Texte intégral
ELISABETH MARTICHOUX
Merci beaucoup d'être ce matin sur LCI, bonjour Gérald DARMANIN.
GERALD DARMANIN
Bonjour.
ELIZABETH MARTICHOUX
Vous serez tout à l'heure, dans quoi, 1 heure, 2 heures, à la table du Conseil des ministres, sur laquelle sera posé le projet de réforme des retraites. Est-ce que vous êtes rassuré, est-ce que vous vous dites ce matin le texte est sur les rails, malgré une contestation historique ?
GERALD DARMANIN
Moi je suis confiant, je suis confiant parce que ça fait longtemps qu'on travaille, à la demande du président de la République, plus de 2 ans maintenant, à cette réforme des retraites, pour améliorer la retraite des Français, pour assurer les jeunes générations, pour assurer les retraites des retraités d'aujourd'hui. Et vous dites contestation historique, contestation c'est certain, historique je ne sais pas. Moi depuis que j'ai l'âge…
ELIZABETH MARTICHOUX
Sept semaines. Sept semaines.
GERALD DARMANIN
Sept semaines, je ne peux pas…de vous dire ça, des grands syndicats réformistes rentrent dans un consensus avec le gouvernement, avec sans doute du travail encore et des échanges de point de vue. Je constate objectivement que toutes les réformes des retraites ont fait naître beaucoup de contestations, c'est normal, c'est à la fois, la retraite, ce qui accompagne la fin de notre vie, on s'inquiète lorsqu'on ne l'a pas parce qu'on est actif et on se dit est-ce que je vais en avoir une, tous les gens de ma génération se demandent est-ce que je vais en avoir une. On constate évidemment que lorsqu'on demande aux Français de travailler un peu plus, mais naturellement, et chacun le comprend, il y a des réticences. Donc, c'est à la fois une très grande réforme, je crois qu'elle apporte les buts sociaux qu'on s'est donnés, c'est-à-dire de garantir la retraite des Français, de garantir 1000 euros de retraite, aux agriculteurs, aux artisans…
ELIZABETH MARTICHOUX
On y reviendra sur le…
GERALD DARMANIN
Et puis par ailleurs qui essaye de travailler, je pense que c'est la force du Premier ministre, dans la démocratie sociale. Moi je voulais surtout avec un mot, ce matin, je pense qu'on ne le dit pas assez, peut-être même d'ailleurs les membres du gouvernement, pour tous ces gens qui se lèvent, qui se sont levés, pendant de très longs mois, à 3h00, à 4h00, à 5h00 du matin, qui habitent à 1 heure 30, 2 heures de Paris, et qui ont pris leur voiture, beaucoup plus tôt que d'habitude, pour venir travailler, toutes les femmes de ménage, les agents de sécurité, les secrétaires, les employés, tous ceux qui malgré tout, cette France qui travaille, qui n'a pas fait grève, qui ne demande pas de subventions, comme dirait l'autre, et qui va travailler le matin dans des conditions extrêmement difficiles. Eh bien moi je voudrais d'abord leur tirer un grand coup de chapeau, les remercier pour tout le travail qu'ils font, parce qu'ils font tourner la France, et peut-être que tous ensemble on ne l'a pas assez dit, que des gens qui ne gagnent pas beaucoup, 1000 euros, 2000 euros par mois, qu'ils fassent tout ce travail malgré les grèves, malgré les contestations, qui sont au rendez-vous de leur travail, eh bien c'est très admirable.
ELIZABETH MARTICHOUX
Un mot quand même du contexte, il est tendu, il est marqué par des blocages, des coupures de courant. Vous avez reçu, je crois, par courrier une menace de mort, cette semaine.
GERALD DARMANIN
Oui, alors il arrive que quelques personnes menacent…
ELIZABETH MARTICHOUX
Ce n'est pas la première fois.
GERALD DARMANIN
Ce n'est pas la première fois, ce n'est jamais très agréable, mais je pense qu'aucune intimidation ne peut avoir lieu en République, on ne peut pas fonctionner comme ça, ce n'est pas la loi du plus fort ou du plus menaçant qui l'emporte. Donc envahir, un syndicat, empêcher des femmes ou des hommes politiques de tenir des réunions publiques…
ELIZABETH MARTICHOUX
Est-ce qu'il y a un sale climat, pardon Gérald DARMANIN, comment vous le caractérisez ce climat ?
GERALD DARMANIN
Non, mais on voit bien que depuis quelques années, je pense que ce n'est pas dû simplement au climat autour de la réforme des retraites, depuis quelques années la démocratie française se pose des questions, je crois, et que tout ça est très fragile, on le voit bien autour de nous…
ELIZABETH MARTICHOUX
C'est l'expression d'une fragilité ?
GERALD DARMANIN
Il y a un climat, à la fois de défiance et de grande violence qui s'exprime, je suis certain que la très grande majorité de nos compatriotes sont attachés, à la démocratie, à la République, au fait que c'est bien les forces de l'ordre qui ont le monopole de la force, au fait qu'on puisse à la fois parler, dire ce que l'on souhaite sur n'importe quel plateau de télévision ou n'importe quelle réunion publique, et que ce n'est pas une minorité agissante et violente qui l'emporte, mais il faut faire attention.
ELIZABETH MARTICHOUX
Enfin vous dites quand même… oui, parce que là vous regardez le verre à moitié plein, le verre à moitié vide, c'est qu'effectivement il y a beaucoup de tensions, il y a des manifestants qui, encore hier place de la République, chantaient "Louis XVI on l'a décapité, MACRON on peut recommencer." est-ce que c'est plus grave que quand les manifestants de mai 68 disaient « CRS-SS », par exemple, on ne s'en souvient pas mais, "CRS-SS", ou est-ce que c'est une radicalité singulière ou de fin de mouvement classique ?
GERALD DARMANIN
Moi je n'ai pas la mémoire de 68, et pour cause, mais j'ai la mémoire depuis à peu près 15 ans que je m'intéresse à la vie politique active, et j'ai l'impression que nous sommes dans une société un peu plus violente que celle que j'ai connue dans mes années étudiantes, pourtant qui étaient contestataires, je me rappelle très bien que mes camarades contestaient le CPE, il y avait des manifestations. Je crois qu'il y a une violence extrêmement forte qui existe envers les responsables, notamment les responsables politiques. Est-ce qu'elle est la contrepartie, moi je veux bien l'entendre, d'une violence sociale très forte qui s'exprime auprès de petites gens qui n'arrivent pas à s'en sortir, qui connaissent de grandes difficultés, qui vivent dans des quartiers très difficiles, qui ont l'impression que personne ne les entend jamais ? C'est possible, et il faut que les hommes et les femmes politiques l'entendent, qu'ils ont fait des bêtises, et qu'ils doivent réparer cette France en difficulté. Mais je crois qu'il y a surtout une contestation de l'idée de République et de démocratie même, et moi je n'ai jamais considéré qu'il fallait… enfin, montrer que ce n'était pas très grave. Et quand j'entends Monsieur MELENCHON, parfois des responsables syndicaux aussi, parfois des hommes ou des femmes politiques, justifier ces violences, je me dis qu'on n'est plus dans la même marque de cercle républicain.
ELIZABETH MARTICHOUX
Mais ce qu'on vous dit Gérald DARMANIN, c'est que, par exemple, 61% des Français encore cette semaine, sondage Elabe, vous demandent de retirer la réforme, ce que disent les contestataires c'est que c'est vous qui piétinez la démocratie. Vous n'entendez pas cette majorité…
GERALD DARMANIN
Non, mais d'abord ça n'a rien à voir…
ELIZABETH MARTICHOUX
Dans les sondages, qui dit vous ne retirez pas cette réforme. Vous vous opposez à la contestation, vous l'avez vous-même dit, ça fait des mois qu'il y a des Français qui se lèvent tôt pour éviter les grèves – des mois, c'est peut-être un peu exagéré - mais c'est très long, c'est historique, eh bien vous opposez à cette contestation un retrait, enfin un refus absolu de retirer le texte. Ce n'est pas vous qui tendez ?
GERALD DARMANIN
La démocratie c'est quoi ? C'est des gens qui – on va le connaître le 15 mars prochain aux élections municipales, pour d'autres raisons – des gens qui un matin, un après-midi, vont dans les préaux des écoles de la République prendre des bulletins de vote librement, sans être influencés, ni par le curé, ni par leur mari, ni par le maire, ni par les syndicats, voter librement et choisir qui va diriger pendant un temps certain la vie locale ou la vie nationale. Le président de la République a été élu de façon démocratique, et puis ensuite, l'Assemblée nationale a été élue de façon démocratique, et il n'y a pas si longtemps que ça d'ailleurs, il y a eu des élections européennes, qui n'ont pas montré une franche victoire du président de la République, mais enfin pas non plus une frange défaite.
ELIZABETH MARTICHOUX
Oui, mais 61%, pardon j'y reviens, 61%…
GERALD DARMANIN
Non, non, mais attendez, la démocratie des sondages c'est la démocratie de la feuille morte pris dans le vent, c'est une très belle phrase de KUNDERA, être à la mode…
ELIZABETH MARTICHOUX
Vous ne voyez pas la traduction de ces sondages dans la rue, Gérald DARMANIN ?
GERALD DARMANIN
Mais, Madame…
ELIZABETH MARTICHOUX
Dans la diversité des actions qui se poursuivent ?
GERALD DARMANIN
D'abord il faut savoir être un peu impopulaire pour être responsable, ce n'est pas très nouveau, on demande aux hommes et aux femmes politiques du temps long, c'est très important de prendre des décisions pour leurs enfants, et leurs petits-enfants aussi, et moi, vous savez, je constate tous les jours la contradiction parfois aussi de ces sondages. Il y a une très grande majorité de Français qui sont pour le régime universel, très grande majorité de Français…
ELIZABETH MARTICHOUX
Il y a 1 an les deux tiers étaient pour votre réforme, aujourd'hui ils vous demandent de retirer le texte.
GERALD DARMANIN
Non, non, Madame MARTICHOUX, aujourd'hui il y a une très grande majorité…
ELIZABETH MARTICHOUX
Excusez-moi, mais…
GERALD DARMANIN
Je vous excuse bien volontiers, mais, si vous considérez vous-même que c'est un sondage qui fait l'opinion, mais alors ne votons plus, ne faisons plus de débat démocratique, ne nous présentons plus à aucune élection, faisons en ligne "oui" ou "non", et puis on aurait démocratie tels que "Black Mirror", la série télé, le montre, et je pense que ce ne soit pas vraiment une bonne chose dans laquelle nos enfants doivent vivre.
ELIZABETH MARTICHOUX
Philippe MARTINEZ ce matin répète : on va continuer, on va continuer, le gouvernement n'écoute pas, on va même amplifier. Qu'est-ce que vous répondez au leader de la CGT ? Vous le connaissez bien, vous avez débattu avec lui…
GERALD DARMANIN
Oui, moi je respecte, d'ailleurs à la fois le leader de la CGT et les adhérents de la CGT.
ELIZABETH MARTICHOUX
Il a perdu la partie ou pas ?
GERALD DARMANIN
Mais, je respecte encore une fois le leader de la CGT, les adhérents de la CGT, simplement je crois que Monsieur MARTINEZ aujourd'hui devient de plus en plus un contestataire politique, alors que c'est un responsable syndical, c'est assez différent. Le Parti communiste est notre opposant politique, que je respecte d'ailleurs, Monsieur ROUSSEL est quelqu'un de respectable, mais je ne suis pas d'accord avec le leader du Parti communiste. Monsieur MARTINEZ il est là pour améliorer la vie des travailleurs, et là il refuse de venir, à des réunions parfois, il rentre dans une opposition frontale avec le gouvernement, non pas sur des propositions, mais sur le principe, et il utilise, de manière à peine acceptable, des attaques qui n'ont rien à voir avec la démocratie. Quand on coupe l'électricité, ça m'est arrivé à Tourcoing, quand on coupe l'électricité dans des crèches, qu'on doit appeler les parents à 9h00…
ELIZABETH MARTICHOUX
Il dit "ce sont des dégâts collatéraux, je m'en excuse."
GERALD DARMANIN
Non… enfin, des enfants de 2 ans qui n'ont pas de chauffage pendant plus d'une heure et demie, alors qu'il fait 3, 4 degrés dehors, ce n'est pas des dommages collatéraux, c'est un acte inacceptable en démocratie, ça doit être clairement condamné, y compris par le leader de la CGT, je pense que chacun comprend ce bon sens. Donc il faut savoir distinguer le droit de grève, qui est absolument consacré dans notre Constitution, le droit de manifester bien sûr, le droit d'être contre évidemment, mais enfin couper de l'électricité, dans des hôpitaux, dans des crèches, dans des entreprises, dans des services publics, c'est le contraire de la République.
ELIZABETH MARTICHOUX
Donc vous lui dites "stop" ? Donc vous lui dites ce matin….
GERALD DARMANIN
Mais Monsieur MARTINEZ est un grand monsieur, je pense qu'il a l'âge de prendre ses responsabilités. Je dis à chacune et à chacun qu'il faut faire attention à la démocratie et la République, c'est fragile, et que chacun doit la consolider. Jadis la CGT y a contribué, il faut qu'elle continue à le faire.
ELIZABETH MARTICHOUX
Sur la réforme Gérald DARMANIN, un mot quand même, on n'a pas fini d'en parler, mais vous êtes ministre des Comptes publics, combien va coûter la réforme ?
GERALD DARMANIN
Alors, la réforme des retraites ne coûtera rien, elle est neutre en termes de finances publiques puisque, c'est assez technique, mais aujourd'hui la réforme c'est 320 milliards d'euros les retraites…
ELIZABETH MARTICHOUX
Je ne vous demande pas combien va coûter le système, le financement de la retraite…
GERALD DARMANIN
C'est ça qui est intéressant, c'est le système.
ELIZABETH MARTICHOUX
Je vous dis la réforme elle-même, combien va-t-elle coûter ?
GERALD DARMANIN
Aujourd'hui, la retraite c'est 14 % de notre richesse nationale, demain ça sera 14% de la richesse nationale.
ELIZABETH MARTICHOUX
Alors pardon, vous avez ce matin sur la table du Conseil des ministres enfin une étude d'impact, 700 pages, je ne les ai pas lues, mais Les Echos, qui est un journal très sérieux, a eu une partie de l'étude d'impact, et que nous révèlent Les Echos ce matin, justement, que ce taux va baisser à 13,3% en 2040, puis 12,9% en 2050, ce qui est plus bas que prévu sans la réforme. C'est-à-dire que vous qui répétez en permanence, pour contester l'accusation qui vous est faite de vouloir rogner précisément sur le volume de la dépense des retraites, eh bien vous êtes pris en contradiction avec cette étude d'impact.
GERALD DARMANIN
Non. Alors, vous avez eu l'honnêteté de dire vous n'avez pas lu les 700 pages que vous commentez…
ELIZABETH MARTICHOUX
Eh bien non, parce que vous ne nous les avez pas données cela dit.
GERALD DARMANIN
C'est intéressant, mais le débat démocratique "continue", après le Conseil ministres on aura de longs mois de discussion parlementaire, ce n'est évidemment pas comme ça que les choses sont réelles. Aujourd'hui, si je prends l'exemple d'une personne qui est au SMIC toute sa vie…
ELIZABETH MARTICHOUX
Non, non, mais vous ne répondez pas à ma question.
GERALD DARMANIN
Je vous réponds à votre question, vous parlez…
ELIZABETH MARTICHOUX
Je vous dis qu'il y a toutes les accusations de vouloir faire des économies, vous dites mais non c'est 14% du PIB.
GERALD DARMANIN
Madame MARTICHOUX, vous avez tendance à être un peu comme…
ELIZABETH MARTICHOUX
Ça sera 12,9.
GERALD DARMANIN
Vous avez un peu tendance… comme au ministère, à parler en pourcentage ou en technique, moi je préfère le langage des Français, si aujourd'hui…
ELIZABETH MARTICHOUX
Non, vous ne préférez pas répondre à ma question.
GERALD DARMANIN
Je vais vous répondre, si vous me laissez parler quelques instants, mais encore une fois parlons comme les Français parlent, et c'est normal puisque c'est comme ça qu'ils doivent nous juger. Quelqu'un qui travaille au SMIC toute sa vie, s'il partait à la retraite, avec … d'aujourd'hui, ce serait 1175 euros bruts, demain ce sera 1390, il y a 200 euros grâce à la réforme des retraites. Il y a un effet…
ELIZABETH MARTICHOUX
Combien ça coûte ? Par exemple, cette mesure, là, combien elle coûte, est-ce que vous le savez ?
GERALD DARMANIN
Mais, il y a un effet - je vais répondre à votre question sur les pourcentages dans la richesse nationale, qui est un petit peu compliquée – il y a un effet démographie, il y a de moins en moins de gens qui naissent dans notre pays par rapport à ceux qui existent aujourd'hui, ce qu'on appelle les baby-boomers, qui aujourd'hui rentrent en retraite, vont demain malheureusement mourir, c'est la génération de mes parents, évidemment quand il y a moins de gens qui cotisent, qui participent, qui touchent la retraite, il y a effectivement moins de dépenses dans la richesse nationale. Mais par ailleurs, ce que dit aussi l'étude d'impact, que vous ne citez pas, c'est que nous avons des dépenses qui sont liées à la réforme des retraites, et qui viennent tenir les fameux 14% de richesse nationale qui ne bougeront pas. Quand on augmente les professeurs, Monsieur BLANQUER a annoncé 500 millions d'euros d'augmentation chaque année, ça n'a jamais existé, aucun gouvernement n'a autant augmenté…
ELIZABETH MARTICHOUX
Vous voyez qu'elle va coûter cette réforme !
GERALD DARMANIN
Mais vous ne pouvez pas dire tout et son contraire autour de votre table Madame MARTICHOUX. Vous ne pouvez pas dire…
ELIZABETH MARTICHOUX
Non, je vous demande combien coûte cette réforme, vous dites rien.
GERALD DARMANIN
Monsieur DARMANIN, vous êtes affreux, vous faites des économies, et puis juste après dire Monsieur DARMANIN c'est affreux, vous faites plein de dépenses.
ELIZABETH MARTICHOUX
Non, non, mais parce qu'on ne parle pas tout à fait de la même chose, vous le savez très bien Gérald DARMANIN.
GERALD DARMANIN
Moi, ce que je vous dis c'est que les employés, ouvriers, salariés, artisans, commerçants, agriculteurs de France, grâce à la réforme des retraites portée par le président de la République, ils auront plus de retraite.
ELIZABETH MARTICHOUX
Et je vous demande combien, ça par exemple, le ministre des Comptes publics peut-il nous préciser combien cette mesure-là, qui est effectivement de porter à 1000 euros nets le minimum contributif, combien, est-ce que vous l'avez quelque part cette… ?
GERALD DARMANIN
Mais, regardez, nous ouvrons une conférence de financement, la question est de savoir comment s'appliquent ces 1000 euros. Aujourd'hui la proposition du gouvernement c'est de dire elle s'applique à toute personne qui a eu une carrière complète, mais dont les défauts de la vie, et parfois même un certain nombre de difficultés que connaissent très bien nos amis agriculteurs, font qu'ils n'ont pas leur retraite à pension complète et touchent 500, 600, 700 euros. Eh bien, si les partenaires sociaux disent, eh bien voilà par exemple, le gouvernement propose ça, mais on souhaite que ce soit aussi des temps partiels, on souhaite que ce soit par rapport à une majoration du SMIC qui viendrait à augmenter, eh bien ça ne coûte pas la même chose que si c'est la proposition du gouvernement, donc la conférence de financement elle va permettre de le faire. Ce qui est certain, Madame MARTICHOUX, c'est que le texte n'a même pas encore été discuté en première lecture à l'Assemblée nationale.
ELIZABETH MARTICHOUX
Non, mais ce qui est sûr c'est que réforme fondamentale, on ne sait pas encore, après 2 ans de discussions, des mois de discussions, ni combien elle rapporte, ni combien elle va coûter.
GERALD DARMANIN
Ce que je vous dis c'est que…
ELIZABETH MARTICHOUX
Ça c'est factuel.
GERALD DARMANIN
Mais non, mais ce qui est factuel… écoutez, les retraites coûtent 320 milliards d'euros…
ELIZABETH MARTICHOUX
Ça c'est le système.
GERALD DARMANIN
Demain… non, mais les retraites coûtent 320 milliards d'euros – demain ça coûtera la même proportion d'argent que les Français dépenseront par rapport à notre richesse nationale. Donc, comme chaque année notre richesse nationale elle augmente…
ELIZABETH MARTICHOUX
Et combien le budget, et combien l'Etat va fournir d'efforts au fil des années pour financer…
GERALD DARMANIN
Dès 2021…
ELIZABETH MARTICHOUX
Les augmentations des professeurs, etc. ?
GERALD DARMANIN
Oui, mais l'Etat fait des économies aussi, lorsqu'on supprime les régimes spéciaux, c'est des milliards d'euros…
ELIZABETH MARTICHOUX
Eh bien dites-nous combien ça vous rapporte ?
GERALD DARMANIN
Eh bien chacun le sait, chacun le sait que les régimes spéciaux c'est à la fois des taxes que payent les Français, sur leurs tarifs d'électricité par exemple, ils le savent, c'est pour équilibrer le régime des retraites des personnes qui sont dans ce régime, et puis en même temps nous dépensons beaucoup d'argent. Madame BORNE elle a 5 milliards d'euros de dépenses, de dépenses, pour équilibrer les régimes de la RATP, de la SNCF, tout ça c'est des économies. Et ce que moi, ce que je constate aujourd'hui, c'est que ceux qui font grève, c'est pour garder les régimes spéciaux, appelons un chat un chat, ce n'est d'ailleurs pas très grave, on peut le comprendre que ces personnes souhaitent garder un régime, nous on ne souhaite pas qu'ils le gardent, parce qu'on pense que, ça valait le coup hier parce que c'était très pénible, aujourd'hui, eh bien voilà, peut-être que l'agent de la SNCF ou de la RATP il a un métier un peu moins pénible, s'il travaille la nuit il doit rentrer dans un cadre de pénibilité, comme tous les salariés, évidemment, et puis il y en a d'autres, effectivement, qui doivent rentrer dans un régime général. Eh bien nous on fait des économies, on met fin aux régimes spéciaux. C'est normal qu'il y ait des blocages, personne ne l'a fait depuis la Libération, personne ne l'a fait.
ELIZABETH MARTICHOUX
Mais ça a été pratiquement occulté par la difficulté que vous avez à expliquer clairement aux Français les bénéfices de cette réforme pour eux.
GERALD DARMANIN
Oui, oui, mais chacun fait des erreurs, le gouvernement en premier lieu évidemment, mais je voudrais quand même souligner que c'est une réforme historique, courageuse, personne n'a supprimé des régimes spéciaux, jusqu'au président de la République aujourd'hui, sociale, 1000 euros pour chaque artisan, commerçant, agriculteur, et par ailleurs assez compliquée il est vrai, parce que quand vous avez 42 régimes de retraite et que vous n'en faites qu'un seul, et quand ça touche tout le monde, évidemment que c'est un peu compliqué, et que, en 15 secondes ou en 28, on n'arrive pas à l'expliquer forcément.
ELIZABETH MARTICHOUX
Est-ce que là vous tenez le bon bout, pardon pour l'expression familière, mais est-ce que vous pensez que la contestation va s'amenuiser malgré ce que vous disait Philippe MARTINEZ tout à l'heure ?
GERALD DARMANIN
Mais la contestation elle fait partie de la démocratie, moi je n'ai rien contre les manifestations, contre les gens qui sont contre, du moment que ça se fait dans un cadre républicain.
ELIZABETH MARTICHOUX
Vous n'êtes pas frappé, quand même, par le caractère particulier, cette violence, cette crispation qui s'agrège sur la réforme des retraites, et qui touche beaucoup Emmanuel MACRON d'ailleurs ?
GERALD DARMANIN
Si je puis me permettre, lorsque le président SARKOZY a fait une réforme des retraites, également courageuse, qui était une réforme d'âge, il y a plus de monde dans la rue, donc…
ELIZABETH MARTICHOUX
Oui, dans la rue, mais vous ne trouvez pas…
GERALD DARMANIN
Non, mais je pense qu'il faut savoir remettre les choses dans leur contexte. Il y a une contestation, il faut l'écouter, une partie des syndicats accepte de discuter avec le gouvernement, et c'est une très bonne chose – il y a encore 15 jours les titres c'était "On n'y arrivera jamais à discuter avec la CFDT", aujourd'hui Monsieur BERGER, de façon très responsable, le gouvernement qui a fait un pas également, discutent, comme l'UNSA par exemple, comme les entreprises de France.
ELIZABETH MARTICHOUX
Donc vous tenez bon quoi !
GERALD DARMANIN
En tout cas il faut travailler, avec humilité, convaincre encore bien sûr sans doute les Français, et puis, désormais, la démocratie parlementaire va s'exprimer et les Français pourront voir tous les débats et tous les textes.
ELIZABETH MARTICHOUX
Mais ce n'est pas encore gagné, je crois que Laurent BERGER a encore dit ce matin que c'était très flou sur le financement, la conférence commence la semaine prochaine.
GERALD DARMANIN
Bien sûr, ça commence le 30.
ELIZABETH MARTICHOUX
Vous serez candidat à Tourtoing (sic), aux municipales ? A Tourcoing, pardon.
GERALD DARMANIN
A Tourcoing, c'est la grande ville à côté de Lille. Je serai candidat aux élections municipales, je n'ai pas encore dit dans quelle position, parce que, vous savez, ministre c'est temporaire, maire c'est l'engagement d'une ville, excusez-moi pour le jeu de mots, moi j'aime Tourcoing, c'est là où j'habite, j'aime les habitants de Tourcoing…
ELIZABETH MARTICHOUX
Ça permettrait en tout cas à la majorité de pouvoir brandir une victoire si vous êtes candidat et que vous gagnez, il n'y en aura pas tant que ça à revendiquer au soir du 22 mars…
GERALD DARMANIN
Je vais vous dire quelque chose.
ELIZABETH MARTICHOUX
Et en plus c'est une ville populaire, et il y en aura encore moins.
GERALD DARMANIN
Je vais vous dire quelque chose, les Français ils sont assez concrets et de bon sens, ils savent que quand ils votent aux nationales, c'est pour des élections nationales, et le maire c'est quelqu'un à part. il y a plein de gens qui pensent peut-être que je suis un bon ministre et peut-être un mauvais maire, et il y a peut-être plein de gens de Tourcoing qui considèrent que nationalement ils ne sont pas d'accord avec mes engagements, mais que localement on fait des choses bien pour Tourcoing. Moi mon père il a voté toute sa vie communiste à Saint-Amand-les-Eaux, et il n'était pas communiste, il savait distinguer le maire du député, voilà. Donc moi je suis fier d'être ancré…
ELIZABETH MARTICHOUX
Donc regardez-moi en tant que maire et pas en tant que ministre.
GERALD DARMANIN
Ancré dans ma commune populaire, et je suis très heureux de la représenter, d'en parler sur votre plateau.
ELIZABETH MARTICHOUX
Paris c'est compliqué pour la majorité.
GERALD DARMANIN
Moi je trouve que Benjamin GRIVEAUX est un homme courageux, il a un beau projet pour Paris, je constate d'ailleurs que personne ne parle projet dans cette campagne municipale de Paris, et c'est bien dommage, et moi je souhaite que Benjamin GRIVEAUX soit maire de Paris, et je le soutiens très fortement.
ELIZABETH MARTICHOUX
Cédric VILLANI vous l'encouragez à…
GERALD DARMANIN
Eh bien à rejoindre Benjamin GRIVEAUX, Benjamin GRIVEAUX est le candidat de la majorité présidentielle. Paris, je crois, doit tourner la page et doit avoir une alternance politique, ça me paraît tout à fait nécessaire, peut-être qu'il en fallait une après les ères CHIRAC et TIBERI, maintenant il en fait une après les ères DELANOË et HIDALGO, et sans doute HIDALGO en premier lieu, même si Madame HIDALGO est une femme respectable, moi je crois que Benjamin GRIVEAUX est le maire de Paris qu'il faut, pour la France, et pour Paris.
ELIZABETH MARTICHOUX
Voilà, le gouvernement qui monte au front pour défendre Benjamin GRIVEAUX. Ségolène ROYAL va être démise de ses fonctions tout à l'heure en Conseil des ministres, d'ambassadrice des pôles ?
GERALD DARMANIN
Je ne sais pas, nous ne connaissons pas les nominations et les dénominations avant que nous n'arrivions en Conseil des ministres.
ELIZABETH MARTICHOUX
Elle était hier à Marseille, elle a tapé à bras raccourcis sur la politique du gouvernement en disant qu'elle représentait une troisième voie entre Emmanuel MACRON et Marine LE PEN.
GERALD DARMANIN
Moi je respecte Madame ROYAL, qui s'est présentée à l'élection présidentielle avant même que je sois actif en politique, donc je respecte mes aînés en politique… et puis si, par ailleurs, c'est une femme politique qui est tout à fait respectable, qui a ses opinions, effectivement il vaut mieux qu'elle ne reste pas en responsabilité où il y a vraiment un devoir de neutralité. Donc, voilà, moi je respecte Madame ROYAL et tant mieux si désormais le fait va avec le droit.
ELIZABETH MARTICHOUX
Le fait va avec le droit, c'est-à-dire qu'elle sera une opposante politique…
GERALD DARMANIN
Respectable et respectée, mais en même temps il faut savoir choisir est-ce qu'on est dedans ou dehors, on ne peut pas être entre deux chaises…
ELIZABETH MARTICHOUX
Elle n'a pas choisi, elle subit, mais elle en fait son miel manifestement. Merci à vous Gérald DARMANIN d'avoir été ce matin sur le plateau de LCI.
Source : Service d'information du Gouvernement, le 28 janvier 2020