Interview de M. Alain Griset, ministre chargé des petites et moyennes entreprises, à Sud radio le 10 juillet 2020, sur les efforts du gouvernement en faveur des petites et moyennes entreprises.

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Média : Emission La Tribune Le Point Sud Radio - Sud Radio

Texte intégral

CECILE DE MENIBUS
07H47, bienvenue ! « Le petit-déjeuner politique » ce matin, Alain GRISET, qui est ministre délégué auprès du ministre de l'Economie, des finances et de la relance et chargé des Petites et Moyennes Entreprises.

PATRICK ROGER
Oui, bonjour Alain GRISET.

ALAIN GRISET
Bonjour.

PATRICK ROGER
Vous êtes donc le nouveau ministre. Deux mots avant de démarrer, d'ailleurs sur votre parcours, vous venez du monde des petites entreprises et des artisans que vous connaissez parfaitement bien, au passage, vous vous êtes construit vous-mêmes aussi à force de travail, fils de métallo devenu ensuite chauffeur de taxi. Vous vous sentez donc légitime, loin des regards technos pour mener les petites entreprises aujourd'hui ?

ALAIN GRISET
Ecoutez, en tout cas, on a à toujours apprendre, et je pense assez bien connaître ce secteur des entreprises, mais néanmoins, je resterai à l'écoute de ces entreprises, d'ailleurs, aujourd'hui je vais rencontrer des collègues sur le terrain.

PATRICK ROGER
Oui, alors c'est ça. Alors, Alain GRISET, vous arrivez à un moment critique quand même aussi, est-ce qu'il faut redouter les semaines à venir pour les petites entreprises françaises ?

ALAIN GRISET
Eh bien, globalement, toutes les statistiques démontrent que les prochaines semaines, prochains mois risquent d'être difficiles, mais il faut surtout avoir la perspective de l'après et donner des perspectives positives tout en disant que le gouvernement va écouter et s'adapter aux besoins des entreprises, parce que ça a été fait très bien pendant 4 mois, on l'a bien vu, les mesures ont permis quand même de maintenir le tissu d'entreprises, il faut continuer et trouver les bons outils pour répondre aux besoins de chacun.

PATRICK ROGER
Alors c'est ça, qu'est-ce qu'il faut alors justement, qu'est-ce que vous allez pouvoir proposer… il y a eu les mesures d'exonération, de report de charges, quelle va être la suite, là, Alain GRISET ?

ALAIN GRISET
Eh bien, on le voit bien, il y avait 4 piliers qui ont été ouverts, le fonds de solidarité, les cotisations sociales, l'activité partielle, et puis, le fait de regarder si dans tel ou tel secteur, il y a des besoins particuliers. Je crois que, aujourd'hui, on est dans une période de reprise, la reprise dans certains secteurs est correcte, dans d'autres plus fragile, et donc il faudra s'adapter pour répondre à tous les besoins, c'est ça, l'objectif du gouvernement, c'est de répondre à chacun pour qu'on trouve des solutions adaptées.

PATRICK ROGER
Oui, est-ce qu'il faudra, pour sauver des petites entreprises, pérenniser cette annulation de charges pour certaines, il y en a qui la réclament un petit peu…

ALAIN GRISET
Oui, vous voyez, bon, dans le PLFR 3, là, il va y avoir des décisions pour confirmer les exonérations de cotisations sociales dans certains secteurs. Bruno LE MAIRE avait dit aussi que, au-delà de ces secteurs, les cas particuliers seraient regardés de façon à pouvoir justement accompagner ceux qui en ont le plus besoin, et en fonction de l'évolution de la situation, naturellement, nous regarderons pour voir si cette solution-là est la meilleure.

PATRICK ROGER
Qu'est-ce qu'on vous demande à vous, Alain GRISET, je ne sais pas si vous avez eu au téléphone Emmanuel MACRON, que vous connaissez bien, ou pas ?

ALAIN GRISET
Non.

PATRICK ROGER
Non ?

ALAIN GRISET
Je ne l'ai pas eu au téléphone.

PATRICK ROGER
Non, ah, vous l'avez vu directement ?

ALAIN GRISET
Non, mais le président, il y a eu le Conseil des ministres, mais depuis, il n'y a pas eu d'appel téléphonique, mais la ligne de conduite est très claire, le Premier ministre l'a rappelée ; il faut être à l'écoute, il faut être réactif, il faut prendre des mesures qui soient adaptées pour avoir des résultats.

PATRICK ROGER
Parce que les PME vont être au coeur du plan de relance ?

ALAIN GRISET
Je pense que c'est important, mais toutes les entreprises, moi, naturellement, j'ai en charge les petites entreprises, les PME, mais je pense que l'économie, c'est l'ensemble des entreprises, on a besoin de grandes entreprises, on a besoin de petites entreprises, de moyennes, c'est comme ça que l'économie française sera forte.

PATRICK ROGER
Oui, c'est ça. Et pour l'emploi des jeunes, est-ce qu'on va aussi vers l'exonération, qu'on avait évoquée, de charges ?

ALAIN GRISET
Eh bien, il y a déjà eu des mesures qui ont été prises pour l'apprentissage pour les jeunes…

PATRICK ROGER
Alors, on rappelle pour l'apprentissage…

ALAIN GRISET
C'est 5.000 euros pour les mineurs, c'est 8.000 euros au-dessus, en gros, pour un chef d'entreprise, c'est-à-dire le fait de prendre un apprenti, relativement, ne coûte quasiment rien à peu de choses près, eh bien ça coûte le temps qu'on va y passer pour le former, mais en termes d'argent, ça ne coûte quasiment rien.

PATRICK ROGER
Et là, ça commence à porter ses fruits ou pas, ou est-ce que vous avez déjà des premières indications ?

ALAIN GRISET
La mesure prenait effet au 1er juillet, donc je pense qu'il y a beaucoup de collègues qui ont un peu attendu la mise en oeuvre de la mesure pour se déterminer, bon, dans les secteurs qui sont ceux dont je suis en charge, l'apprentissage est quelque chose de naturel, dans l'artisanat, dans le commerce, bon, néanmoins, on voit bien que pour nos collègues, ça n'a pas été la première priorité ; la première priorité, ça a été de reprendre l'activité. Et là, il faut les mobiliser pour qu'ils se mettent à avoir une perspective positive et prendre des apprentis, moi, je les encourage à le faire, parce que, d'abord, il y a une sorte de devoir civique d'accompagner les jeunes, et puis, c'est aussi l'avenir qu'ils préparent, leur avenir à eux d'avoir des salariés, la reprise d'entreprises, et ce phénomène positif de transmission des savoir-faire, c'est essentiel.

PATRICK ROGER
Est-ce que vous avez le sentiment qu'il y a eu un phénomène autour de la création de l'entreprenariat ces dernières années en France, bien souvent, aussi, c'est parce qu'il n'y avait plus de boulot et de travail en fait dans des entreprises et qu'on conseillait, est-ce que vous allez encourager ce mouvement, et que, aujourd'hui, avec la crise ça fragilise quand même un petit peu ce secteur ?

ALAIN GRISET
Globalement tous les secteurs sont touchés, mais l'esprit d'entreprise est quelque chose qui s'est beaucoup développé, bon. Vous comprenez qu'avec mon parcours, je ne pourrai dire à personne qu'il ne faut tenter de se mettre à son compte, c'est quelque chose qui est valorisant, qui permet, je veux dire, de faire ce qu'on aime, ce qui est tellement important, et ça donne des perspectives aussi d'autonomie. Et je pense que l'esprit d'entreprise est quelque chose qui est positif, et puis, cette crise a démontré quelque chose, c'est que l'entreprise doit être prioritaire, quand il n'y a pas d'entreprises qui fonctionnent, comment on peut avoir de la protection sociale, comme on peut développer la protection des Français ; donc il faut de l'entreprenariat, et tous ceux qui créent leur entreprise, on doit considérer, voilà, que ce sont des hommes et des femmes qu'il faut accompagner, qu'il faut protéger, parce qu'ils sont essentiels, quelle que soit leur taille. Vous créez une entreprise, vous avez une personne au début, bon, il y en a qui restent seuls, et c'est respectable, d'autres se développent, et toutes les entreprises importantes ont commencé petit…

PATRICK ROGER
Il y a beaucoup de petites entreprises qui hésitent quand même aussi à aller recruter aujourd'hui, parce que elles se disent : oui, on est dans une situation qui est un peu difficile et c'est compliqué, si on embauche, derrière, on peut être un petit peu bloqué, quoi, et qui préfèrent ne pas embaucher. Quels conseils vous avez à leur donner, qu'est-ce vous allez pouvoir mettre en place ?

ALAIN GRISET
Il peut y avoir cette interrogation, elle est légitime…

PATRICK ROGER
Mais elle existe…

ALAIN GRISET
Elle existe…

PATRICK ROGER
Tous les jours, on voit des petits chefs d'entreprise qui nous racontent…

ALAIN GRISET
Et elle a toujours existé. Le fait d'embaucher, ça veut dire quoi, ça veut dire d'abord qu'il y a du travail, parce que quand on crée son entreprise, on n'embauche pas s'il n'y a pas de travail, et donc la perspective d'une embauche, c'est un engagement pour un chef d'entreprise, ensuite, il y a un tas de personnes qui considèrent que le fait de travailler seules est bien, parce que je rappelle quand même qu'il y a la moitié des entreprises d'hommes et de femmes qui travaillent seuls, ensuite, on voit bien qu'il y a un cercle vertueux dès qu'il y a la première embauche, après, ça peut continuer, bon, donc moi, j'encourage les collègues qui le peuvent à embaucher, mais ceux qui travaillent seuls qui gagnent leur vie, qui paient des impôts, qui paient des cotisations, c'est aussi bien pour la France.

PATRICK ROGER
Le Premier ministre a reçu hier les partenaires sociaux, ils ont évoqué la réforme des retraites, la relance des réformes des retraites notamment, elle ne doit pas être une priorité pour certains partenaires sociaux, qu'est-ce que vous en pensez, vous, Alain GRISET ?

ALAIN GRISET
Eh bien, vous savez, il y a quelques semaines, j'étais parmi les partenaires sociaux, au titre de l'U2P, j'avais rencontré le Premier ministre ; c'est vrai que, globalement, les partenaires sociaux disaient : nous n'avons pas demandé cette réforme des retraites, c'était ce qui était dit. Néanmoins, on disait, virgule, on considère quand même qu'il est nécessaire d'avoir une réforme, parce que le dispositif, globalement, n'est pas juste, tout le monde constate, et il y a naturellement la perspective de l'équilibre financier, bon, le Premier ministre a indiqué qu'il souhaitait reprendre ce dossier, je crois que les partenaires sociaux, à un moment donné où il y a cette décision, travailleront avec le Premier ministre pour trouver des solutions…

PATRICK ROGER
C'est un peu explosif, non, est-ce que c'est le moment de relancer ça, il y a d'autres priorités, comme vous l'avez dit, autour de l'emploi ?

ALAIN GRISET
Mais tout est prioritaire, là, il y a…

PATRICK ROGER
Eh bien, oui, mais il faut dégager des priorités quand même, Alain GRISET…

ALAIN GRISET
J'entends bien, mais la priorité, c'est effectivement l'économie développant la protection des entreprises, mais il y a aussi le fait qu'on risque d'avoir un déficit extrêmement important au niveau des retraites, et donc il faut aussi garantir l'avenir.

PATRICK ROGER
Vous êtes un ancien artisan taxi, je l'ai dit tout à l'heure, il y a une guerre ouverte, là, en ce moment, entre les VTC, et puis, les des taxis beaucoup plus classiques ; est-ce que vous, vous allez intervenir dans ce dossier, je pense notamment du côté de Paris où les VTC reprochent à Anne HIDALGO de ne pas laisser les grandes artères pour ces VTC ?

ALAIN GRISET
Vous savez que ça, c'est la compétence du ministère des Transports, VTC, taxis…

PATRICK ROGER
Non, non, bien sûr, mais vous avez votre petite idée quand même là-dessus aussi…

ALAIN GRISET
Ça serait surprenant que je ne connaisse pas le secteur, mais néanmoins, ce sont pour beaucoup d'entre eux des artisans, bon, mais en termes de réglementation, c'est le ministère des Transports qui va regarder ça, je veux dire, ce n'est pas tout à fait nouveau, lors de la création des VTC en 2009, il y avait eu effectivement dans le taxi un peu d'émotion, les choses se sont un petit peu stabilisées, bon, je pense qu'il y a possibilité de trouver des solutions, le principal, c'est que chacun respecte l'objectif de…

PATRICK ROGER
Oui, mais il y a une chasse en fait aux voitures, et puis, par-là même aussi des VTC dans les villes, non, actuellement ?

ALAIN GRISET
Non, il y a nécessité que chacun respecte la réglementation, le taxi a une réglementation spécifique, le VTC également, je crois que si chacun respecte, déjà, on fera un grand progrès, ce qui n'est pas toujours le cas pour l'instant.

PATRICK ROGER
Alain GRISET, la question de la fin avec Cécile de MENIBUS.

CECILE DE MENIBUS
On a eu hier un artisan en ligne qui fait partie de la confédération des artisans et des petites entreprises du bâtiment qui, visiblement, discute régulièrement avec vous par SMS, et il se disait hier : est-ce que le ministre va encore aller sur le terrain, est-ce qu'il va encore venir nous voir, est-ce qu'il va encore nous laisser la possibilité d'échanger avec lui, et donc, voilà, j'en profite pour vous poser cette question…

PATRICK ROGER
Est-ce que vous serez encore accessible…

ALAIN GRISET
Ecoutez, alors là, si ce n'est pas le cas, qu'ils me le disent, que mes collègues me le disent, la meilleure preuve, c'est que ce matin même…

CECILE DE MENIBUS
Vous n'avez pas changé de numéro ?

ALAIN GRISET
Ce matin même, je vais faire mon premier déplacement dans le Nord, et j'ai demandé à mon cabinet de prévoir tous les semaines une journée et demie de déplacement partout. Moi, j'ai la chance d'être sûrement le ministre qui a le plus de possibilités de rencontrer sur le terrain les entreprises, il y en a partout, et il y a des sujets tellement nombreux que je n'ai que l'embarras du choix pour choisir le sujet et le terrain. Et donc naturellement, je l'ai toujours fait dans mes différentes fonctions, et je continuerai à le faire, pour moi, c'est essentiel, et écouter nos collègues pour prendre les bonnes décisions.

CECILE DE MENIBUS
En tout cas, il vous a félicité hier et vous ne lui avez pas répondu, donc voilà, c'est pour ça…

PATRICK ROGER
Bon, alors, voilà, Alain GRISET, mais il ne peut pas répondre à tout le monde encore, mais il va le faire…

CECILE DE MENIBUS
Il a dû avoir tellement de messages…

ALAIN GRISET
Presque 1.000 messages, il m'en reste encore 500 à répondre, mais je répondrai à tous…

PATRICK ROGER
Eh bien, ce week-end, vous allez avoir un petit peu de temps…

ALAIN GRISET
Exactement.

CECILE DE MENIBUS
Voilà, c'est ça. Merci d'avoir été avec nous.

PATRICK ROGER
Merci Alain GRISET, ministre délégué auprès du ministre de l'Economie et des finances, donc en charge des petites et moyennes entreprises.


Source : Service d'information du Gouvernement, le 17 juillet 2020