Déclaration de Mme Sophie Cluzel, secrétaire d'État aux personnes handicapées, sur l'importance de la recherche sur les innovations sociales et technologiques liées au handicap et la création d'un fond européen dédié, Paris le 14 mars 2019.

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Circonstance : Sixième rencontre Handicap, Recherche et Citoyenneté de la Fondation internationale de la recherche appliquée sur le handicap (FIRAH), à Paris le 14 mars 2019

Texte intégral

Bonjour à tous, cher président, chers amis.


Je suis ravie d'être là pour ouvrir cette soirée d'échange qui sera très riche. Il ne peut en être autrement quand on fait le lien entre la recherche, les politiques publiques, et les pratiques professionnelles.

Il s'agit d'une source extraordinaire pour faire émerger l'innovation dans les réponses que nous apportons aux personnes en situation de handicap.

Aujourd'hui, nous nous devons d'innover pour être à la hauteur des attentes, des personnes et des défis qui sont encore à relever.

Ce matin, j'étais avec l'ensemble des ministres européens du handicap. Ce sujet est revenu constamment : nous devons créer un fonds européen pour les recherches sur l'innovation sociale et technologique.

Ces revenus auprès de tous les ministres. Donc, je suis assez optimiste, nous y arriverons.

Vous le savez, notre gouvernement est engagé pour rendre notre société plus inclusive. Notre responsabilité collective est de garantir que les personnes handicapées puissent accéder à tout ce que la république offre à l'ensemble de nos citoyens.

Nous devons progresser sur l'accessibilité universelle, rendre l'environnement plus inclusif et plus facilitateur.

Notre but : permettre aux personnes en situation de handicap d'avoir accès à l'école, à la formation professionnelle, au logement, au monde du travail, la culture le sport, en faisant évoluer le regard de la société sur le handicap.

Nous devons faire évoluer notre manière dont on conçoit l'accompagnement spécialisé.

C'est tout le sens du chantier que j'ai lancé il y a un an. Avoir pour cap la société inclusive, ce n'est pas nier les besoins d'accompagnement. Au contraire, il s'agit de mobiliser toutes les ressources au parcours de vie.

La recherche sur le handicap permet de faire émerger des solutions complètes concrètes face aux difficultés rencontrées au quotidien par les personnes handicapées et les familles, avec un caractère intrinsèquement disciplinaire. En croisant les Sciences sociales humaines, les sciences de la réadaptation, on peut s'appuyer sur un ensemble de savoir-faire pour s'adapter aux besoins de la personne et les impératifs sociétaux.

Nous écrirons aussi la pertinence des réponses aux personnes. Elle apporte des éléments validés au niveau politique au niveau local et national. C'est particulièrement précieux quand nous cherchons à changer de paradigme d'action, que les résistances sont nombreuses, que nous devons faire preuve de concept, que le respect des personnes en situation de handicap et leurs participations sociales ne sont pas des Utopies.

Les recherches aujourd'hui sont particulièrement intéressantes : les publics doublement exclus par leur handicap. L'accompagnement des personnes très sévèrement handicapées et ne pouvant pas communiquer. Enfin, l'accès à la vie associative et sexuelle, sujet sur lequel nous devons progresser en France.

Cette dernière recherche est emblématique pour moi, car à travers sa méthode, son périmètre et ses défis, on voit trois défis à relever :

le premier est celui de l'amélioration effective de la qualité de vie des personnes en situation de handicap, en partant de leurs aspirations, et en s'appuyant sur leurs compétences.

Cela implique de donner une véritable place au savoir expérientiel des personnes elles-mêmes et de leurs proches.

Cela doit être un objet de recherche, car nous sommes très en retard en matière d'autodétermination des personnes en situation de handicap.

Nous avons besoin de nouvelles méthodes de nouveaux outils de nouvelles pratiques que la recherche peut faire émerger et évaluer.

Je pense évidemment à l'émergence de nouvelles formes accompagnement qui mobilisent leurs pairs : le programme «Mes amours» met en exergue la pair-aidance. Il montre que ce n'est pas réservé à certaines catégories de handicap seulement.

Je pense aussi au programme de l'alternative améliorée. Il nous faut mobiliser les chercheurs des disciplines technologiques sur des thématiques liées au handicap qu'ils ne connaissent souvent pas très bien.

La recherche appliquée et en élargissant son approche pluridisciplinaire peut être un véritable pont avec différents secteurs en tissant des partenariats avec le monde industriel.

En partant des besoins avec les utilisateurs, cela doit permettre et faciliter l'accès économique aux nouvelles solutions.

Il y a un impératif de méthode. Le projet «Mes amours» peut servir d'exemple en la matière. Les projets doivent être ciblés sur les personnes handicapées et leurs familles en proposant des solutions à des problèmes concrets pour renforcer leur participation à des besoins sociaux.

Il faut mettre les personnes handicapées en position de recherche, et positionner leurs familles comme des sujets acteurs de la recherche, et non uniquement comme l'objet de celle-ci.

Ainsi, le caractère collaboratif de la recherche appliquée ne doit pas laisser de côté les principaux intéressés.

Les personnes doivent être associées dès la phase de conception des projets de recherche et tout au long.

Les personnes et leurs proches peuvent être un formidable vecteur pour lever le troisième défi de la recherche appliquée : celui de la diffusion sur le terrain de ses résultats.

Si l'enjeu de diffusion se pose pour l'ensemble des productions scientifiques, il est particulièrement crucial en matière de recherche appliquée. Car elle doit impacter les pratiques professionnelles et le quotidien des personnes concernées.

Elle ne s'adresse pas aux spécialistes, mais elle doit être intelligible pour tous : professionnels, bénévoles, bénévoles associatifs, proches et personnes elles-mêmes.

Des journées comme celle-ci contribuent à l'enjeu de diffusion des savoirs.

Il faut établir un lien plus fort entre la recherche et la formation initiale continue.

D'ores et déjà, nous avons prévu d'associer aux différents comités d'experts, les chercheurs engagés sur les questions du handicap.

Je vous invite à aller plus loin, à imaginer de nouvelles manières de faire le lien entre les travaux de recherche, y compris les travaux issus d'autres pays, et les travaux d'accompagnement au-delà d'un cercle restreint de personnes impliquées.

Je serai attentive à toute proposition qui nous permettra d'aider les acteurs de terrain à renforcer la participation des personnes et leur autonomie, en traduisant ainsi dans la vie quotidienne, les acquis de la loi de 11 février 2005, et les ambitions de la Convention internationale relative aux droits des personnes handicapées.

Je vous souhaite de bons travaux, je sais compter sur Céline Poulet pour faire ce lien indispensable entre nous-mêmes, entre vous, entre le secrétariat d'État aux personnes handicapées.

Sachez que l'Europe est mobilisée. Sachez que les ministres sont en train de travailler sur le nouveau socle, la nouvelle stratégie 2020. Je pense que nous pouvons contribuer en apportant vos travaux à avoir un regard différent sur cette recherche.


Merci beaucoup.


Source https://www.firah.org, le 21 janvier 2020