Interview de Mme Christelle Dubos, secrétaire d'État à la santé, à France Info le 24 février 2020, sur les premiers cas de Coronavirus 2019-nCoV en France et leur prise en charge dans les hôpitaux.

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Média : France Info

Texte intégral

SEBASTIEN THOMAS
Nous accueillons Christelle DUBOS, secrétaire d'Etat auprès du ministre de la Santé et des Solidarités. Bonjour.

CHRISTELLE DUBOS
Bonjour.

SEBASTIEN THOMAS
Et merci d'avoir acceptée l'invitation de France Info, alors que votre agenda est, on l'imagine, chargé. Vous êtes chargée notamment un petit peu des retraites, on va y venir, mais d'abord le gros de cette interview on va le consacrer à cette crise du coronavirus. On l'a bien compris Olivier VERAN dit « on est prêt », 70 hôpitaux parés à faire face, il faut le rappeler aussi il n'y a qu'un seul cas en France toujours en traitement. D'abord est-ce qu'on a des nouvelles de la personne qui est soignée actuellement ?

CHRISTELLE DUBOS
Oui en effet la personne est soignée, nous avons une personne qui est malheureusement décédée, c'est la situation qui est en France, 10 personnes qui sont guéries, qui sont sorties. Nous avons une situation qui est stable en France et, vous l'avez très bien dit le ministre de la Santé, Olivier VERAN, a fait en sorte qu'il y ait 70 établissements qui puissent accueillir pour traiter les patients de A à Z s'ils ont besoin et l'objectif c'est qu'on ait un centre hospitalier par département pour éviter la propagation et le déplacement des personnes.

SEBASTIEN THOMAS
A tout le moins métropole effectivement. Mais juste vous avez des nouvelles, enfin sans trahir aucun secret médical mais du patient qui est soigné toujours ?

CHRISTELLE DUBOS
Il est toujours hospitalisé, il est suivi, son état est stable.

SEBASTIEN THOMAS
D'accord son état est stable. Dans un entretien au journal Le Parisien Dimanche, Olivier VERAN a estimé très probable la possibilité de nouveaux cas en France. Il n'est évidemment pas question de faire de l'alarmisme mais à quoi est-ce que vous dans les services spécialisés, vous vous attendez dans les heures, dans les jours qui viennent ?

CHRISTELLE DUBOS
D'abord je voudrais rappeler quelques règles, quand on aurait un doute, une suspicion, ne pas aller aux urgences, rester chez soi et appeler le 115…

SEBASTIEN THOMAS
Le 15.

CHRISTELLE DUBOS
Pardon le 15, c'est bien les médecins régulateurs qui verront en fonction de votre situation les démarches à effectuer.

SEBASTIEN THOMAS
Alors pourquoi il ne faut pas aller aux urgences ?

CHRISTELLE DUBOS
Pour éviter si vous êtes malade, pour éviter la propagation. Quand vous allez rentrer en contact, si vous y allez en transport, si vous y allez et que vous arrivez aux urgentes, où il y aurait d'autres personnes et c'est là où la propagation est importante. C'est pour ça qu'on parle en effet de confinement et c'est ce qu'on a fait sur les différentes situations, quand on a eu des clusters, ce qu'on appelle des clusters avec plusieurs situations…

SEBASTIEN THOMAS
A Carry-le-Rouet, à Aix-en-Provence et depuis peu dans le Calvados.

CHRISTELLE DUBOS
Exactement et c'est là où en effet on permet aux personnes de rester isolées chez elles pour éviter la propagation, c'est un système qui fonctionne bien puisque nous avons limité, nous avons une situation qui est très stable en France, donc éviter de se déplacer et appeler le 15.

SEBASTIEN THOMAS
Le Calvados d'ailleurs, les gens qui sont rapatriés de Wuhan et qui sont à Branville, ils ont été testés a priori, vous avez les résultats de leurs tests, tout va bien ou pas ?

CHRISTELLE DUBOS
M, là je ne les ai pas à ce jour-là, au moment où je vous parle, mais en effet même s'ils vont bien, ils resteront, je dirais, confinés sur les 14 jours, comme l'ont été les autres personnes pour éviter tout risque éventuel.

SEBASTIEN THOMAS
La France a envoyé quatre avions à Wuhan, il y a aussi des cas de foyers préoccupant en Iran, en Corée du Sud, est-ce que nous allons rapatrier nos ressortissants de là-bas ?

CHRISTELLE DUBOS
Nous regardons toutes les situations, à ce stade nous n'avons pas de projet de rapatriement. Si on sent qu'il y a un besoin et si on voit qu'il y a un besoin nous verrons comment on peut mettre en place, l'objectif est bien de sécuriser, de bien aussi ramener dans de bonnes conditions nos concitoyens français.

SEBASTIEN THOMAS
Protéger aussi, je rebondis là-dessus est-ce qu'à terme vous n'excluez pas de fermer la frontière avec l'Italie ?

CHRISTELLE DUBOS
Le virus ne s'arrête pas aux frontières. Ce que nous devons faire, c'est en effet, dès lors qu'on a une situation, c'est la confiner, et s'assurer qu'il n'y ait pas de propagation de cette situation et de virus supplémentaire. Et donc c'est bien dans ce cadre-là que nous travaillons. C'est dans ce cadre-là que nous mettons en effet un centre hospitalier par département pour éviter le transport d'éventuels patients ou d'éventuels malades. Evitons le contact entre les Français et les personnes pour éviter cette propagation. Je veux juste rassurer : nous tenons un point presse tous les jours, tous les chiffres sont donnés en toute transparence sur le site du ministère de la Santé et des solidarités, et nous sommes dans la transparence totale, dès que nous avons des évolutions, nous les donnons, nous les informons, nous informons les personnes.

SEBASTIEN THOMAS
Appeler le 15, ne pas se rendre aux urgences, on l'aura compris. Voici pour ce dossier. J'en viens à la réforme des retraites, parce qu'elle vous concerne aussi un petit peu dans le périmètre de votre ministère, si j'en crois la presse notamment d'hier, à propos du 49.3, la question n'est pas de savoir si oui, il sera utilisé, mais quand, c'est inéluctable d'en venir là ?

CHRISTELLE DUBOS
Ecoutez, ce que je peux vous dire, c'est que le 49.3, nous ne le souhaitons pas, nous voulons un débat parlementaire, un débat parlementaire sur le fond, et pas sur la forme. Actuellement, les 41.000 amendements déposés par une petite…

SEBASTIEN THOMAS
Une grande partie de La France Insoumise…

CHRISTELLE DUBOS
Voilà, de La France Insoumise, etc., portent sur la forme. Je vais vous donner un seul exemple, c'est on change le mot, c'est « tous les ans », par « chaque année », et donc ce n'est pas un débat qui est correct, c'est inacceptable. La première… je dirais, j'ai vu un tweet de Jean-Luc MELENCHON qui commence à se dire être victime par rapport au fait que si on aurait le 49.3, etc, je crois que la première victime, c'est bien notre démocratie, c'est bien ce travail parlementaire que nous avons souhaité, le texte ira jusqu'au bout, parce que, oui, nous voulons un minimum de retraite à 1.000 euros. Moi, je souhaite, et c'est là-dessus mon travail avec les parlementaires, nous avons proposé des amendements par rapport au texte initial, pour que, oui, il y ait des majorations pour enfant, dès le premier enfant, mais surtout qu'il y ait une part réservée au titre de la maternité à la maman, nous avons des amendements également pour garantir des points supplémentaires pour les parents qui sont isolés ou encore garantir que cette majoration, que ce supplément lié aux enfants soit bien versé aux parents victimes des violences conjugales…

SEBASTIEN THOMAS
Ça, c'est grâce à la discussion parlementaire ou en commission…

CHRISTELLE DUBOS
Exactement. Donc c'est bien le travail parlementaire, et si on n'a pas les amendements, si on ne peut pas les déposer dans l'hémicycle, ils ne seront pas inscrits dans le texte.

SEBASTIEN THOMAS
Sauf si vous décidez dans le cadre d'un 49.3, vous pouvez présenter la version que vous voulez finalement ?

CHRISTELLE DUBOS
Mais l'objectif, c'est quoi, l'objectif, c'est bien que les parlementaires se saisissent du sujet, les parlementaires, ils représentent qui, ils représentent les Français. Et les Français, ils ont besoin d'être représentés, d'être entendus et que leur voix soit portée au chapitre, c'est bien ce qui se passe dans les débats parlementaires, et dire que le gouvernement ne prendrait aucun texte de l'opposition, ne travaillerait jamais avec l'opposition, c'est faux, quand nous sommes sur un texte, nous prenons les amendements de l'opposition et nous travaillons avec l'opposition justement parce que c'est bien là le rôle des parlementaires, c'est améliorer les textes que nous proposons.

SEBASTIEN THOMAS
Je ne sais pas si vous entendiez tout à l'heure, à 07h, on avait Guillaume LARRIVE dans notre journal, par téléphone, et il dit : moi, j'ai une proposition, que le Premier ministre reçoive les chefs de partis représentés au Parlement, qu'on discute et qu'on fasse en gros un étalement de la discussion jusqu'à mi-avril, vous, vous dites quoi, non, il faut en finir, il faut qu'on y aille ?

CHRISTELLE DUBOS
Je crois que le texte, d'abord, on en a besoin, et puis, deuxièmement, il y a tout un travail qui est fait en parallèle avec les organisations syndicales et les organisations patronales, la conférence de financement, etc, donc nous travaillons en parallèle. Je pense que maintenant, il faut aboutir sur ce texte et passer à autre chose derrière, on doit continuer à le faire évoluer, à l'améliorer avec ce travail parlementaire, après, il va aller au Sénat, le Sénat va continuer à l'améliorer, nous avons un joli texte à proposer aux Français, parce que, oui, ce texte est une avancée majeure en termes de justice et de lisibilité par rapport à l'ensemble de nos concitoyens.

SEBASTIEN THOMAS
Entre nous, mercredi, Conseil des ministres, vous vous attendez peut-être à ce que, Edouard PHILIPPE vous dise que, oui, il va demander le 49.3 ?

CHRISTELLE DUBOS
Ecoutez, je verrai si j'y suis, les secrétaires d'Etat ne sont pas systématiquement à tous les Conseils des ministres. Mais nous travaillons surtout à ce que les débats se passent bien, et surtout que le texte, au final, soit un joli texte qui réponde aux besoins des Français.

SEBASTIEN THOMAS
Je voudrais maintenant dire un mot de choses dont vous vous occupez plus particulièrement, Christelle DUBOS, dans votre ministère, d'abord, ce dispositif petit-déjeuner gratuit en maternelle et en primaire, doublement du nombre servi de 200.000 élèves, c'est ça, en 2020, bientôt ?

CHRISTELLE DUBOS
Oui, tout à fait, nous avions un objectif…

SEBASTIEN THOMAS
Pourquoi c'est important de donner des petits déjeuners aux élèves, aux enfants ?

CHRISTELLE DUBOS
Parce que quand vous arrivez le ventre vide à l'école, et qu'à 11h, vous êtes en hypo, donc vous avez un coup de barre, vous n'avez pas les mêmes chances de travail et de concentration, pour faire votre dictée ou apprendre votre leçon de mathématiques. Et les enseignants nous le disent bien, on a eu des retours, moi, je continue à les rencontrer les enseignants, nous travaillons avec Jean-Michel BLANQUER, les enseignants nous disent bien qu'en effet, on voit bien que les enfants sont beaucoup moins fatigués, sont beaucoup moins énervés, et que la concentration va jusqu'au repas de midi. Donc c'est important, et puis, surtout, c'est, au-delà de donner à manger aux enfants, c'est aussi nos adultes de demain, donc c'est une éducation alimentaire…

SEBASTIEN THOMAS
Qui peut en bénéficier, juste d'un mot ?

CHRISTELLE DUBOS
Tous les enfants qui sont dans un groupe scolaire, et pour lequel l'équipe éducative, donc les enseignants ou les élus ou les parents d'élèves ont souhaité monter un projet, ce projet est validé après par les services de l'Education nationale. Les petits déjeuners se mettent en place, soit sur du temps scolaire, soit du temps hors scolaire, en moyenne c'est deux fois par semaine, il y a des secteurs où c'est trois fois, des secteurs où c'est une fois par semaine, donc c'est vraiment très souple, nous avons voulu un dispositif qui soit non obligatoire, qui laisse cette souplesse et qui laisse surtout les acteurs se saisir de ce projet pour le travailler ensemble et trouver la bonne solution. Et donc nous avons un objectif en effet, nous étions à 110.000 élèves en 2019, nous avions un objectif de 100.000, nous doublons notre objectif pour 2020, 200.000 avec un budget qui est doublé à 12 millions d'euros.

SEBASTIEN THOMAS
Un mot aussi en quelques secondes de ce nouveau dispositif, enfin pas tout-à-fait nouveau mais qui est élargi, concernant les pensions alimentaires impayées, je crois que ça représente un million de pensions potentiellement en France, c'est ça ?

CHRISTELLE DUBOS
Tout-à-fait en France nous avons un million de pensions alimentaires qui sont versées, on estime à peu près à 30 % des pensions qui sont malversées ou pas versées en totalité, donc 300.000 pensions alimentaires. Nous garantissons le versement de la pension alimentaire en allant chercher du 1er juin de cette année, aller chercher de votre ex-conjoint le montant de la pension alimentaire et vous le reverser sur votre compte, ça c'est pour toutes les nouvelles séparations. Quand vous êtes déjà en situation d'impayé, dans des difficultés de paiement de pension alimentaire, on vous garantit le remboursement de la dette de votre pension et après on vous garantira le versement. Et à partir du 1er janvier 2021, ce sont toutes les familles qui le souhaitent, c'est une avancée majeure et importante de ce quinquennat, quand on sait à peu près que 170 euros par enfant et par mois, c'est la moyenne d'une pension alimentaire et que pour les familles monoparentales, c'est 18 % du budget, on voit bien la difficulté que ça peut générer financièrement, mais surtout la difficulté et le risque de conflit de façon importante parfois entre les ex-conjoints, qui de fait n'éduquent plus leur enfant. Laissons-leur éduquer leur enfant et oublions ce souci de versement de pension alimentaire.

SEBASTIEN THOMAS
Merci pour ces précisions, Christelle DUBOS, secrétaire d'Etat auprès du ministre de la Santé et des Solidarités. Merci d'avoir été sur France Info ce matin.

CHRISTELLE DUBOS
Merci.


Source : Service d'information du Gouvernement, le 25 février 2020