Interview de Mme Frédérique Vidal, ministre de l'enseignement supérieur, de la recherche et de l'innovation, à France Info le 14 mai 2020, sur la recherche du vaccin contre le Covid-19.

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Intervenant(s) : 
  • Frédérique Vidal - Ministre de l'enseignement supérieur, de la recherche et de l'innovation

Média : France Info

Texte intégral

MARC FAUVELLE  
Bonjour Frédérique VIDAL. 

FREDERIQUE VIDAL
 Bonjour. 

MARC FAUVELLE 
Est-il normal qu'un groupe privé français, le laboratoire SANOFI, annonce comme il l'a fait hier soir qu'il réservera la primeur d'un éventuelle vaccin au marché américain ?  

FREDERIQUE VIDAL  
S'il le faisait, ce serait évidemment incompréhensible et indigne mais SANOFI a immédiatement fait un correctif à la dépêche de Bloomberg pour indiquer que le vaccin serait bien accessible à tous les pays et donc évidemment je me réjouis que cette annonce ait été faite. 

MARC FAUVELLE  
Alors pour être parfaitement clair, c'est le PDG britannique du groupe qui a fait cette annonce hier soir et son numéro deux, le président en France de SANOFI et on l'a entendu il y a quelques instants, a relativisé cette annonce en disant bien sûr qu'il y aurait des vaccins pour tout le monde mais dans un groupe, c'est le patron qui décide, non ?  

FREDERIQUE VIDAL  
Oui, mais les précisions ont été apportées par le groupe et au nom du groupe et je me réjouis que l'entreprise ait clarifié les propos de son directeur général. Ça a suscité évidemment une émotion légitime. Le président de la République l'a rappelé : trouver un vaccin, c'est une priorité absolue et ce vaccin devra être un bien public mondial, c'est-à-dire mis à la disposition de tous lorsqu'il existera. C'est exactement le sens de ce qui s'est passé la semaine dernière au niveau européen avec une levée de 7,4 millions d'euros qui vont permettre justement… 

MARC FAUVELLE 
Milliards. 

FREDERIQUE VIDAL 
Milliards d'euros, oui, qui vont permettre justement de développer des vaccins et de pouvoir mettre ces vaccins dès qu'ils seront produits à la disposition de tous. 

MARC FAUVELLE 
Pour en avoir le coeur parfaitement net, Frédérique VIDAL, vous allez joindre Olivier BOGILLOT, le président de SANOFI France, pour être bien sûre que les vaccins fabriqués par une entreprise française seront aussi utilisés en France en même temps que dans les autres pays ou prioritairement ?  

FREDERIQUE VIDAL 
Bien sûr, ça a déjà été pris en charge à la fois par le ministère de l'Economie et des Finances et par le ministère de la Santé, et nous sommes bien clairs : nous serons en capacité, bien sûr si c'est le vaccin de SANOFI qui fonctionne, de pouvoir en disposer sur le territoire. 

MARC FAUVELLE  
Il doit y avoir une forme de patriotisme sanitaire pour les vaccins ?  

FREDERIQUE VIDAL 
Le vaccin doit être un bien mondial. C'est une pandémie qui a touché l'ensemble des pays et nous devons faire montre de solidarité dans cette situation. Et donc c'est pourquoi au niveau européen, au niveau français, l'objectif est bien de produire un vaccin qui puisse être mis à la disposition de tous ceux qui en auront besoin pour être vaccinés. Vous voyez bien à quelle vitesse ce virus s'est propagé dans le monde. Ça n'aurait pas de sens de ne pas protéger l'ensemble de la population mondiale. 

MARC FAUVELLE 
Donc pour vous, pour être parfaitement clair, l'incident est clos à partir du moment où le président en France de SANOFI explique qu'il n'y aura pas de problème. 

FREDERIQUE VIDAL 
Je pense que les précisions ont été largement apportées par le groupe SANOFI dans son ensemble. 

MARC FAUVELLE 
Frédérique VIDAL, Emmanuel MACRON avait annoncé que les tout premiers résultats de l'essai européen Discovery, qui devait tester plusieurs traitements possibles pour les malades, seraient connus aujourd'hui, le 14 mai. Est-ce que ce sera encore le cas ?  

FREDERIQUE VIDAL 
Alors oui. Ce sont des résultats qui sont fournis au ministère des Solidarités et de la Santé. Il faut bien s'entendre sur ce qu'on entend par résultats. Le fait que les produits qui sont utilisés actuellement dans le traitement ne présentent pas de dangerosité, ne compliquent pas les cas cliniques, ce sont déjà des premiers résultats. Les doses, les meilleures doses a à utiliser pour les traitements, ce sont déjà des premiers résultats. Et dans cet essai, la France a inclus quasiment l'ensemble des patients qui étaient prévus dans l'essai Discovery… 

MARC FAUVELLE
 Oui, ce qui n'était pas prévu comme ça puisqu'on devait trouver 3 000 malades dans toute l'Europe ; finalement, on n'en a trouvé que 800 dont je crois la quasi-totalité - sauf un - qui sont Français. Certains scientifiques qu'on a entendus hier sur cette antenne parlent même d'un fiasco. 

FREDERIQUE VIDAL 
Non. En réalité, il faut bien comprendre que monter un essai européen, c'est quelque chose de totalement inédit. C'est la France qui a été leader dans le montage de cet essai puisque nous avons un dispositif en France qui permet de faire travailler l'ensemble des laboratoires, qui est le dispositif Reacting et c'est ce qui a permis de faire des inclusions en France beaucoup plus rapidement, mais évidemment les autres pays européens sont toujours à nos côtés pour cet essai et ils commencent à inclure des patients. Donc nous avons fait preuve… 

MARC FAUVELLE  
C'est tellement inédit, Frédérique VIDAL, qu'il n'existe pas cet essai européen aujourd'hui puisqu'il est franco-français.  

FREDERIQUE VIDAL 
Non, pas du tout puisque les patients commencent à être inclus. Vous savez, pour inclure des patients il faut commencer par monter un réseau entre différents médecins qui acceptent d'inclure les patients. L'inclusion d'un patient, c'est quelque chose qui se fait de façon rigoureuse en lui expliquant, en obtenant son accord. Les règles sont différentes dans les différents pays européens. Nous, grâce à Reacting, nous avons un dispositif qui était en place en cas d'épidémie et nous avons pu le mettre en place immédiatement. Dans les autres pays, il a fallu qu'ils s'organisent pour pouvoir participer à cet essai clinique européen, donc voilà. Les choses se poursuivent et, en tout cas, nous avons inclus le nombre de patients qui étaient prévus en France et nous avons donc environ 150 patients par bras. Et ce qu'Olivier VERAN va obtenir comme résultat de cet essai, c'est est-ce qu'on continue, à quelle dose et quel type de molécule. 

MARC FAUVELLE 
Frédérique VIDAL, vous êtes également ministre de l'Enseignement supérieur. Dans quelques jours, les étudiants dont on sait déjà qu'ils ne rentreront pas à l'université avant le mois de septembre, doivent passer leurs partiels de fin d'année. Ce sera des examens à distance pour tout le monde ?  

FREDERIQUE VIDAL 
Non, pas du tout. En fait, c'est les universités qui s'organisent pour faire passer leurs examens. Donc ce sera soit des remises de mémoire ou de projets, soit du contrôle continu, soit dans un certain nombre de cas des examens à distance. Mais les universités ont pris leurs dispositions de façon à pouvoir évaluer, dans des circonstances exceptionnelles, le semestre qui vient de se dérouler et durant lequel les enseignants et les enseignants chercheurs ont continué en innovant de façon incroyable et en testant de nouvelles façons d'enseigner à distance, malgré les difficultés. Et je tiens vraiment à leur faire remarquer à quel point, là encore, que ce soit au niveau scolaire ou au niveau supérieur, nous avons été capables de rapidement déployer ces formations à distance, en nous appuyant sur des outils que nous avions aussi au préalable et que nous avons développés extrêmement rapidement dans cette période.  

MARC FAUVELLE  
Pour les étudiants en médecine, c'est aussi la dernière année du fameux numerus clausus en fin de première année qui visait depuis des années à limiter le nombre de futurs médecins. Est-ce que vous avez fixé le chiffre pour cette dernière année ?  

FREDERIQUE VIDAL 
Alors oui. Les chiffres viennent d'être fixés. Donc c'est 9 361 pour l'entrée en médecine, 1 332 pour l'entrée en odontologie, 3 265 pour l'entrée en pharmacie et 1 039 pour la filière maïeutique.   

MARC FAUVELLE 
Ce qui fait un total de combien ? Pardon, je n'avais pas ma calculette devant moi.  

FREDERIQUE VIDAL 
Ce qui fait près de 15 000. 14 997 exactement. 

MARC FAUVELLE 
C'est davantage que les années précédentes ? C'est pour qu'il y ait davantage de médecins dans quelques années ?  

FREDERIQUE VIDAL 
Alors c'est davantage que les années précédentes. Depuis 2017, c'est plus 15 %. Le numerus clausus a augmenté de plus de 15 % mais c'est surtout ce qui se met en place à partir de cette année, avec les licences accès santé qui viennent compléter des dispositifs de parcours d'accès santé, et puis le fait que ce sera les universités en lien avec les régions, les ARS qui vont fixer en fait le nombre de médecins à former en fonction des besoins des territoires. C'est une véritable révolution. 

MARC FAUVELLE 
Ce sera la règle à présent. Merci à vous Frédérique VIDAL, ministre de l'Enseignement supérieur et de la Recherche. Bonne journée à vous. 


Source : Service d'information du Gouvernement, le 15 mai 2020