Texte intégral
LEA SALAME
Bonjour à vous, Agnès PANNIER-RUNACHER.
AGNES PANNIER-RUNACHER
Bonjour Léa SALAME.
LEA SALAME
Merci d'être avec nous en direct ce matin. Il y avait foule sur les terrasses de Paris et des grandes villes hier avec la réouverture des cafés et des restaurants. Avez-vous des remontées, est-ce que ça s'est bien passé, les mesures sanitaires ont-elles été respectées ou pas vraiment, comme on l'a vu dans de nombreuses images ?
AGNES PANNIER-RUNACHER
Je pense qu'il y a avait beaucoup d'engouement, alors, ça s'est très bien passé, c'est-à-dire que les gens étaient au rendez-vous, les gens se sont bousculés sur les terrasses, il va falloir que ça se régule en termes de distanciation sociale et de mesures sanitaires, mais j'ai toute confiance sur ça, parce que ça va se mettre en place assez rapidement. Mais ce que ça veut dire, c'est que pour les commerçants, c'est une très bonne nouvelle, c'est une très bonne nouvelle, et on voit que la consommation a envie de repartir, j'ai des chiffres par exemple dans l'ameublement où les professionnels de l'ameublement me disaient : le week-end du 25 mai, j'avais déjà fait mon mois de mai de l'année dernière, donc il y a de l'attente, il y a de l'envie de la part des Français.
LEA SALAME
Donc il y a, d'une certaine manière, des bonnes surprises dans le commerce, c'est-à-dire, avec l'ouverture des magasins le 11 mai, vous voyez, vous sentez que la consommation repart, vous pouvez le dire comme ça ce matin ?
AGNES PANNIER-RUNACHER
On le sent, on n'a pas de chiffres précis, donc il faut être prudent, mais on sent qu'il y a une envie de repartir, les gens se bousculent aussi sur les concessions automobiles, puisque j'étais en visite hier pour le plan automobile et les annonces de primes à la conversion dans une concession, et là aussi, ils ont été obligés d'élargir les horaires pour accueillir les personnes. Donc ça, c'est un très bon signal, et nous allons l'appuyer, l'accompagner, puisque le président de la République souhaite que nous travaillions sur un plan commerçants, petits commerces, artisanat indépendant, que nous allons préparer pour le début du mois de juillet.
LEA SALAME
Donc début du mois de juillet plan pour le commerce, pour le petit commerce ?
AGNES PANNIER-RUNACHER
Exactement, exactement, qui va être présenté par le président de la République…
LEA SALAME
Savez-vous combien de cafés et de restaurants ne pourront pas rouvrir au creux de la crise, les professionnels du secteur évoquaient la fermeture définitive de 25 % des restaurants, c'est énorme, c'est 1 sur 4, est-ce que ce scénario est trop catastrophiste ou c'est à peu près la réalité ?
AGNES PANNIER-RUNACHER
Ce scénario est probablement à ce stade trop catastrophiste, mais il est vrai qu'il va falloir accompagner particulièrement ce secteur, et c'est pour ça que nous avons pris des mesures massives, c'est pour ça qu'aujourd'hui, c'est avec, tous les métiers du tourisme, l'un des secteurs qui va être le plus accompagné, puisque le fonds de solidarité est prolongé jusqu'à la fin du mois de décembre, et les mesures de soutien sont plus importantes que pour d'autres secteurs.
LEA SALAME
Alors, c'est vrai, vous avez mis de l'argent sur la table, si j'ose dire, et pourtant, le torchon brûle, pas entre vous et les restaurateurs, mais entre les restaurateurs et les assureurs, les premiers reprochent aux assurances de ne pas vouloir prendre en charge les pertes dues au Covid, la puissante Union des métiers et des industries de l'hôtellerie menace ce matin, information France Inter, de constituer ses propres contrats d'assurance ; que leur dit la ministre : faites-le, faites vos propres contrats d'assurance ou on va tordre le bras aux assureurs un peu plus ?
AGNES PANNIER-RUNACHER
Alors, d'abord, on a beaucoup travaillé à tordre le bras, comme vous le dites, je ne sais pas si le terme est d'ailleurs approprié, mais en tout cas, faire participer chacun à cet effort considérable dont nous avons besoin aujourd'hui dans la situation de crise dans laquelle nous sommes. Donc les assureurs ont mis 400 millions d'euros sur la table pour le fonds de solidarité, ils ont promis des investissements à hauteur de 1,3 milliard dans l'économie…
LEA SALAME
On en espérait beaucoup plus…
AGNES PANNIER-RUNACHER
Mais effectivement, il y a une tension, et un certain nombre de travaux ont été lancés sur les assurances, et en particulier sur les assurances par rapport à des catastrophes de type sanitaire, parce que ce type de contrat existe de manière très réduite, j'étais moi-même au Sénat hier pour répondre à une proposition de loi des Républicains sur le sujet, et en fait, nous adhérons à l'idée qu'il faut un mécanisme particulier d'assurance dans ce type de circonstances, ce mécanisme, il ne peut pas mettre en jeu que les assureurs ; l'impact d'une crise sanitaire est tellement massif, je veux dire, on parle de 120 milliards d'euros de pertes d'exploitation, tellement massif, que ce n'est pas en mettant une petite prime complémentaire dans les contrats d'assurance, que devront payer les entreprises, que le jour où une crise arrivera, on sauvera la mise, donc il faut inventer un mécanisme de solidarité nationale, comme pour les catastrophes naturelles.
LEA SALAME
Le secteur de l'automobile souffre, et particulièrement RENAULT, que l'Etat va aider, vous vous êtes engagé depuis hier, ça y est, c'est fait, à garantir un prêt bancaire de 5 milliards d'euros à RENAULT, et pourtant, RENAULT a annoncé qu'il y aura 4.600 suppressions de postes, un plan qui était déjà en gestation avant la crise du Covid ; l'Etat doit-il soutenir une entreprise qui supprime autant d'emplois ?
AGNES PANNIER-RUNACHER
Dans l'économie, vous savez, on n'est pas dans le déni, moi, j'ai été trop marquée dans ma jeunesse par les suppressions d'emplois dans la sidérurgie et le textile où on commençait par dire : il ne va rien se passer, et finalement, on regardait partir des pans entiers d'économie, aujourd'hui, ce que nous faisons, c'est que nous accompagnons RENAULT dans une des plus graves crises de son histoire. Et pour se faire, il faut accepter qu'il y ait une partie de restructuration, je vais être très claire, d'abord, ce sont des postes qui sont supprimés, ce n'est pas des personnes qui partent, ce n'est pas des personnes qui sont mises au chômage du jour au lendemain…
LEA SALAME
Il n'y aura pas de licenciements secs, a promis Jean-Dominique SENARD, est-ce que vous prenez l'engagement qu'il n'y aura pas de licenciements secs chez RENAULT ?
AGNES PANNIER-RUNACHER
Surtout, je lui renvoie cet engagement, et je lui dis : tenez cet engagement, nous l'avons poussé dans ses retranchements et nous avons poussé RENAULT pour qu'il reconsidère de manière très claire, par exemple, la question de Maubeuge, il y a eu une réunion, hier, au niveau de Bruno LE MAIRE pour dire : Maubeuge, il faut qu'il y ait des activités au-delà de 2023, faites-nous des propositions, c'est l'usine la plus compétitive de France, on ne comprendrait pas que cette usine n'ait pas un avenir.
LEA SALAME
Donc Maubeuge ne fermera pas après 2023 ?
AGNES PANNIER-RUNACHER
Eh bien, c'est l'objectif…
LEA SALAME
C'est en tout cas ce que l'Etat dit clairement à RENAULT, que Maubeuge ne doit pas fermer, non, mais pour être clair, parce que Jean-Dominique SENARD a dit : Maubeuge ne fermera pas aujourd'hui et jusqu'en 2023, mais après ?
AGNES PANNIER-RUNACHER
Eh bien, précisément, nous, nous leur disons, nous prenons nos responsabilités de notre côté, à vous de nous proposer le plan qui permet, puisque c'est votre engagement, de ne pas faire de licenciements secs et de donner un avenir aux sites qui effectivement sont aujourd'hui les plus compétitifs.
LEA SALAME
Agnès PANNIER-RUNACHER, vous baissez votre salaire de 20 % ou vous êtes licencié, c'est l'ultimatum lancé par la direction de RYANAIR à ses pilotes et à ses hôtesses, une telle proposition, un tel deal vous choque-t-il ?
AGNES PANNIER-RUNACHER
Si, je dirais, les personnels de RYANAIR étaient payés 30 % de plus que le marché, s'ils étaient payés plus que les personnels d'AIR FRANCE, le personnel de la LUFTHANSA, je pourrais entendre ce point-là, je pourrais entendre : écoutez, on a un problème structurel, et ça suppose de revoir notre modèle pour être à peu près comme les autres, c'est-à-dire avec un contrat social qui est acceptable, je ne suis pas sûre que soit la situation. Et donc c'est du chantage, et cela ne me paraît pas acceptable, en revanche…
LEA SALAME
Oui, c'est ce que j'allais vous dire, vous dites : c'est du chantage, mais sauf que c'est une petite musique qu'on commence à entendre dans d'autres entreprises, et Muriel PENICAUD, elle-même, elle dit aux entreprises en difficulté : ne licenciez pas, mais…
AGNES PANNIER-RUNACHER
Trouvez des accords, mais…
LEA SALAME
Trouvez des accords, est-ce que c'est ça, non mais, est-ce qu'il faut préparer les Français, soyons honnêtes, est-ce qu'il faut préparer les Français à ce que dans les entreprises, on dise aux syndicats : il faut que vous acceptiez de baisser vos salaires, si vous voulez qu'on ne vous licencie pas ?
AGNES PANNIER-RUNACHER
Léa SALAME, vous savez, ça fait 18 mois que je suis des dossiers d'entreprises en difficulté, les solutions pour sauver une entreprise en difficulté, elles sont diverses mais elles reposent toujours sur une notion, il faut que tout le monde fasse un effort, cet effort, ce n'est pas nécessairement les salaires, ça peut être l'organisation du travail du côté des salariés, ça peut être aussi les gros salaires qui baissent, pourquoi on ne parle pas des gros salaires qui baissent, quand vous êtes payé au niveau du SMIC ou à 1,5 fois le SMIC, l'impact d'une baisse des salaires n'est pas nécessairement extraordinaire…
LEA SALAME
Il faut que les gros salaires dans les entreprises baissent ?
AGNES PANNIER-RUNACHER
On pourrait très bien imaginer des accords de performance, où chacun apporte quelque chose, un peu d'heures de travail en plus, des modifications de salaires, mais c'est aussi aux actionnaires de prendre leurs responsabilités, c'est aussi aux créanciers de prendre leurs responsabilités, et c'est à l'Etat, et c'est ce que nous faisons. Donc il n'y a pas une seule recette pour sauver une entreprise, les accords de performance, ce sont de bonnes pistes, parce que ça met tout le monde autour de la table…
LEA SALAME
Les accords de performance, c'est : on fait un deal pour baisser les salaires, pour éviter…
AGNES PANNIER-RUNACHER
On fait un deal, pas nécessairement pour baisser les salaires…
LEA SALAME
Pour sauver des emplois…
AGNES PANNIER-RUNACHER
On essaie de trouver une façon de sauver les emplois.
LEA SALAME
C'est une piste privilégiée par le gouvernement.
AGNES PANNIER-RUNACHER
C'est une piste qui fonctionne, parce qu'on a eu longtemps la préférence du licenciement sur ce type de négociations qui sont plus compliquées, mais qui sont à terme plus créatrices d'emplois.
LEA SALAME
Deux questions rapides pour terminer, d'abord, la question de la 5G, la bataille fait rage entre les différents distributeurs pour savoir comment seront distribuées les bandes de fréquence, et surtout, quand. Les discussions ont été reportées à cause du Covid. FREE veut les reprendre en juillet, ORANGE, en septembre, BOUYGUES, en janvier, vous avez tranché ?
AGNES PANNIER-RUNACHER
On va trancher, mais ce que je veux dire, c'est que la 5G, ce n'est pas un gadget, c'est une priorité industrielle, c'est extrêmement important parce que c'est ça qui va permettre aux entreprises industrielles de communiquer entre elles et d'être plus compétitives, donc ce n'est pas la basket connectée, comme je l'ai entendue sur cette antenne, hier…
LEA SALAME
François RUFFIN, hier…
AGNES PANNIER-RUNACHER
Ça n'a rien d'un gadget, et aujourd'hui il faut déployer la 5G le plus rapidement possible en étant efficace et en l'orientant vers les entreprises…
LEA SALAME
Le plus rapidement possible, ça veut dire juillet, les négociations vont reprendre ?
AGNES PANNIER-RUNACHER
Ça, c'est à l'ARCEP de le dire parce que le sujet…
LEA SALAME
Mais vous souhaitez que ce soit rapide, c'est ça que je veux dire…
AGNES PANNIER-RUNACHER
Moi, je souhaite que ce soit rapide, et après, il faut le faire de manière organisée, c'est-à-dire, il n'est pas besoin de mettre inutilement une pression si c'est pour de bonnes raisons.
LEA SALAME
Allez, dernière question, vous êtes candidate à Paris dans le 16ème aux municipales, ça y est, les listes ont été déposées hier, que voit-on, qu'à Lyon, Gérard COLLOMB s'est allié avec la droite de Laurent WAUQUIEZ, mais aussi à Strasbourg, à Bordeaux, à Clermont-Ferrand, à Tours, à Rouen, les candidats La République En Marche se sont alliés à la droite pour faire barrage aux écologistes et à la gauche. Est-ce la fin du « Et en même temps », est-ce une clarification nécessaire, au fond, la Macronie est plus compatible avec la droite ?
AGNES PANNIER-RUNACHER
Bien au contraire, je pense que c'est le signe qu'on est capable de faire du « En même temps », c'est-à-dire de s'allier avec la droite, on ne parle pas des quelques alliances que nous avons sur le terrain avec par exemple les listes de Cédric VILLANI, on ne parle pas des rapprochements qui ont été faits dans d'autres villes, qui ne sont peut-être pas traduits par une fusion, mais des soutiens
LEA SALAME I
l n'y a que Dreux apparemment, à gauche…
AGNES PANNIER-RUNACHER
Et Aix-en-Provence aussi, où la candidate appelle à un large rassemblement, donc le « En même temps », il est plus que jamais nécessaire, c'est ce qui fait notre diversité, et moi, c'est ce qui m'a fait rentrer en politique.
LEA SALAME
Merci Agnès PANNIER-RUNACHER d'avoir été avec nous. Bonne journée à vous.
AGNES PANNIER-RUNACHER
Merci beaucoup.
NICOLAS DEMORAND
Merci Léa, et rendez-vous tout à l'heure.
Source : Service d'information du Gouvernement, le 4 juin 2020