Texte intégral
SONIA MABROUK
Bonjour Jean-Michel BLANQUER.
JEAN-MICHEL BLANQUER
Bonjour.
SONIA MABROUK
Et merci d'être avec nous sur Europe 1 en ce lundi 11 mai qui marque une reprise inédite pour de nombreux enseignants. Tout d'abord de quelles remontées de terrain disposez-vous, comment sa mort c'est cette journée forcément particulière ?
JEAN-MICHEL BLANQUER
Eh bien c'est une journée d'amorce en effet puisque d'abord c'est une prérentrée dans la plupart des écoles, autrement dit c'est le jour où les professeurs se retrouvent pour préparer l'arrivée des enfants et en même temps on a la première remontée sur le nombre d'enfants qui viennent. C'est souvent au-dessus de 20 % cette semaine et c'est donc c'est une remise en marche en quelque sorte et pour l'instant ça se présente bien, même si par définition, c'est très différent des situations qu'on a l'habitude de connaître et on est dans quelque chose de tout à fait inédit.
SONIA MABROUK
Bien sûr c'est une reprise et pas une rentrée, un tiers des enseignants présents aviez-vous dit jeudi, cela a évolué à 50 % d'objectif de présence hier, est-ce le cas ce matin et quels objectifs fixés à la fin mai ?
JEAN-MICHEL BLANQUER
D'ici à la fin mais l'objectif c'est que tous les élèves soient à un moment donné revenu à l'école, alors évidemment on a des priorités et qui sont des priorités de niveau déjà. Les grandes sections, les CP, les CM2 en particulier et puis ensuite et de manière transversale des publics prioritaires qu'on a identifié qui sont des élèves en situation de handicap, les élèves qui sont en risque de décrochage scolaire et puis les enfants de certains personnels nous notamment les personnels soignants mais aussi d'autres comme les forces de sécurité intérieure ou les professeurs qui justement sont présents physiquement. Donc tout ceci donne lieu à des organisations spécifiques, école par école et cela commence à se mettre en marche, sachant qu'on essaye aussi d'avoir des organisations complémentaires en lien avec les communes en particulier notamment des activités de sport et de culture, pour que parfois quand on a la moitié de l'école qui est présente dans l'école, peut-être une autre partie des élèves puissent être en activité, tout en respectant les règles sanitaires bien sûr.
SONIA MABROUK
Bien sûr on va parler de cette présence, mais Jean-Michel BLANQUER est-ce que ce matin les enseignants, les personnels en contact avec les enfants disposent déjà et dès ce matin dans leurs établissements des masques fournis par l'Education nationale et des masques en nombre également ?
JEAN-MICHEL BLANQUER
Oui bien sûr ça fait maintenant à un certain nombre de semaines qu'on a préparé tout cela, donc on a acheté des masques pour l'ensemble de l'Education nationale qui sont acheminés dans toutes les écoles de France. Alors aujourd'hui c'est le jour justement de prérentrée où ils sont normalement distribués, il peut y avoir des problèmes de logistique ça et là dans quelques endroits, mais ça reste l'exception, sinon dans toutes les écoles de France le principe était la distribution des masques aux professeurs ce matin.
SONIA MABROUK
Monsieur le ministre de l'Education suite au foyer épidémique dans le collège de Chevigny dans la Vienne, département, il faut le rappeler, classé en vert, la rentrée du 18 mai a été reportée au 27, des équipes se sont rassemblées pour préparer cette rentrée, 4 cas positif au Covid d'abord est-ce que vous en savez plus sur ce foyer, comment y a-t-il eu contamination, les enseignants portaient-ils des masques, est-ce qu'ils respectaient la distanciation ?
JEAN-MICHEL BLANQUER
Sur ce point-là je n'ai pas les éléments, dès qu'il y a un foyer de ce type, c'est évidemment les autorités de santé qui sont en première ligne pour faire les analyses que nous attendons, mais les mesures qui sont prévues par le protocole sanitaire sont prises, c'est-à-dire fermeture comme vous venez de le dire et puis le travail à faire qui est notamment un travail de tests avec les personnes qui sont symptomatiques. Et puis ensuite le test de tout le monde même les assassins les asymptomatiques pour savoir pour savoir où on en et donc il n'y aura pas de réouverture tant qu'il y a pas de clarification bien sûr.
SONIA MABROUK
Et ça ce sera le protocole qui sera en vigueur s'il y a d'autres foyers dans des établissements, c'est-à-dire tester l'ensemble des employés qui travaillent dans les écoles, ceux de la commune ?
JEAN-MICHEL BLANQUER
Oui c'est d'ailleurs ce que l'on faisait dans, ce qu'on a fait dans les premiers foyers avant le confinement, comme dans l'Oise ou notamment quand il y avait un cas, eh bien l'ensemble des personnes contacts était testé et ça pouvait déboucher sur la fermeture d'une classe voire d'un établissement en fonction de l'analyse des autorités sanitaires.
SONIA MABROUK
Mais est-ce qu'il y a un risque, est-ce que vous craignez Jean-Michel BLANQUER d'autres cas de foyers épidémiques dans des établissements scolaires en France ?
JEAN-MICHEL BLANQUER
Ecoutez, vous savez on a accueilli 30 000 enfants de soignants pendant toute la période de confinement, donc dans des centaines d'écoles qui étaient restées ouvertes pendant toute la période de confinement, on n'a jamais été amenés à en fermer à cause de ça pendant cette période et on n'a pas noté de problèmes particuliers. Donc je crois qu'il faut évidemment être très prudent, c'est-ce qu'on fait, on a un protocole sanitaire qu'il est très strict, mais des problèmes de ce type vont rester extrêmement minoritaires et seront traités au cas par cas. Mais sur les milliers d'écoles que compte la France, c'est 50 000 écoles, plus de 50 000 écoles en France, je pense que ça restera extrêmement, extrêmement minoritaire.
SONIA MABROUK
Malgré tout il y a ce cas-là, comment ce matin rassurer les parents, pourquoi ne pas faire par exemple un dépistage systématique, à Marseille pour exemple les agents municipaux qui vont retrouver le chemin de l'école des crèches et autres bâtiments sont Jean-Michel BLANQUER dépistés sur la base du volontariat, est-ce que ce n'est pas une bonne idée pour rassurer les parents ?
JEAN-MICHEL BLANQUER
Alors il y a 2 éléments dans votre question, il y a d'abord, rappelons dans le cas que vous évoquez que ce n'est pas les enfants qui sont malades et que les études qu'on a quand même sont assez rassurantes, même si évidemment je sais tous la science progresse pas à pas sur ces sujets, mais les enfants. À la fois sont très peu symptomatiques et très peu contagieux d'après tout ce que nous savons. Mais en second lieu ce qu'il faut avoir en tête, c'est que tester tout le monde d'un coup à la sortie du confinement n'aurait aucun sens et ça les autorités de santé ont été très claires là-dessus, ce qui a du sens c'est quand quelqu'un est symptomatique le tester et ensuite tester toutes les personnes contacts. Il y a 700.000 tests qui vont être faits par semaine en France à partir de ce mois de mai et ils vont servir à ça, c'est-à-dire rompre les chaînes de transmission.
SONIA MABROUK
Certes, mais est-ce de nature à rassurer les parents, pouvez-vous affirmer de manière générale que le retour en classe est sans risque sur tout le territoire ?
JEAN-MICHEL BLANQUER
De façon, nous sommes dans une société où circule ce virus, c'est un fait, nous le savons, ce qu'a dit la société de pédiatrie française et de nombreux pédiatres justement, et scientifiques, c'est, il y a plus de risques à rester chez soi qu'aller à l'école, la société zéro risque n'existe pas, et donc aujourd'hui vous avez bien des risques quand vous allez dans la rue, quand vous vivez tout simplement. Donc aujourd'hui on a cette société avec le virus, si on raisonne a contrario on pourrait dire qu'on reste tous chez nous sur un canapé en attendant la découverte d'un vaccin, et la société s'effondrera pour bien d'autres raisons que le Covid-19, il y a des problèmes de virus…
SONIA MABROUK
Non, mais sans aller jusque-là vous ne dites pas qu'une rentrée en septembre, Monsieur le ministre, aurait été plus sécurisée, plus sereine, pour tous ?
JEAN-MICHEL BLANQUER
Je pense que non. D'abord, il y aurait certainement eu des problèmes de sortie des enfants qui peuvent tout à fait être comparables, et d'autre part les dégâts sociaux, et les dégâts même sanitaires, auraient été plus importants, c'est encore une fois ce que disent de nombreux pédiatres eux-mêmes. Vous avez des soins qui ne sont pas faits actuellement, vous avez des enfants qui ont des problèmes alimentaires, vous avez des enfants qui connaissent des violences intrafamiliales, tous ces sujets-là il faut les avoir bien à l'esprit, et puis pour tous les enfants, quelles que soient les classes sociales quelles que soient les difficultés, l'école ce n'est pas quelque chose de secondaire, c'est quelque chose de très important pour tous les enfants, et il faut être très attentifs à ne pas faire de dégâts sur une génération entière en les laissant 6 mois sans école, c'est particulièrement vrai des enfants de l'âge de l'école primaire. Et c'est mon devoir de ministre de l'Education que de garantir que ce droit à l'éducation ne soit pas considéré comme quelque chose de secondaire dans notre société, c'est fondamental, et bien entendu, à condition de respecter un protocole sanitaire très strict, c'est ce qu'on a fait, on a fait vraiment un protocole très strict, et d'ailleurs parfois on me le reproche, mais l'idée de tenir les deux bouts de la chaîne si je puis dire, c'est-à-dire, un, les garanties sanitaires, deux, le fait que l'école soit ouverte, avec évidemment une montée en puissance progressive.
SONIA MABROUK
L'école ouverte, et vous avez dit souhaiter, Jean-Michel BLANQUER, que chaque enfant, chaque enfant retourne à l'école au moins une fois avant la fin mai, mais quel en est le but, quel est l'objectif d'y revenir au moins une fois physiquement ?
JEAN-MICHEL BLANQUER
C'est le contact avec l'école. Vous savez, il y a beaucoup d'enfants, vous en avez peut-être dans votre entourage, qui disent que leur maîtresse leur manque, que les camarades manquent, etc., il y a toute cette dimension psychologique de sociabilité, d'affectivité, qui est très importante. Et puis il y a une dimension pédagogique, c'est-à-dire que l'enseignement à distance nous l'avons beaucoup, beaucoup développée, pendant la période de confinement, ça a plutôt bien réussi, on a les taux de satisfaction, aujourd'hui d'environ 75 % des familles, mais néanmoins ça a évidemment des limites, et donc même si on continue beaucoup l'enseignement à distance pendant cette période, puisqu'on est dans un moment mixte, il est important que ce soit, matinée d'un peu de présence physique à l'école pour reprendre contact, pour faire le point sur ce qui a été acquis pendant cette période, quels sont les manques, etc.
SONIA MABROUK
Bien sûr mais, Jean-Michel BLANQUER, en fixant cet objectif supplémentaire n'y a-t-il pas le risque de désorganiser tout ce qui a été fait, surtout que vous l'avez annoncé hier, cet objectif, et puis un risque sanitaire supplémentaire également ?
JEAN-MICHEL BLANQUER
Non, c'est un objectif induit par tout ce qui est fait par les uns et les autres, c'est-à-dire que, les organisations qui ont été réalisées, si on regarde la circulaire de reprise que j'ai adressée à tout le personnel de l'Education nationale, elle va dans ce sens, c'est-à-dire une forme de rotation, qui n'exclut pas des priorités, donc concrètement ça veut dire que, une bonne partie des enfants sont une partie du temps à l'école, certains y sont à plein temps, parce qu'ils sont dans les publics prioritaires, ou dans un niveau particulier, et puis d'autres qui y sont moins, soit parce que leurs parents l'ont décidé ainsi, soit parce qu'ils ne sont pas dans les publics prioritaires, mais en tout cas ils ont vocation à passer à l'école. Et, si vous voulez, moi mon principal souci c'est de faire revenir les enfants les plus éloignés de l'école, ceux qui sont défavorisés, ceux dont on n'a eu aucune nouvelle pendant la période de confinement, on les estime à environ 4 %, c'est beaucoup d'enfants, et c'est eux qui peuvent ensuite avoir des dégâts éducatifs et sociaux très graves pour la suite de leur vie, donc on doit les ramener à l'école, si possible physiquement, et au moins en rétablissant le contact avec eux. Donc j'attends beaucoup, si vous voulez, sur le plan social, de ce mois de mai, pour ce raccrochage à l'école, et par ailleurs nous travaillons pour que ces mois de mai et juin soient utiles pour tous les enfants, et adolescents aussi, parce que je n'oublie pas les collégiens et les lycéens…
SONIA MABROUK
D'ailleurs, avez-vous déjà une estimation, une prévision justement, sur les présences également dans les collèges à partir de 18 mai ?
JEAN-MICHEL BLANQUER
Alors, à partir du 18 mai on pense qu'on aura environ 30 % des collégiens, mais c'est encore trop tôt pour le dire, peut-être que ce sera un petit peu plus, on a des remontées, vous savez, en fin de semaine sur ce genre de chose, donc je serai capable de le dire de manière précise à la fin de cette semaine.
SONIA MABROUK
Pour conclure, Jean-Michel BLANQUER, on l'a bien compris, ce matin c'est une reprise, et simplement une reprise qui s'engage, une reprise conditionnée à la situation sanitaire dans notre pays, tout reste fragile, sous conditions également ?
JEAN-MICHEL BLANQUER
Oui, bien sûr, les choses sont fragiles, nous le savons bien, et c'est pour ça qu'on s'est donné un temps d'analyse et que c'est à la fin du mois qu'on verra si on ouvre davantage, notamment vers les lycées, je pense beaucoup aux lycées professionnels aussi, où justement se concentre une partie importante de la difficulté sociale, et se pilote en fonction des critères sanitaires et puis en fonction aussi de nos stratégies éducatives, mais ça nous met nous tous, Français, en situation de responsabilité, nous savons parfaitement que les choses sont difficiles, qu'elles nous obligent à beaucoup de, à la fois de créativité et de civisme, mais je crois pouvoir dire que cette semaine du 11 s'amorce de cette façon-là justement dans l'Education nationale, c'est-à-dire que, on se retrousse les manches, on fait les choses selon un protocole très défini, et en même temps on doit inventer de nouvelles manières avec les enfants, et il faut qu'il y ait un message éducatif au travers de ça, qu'il y ait à la fois notre bienveillance vis-à-vis de chaque enfant, bien les accueillir, parce qu'il y a une dimension psychologique très importante dans cette période, notamment pour certains enfants qui ont pu connaître des choses très dures pendant cette période, et puis pour tous, parce qu'il faut tous, en quelque sorte, reprendre le lien avec eux, et puis il y a une dimension donc de bienveillance très forte, et puis en même temps une dimension d'ambition pour nos enfants, qui est de faire que cette année scolaire leur soit bien utile. Et puis il y a des enseignements à tirer, il faut tirer des choses du côté du positif, parce qu'il y a des enseignements de civisme notamment…
SONIA MABROUK
Et c'est une semaine cruciale qui s'engage, merci Jean-Michel BLANQUER, je crois que vous serez d'ailleurs sur le terrain, dans une école ce matin.
JEAN-MICHEL BLANQUER
Oui, je ferai la prérentrée dans une école de Paris, tout à fait, et j'irai dans d'autres écoles cette semaine, bien sûr.
Source : Service d'information du Gouvernement, le 12 mai 2020