, parce qu'on est malade, et le médecin doit décider de vous arrêter s'il estime que votre état n'est pas compatible avec le travail.
MARC FAUVELLE
Là, le médecin peut dire non.
AGNES BUZYN
On voit bien que c'est un site marchand, on voit bien la philosophie qui est derrière, c'est un site qui est situé en Allemagne, mais avec des médecins français. J'ai demandé à mes services, aujourd'hui, de faire un recours en justice contre ce site, parce que pour moi c'est totalement contraire à ce que doit être aujourd'hui la médecine, c'est une forme de marchandisation de la médecine, une forme de consumérisme, et ça n'est pas la façon dont aujourd'hui j'imagine le métier de médecin. Je suis assez choquée en réalité que des médecins se prêtent au jeu.
MARC FAUVELLE
Il y aura des sanctions ?
AGNES BUZYN
L'Ordre des médecins, l'Ordre national des médecins s'est saisi du cas, donc j'attends évidemment leurs conclusions.
RENAUD DELY
On évoquait les réseaux sociaux, Internet, il y a un groupe privé qui rassemble 11 000 médecins sur Facebook, qui s'est fait remarquer, on a appris qu'il publiait des photos, des commentaires, insultants, injurieux, à l'endroit de patients ou de patientes. Un exemple au hasard : si elle mesure 1,50 m, je cite, c'est déjà une contraception à elle toute seule. Quand les seins tombent comme ça, à propos d'une patiente, je refuse de la voir en consultation, etc. etc. Est-ce que vous êtes choquée par ces messages, et est-ce que vous pouvez sanctionner là aussi certains de ces médecins donc ? Je rappelle que ce groupe rassemble 11 000 médecins.
AGNES BUZYN
Alors c'est horrible. Franchement j'ai été voir les commentaires sur ce site, c'est horrible. Je pense que mes confrères ne s'honorent pas à ce type de commentaires, c'est totalement contraire à notre déontologie. Donc là encore, l'Ordre des médecins doit se saisir, c'est un enjeu de déontologie. On ne parle pas d'un malade en dehors de la consultation.
MARC FAUVELLE
Dans certains cas, les malades sont reconnaissables.
AGNES BUZYN
Absolument, donc là nous verrons s'il y a matière ou pas. Là encore, vous savez, il faut instruire les dossiers, donc je ne peux pas vous donner comme ça une mesure que nous pourrions prendre face à cette dérive, mais...
RENAUD DELY
L'Ordre des médecins va intervenir ?
AGNES BUZYN
Ah oui, parce que c'est de la déontologie médicale élémentaire.
RENAUD DELY
Vous l'avez saisi l'Ordre des médecins ?
AGNES BUZYN
Non, l'Ordre des médecins est indépendant du ministère, donc ils doivent se saisir eux-mêmes, je n'ai pas d'ordres à donner à l'Ordre des médecins.
MARC FAUVELLE
Un mot sur l'affaire Carlos GHOSN, Agnès BUZYN. Carlos GHOSN ce matin dans Le Figaro annonce qu'il va attaquer RENAULT aux Prud'hommes, notamment pour pouvoir toucher sa retraite d'ancien patron du groupe. Ça vous fait sourire ?
AGNES BUZYN
Eh bien il est dans l'air du temps, il veut toucher sa retraite !
MARC FAUVELLE
Voilà, mais ce n'est pas la même que les manifestants, Carlos GHOSN.
AGNES BUZYN
Non, ce n'est pas la même retraite que celle des Français.
MARC FAUVELLE
On ne l'a pas vu dans les cortèges, aux dernières nouvelles.
AGNES BUZYN
Moi je…
MARC FAUVELLE
Il y a quelque chose d'indécent ou vous trouvez que c'est son droit, après tout, de faire valoir ses droits justement à la retraite ?
AGNES BUZYN
Vous savez, il y a toujours une très grande différence entre la morale et le droit. Aujourd'hui, je ne suis pas en état de juger évidemment. La justice s'est saisie de l'affaire de Carlos GHOSN, en réalité je ne vais pas présumer de son innocence ou de sa…
MARC FAUVELLE
Geoffroy ROUX de BEZIEUX, le président du MEDEF, qui était l'invité de France Info radio tout à l'heure, disait : « S'il veut toucher sa retraite en France, qu'il commence par venir se faire juger en France ».
AGNES BUZYN
Il n'a pas tort.
MARC FAUVELLE
Il n'a pas tort.
RENAUD DELY
Il devrait être jugé en France.
AGNES BUZYN
Vous savez qu'il y a une enquête en cours, donc peut-être qu'il y aura des faits qui lui sont reprochés, et je pense que dans ce cas-là il doit se présenter à la justice française.
RENAUD DELY
Les élections municipales, Agnès BUZYN, c'est maintenant dans moins de 2 mois, est-ce que vous serez candidate aux élections municipales ?
AGNES BUZYN
Comme vous avez pu le remarquer, j'ai beaucoup de sujets aujourd'hui, ma préoccupation c'est de régler le sujet de la retraite évidemment, et régler l'hôpital public, parce qu'il faut que j'apaise et que je fasse, que les médecins, que les soignants retrouvent confiance dans l'hôpital public. Ce sont aujourd'hui mes deux priorités.
MARC FAUVELLE
Ça veut dire que vos collègues qui sont candidats, ils font le job à mi-temps au gouvernement ?
AGNES BUZYN
Non mais j'ai beaucoup de sujets. Je ne dis pas qu'ils font le job à mi-temps, mais objectivement j'ai énormément de sujets aujourd'hui sur la table, sur lesquels je suis extrêmement concentrée. Je pense qu'aujourd'hui la préoccupation des Français n'est pas encore aux municipales, la préoccupation des Français c'est d'abord que les transports refonctionnent, que la vie reprenne, que le pays s'apaise, que l'hôpital public fonctionne, parce que c'est un pilier de l'Etat de droit, c'est un pilier de l'Etat social, c'est un pilier de la protection, et ça c'est ma priorité d'aujourd'hui.
MARC FAUVELLE
Donc vous ne serez pas candidate avec Benjamin GRIVEAUX à Paris, si je lis bien dans vos propos. C'est votre décision ou c'est celle d'Emmanuel MACRON ?
AGNES BUZYN
J'ai dit que j'étais concentrée sur mes sujets, aujourd'hui.
MARC FAUVELLE
Donc vous ne serez pas candidate, on l'a bien compris.
AGNES BUZYN
Je crois que je vous ai répondu.
MARC FAUVELLE
Aujourd'hui, le mot aujourd'hui était aussi important que le reste de la phrase.
AGNES BUZYN
Je suis concentrée et je travaille.
MARC FAUVELLE
Vous en avez parlé avec Emmanuel MACRON ?
AGNES BUZYN
J'ai parlé de ma volonté un jour d'être candidate dans une élection, et voilà où nous en sommes.
MARC FAUVELLE
Bon, eh bien on n'en saura pas plus aujourd'hui. Ce n'est pas l'élection présidentielle, on parle bien des municipales.
RENAUD DELY
Vous avez parlé des élections européennes avec lui.
AGNES BUZYN
Absolument.
MARC FAUVELLE
Merci à vous, Agnès BUZYN, et merci à Renaud DELY
source : Service d'information du Gouvernement, le 15 janvier 2020