Texte intégral
JEAN-JACQUES BOURDIN
Olivier VERAN, bonjour.
OLIVIER VERAN
Bonjour Jean-Jacques BOURDIN.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Ministre de la Santé. On a besoin de vous. On a besoin de vos informations. Combien de personnes sont hospitalisées en France souffrant de coronavirus ?
OLIVIER VERAN
Le directeur général de la santé a fait un point presse, comme il le fait chaque jour, hier soir à 19h et a annoncé qu'il y avait au total 191 personnes diagnostiquées positives pour le coronavirus depuis le mois de janvier et le début de la crise virale. Sur ces 191 personnes, trois personnes au total sont décédées, nous n'avons pas la preuve à ce stade que ces personnes soient décédées des causes du coronavirus, mais qu'elles sont décédées porteuses du virus, c'est notamment le cas d'une dame de 89 ans qui était porteuse de pathologies hier. Un certain nombre de patients ont déjà pu quitter l'hôpital guéris et ne sont plus transmissibles pour le virus. Et il reste encore une centaine de patients qui sont hospitalisés, la plupart d'entre eux sont hospitalisés pour être isolés parce qu'ils sont porteurs du virus, et un certain nombre de patients sont hospitalisés avec des symptômes plus ou moins sévères. Il y a encore une dizaine de patients hospitalisés dans des services de réanimation pour des pneumopathies sévères.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Bien. La troisième victime est une octogénaire, était une octogénaire, 89 ans, de Crépy-en-Valois. Est-ce qu'elle vivait dans un EHPAD ?
OLIVIER VERAN
Je n'ai pas l'information de savoir si elle vivait dans un EHPAD…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Vous n'avez pas l'information…
OLIVIER VERAN
Mais elle avait 89 ans, elle était porteuse de ce qu'on appelle les comorbidités, comme parfois, comme souvent, les Français peuvent avoir un certain nombre de maladies et de fragilités, parce que vous savez, Jean-Jacques BOURDIN, c'est un virus, le coronavirus, qui provoque des symptômes respiratoires qui peuvent aller d'un rhume à une très forte grippe jusqu'à des pneumonies, avec ce qu'on appelle parfois des syndromes de détresse respiratoire. Ce qu'on sait des données qui nous reviennent de l'étranger, et des premières données françaises, c'est que le virus, dans près de 80 % des cas, il va donner très peu de symptômes, parfois, pas de symptôme du tout, ou parfois, un syndrome grippal. Dans 15 % des cas, il va donner des troubles respiratoires plus sévères, près de 5 % des patients dans le monde justifient d'aller en soins intensifs ou en réanimation, parfois pour une durée courte, parfois pour une durée plus longue, parce qu'ils peuvent avoir besoin d'assistance respiratoire, et il y a une mortalité qui est réévaluée en ce moment, mais qui est aux alentours de 1 à 2 %, c'est-à-dire une mortalité plus importante que la grippe, bien moins importante que le SRAS, que nous avions connu auparavant. Mais le coronavirus est un virus qui est contagieux, voire très contagieux, c'est pour ça que nous le surveillons comme le lait sur le feu…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Alors, contagieux, très contagieux, combien de personnes pourraient être touchées en France ? Certains avancent des chiffres, des dizaines de milliers, peut-être, des centaines de milliers, et même plusieurs millions de personnes, vrai ou faux ?
OLIVIER VERAN
C'est un virus, le coronavirus, qui a déjà fait plusieurs vagues d'épidémie dans le monde, mais qui a muté dans sa forme actuelle, c'est pour ça d'ailleurs qu'il y a une très grande vigilance sur toute la planète, parce que c'est un virus qui a muté, et donc c'est un virus qui a des caractéristiques nouvelles, que nous identifions progressivement, à mesure que les semaines passent et que nous pouvons observer son profil épidémique. Ce qu'on peut dire, c'est que la Chine par exemple, avec des mesures de confinement, a connu malgré tout près de 80.000 malades, que, manifestement, d'après les données qu'ils nous livrent, voit une réduction importante du nombre de malades, tandis que dans d'autres pays, je pense à l'Iran, je pense à la Corée du Sud, plus près de nous, je pense à l'Italie, il y a une augmentation sensible du nombre de malades…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Est-ce qu'il faut s'attendre à une augmentation sensible du nombre de malades en France ?
OLIVIER VERAN
Je vous ferai la réponse que je fais tous les soirs, nous anticipons toutes les situations, nous nous adaptons, et en fonction des données qui nous reviennent, nous sommes capables de dire en transparence aux Français où est-ce que nous en sommes. Ce que je peux vous dire, c'est que nous anticipons la possibilité d'une épidémie, quelle que soit la taille de cette épidémie…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Anticiper, ça veut dire que nous passons au stade 3 ?
OLIVIER VERAN
Ça veut dire que nous sommes au stade 2 depuis maintenant deux jours, qui est un stade, pardon, Jean-Jacques BOURDIN, pour expliquer, pour expliquer aux Français, parce que le stade 2, le stade 3, je ne suis pas sûr que ce soit très clair…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Alors, allez-y…
OLIVIER VERAN
Le stade 1, c'est le stade au cours duquel on met tout en oeuvre pour empêcher le virus d'entrer sur le territoire national, nous l'avons connu avec succès pendant plusieurs semaines. Le stade 2, c'est le stade au cours duquel le virus circule sur la territoire, c'est-à-dire que les gens peuvent se contaminer en France, mais où on a encore ce qu'on appelle des chaînes de contamination, ça veut dire que les patients sont liés les uns aux autres, c'est le cas pour les trois quarts des patients encore aujourd'hui, alors que pour d'autres patients, des enquêtes précises, minutieuses de terrain sont en cours pour essayer de comprendre quelles sont les sources de contamination, les origines de la contamination. Le stade 3, c'est le stade de l'épidémie, c'est le stade au cours duquel vous faites le constat que le virus circule et qu'il est transmissible sur l'ensemble du territoire…
JEAN-JACQUES BOURDIN
C'est le constat que vous faites ?
OLIVIER VERAN
Non, nous sommes aujourd'hui au stade 2, je n'ai pas annoncé…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Donc nous ne sommes pas en épidémie ! Alors, nous sommes en épidémie ou pas en épidémie ?
OLIVIER VERAN
Nous ne sommes pas en épidémie, nous faisons face à une menace épidémique qui se rapproche, et nous anticipons la situation, encore une fois, les choses sont pour le coup extrêmement claires…
JEAN-JACQUES BOURDIN
J'ai entendu plusieurs discours…
OLIVIER VERAN
Stade 1, stade 2, stade 3. Nous sommes au stade 2. Si nous devons passer au stade 3, je le dirai aux Français, comme je l'ai dit lorsque nous sommes passés au stade 2.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Bien. Pourquoi Emmanuel MACRON annule-t-il tous ses rendez-vous jusqu'à jeudi, ça a un rapport avec le coronavirus ou pas ?
OLIVIER VERAN
Le président de la République – et c'est normal – est impliqué également en première ligne sur la lutte contre le coronavirus, il est là aussi pour rassurer les Français, il est là aussi pour participer à la mise en oeuvre…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Aucun rapport, lui n'est pas touché, lui…
OLIVIER VERAN
Pas plus que moi, Jean-Jacques BOURDIN…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Je vous pose la question. Pas plus que vous…
OLIVIER VERAN
J'ai fini par recevoir un texto de quelqu'un de ma famille hier soir me demandant s'il était vrai que j'étais malade, je rassure les Français, et je vous rassure et je rassure mes proches…
JEAN-JACQUES BOURDIN
… Vous avez serré la main…
OLIVIER VERAN
Non, je n'ai pas serré la main…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Au préfet de l'Oise, non ?
OLIVIER VERAN
Non, Jean-Jacques BOURDIN, je suis allé dans l'Oise…
JEAN-JACQUES BOURDIN
C'était vendredi…
OLIVIER VERAN
Dans la commune de Crépy-en-Valois, et dans la commune de Vaumoise, parce que c'était mon rôle, comme ministre de la Santé, d'aller sur place, saluer les volontaires de la réserve sanitaire, épidémiologistes, hygiénistes, médecins, infirmiers, qui sont mobilisés sur le terrain, pour rassurer, dépister, accompagner la population, et parce que c'était mon rôle d'aller à la rencontre des habitants qui légitimement s'inquiétaient sur leur situation, pour pouvoir aussi expliquer les mesures que nous allions prendre…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Vous avez des nouvelles du préfet de l'Oise…
OLIVIER VERAN
Le soir même, j'invitais les Français à ne plus se serrer la main, et vous le savez, parfois, il peut y avoir des accidents, surtout, quand vous êtes ministre, les gens peuvent être tentés de vous serrer la main, et vous pouvez, donc, moi, j'ai toujours sur moi du gel hydro-alcoolique, où je me lave les mains…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Vous vous lavez les mains régulièrement…
OLIVIER VERAN
Eh bien, oui, bien évidemment, et puis, vous savez, je suis médecin, donc j'ai une déformation professionnelle de base qui fait que le lavage des mains fait partie intégrante de mon quotidien, mais c'est important, c'est important, et je le rappelle, parce que je ne peux pas passer sur votre plateau avec tous les personnes qui nous regardent sans rappeler ces gestes barrières, parce que ce n'est pas comme si on était passif quand on est citoyen face au virus, on peut être actif, on doit être actif en protégeant les plus fragiles, en n'allant pas voir les personnes malades ou fragiles quand on est soi-même fiévreux ou qu'on a un doute sur son état de santé, en se lavant les mains toutes les heures, en se frictionnant les mains avec du gel hydro-alcoolique, en toussant ou en éternuant dans son coude. J'avoue que ce n'est pas spontanément extrêmement facile, mais on prend vite le pli, et en utilisant un mouchoir à usage unique, Jean-Jacques BOURDIN…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Olivier VERAN, vous avez des nouvelles du préfet de l'Oise, du sous-préfet de Senlis, du directeur général de l'Agence régionale de santé des Hauts-de-France, qui sont confinés ?
OLIVIER VERAN
Oui, j'ai eu le directeur général de l'Agence régionale de santé, Etienne CHAMPION, hier au téléphone…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Tout va bien ?
OLIVIER VERAN
Qui travaille par télétravail, qui m'a d'ailleurs envoyé des photos, captures d'écran…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Ils ont été dépistés…
OLIVIER VERAN
De ses réunions de travail avec l'ensemble de ces administrations, vous savez…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Est-ce qu'ils ont été dépistés ?
OLIVIER VERAN
Ils sont en cours de… quelle est la règle, quand vous êtes personne contact de personnes confirmées, de cas confirmés, on vous propose, on vous demande de rester chez vous, de prendre votre température deux fois par jour, si vous avez de la fièvre, des frissons, difficultés respiratoires…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Ce que vous faites, j'imagine…
OLIVIER VERAN
De composer le 15, je ne suis pas personne contact de cas confirmé, Jean-Jacques BOURDIN, mais ne vous inquiétez pas, encore une fois, je suis à la fois patient, médecin, citoyen, et parfaitement engagé dans la lutte contre l'épidémie, je ne prendrai aucun risque ni pour moi ni pour mes proches.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Bon, donc, pas de contact à la Salpêtrière avec des malades, bon…
OLIVIER VERAN
Et je continuerai d'aller sur le terrain à la rencontre des professionnels de santé, j'étais hier à Bordeaux où il y a des malades hospitalisés, j'ai rencontré les équipes hospitalières et la médecine de ville extrêmement mobilisées les unes comme les autres dans la lutte contre l'épidémie, vous savez, on a de la chance dans notre pays d'avoir un système sanitaire d'une qualité optimale ; et beaucoup, beaucoup de pays autour de nous nous envient la qualité de nos professionnels…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Olivier VERAN, un expert italien, reconnu membre de l'OMS, estime qu'il faudra attendre mai, juin avant que le danger ne soit réellement écarté, vous êtes d'accord ?
OLIVIER VERAN
Vous me demandez de tirer des plans sur la comète, moi, ce n'est pas les plans sur la comète qui m'intéressent. Ce qui m'intéresse, Jean-Jacques BOURDIN, c'est d'être prêt à toutes les situations, prêt dans l'hypothèse où l'épidémie s'arrêterait, prêt dans l'hypothèse où l'épidémie flamberait dans les trois prochains mois, prêt dans l'hypothèse où l'épidémie aurait un profil inhabituel, ça ne m'intéresse pas d'avoir forcément des projections, parce que dans la mesure où j'ai une vision scientifique aussi de la question, et toutes les décisions que je prends, toutes les décisions que nous prenons au gouvernement sont des décisions qui sont fondées sur un rationnel scientifique, un rationnel médical et qui tient compte des données actualisées de la science heure par heure, non seulement, issues de la science nationale, mais de toutes les conférences d'experts au niveau international, c'est ça qu'il faut aussi comprendre, c'est très important. C'est très important de le comprendre…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Olivier VERAN, est-ce que les hôpitaux français sont prêts ?
OLIVIER VERAN
Les hôpitaux français sont toujours prêts, nous avons un hôpital qui est un bijou, un bijou. L'hôpital français est prêt, la médecine de ville est prête, nous faisons en sorte de fournir tout le matériel nécessaire aux hôpitaux et aux professionnels de santé de ville, je travaille aussi à ce qu'il y ait des programmes de protocole et de formation…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Oui, je vais y revenir…
OLIVIER VERAN
Et l'hôpital, nous le soutenons, d'ailleurs, je peux vous nous annoncer ce matin qu'il y avait sur l'exercice budgétaire, le budget 2019, des hôpitaux français, publics et privés d'ailleurs, de l'argent qui n'avait pas été dépensé, de l'argent important, 260 millions d'euros, ce qu'on appelle une mise en réserve, eh bien, je peux vous annoncer ce matin que ces 260 millions d'euros, je les libère pour l'ensemble des hôpitaux français…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Vous les débloquez ?
OLIVIER VERAN
Je les débloque.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Pour les hôpitaux français.
OLIVIER VERAN
Pour les hôpitaux français, 260 millions d'euros.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Oui, les hôpitaux français et notamment plusieurs responsables, on a vu l'interpellation du président de la République la semaine dernière, plusieurs responsables qui se plaignent, et on ne peut pas aujourd'hui, on ne pourrait pas faire face à une véritable épidémie.
OLIVIER VERAN
On peut faire face à une épidémie.
JEAN-JACQUES BOURDIN
On peut faire face à une épidémie ?
OLIVIER VERAN
Jean-Jacques BOURDIN, on peut faire face à une épidémie. L'ensemble des professionnels que je suis allé voir à Paris, à Bordeaux et dans d'autres territoires me disent tous qu'on sait faire, on a le savoir-faire, oui, on a besoin de soutenir l'hôpital, ce que nous faisons depuis un certain temps, Agnès BUZYN l'a commencé bien avant moi en libérant des crédits exceptionnels avec la reprise de dettes, qui va bientôt se mettre en place dans les hôpitaux, et moi, j'ai fait aussi le choix très vite de faire en sorte qu'il n'y ait pas un seul département français au sein duquel il n'y aurait pas au moins un hôpital capable de prendre en charge des malades de A à Z ; la prise en charge du coronavirus n'est pas une prise en charge à enjeu parisien ou à gros CHU, la prise en charge du coronavirus, elle doit être uniforme et de qualité optimale sur tout le territoire, que ce soit dans le Morbihan, que ce soit dans la Franche-Comté ou que ce soit à Paris.
JEAN-JACQUES BOURDIN
260 millions d'euros pour être utilisé où, comment ?
OLIVIER VERAN
C'est 260 millions d'euros qui sont restitués aux hôpitaux qui pourront les utiliser pour financer de l'innovation, de l'investissement ou des mesures RH…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Du personnel ?
OLIVIER VERAN
Bien sûr, c'est tout à fait possible…
JEAN-JACQUES BOURDIN
C'est tout à fait possible.
OLIVIER VERAN
Et je le dis, vous savez, je n'ai jamais caché, je n'ai jamais eu peur de parler du problème de lits, du problème de valorisation des soignants, du problème d'attractivité, je suis médecin hospitalier avant d'être élu, et je consultais encore au CHU de Grenoble avant d'être ministre, j'aurais dû d'ailleurs consulter le matin où j'ai été nommé, je ne méconnais pas cette situation-là, et je porte l'hôpital dans mon coeur, mais je porte aussi parce que je ne veux pas faire croire aux professionnels de santé que je serais "hospitalo-centré", je porte l'ensemble des acteurs de santé et du soin dans mon coeur…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Les masques…
OLIVIER VERAN
Et il faut prendre soin de ceux qui prennent soin de nous quand on en a besoin, et je crois que les Français attendent de nous aussi cela.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Des masques vont être distribués aux médecins généralistes qui iront dans les pharmacies chercher ces masques, apparemment, des lots…
OLIVIER VERAN
Vous en parlez au futur, n'en parlez pas au futur…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Ça y est…
OLIVIER VERAN
N'en parlez pas au futur…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Oui, ça a commencé, mais pas partout…
OLIVIER VERAN
N'en parlez pas au futur…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Pas partout, Olivier VERAN…
OLIVIER VERAN
N'en parlez pas au futur. Nous avons priorisé, alors, deux chiffres, vous aimez les chiffres, et moi aussi, cinq millions de masques chirurgicaux ont été distribués dans les agences régionales de santé et auprès des établissements de santé et des EHPAD pour les personnes âgées. Dix millions de masques ont été déstockés, sont partis dans des camions aux quatre coins du pays et sont répartis dans toutes les pharmacies d'officine du territoire, je remercie les pharmaciens dont le réseau nous permet de réaliser cet exploit, et l'ensemble des professionnels de santé de ville qui justifient de porter un masque peuvent aller chercher des boîtes de masques dans les pharmacies d'officine ; les camions sont arrivés hier en priorité dans l'Oise, parce qu'il ne vous aura pas échappé que l'Oise est en situation particulière, et aux quatre coins de la France aujourd'hui, et je vous annonce ce matin que je procède à un nouveau déstockage de masques…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Combien ?
OLIVIER VERAN
Et je le ferai à chaque fois que ce sera nécessaire, plusieurs millions de masques, tous les besoins sont évalués en fonction des remontées de terrain…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Combien ? C'est-à-dire, plusieurs millions, c'est un peu vague, 15 millions dans un premier temps ?
OLIVIER VERAN
J'ai déstocké 15 millions, on réfléchit à…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Et là, vous allez déstocker combien ?
OLIVIER VERAN
On va déstocker entre 15 et 20 millions de masques, qui vont arriver dans…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Supplémentaires ?
OLIVIER VERAN
Qui vont arriver dans les pharmacies d'officine, progressivement à mesure que les besoins…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Entre 15 et 20 millions de masques supplémentaires ?
OLIVIER VERAN
Oui, à mesure que les besoins se font sentir…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Je suis médecin généraliste, je vais dans une officine, on me donne un lot de 50 masques, au bout de deux jours, je n'en ai plus…
OLIVIER VERAN
On vous le donne, d'ailleurs…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Oui, au bout de deux jours, je n'en ai plus, et qu'est-ce que je fais ?
OLIVIER VERAN
On vous le donne le stock de masques.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Oui, on me le donne, qu'est-ce que je fais, j'y retourne ?
OLIVIER VERAN
Non, attendez, oui, et d'abord, premier message…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Donc je suis à la pharmacie tous les deux jours…
OLIVIER VERAN
Attendez, Jean-Jacques BOURDIN, vous le savez très bien, le premier risque de manquer de quelque chose dans un pays, c'est quand tout le monde se rue dessus, bien, il n'y a pas de pénurie alimentaire, il n'y a pas de pénurie de gels hydro-alcooliques, il y a juste eu énormément de demandes concentrées sur une seule période, nous relâchons les quantités de production et tous les stocks disponibles dans les pharmacies…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Combien, là aussi, sur les gels hydro-alcooliques ?
OLIVIER VERAN
On a un énorme producteur français de gels hydro-alcooliques qui est capable de faire face à la demande, encore une fois c'est la concentration de la demande…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Ça veut dire quoi concrètement ?
OLIVIER VERAN
Je ne vais pas vous donner le nombre de millions de boites, mais je peux vous dire que les Français qui ont besoin d'acheter du gel hydro-alcoolique pourront le faire.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Vont en trouver dans les pharmacies ?
OLIVIER VERAN
Ils vont en trouver dans les pharmacies. Ce que je demande, sur votre antenne, c'est que le prix du gel hydro-alcoolique ne soit pas multiplié par le contexte, parce que…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Il l'est parfois ?
OLIVIER VERAN
Oui, et ce n'est pas acceptable, c'est inacceptable. Sur la question des masques, je vous ai dit qu'on est en déstocke, mais vous savez…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Oui, entre 15 et 20 millions vous m'avez dit, nouveau déstockage.
OLIVIER VERAN
Après la grippe H1N1 de 2011 – dans la semaine on va déstocker – après la grippe H1N1 de 2011 il y a eu une conférence scientifique de sachants, d'acteurs de santé publique, qui s'est réunie, et qui ont déterminé quels étaient les besoins en masques, de notre pays par exemple, tout a été déterminé suite aux épisodes viraux précédents. En 2011, je ne sais pas si vous étiez sur RMC et BFM, moi je n'étais pas encore ministre et loin de là. Un stock d'Etat de 145 millions de masques chirurgicaux a été constitué, et à l'époque il n'a pas été considéré comme nécessaire d'avoir ce qu'on appelle un stock de masques FFP2. Donc, en arrivant, et en faisant face à cette crise virale, nous avons pris toutes les mesures nécessaires…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Vous ?
OLIVIER VERAN
Ma prédécesseur…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Surtout vous, si j'ai bien compris.
OLIVIER VERAN
Non, non, ma prédécesseur…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Les stocks avaient été constitués avant ?
OLIVIER VERAN
Ne mettez pas…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Non, non, mais je vous pose la question, comme ça, au passage.
OLIVIER VERAN
Je peux vous dire que si la France… très clairement, si la France est le pays européen le plus préparé, et si la France a enrayé autant de semaines l'évolution et la circulation du virus, c'est parce qu'Agnès BUZYN était une ministre extrêmement engagée sur le sujet, aucun sujet là-dessus.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Bien. Les enfants, dites-moi, parce qu'il faut prendre des précautions pour les enfants aussi, mais allez dans une école, regardez les toilettes, la propreté des toilettes. Il y a du savon dans les écoles ?
OLIVIER VERAN
Il doit y avoir du savon dans les écoles.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Il devrait y en avoir…
OLIVIER VERAN
Oui, il doit y avoir des savons dans les toilettes, Jean-Jacques BOURDIN…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Oui, malheureusement…
OLIVIER VERAN
Une école est un service public et évidemment qu'il faut qu'il y ait du savon dans les écoles.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Ce n'est pas toujours le cas, et la propreté des toilettes, vous le savez bien, laisse à désirer dans les écoles, il va falloir absolument qu'on fasse des efforts, non ?
OLIVIER VERAN
Nous en parlons avec le ministre de l'Education nationale, Jean-Michel BLANQUER, qui est extrêmement attentif au sujet, vous l'imaginez.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Le droit de retrait, est-ce que vous comprenez que certains exercent leur droit de retrait, dans les transports par exemple, sincèrement, franchement ?
OLIVIER VERAN
Vous savez, nous adoptons des consignes nationales, qui sont toutes justifiées sur un rationnel, un rationnel scientifique, un rationnel médical. Lorsque des personnes doivent être éloignées du travail, lorsque des enfants doivent être éloignés de l'école, lorsque nous encourageons la limitation du déplacement ou des rassemblements, toutes ces décisions sont fondées sur un rationnel scientifique et médical. Tout ce qui se sort de ce rationnel, et qui sort des recommandations, n'est, par définition, pas soutenu. Donc, il faut pouvoir expliquer, il faut pouvoir rassurer, il faut pouvoir informer. Nos doctrines sont capables d'évoluer, vous l'avez vu, puisqu'elles peuvent évoluer jour après jour, non pas au doigt mouillé, mais en fonction justement de la situation sanitaire, territoire par territoire, nous ajustons, nos adaptons, nous anticipons en permanence. Donc, tout ce qui sort de la doctrine nationale, dans le sens où tout ce qui se sort des recommandations sanitaires, des recommandations d'experts, ne me semble pas de nature à devoir s'appliquer.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Donc le droit de retrait n'est pas justifié ?
OLIVIER VERAN
Je vous ai répondu.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Oui ou non ?
OLIVIER VERAN
La justification ou non du droit de retrait ce n'est pas un ministre qui peut le dire, le droit de retrait peut s'opérer, et ensuite, éventuellement, il peut être décidé de saisir la justice, ou de ne pas la saisir, etc.
JEAN-JACQUES BOURDIN
De sanctionner ?
OLIVIER VERAN
Non, mais attendez, il ne s'agit pas de sanctionner les gens, il s'agit d'expliquer, de justifier et de dire aux personnes si, oui ou non, ce droit de retrait peut s'opérer ou non. Je vous le redis Jean-Jacques BOURDIN, vous voyez bien… regardez.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Très vite, très vite.
OLIVIER VERAN
Pour que les Français comprennent. On va arrêter de parler de cluster parce que je crois que les gens ne comprennent pas ce que c'est un cluster, et je comprends parfaitement, et en plus c'est un anglicisme. Dans les zones territoriales, les petits bassins de vie, parfois deux communes, parfois cinq communes, au sein desquelles le virus circule beaucoup, c'est le cas notamment dans l'Oise, c'est le cas dans une partie du Morbihan, dans ces endroits-là nous limitons énormément les rassemblements de personnes, nous fermons les écoles, ce n'est pas une fermeture sèche d'ailleurs, c'est une fermeture qui permet à la réserve sanitaire d'accompagner les familles, de faire du dépistage auprès des enfants, etc., etc.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Est-ce que les parents seront indemnisés d'ailleurs, qui sont obligés de garder… ?
OLIVIER VERAN
Oui. Alors, tiens, quand une école doit fermer et que les parents doivent garder leurs enfants, la procédure, jusqu'à présent, c'était de contacter l'Agence régionale de santé, ils sont saturés d'appels, ils ne peuvent pas répondre en temps réel à toutes les demandes, cet après-midi, cet après-midi, il y aura une procédure qui sera très claire, expliquée à l'ensemble des parents qui sont concernés, qui va passer par une déclaration, par l'employeur, auprès de l'Assurance maladie, ce qui va simplifier et accélérer le processus pour les parents qui sont concernés.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Et qui seront donc indemnisés, les parents.
OLIVIER VERAN
Et qui seront indemnisés. Je reviens à mes moutons, pardon. Aux alentours de la zone, où de forte circulation du virus, on est amené à limiter un certain nombre de regroupements, de rassemblements, et puis ensuite vous avez les zones où le virus n'est pas connu pour circuler, où on est toujours extrêmement attentif, et là il y a les règles nationales, c'est interdiction des rassemblements dans des lieux confinés de plus de 5000 personnes…
JEAN-JACQUES BOURDIN
C'est-à-dire, pour l'instant, pas question d'interdire les matchs de foot par exemple, de Ligue 1 ou de Ligue 2.
OLIVIER VERAN
A chaque fois qu'il y aura un événement qui regroupe énormément de monde, quelles que soient les conditions, nous aurons une évaluation au cas par cas, en fonction des…
JEAN-JACQUES BOURDIN
C'est-à-dire qu'aujourd'hui…
OLIVIER VERAN
…Clusters, est-ce qu'elles sont dans les zones où le virus circule, ou non.
JEAN-JACQUES BOURDIN
C'est-à-dire qu'aujourd'hui certains matchs pourraient être annulés ?
OLIVIER VERAN
On peut être amené à prendre des décisions d'interruption de matchs, oui, tout à fait. Pourquoi 5000 personnes, Jean-Jacques BOURDIN, pourquoi 5000 personnes ? C'est une question qui nous remonte, je profite d'être chez vous pour répondre. 5000 personnes c'est le seuil à partir du duquel un événement doit être déclaré en préfecture, tout simplement, en dehors de l'épidémie, ou pendant l'épidémie, donc c'est le seuil de déclaration.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Disneyland Paris, pourquoi est-ce que Disneyland reste ouvert ?
OLIVIER VERAN
Alors pourquoi le semi-marathon et pas Disneyland ? Ça c'est aussi une question que j'ai entendue. Le semi-marathon, 20 % des coureurs viennent de l'étranger, donc on a la condition de brassage, on a le grand rassemblement, et on a beau être à l'extérieur…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Disneyland aussi.
OLIVIER VERAN
On est confiné. Vous avez vu le départ d'un semi-marathon, Jean-Jacques BOURDIN, vous avez le départ d'un semi-marathon et l'arrivée ? Quand vous allez courir 20 bornes…
JEAN-JACQUES BOURDIN
… Dans une attraction ?
OLIVIER VERAN
Attendez, vous allez tousser, vous allez parfois cracher, vous allez expectorer, et donc vous allez re-larguer du virus, donc vous allez là des dizaines de milliers de personnes, dont 1 personne sur 5 vient de l'étranger, et qui vont courir ensemble pendant des heures, se tousser dessus, se cracher dessus, ce n'était pas raisonnable de le maintenir. Quand vous êtes, maintenant, dans un stade par exemple, vous allez être assis dans des tribunes, vous n'avez pas vocation à courir vous-même, à tousser, à cracher…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Non, mais à proximité.
OLIVIER VERAN
On n'est pas dans un lieu confiné. Disneyland Paris, vous allez faire parfois la queue, donc vous avez des queues qui sont à l'extérieur, donc là les mesures, les gestes barrière, tousser dans son coude, mouchoir à usage unique, ne pas se toucher la main, etc., s'appliquent évidemment, mais on n'est pas dans un lieu de confinement. Encore une fois, il ne faut pas imaginer que c'est comme ça, le ministre, dans son bureau, qui a dit « tiens, Disneyland on va dire que c'est bon, le match on va dire que c'est bon », toutes les décisions que je prends sont des décisions qui sont fondées sur le rationnel scientifique, validées par les commissions d'experts, à commencer par les autorités de santé publique, c'est important. Enfin, il y a des blouses blanches derrière toutes les décisions que nous prenons.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Merci Olivier VERAN d'être venu nous voir ce matin, ministre de la Santé.
Source : Service d'information du Gouvernement, le 10 mars 2020