Extraits d'un entretien de Mme Amélie de Montchalin, secrétaire d'État aux affaires européennes, avec Public Sénat le 2 juin 2020, sur les frontières au sein de l'Union européenne face à l'épidémie de Covid-19 et les discussions concernant le plan européen de relance économique.

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Média : Public Sénat

Texte intégral

Q - Aujourd'hui j'accueille Amélie de Montchalin, secrétaire d'Etat aux affaires européennes, Bonjour Amélie de Montchalin.

R – Bonjour.

(…)

Q - Alors on va commencer par la situation internationale et les manifestations qui s'intensifient aux Etats-Unis après la mort de l'Afro-Américain George Floyd lors d'une intervention policière, le président américain Donald Trump a évoqué hier le recours à l'armée, il appelle à l'armée, est-ce que cette situation dans l'une des plus grandes démocraties au monde, vous inquiète ?

R- D'abord, la mort de George Floyd est une vraie tragédie et donc effectivement on est très préoccupé. On est en particulier très préoccupé par toutes les violences que l'on voit aujourd'hui à l'oeuvre et on voit bien qu'il est nécessaire aujourd'hui de tout faire pour qu'il y ait de l'apaisement, pour qu'il y ait de la justice et que cette grande démocratie puisse effectivement retrouver le cours d'un fonctionnement apaisé.

Q - Justement, est-ce que vous trouvez que Donald Trump réalise, eh bien, de l'apaisement dans cette situation, avec ses tweets multiples ?

R - Je ne vais pas commenter ici, vous voyez, les déclarations des uns et des autres, je pense que vraiment une démocratie comme celle des Etats-Unis doit pouvoir retrouver, avec l'action de tous, de l'apaisement, de la justice et, au fond, régler les questions profondes qui se manifestent par des violences aujourd'hui. Je crois que c'est plus par l'action, par le dialogue, qu'on peut traverser une telle période qui est une vraie tragédie humaine et, on le voit, qui pose beaucoup de questions sociales.

Q - Mais au-delà des déclarations, le recours à l'armée pour contrôler des manifestations, cela pose problème pour une démocratie comme les Etats-Unis.

R - Je pense que la clé, c'est stopper les violences et rouvrir une période d'apaisement, de dialogue, de justice. Je crois que les Etats-Unis en ont besoin et le monde entier accompagnera ce mouvement.

Q - C'est possible avec Donald Trump ?

R - Je crois qu'aujourd'hui il vaut mieux se focaliser sur ce qui se passe plutôt que de faire de la politique fiction.

(…)

Q - Une question sur les frontières. La question de l'ouverture des frontières entre pays européens, on s'achemine peut-être vers le 15 juin... ? Ou comment ça se passe, on a l'impression que tous les pays ne jouent pas la même partition et ne tirent pas dans le même sens ?

R - Alors déjà, on ne peut pas avoir une harmonisation totale sur ce sujet parce que le virus n'a pas circulé au même moment, n'a pas circulé de manière homogène et donc c'est normal qu'il y ait... qu'au fond chacun ait aussi une situation sanitaire à gérer qui ne soit pas exactement la même, qui n'est toujours pas la même aujourd'hui. Entre ce qui se passe en Italie, en Espagne, en France, en Belgique, Royaume-Uni, on est tous dans des situations assez différentes. La clé, c'est qu'on se coordonne et que personne ne prenne des mesures qui mettent en danger, vous voyez, la progression sanitaire positive des uns et des autres. Notre objectif avec Jean-Yves Le Drian, avec Christophe Castaner, avec Laurent Nunez, c'est d'assurer une coordination autour de nous, avec nos pays voisins. On y a beaucoup travaillé pendant les dernières semaines, les derniers mois. On s'achemine et on aimerait pouvoir effectivement suspendre la plupart, la majorité des contrôles, notamment, effectivement, avec cette date du 15 juin. On reste très vigilant, si les choses changent, il faut qu'on reste souple. Ce qui est clé pour moi c'est que je vais me rendre vendredi en Allemagne et à la frontière franco-allemande, entre la Moselle et la Sarre. C'est un lieu où il y a eu beaucoup de solidarité avec notamment les transferts des patients qui ont été accueillis en Allemagne. C'est un lieu où on travaille aussi beaucoup sur le bassin de vie frontalier pour que, notamment les travailleurs puissent passer les frontières, que les familles puissent aller rendre visite à leurs proches. Je pense notamment aux enfants, aux personnes âgées de part et d'autre et pour qu'effectivement on puisse le plus rapidement possible coordonner cette levée des contrôles et qu'on retrouve une circulation. Ça doit se faire avec la coordination.

Maintenant je vous dis, c'est normal qu'il n'y ait pas d'harmonisation parce que le virus ne nous a pas tous touchés pareil.

Q - Et puis, concernant le tourisme et notamment les vacances d'été, le gouvernement a beaucoup parlé de vacances bleues, blanc, rouge, est-ce que vous conseillez aux Français d'aller en vacances en France ou en Europe ?

R - Moi, je leur conseille, déjà, d'être prudents parce que la situation sanitaire, on l'a dit, nous appelle tous, d'ailleurs, à être prudents, à être aussi flexibles parce qu'il y a des choses peut-être qui ne se passeront pas exactement comme on le pensait. D'ailleurs on a tous été surpris par ce qui s'est passé. Le but sur le tourisme et c'est tout le plan qui a été présenté par Jean-Baptiste Lemoyne avec Jean-Yves Le Drian et le Premier ministre, c'est à la fois de faire revenir les Français dans des lieux touristiques en France, c'est de permettre à des Européens de venir chez nous, c'est de permettre aux Français de partir à l’étranger, c'est que tout le monde puisse passer des bonnes vacances. Après, effectivement, il faut qu'on soit prudent, il faut qu'on soit vigilant et donc peut-être que certaines destinations ne sont pas tout à fait adaptée à la situation ; mais le but c'est quand même qu'on rende cela possible.

C'est pour cela d'ailleurs qu'au niveau européen, on a une stratégie coordonnée des protocoles sanitaires à appliquer partout en Europe, pour que chacun, quand il part un peu plus loin de chez lui, trouve des choses qui soient harmonisées et qui lui donne confiance.

Vous savez le tourisme, c'est une part importante de nos économies, c'est aussi une part importante de notre rayonnement, de notre attractivité. Donc, le but c'est que tout ça reparte mais là aussi avec vigilance et prudence.

Q - Et justement de la relance économique on va en parler puisqu'il y a quelques jours la Commission européenne a présenté son propre plan de relance de l'économie européenne. Alors je vais le détailler brièvement, il y a 500 milliards d'euros de subventions aux Etats membres qui étaient d'ailleurs à l'initiative du plan franco-allemand. Il y a également 250 milliards d'euros de prêts. Et puis, ces fonds vont être intégrés dans un budget européen de relance, entre 2021 et 2027, qui s'élèvera à 1850 milliards d'euros. Ça y est, l'Europe est au rendez-vous ?

R - Alors, il faut reprendre effectivement les choses par étape et comprendre ce qui se joue aujourd'hui. Il y a en fait, deux grands enjeux devant nous. Il y a d'abord l'enjeu de rebond, de relance : comment on sort de cette crise économique ; comment on en sort ensemble ? On est extrêmement interdépendant les uns des autres, ça a fait notre prospérité, il ne faut pas que ça devienne une fragilité. Aujourd'hui, nous, si en France on continue, et on le fait beaucoup, d'aider nos entreprises, on ne peut pas leur inventer des clients et si ses clients sont en Italie, sont en Allemagne, sont en Espagne, en Slovaquie, ou je ne sais où, il faut que leurs clients puissent leur faire des commandes. Et donc, il faut que notre économie dans son ensemble reparte et cela, c'est le plan de relance. C'est au fond sa capacité à nous assurer un rebond et un rebond qui soit collectif, pour que ce soit un vrai rebond, parce que si on fait des rebonds chacun de notre côté, on va rebondir chacun moins loin que ce qu'on peut faire ensemble.

Et puis ensuite, il y aura tout un enjeu d'investissement : qu'est-ce qu'on veut faire en européens pour la décennie qui vient ? Comment face à la Chine, face aux Etats-Unis, on s'affirme ? Comment on protège notre agriculture, notre autonomie alimentaire ? Comment on protège notre industrie, le numérique ? Comment on met dans la voiture électrique, par exemple, des moyens ? Tous ces sujets-là, ce ne sont pas des sujets sur 18 mois ou 2 ans, ce sont des sujets sur une décennie. Et donc c'est là où on a effectivement bâti une ambition avec ce budget européen. C'est une négociation difficile que je mène maintenant depuis longtemps parce qu'elle était déjà lancée avant la crise. Elle devient d'autant plus urgente parce que ces enjeux de souveraineté, ils s'imposent plus que jamais à nous. L'initiative franco-allemande qui a eu lieu à ce titre, c'est probablement un des moments les plus importants du quinquennat. C'est un moment où la France et l'Allemagne se mettent d'accord, non pas sur le plus petit dénominateur commun, ils ne font pas une synthèse de leurs différences, mais ils disent : voilà la vision qu'on a pour l'Europe ; on veut une Europe qui soit souveraine sur la santé, on veut une Europe qui soit forte et en leader sur la transition écologique. On veut une industrie européenne qui puisse s'affirmer : mettons-y les moyens. C'est comme cela qu'on est arrivé aux 500 milliards et aussi à l'idée que ce budget européen jusqu'en 2027, il devait absolument être ambitieux et cohérent avec la transition numérique, la transition écologique et donc nous amener vraiment à penser en Européens notre puissance, notre crédibilité et notre souveraineté.

Q - Pour cela, il faut mettre les 27 Etats membres d'accords, c'est vous qui allez mener les négociations, être à la baguette sur ce dossier. Il y a quatre pays du Nord, les fameux frugaux, Pays-Bas, Autriche, Suède, Danemark à convaincre, eux, ils ne sont pas très chauds sur la partie subventions, comment allez-vous faire ?

R - Nous on cherche à avoir un accord avant début juillet, parce que si on parle de relance, ce n'est pas la peine d'arriver une fois que les choses seront finies, on a quand même besoin d'accompagner cette sortie de crise, donc il faut que les choses aillent vite.

Il y aura un sommet des chefs d'Etat et de gouvernement le 18 juin et effectivement on a quelques pays aujourd'hui qui prennent de la distance. Ils disent " s'il y a des pays qui ont besoin, on a qu'à donner à ceux-là seulement ".

Je prends un exemple : la Suède. La Suède c'est un pays, vous savez, qui n'a pas mené de même confinement que d'autres pays. Qui néanmoins, malgré ça, va avoir une chute de PIB de 7, 8% ou peut-être même plus, parce que c'est un pays extrêmement exportateur. Et donc, si les Suédois ont eux consommé, vécu je veux dire, peut-être plus normalement que nous qui avons connu un confinement plus ferme, plus strict, mais ils n'ont toujours pas de clients. Et donc ce que je dis à la Suède, c'est : ne nous lançons pas dans les débats théoriques, ne nous payons pas le luxe de prendre du temps sur des débats qui sont objectivement d'une autre époque, regardons les faits. Les faits c'est que vous, tous seuls, Suédois, vous aurez beau inonder votre économie d'argent, si les pays dans lesquels vos entreprises exportent ne repartent pas, eh bien votre économie ne repartira pas non plus.

Donc, je crois que cette idée qu'on n'est pas chacun une île et il y a des pays effectivement qui ont les moyens, mais leurs moyens seuls, c'est formidable pour eux, mais ça ne permettra pas de repartir si leurs voisins ne se portent pas mieux. Et c'est cette vision de notre interdépendance qui, aujourd'hui, fait que vous avez des pays qui évoluent et donc vous avez l'Autriche, le Danemark, la Finlande, les Pays Bas, qui aujourd'hui quand même voient bien qu'à eux seuls ils ne peuvent pas s'en sortir. L'Allemagne a fait ce chemin. L'Allemagne a une grande puissance financière. Pourquoi elle propose de mettre 500 milliards de subventions sur la table ? Parce qu'elle voit bien que l'économie dans son pays ne repartira pas si l'Italie ne repart pas, si l'Espagne ne repart pas, si les pays plus à l'Est de l'Allemagne ne repartent pas non plus. Et ils ont été très durement touchés par les conséquences de la crise sanitaire qu'on vient de connaître.

Q - Et justement dans la négociation sur ces 500 milliards de subvention, est-ce que la France peut faire des concessions et diminuer le montant de ces subventions ou alors est-ce que la France reste intransigeante ?

R - Mais nous, on n'en est pas là, on n'en est pas à faire des concessions, vous voyez bien, la souveraineté européenne, on ne va pas le faire à 80%. On le fait ou on ne le fait pas. Donc si je vous dis, on veut un plan dans l'aéronautique, on veut un plan pour l'électrification dans l'automobile, on veut un plan pour la transition énergétique, il faut le faire vraiment.

Si on se dit, on va regarder les besoins, par exemple, d'un secteur comme le tourisme, on vient d'en parler, il faut y mettre les moyens. Et donc aujourd'hui, on n'est pas dans l'ajustement des chiffres, on est déjà à se poser le principe selon lequel on est tous bien d'accord qu'on ne peut s'en sortir qu'ensemble, et que s'en sortir ensemble, cela veut dire mettre des moyens qui soient vraiment partagés.

La grande révolution, si je peux parler comme ça, c'est que nous rentrons dans un débat différent de ce qui était déjà maintenant le cas au niveau européen, qui était cette logique du juste retour. Je mets tant d'euros sur la table parce que je veux retrouver exactement le même montant. C'est le fameux "I want my money back" de Margaret Thatcher. Cela a beaucoup abîmé la logique européenne, parce que dans ce marché intérieur, il y a des choses dont on bénéficie qui ne sont pas exactement liées à combien on met chacun sur la table, c'est notre dynamique collective et je crois qu'aujourd'hui cette crise nous a montré combien on était interdépendant et donc combien on devait mettre ensemble pour repartir réellement économiquement, socialement et préparer l'avenir.

Q - Alors, cette relance passe par un budget européen plutôt ambitieux entre 2021 et 2027, Emmanuel Macron veut créer une Europe de la santé, souveraine sur le plan sanitaire. Concrètement, à quoi elle va ressembler ?

R - Il y a trois étapes. Il y a d'abord la capacité à faire de la veille, à être réactif, à suivre les épidémies, et on voit bien que cette capacité d'anticipation, si on avait pu l'avoir tous un peu plus au niveau européen, je pense qu'on aurait tous été dans de meilleures conditions. Donc ça, c'est cette première capacité. Ensuite il y a les questions de réduire notre dépendance à l'extérieur sur des produits essentiels, certains médicaments, on a parlé notamment des médicaments de réanimation, les équipements de protection, les masques, on pense qu'on a besoin de peut-être soutenir la relance d'une vraie économie de production de ces biens en Europe pour pouvoir en avoir sur notre continent, pour les exporter d'ailleurs, mais avoir les capacités de production chez nous.

Et puis, il y a un troisième volet qui est un volet de recherche. Être un continent qui sur les vaccins, sur le cancer, sur toutes les maladies de vieillissement... Eh bien, est un continent qui revient, j'allais dire, il est déjà très avancé, mais devient un vrai leader qui peut aussi proposer des solutions. Vous savez quand on dit que le vaccin, on aimerait en faire un bien public mondial contre le coronavirus, c'est d'autant plus facile à faire que vous avez chez vous la recherche, vous avez chez vous les moyens d'offrir ensuite ce genre de chose à des pays qui sont moins favorisés.

Q - L'autre enjeu de ce budget, c'est la relance verte, concrètement comment ça peut se mettre en place ?

R - Cela se met en place dans tous les secteurs. L'écologie, ce n'est plus ni l'apanage d'un parti et ce n'est plus un secteur en soi. Il faut qu'on réforme comment on produit notre alimentation, comment on se déplace, comment notre industrie fonctionne. Il faut qu'on réfléchisse aussi à nos importations, c'est pour cela que le président de la République - et on a fait beaucoup de progrès - défend ce qu'on appelle un mécanisme d'ajustement carbone aux frontières, une taxe carbone aux frontières. On ne peut pas mettre des normes extrêmement dures mais souhaitables sur un certain nombre de secteurs et puis continuer à importer des produits pour lesquels on ne ferait pas la différence du CO2 émis ailleurs.

Q - Justement c'est probable qu'il y ait une taxe carbone aux frontières bientôt ?

R - C'est dans le plan de la Commission. Beaucoup de pays nous ont rejoints. C'est d'ailleurs un sujet sur lequel dans les derniers mois on a fait énormément d'avancées parce qu'on voit bien qu'il y a une sorte de lucidité sur le fait que l'écologie, ce n'est pas un sujet juste de discours, il faut maintenant que ça rentre dans tous les domaines économiques. Et donc ce plan de relance dont je vous parle, ce budget européen, il a au moins 25% strictement dédiés au climat, mais l'intégralité de ces dépenses doit être cohérente avec cette transition. Et donc, c'est dans tous les domaines qu'on va investir fortement.

Q - Justement, parlons de fiscalité, car il va bien falloir à un moment financer cette relance et ce budget européen, est-ce qu'il va y avoir la création d'un impôt européen ?

R - Nous ce qu'on défend c'est qu'on ne peut pas indéfiniment faire peser l'effort sur les contribuables, entreprises ou particuliers, qui payent déjà beaucoup d'impôts, et qui vu la situation, on ne va pas les augmenter, mais on voit bien qu'on n'a pas de capacité à augmenter les impôts. Ce n'est pas ce qu'on cherche à faire, ce n'est pas du tout notre vision. On voit en revanche que certains ne payent pas assez d'impôts, je pense aux GAFA. En termes de justice fiscale on a quand même des gens qui vont bénéficier de la relance, qui vont bénéficier de tout ce qu'on va recréer comme économie, est-ce qu'on peut les mettre un peu plus à contribution ? C'est un objectif qu'on poursuit, et on fait des progrès, au niveau européen également. Je vous ai parlé des importations. La taxe carbone aux frontières c'est une bonne façon aussi de dire, "eh bien voilà, nous on a créé un espace économique de prospérité, vous nous importez des produits, pourquoi pas, maintenant il faut qu'on puisse regarder si en termes de CO2 on est cohérent." Donc, voilà le type de choses sur lesquelles on va pousser.

Ce qui est intéressant aujourd'hui, c'est que les lignes ont beaucoup bougé, moi je vois la situation il y a un an et demi et aujourd'hui. Beaucoup de ces débats-là sont devenus des débats, maintenant, intéressants, là où c'était des débats où chacun avait surtout des positions un peu de principes. Je crois qu'aujourd'hui tout le monde comprend bien l'importance d'avancer.

Q - Thierry Breton, commissaire européen au Marché intérieur, propose lui un impôt européen sur les grandes entreprises, sur 0,2% de leur chiffre d'affaires, en gros ça fait 10 milliards, qu'est-ce que le gouvernement en pense ?

R - Tout cela faut que ça se discute. Il faut aussi qu'il y ait une forme de cohérence. Parce qu'en France on a des efforts à faire, on le sait, sur les impôts de production. On veut relocaliser les activités en France. Il faut que tout ça on l'arbitre, on regarde aussi ce qui est pertinent dans chacun des pays. Donc, ce qui est sur la table aujourd'hui c'est effectivement, comment on finance un vrai effort collectif et comment, surtout, on met à contribution ceux qui vont bénéficier de la relance, et qui aujourd'hui n'y contribuent pas assez. Et moi j'ai surtout en ligne de mire, je vous dis, les activités polluantes, les GAFA, et bien sûr les importations de CO2.

Q - Donc, sur cet impôt sur les grandes entreprises, vous n'avez pas trop l'air d'accord ?

R - Ce n'est pas une question d'être d'accord ou pas, il faut qu'on comprenne comment ça s'organise et il faut qu'on comprenne comment aussi, dans notre stratégie nationale, ce genre de chose peut fonctionner en étant cohérent avec ce qu'on propose au plan national. L'Europe, elle n'est pas là pour imposer des choses, elle n'est pas là pour contraindre, elle est là pour que cela fonctionne mieux, et donc il faut qu'on comprenne comment cela peut s'organiser.

Q - Donc la position de la France n'est pas encore arrêtée...

R - Exactement, ce sont des arbitrages sur lesquels il faut qu'on travaille, mais nous on défend fondamentalement l'idée qu'il nous faut des ressources propres européennes et qu'on ne peut pas indéfiniment demander à des gens de payer des impôts, si d'autres, à côté, qui bénéficient de l'Europe, ne partagent pas, au fond, une partie de ce que cela coûte de faire marcher tout ça correctement.

(...).

Q - Merci beaucoup, Amélie de Montchalin, d'avoir été notre invitée politique dans "Bonjour chez vous."

R - Merci beaucoup.


Source https://www.diplomatie.gouv.fr, le 3 juin 2020