Interview de Mme Marlène Schiappa, ministre de la citoyenneté, à BFM TV le 13 juillet 2020, sur les accusations de viol et d'abus de faiblesses concernant Gérald Darmanin, la présomption d'innocence, les violences sexuelles, le communautarisme et la parité en politique.

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Texte intégral

APOLLINE DE MALHERBE
Bonjour Marlène SCHIAPPA.

MARLENE SCHIAPPA
Bonjour.

APOLLINE DE MALHERBE
Merci d'être avec nous ce matin sur RMC et BFM TV, vous être la nouvelle ministre déléguée auprès du ministre de l'intérieur, chargée de la citoyenneté et le ministre de l'Intérieur précisément c'est Gérald DARMANIN. Vous en pensez quoi vous de l'affaire Darmanin, en vrai ?

MARLENE SCHIAPPA
J'en pense quoi, alors plusieurs choses, d'abord vous savez que je ne vais pas pouvoir rentrer dans les détails de l'affaire parce qu'il y a une séparation des pouvoirs. J'appartiens au pouvoir exécutif du gouvernement et le pouvoir exécutif ne peut pas commenter les affaires judiciaires.

APOLLINE DE MALHERBE
Ça c'est la précaution d'usage.

MARLENE SCHIAPPA
Ce n'est pas la précaution, c'est le principe et vous savez très bien que si je ne la prenais pas, je me ferais lyncher par les magistrats et les défenseurs du monde de la justice qui seraient bien légitime car l'usage, c'est qu'on n'intervient pas dans les affaires judiciaires. Ensuite moi ce que j'observe dans ce que vous appelez cette affaire entre guillemets Darmanin…

APOLLINE DE MALHERBE
Moi je vais revenir sur les détails même si vous, vous ne voulez pas commenter forcément la décision de justice, il y a la décision de justice mais il y a les faits et c'est aussi là-dessus que j'aimerai bien vous entendre.

MARLENE SCHIAPPA
Alors c'est là que j'allais en venir, j'allais arriver là, je vais être très précise dans mes réponses parce que j'observe dans cette affaire c'est que, il y a eu une enquête, et qu'il y a eu trois décisions de justice qui amènent à un classement sans suite, deux non-lieu et un classement sans suite pour être très précise.

APOLLINE DE MALHERBE
Après des plaintes pour viol, harcèlement et abus de confiance.

MARLENE SCHIAPPA
Voilà exactement et que là l'affaire a été rouverte pour une question de procédure, mais que Gérald DARMANIN n'est pas mis en examen, il n'est pas inculpé et à 3 reprises la justice a considéré qu'il y avait deux non-lieu, un classement sans suite et que donc il n'y avait pas eu de viol.

APOLLINE DE MALHERBE
Sauf qu'il y a les faits et les faits qui ont été reconnus y compris par Gérald DARMANIN, avoir eu des faveurs sexuelles d'une femme au moment où elle lui demandait un service et puis il y a une autre femme à Tourcoing, elle, qui l'accuse d'abus de faiblesse. Elle dit qu'elle a demandé au maire un changement de logement pour quitter son logement insalubre, qui lui aurait demandé en échange des avantages en nature, elle raconte qu'elle s'est sentie obligée de lui prodiguer une fellation en échange de l'avancée de son dossier. Ça c'est les faits et ces faits qu'est-ce que vous en pensez-vous ?

MARLENE SCHIAPPA
Mais ces faits, Apolline de MALHERBE, là on est sur un plateau de télévision, on n'est pas dans un tribunal, je ne suis pas juge, vous n'êtes pas juge non plus et donc qu'est-ce qu'on fait dans un Etat de droit, on s'en remet à la justice. Et là c'est fait, la justice au-delà de deux phrases a regardé les plaintes, a pris les dossiers, a enquêté, a investigué et la justice a été rendue à 3 reprises et a dit qu'il n'y avait pas de viol, qu'il n'y avait pas d'agression sexuelle, qu'il n'y avait pas de harcèlement, donc moi je ne vais pas là mettre le dossier et faire un tribunal populaire public où nous allons regarder les faits et déjuger ce qui a été fait par la justice.

APOLLINE DE MALHERBE
Ça ne vous met pas mal à l'aise.

MARLENE SCHIAPPA
Mal à l'aise par rapport à quoi ?

APOLLINE DE MALHERBE
Par rapport à ces histoires, par rapport à tous ces féministes qui manifestent, vous qui étiez il y a encore 10 jours, chargée des relations homme-femme, chargés de l'égalité homme-femme, c'était votre combat.

MARLENE SCHIAPPA
Mais c'est toujours mon combat, moi je vais être très clair, je suis féministe depuis l'adolescence, personne ne me retirera le droit d'être féministe et je n'attends pas de brevet de féminisme de qui que ce soit et notamment pas des gens qui en fait pourfendent le gouvernement et ne mène pas un combat contre les violences sexistes et sexuelles mais mène un combat contre le gouvernement. Moi j'ai été très surprise de voir des groupes féministes qui sont anti-Macron et anti-gouvernement, qui lorsque par exemple j'ai présenté la loi contre le harcèlement de rue se sont mobilisées contre la loi qui protégeait les femmes face au harcèlement de rue et qui maintenant disent c'est scandaleux le nouveau ministre de la Justice à l'époque était contre la loi contre le harcèlement de rue. Donc on voit qu'en fait il y a une instrumentalisation politique, moi je suis féministe depuis toujours, je n'aurais jamais accepté d'être ministre déléguée ou de travailler d'ailleurs avec un homme qui aurait été reconnu coupable de viols. Moi mon combat pour l'égalité femme-homme, c'est quoi ?

APOLLINE DE MALHERBE
Vous avez quand même évolué, vous venez de dire reconnu coupable de viol mais quand vous étiez chargée des relations hommes-femmes à propos de Roman POLANSKI vous aviez dit, je n'applaudirais jamais un homme accusé de viol.

MARLENE SCHIAPPA
Bien sûr mais la différence c'est quoi ? C'est la justice Apolline de MALHERBE.

APOLLINE DE MALHERBE
Mais justement pour Roman POLANSKI, la justice était passée, il était accusé, mais il n'a pas été…

MARLENE SCHIAPPA
Non pour Roman POLANSKI, il y a plusieurs affaires, dont plusieurs qui n'ont pas été jugées et c'est la raison pour laquelle…

APOLLINE DE MALHERBE
Donc pour Roman POLANSKI, ce n'est pas acceptable.

MARLENE SCHIAPPA
Non, non ne faites pas comme si c'était deux situations identiques, pour Roman POLANSKI, je me suis exprimée très clairement et très en détail en disant que pour moi Roman POLANSKI était devenu probablement malgré lui le symbole d'une forme d'impunité parce qu'il y a des plaintes de femmes, il y a des femmes qui l'accusent de viol et que ça n'est pas passé par la justice et mon combat c'est que ça passe par la justice. mon combat c'est que toutes les femmes qui vont déposer plainte pour viol, qu'elles déposent plainte contre un cinéaste très connu, contre un ministre, contre le voisin, le chauffeur de bus, le boulanger que toutes leurs plaintes soient prises, que toutes leurs plaintes soient transmises et qu'ensuite la justice puisse passer, soit reconnaître qu'ils sont coupables et ils doivent alors être évidemment condamnés parce que le viol est un crime grave, soit ils ne sont pas coupables et alors ils ne vont pas être condamné sur la base des plaintes.

APOLLINE DE MALHERBE
Sur cette question de la justice et de la présomption d'innocence on comprend bien évidemment et en effet vous le dites il y a eu non-lieu et puis aujourd'hui la justice travaillera puisqu'il y a réouverture d'une enquête. Mais la présomption d'innocence quand on voit que François BAYROU n'a pas pu rester ministre pour un soupçon d'emplois fictifs au MoDem, quand on voit que François de RUGY n'a pas pu rester président de l'Assemblée nationale pour une histoire de homard sur une table et que là pour une accusation de viol.

MARLENE SCHIAPPA
Alors ce n'est pas président de l'Assemblée nationale, François de RUGY était ministre de la Transition écologique…

APOLLINE DE MALHERBE
Mais lorsqu'il était à l'Assemblée nationale…

MARLENE SCHIAPPA
Et il a souhaité démissionner.

APOLLINE DE MALHERBE
Il a souhaité démissionner. Il a été poussé à la démission.

MARLENE SCHIAPPA
Moi je vais vous dire honnêtement Apolline de MALHERBE, je ne sais pas à quelle heure il est, depuis combien de temps on est là-dessus, moi j'étais venue naïvement pour présenter les fonctions qui sont les miennes en tant que ministre de la Citoyenneté.

APOLLINE DE MALHERBE
Marlène SCHIAPPA, vous savez bien que dans le contexte actuel et ce que vous incarnez dans votre combat, c'est important aussi qu'on puisse aller au bout de cette question.

MARLENE SCHIAPPA
Et ça concerne également la protection des femmes, bien sûr mais vous parlez du homard de François de RUGY, moi je suis allée…

APOLLINE DE MALHERBE
Pour un homard, il a démissionné.

MARLENE SCHIAPPA
C'est son choix.

APOLLINE DE MALHERBE
Et là pour une accusation de viol, il n'y a pas de problème.

MARLENE SCHIAPPA
Non parce que la justice est passée, Apolline de MALHERBE, c'est-à-dire si vous, si quelqu'un a porté plainte contre vous, vous êtes passée en justice et la justice a dit en fait cette dame n'est pas coupable et il y a un non-lieu, vous n'avez plus le droit de travailler, vous n'avez plus le droit d'exercer votre métier.

APOLLINE DE MALHERBE
Il y a quand même une question, ça n'a rien à voir, le job c'est ministre de l'Intérieur en charge en charge notamment de la police et la police elle va devoir faire une enquête sur le ministre de l'Intérieur, pourra-t-elle travaillant en liberté ?

MARLENE SCHIAPPA
la police travaille évidemment en liberté et le ministre de l'Intérieur a immédiatement écrit au président de la République, au secrétaire général de l'Elysée, au Premier ministre et au service pour dire qu'il ne voulait jamais être tenu au courant de rien d'aucune affaire qui le concerne. et par ailleurs vous me permettrez d'ajouter qu'au ministère de l'Intérieur, le ministre et Premier ministre ont souhaité me confier la responsabilité de la protection des femmes côté ministère de l'Intérieur, concrètement ces 230 millions d'euros engagés par le ministère de l'Intérieur pour les forces de l'ordre pour mieux protéger les femmes, pour qu'on poursuive le système d'alerte des forces de l'ordre pour les violences conjugales dans les pharmacies qui avait été mis en place avec Christophe CASTANER, pour qu'on développe la plateforme qui s'appelle arrêtons les violences.gouv.fr sur laquelle vous avez des policiers et des gendarmes qui 24 heures sur 24 sont à l'écouter des femmes.

APOLLINE DE MALHERBE
Donc pour vous les féministes qui manifestent doivent cesser de manifester.

MARLENE SCHIAPPA
Moi je n'ai jamais dit aux gens, vous avez le droit de manifester ou pas le droit de manifester, les femmes qui ont envie de manifester ont parfaitement le droit de manifester et en tant que ministre maintenant place Beauvau au ministère de l'Intérieur, je ne me permettrais pas de dire aux gens s'ils ont droit à manifester ou pas. Il y a des autorisations pour ça et quelque cause que ce soir on peut manifester. Mais moi je voudrais dire à ces femmes qui manifestent que je comprends les questions et quand on entend ce qu'on entend dans la presse, je comprends que légitimement elles se posent des questions, c'est normal d'y répondre et la réponse elle est apportée par les décisions de justice.

APOLLINE DE MALHERBE
Et donc cette décision de justice qui sera encore en cours puisqu'il y a l'enquête. Parlons de votre job, c'est une création, vous êtes donc ministre déléguée auprès du ministre de l'intérieur, chargé de la citoyenneté, concrètement ça veut dire ?

MARLENE SCHIAPPA
Concrètement il y a plusieurs volets, un que je viens d'évoquer qui concerne la protection des femmes côté ministère de l'Intérieur et je le ferai bien sûr main dans la main avec ma successeur Elisabeth MORENO qui est aussi très engagée sur ces questions, et puis un volet important de citoyenneté. Alors je sais quand on a annoncé ministre déléguée à la Citoyenneté, certains se sont dit, c'est un concept de vague et abstrait, etc, pas du tout. Ce sont des politiques publiques très concrètes. C'est par exemple la vie des étrangers en France, c'est par exemple les procédures de naturalisation, c'est par exemple l'asile, c'est par exemple les valeurs de la République au premier rang desquelles, la laïcité dont vous savez que c'est un principe qui me tient à coeur.

APOLLINE DE MALHERBE
Vous aviez même publié un livre Laïcité.

MARLENE SCHIAPPA
Absolument avec le directeur des études de la Fondation Jean Jaurès, J'ai eu l'honneur de recevoir l'an dernier le prix laïcité du Grand Orient de France, c'est un engagement que je porte de longue date. Et je crois qu'il est important que le gouvernement prenne à bras-le-corps la question de la laïcité, nous sommes plusieurs ministres à nous engager sur cette question et avec Gérald DARMANIN nous voulons renforcer la place de la laïcité par exemple dans les parcours de naturalisation. Les gens qui arrivent en France, peut-être méconnaissent en arrivant et c'est normal, les principes de la République française, nous pensons dans les parcours de naturalisation, il est important de renforcer le principe de laïcité, c'est-à-dire tout simplement au sens de la loi de 1905, le droit de croire ou de ne pas le croire sans être inquiété pour cela mais le fait que les lois de la République sont supérieures à tout principe de lois communautaires.

APOLLINE DE MALHERBE
Est-ce qu'il faudrait changer les lois ou changer les obligations qui conduisent à devenir citoyen français ?

MARLENE SCHIAPPA
Je crois que pour l'instant on est dans la deuxième partie du quinquennat, donc ma volonté à ce stade ce n'est pas de modifier les lois, en revanche j'observe …

APOLLINE DE MALHERBE
Ce que vous voulez dire c'est que si ça continue au début d'un prochain quinquennat, là vous pourriez changer les lois ?

MARLENE SCHIAPPA
Alors je viens d'arriver, 2 minutes pour l'instant on va se concentrer sur la fin de ce quinquennat-là et sur ce qu'on va pouvoir faire concrètement et notamment il y a beaucoup de lois qui existent, c'est beaucoup de décisions gouvernementales qui ont été prises, il y a eu des comités interministériels notamment sur l'intégration, etc, qui n'ont pas encore été appliquées parce qu'elles sont dures à appliquer. Par exemple les délais pour obtenir l'asile, quand vous arrivez en France, vous êtes demandeur d'asile, vous allez remplir votre dossier et vous avez quasiment 2 ans, je crois que c'est 20 mois en moyenne avant d'obtenir une réponse et qu'on vous dise oui ou non est-ce que vous pouvez rester en France. Et le président de la République et le gouvernement s'est engagé pour faire en sorte de réduire ces délais, de les ramener à 6 mois et donc ça va être une de mes missions dans le ministère, dont j'ai la responsabilité, de faire en sorte que les administrations se mobilisent et elles sont déjà mobilisées…

APOLLINE DE MALHERBE
Vous êtes dans l'application que dans l'invention ou la création.

MARLENE SCHIAPPA
On est plus dans l'application, je ne vais pas faire de nouvelles lois néanmoins on va avancer de nouvelles mesures. J'ai lu dans la presse une interprétation disant Marlène SCHIAPPA ne prendra aucune mesure, je n'ai jamais dit ça, ce que j'observe c'est que ce n'est pas la période pour faire de nouvelles lois, le Covid, etc, le calendrier parlementaire est déjà très chargé, ni pour lancer des grands plans à 5, 10 ans. Néanmoins je suis en train de travailler sur ma feuille de route avec Gérald DARMANIN sous l'autorité du Premier ministre Jean CASTEX et nous présenterons bientôt cette feuille de route et il y aura bien évidemment des mesures importantes.

APOLLINE DE MALHERBE
Vous aviez dit que vous vouliez lancer, je vous cite, des opérations de reconquête républicaine, c'est quoi ?

MARLENE SCHIAPPA
Eh bien, par exemple, c'est quand, avec Gérald DARMANIN, le ministre de l'Intérieur, donc, nous allons à la chapelle de nuit auprès des forces de l'ordre soutenir ces opérations de reconquête républicaine qui sont menées par les forces de l'ordre, qui font un travail remarquable au ministère de l'Intérieur, c'est 290.000 femmes et hommes qui tous les jours font vivre au quotidien, c'est eux qui font vivre les valeurs de la République très concrètement dans ces quartiers dits de reconquête républicaine, et qui vont reconquérir l'espace public face aux larcins face aux harcèlements de rue, face aux vols face aux stups, face à tout ce à quoi ils sont confrontés, y compris la nuit, dans ces quartiers parfois difficiles.

APOLLINE DE MALHERBE
Gérard COLLOMB, lorsqu'il a quitté le ministère de l'Intérieur, avait eu cette phrase, je le cite : la situation est très dégradée, le terme de reconquête républicaine, que vous reprenez donc à votre compte, prend tout son sens, parce que dans certains quartiers, c'est la loi du plus fort qui s'impose, celle des narcotrafiquants et des islamistes radicaux qui a pris la place de la République ; est-ce que vous partagez ce constat ?

MARLENE SCHIAPPA
Oui, je partage ce constat. Et d'ailleurs, ce n'est pas un constat théorique, c'est ce que l'on observe, je vous parlais de La Chapelle, quand nous y sommes allés, il y avait un couple qui était avec sa petite fille à l'étage, ils sont descendus, on a échangé avec eux avec Gérald DARMANIN, ils nous ont dit : eh bien, notre petite fille Louise, elle a 6 ans, elle ne va pas au square en face, parce que le square en face, eh bien, il est squatté et qu'il y a du deal toute la journée, donc elle n'est jamais allée jouer dans le square en face.

APOLLINE DE MALHERBE
Donc votre mission, c'est que cette petite fille, elle puisse aller jouer dans le square en face ?

MARLENE SCHIAPPA
Exactement, c'est tout à fait ça, et hier, nous étions à Calais avec la maire, Natacha BOUCHART, qui mène un travail très important et qui, là aussi, fait face à des situations, à une situation migratoire et à une situation sécuritaire très compliquée et inhumaine pour tout le monde, inhumaine pour les migrants, inhumaine pour les personnes qui vivent à Calais, et donc notre volonté, c'est de remettre de l'humanité dans cette situation.

APOLLINE DE MALHERBE
Emmanuel MACRON a dit : il faudra être intraitable avec le séparatisme, deux questions là-dessus, d'abord le séparatisme, c'est quoi ?

MARLENE SCHIAPPA
Le séparatisme, ce sont toutes les personnes qui veulent s'organiser en marge de la République, et donc se séparer de la République, et qui considèrent que leurs lois religieuses, communautaires, de tradition, sont supérieures aux lois de la République, c'est par exemple les gens qui considèrent qu'ils ont droit de faire exciser leurs petites-filles, parce que la tradition pour eux, c'est exciser leur petite fille, eh bien, à ces gens, nous disons non, nous disons que les lois de la République sont au-dessus de toute loi, de toute coutume, de tout principe et que lorsqu'on s'intègre dans la République française, eh bien, il y a un travail à mener pour intégrer aussi les lois de la République française, et c'est un travail dont j'aurai la responsabilité.

APOLLINE DE MALHERBE
Et ça, ça consistera en quoi, c'est-à-dire que là, on a compris ce que c'était que le séparatisme à vos yeux, mais quand Emmanuel MACRON dit : il faudra être intraitable avec le séparatisme, ça passera par quoi, est-ce que vous allez mettre en place des outils, des contraintes, des lois voire même un crime de séparatisme, comment ça va marcher ?

MARLENE SCHIAPPA
Alors, on va mettre en place des outils, le Premier ministre, Jean CASTEX, va assez s'exprimer dans quelques jours, et lors de sa déclaration de politique générale, il aura l'occasion notamment de s'exprimer sur les objectifs de lutte contre le séparatisme…

APOLLINE DE MALHERBE
Mercredi…

MARLENE SCHIAPPA
Et contre le communautarisme, et de dérouler notamment le calendrier qu'il aura décidé pour la mise en oeuvre de ces questions, dont nous aurons la responsabilité avec le ministre de l'Intérieur…

APOLLINE DE MALHERBE
Alors, là, on nous parle d'un calendrier, on nous parle d'une feuille de route, mais quelles peuvent être les mesures, comment on lutte contre le séparatisme ?

MARLENE SCHIAPPA
Eh bien, les mesures, elles font partie de la feuille de route. Moi, je pense qu'il y a deux volets dans la lutte contre le séparatisme et communautarisme, il y a d'abord un combat culturel, ce combat culturel, c'est de ne rien lâcher sur ces questions-là. Prenons par exemple ce qui s'est passé à Dijon, les actes de violence inouïs qui ont, je crois, choqué énormément de gens, qui les ont découverts sur les vidéos, et on nous a dit pendant quelques jours : c'est un affrontement entre communautés, et cet affrontement entre différentes communautés va se régler à la mosquée, sous l'égide de l'imam, alors, moi, je crois que chacun a la liberté de croire, et si des personnes qui sont en France, sont des musulmans, des musulmanes, je défendrai mordicus leur droit à pratiquer leur religion librement, sans être stigmatisées pour cela, en revanche, je pense que les affrontements et les problèmes sécuritaires ne se règlent pas à la mosquée, ils se règlent avec la République, ils se règlent en préfecture, ils se règlent avec la justice, ils se règlent dans les commissariats, et je crois que parler de communautés…

APOLLINE DE MALHERBE
Mais vous dites, ça, c'est un problème culturel, ça se règle comment un problème culturel, c'est l'éducation ?

MARLENE SCHIAPPA
C'est l'éducation, c'est aussi les mots que nous choisissons à employer, vous voyez, Napoléon Bonaparte, qui était de Corse comme moi, Napoléon Bonaparte disait les mots sont tout. Et moi, je crois que les mots sont importants, et quand on a un glissement de vocabulaire…

APOLLINE DE MALHERBE
Mais ça ne fait pas…

MARLENE SCHIAPPA
Pardon, pardon, mais quand on a un glissement de vocabulaire, et qu'on commence à parler de communauté sans cesse, eh bien, ça veut dire qu'on morcelle le pays et qu'on arrive à ce que Jérôme FOURQUET appelle le puzzle français, vous avez plein de similis communautés qui s'informent dans leur coin, qui ne se parlent pas entre elles et qui ne partagent pas de commun, et le commun sur les valeurs de la République…

APOLLINE DE MALHERBE
Alors, il faut faire quoi, ne pas en parler, ne pas regarder, il ne faut pas le dire ?

MARLENE SCHIAPPA
Mais la question, c'est de lutter contre le communautarisme et de faire en sorte que chacun s'intègre, s'intègre pourquoi, ce n'est pas s'intégrer pour s'intégrer, pourquoi on devient français, on devient français parce qu'on partage les valeurs de la France, les valeurs de la République, et vous savez, moi, j'ai fait, quand j'étais élue locale, quand j'étais maire adjointe, j'ai participé à des cérémonies de naturalisation, et ce sont des moments solennels et très émouvants parce que vous avez des gens qui ont voulu devenir français, qui sont venus en France, et qui viennent, là, acter qu'ils deviennent des citoyens français, et en général, ces gens sont très fiers de recevoir les documents, d'être là, tout le monde fait venir ses proches, et on rentre dans la communauté nationale parce qu'il n'y a qu'une communauté en France, la République est une et indivisible, et à ce moment-là…

APOLLINE DE MALHERBE
Vous êtes heureuse de votre nouveau job ?

MARLENE SCHIAPPA
Oui, je termine là-dessus, vous voyez ça me passionne, je termine juste là-dessus…

APOLLINE DE MALHERBE
Oui, c'est pour ça, je vous vois sourire…

MARLENE SCHIAPPA
Et à ce moment-là, ils intègrent les valeurs de la République française et ils les défendent, et dans ces valeurs, il y a la laïcité, il y a l'égalité femme-homme également, eh oui, je suis très heureuse de mener ce combat avec le ministre de l'Intérieur et sous l'autorité du président et du Premier ministre.

APOLLINE DE MALHERBE
Avec le ministre de l'Intérieur, vous êtes assez consciencieuse, on a entendu au moins 3 fois, je n'ai pas tout compté, mais au moins 3 fois, vous le disiez…

MARLENE SCHIAPPA
Avec lui, je suis ministre déléguée…

APOLLINE DE MALHERBE
Avec Gérald DARMANIN, le ministre de l'Intérieur…

MARLENE SCHIAPPA
Bien sûr…

APOLLINE DE MALHERBE
Encore une fois, quand même, on est un peu étonné qu'il n'y ait aucun état d'âme quoi…

MARLENE SCHIAPPA
Mais pourquoi j'aurais des états d'âme ?

APOLLINE DE MALHERBE
Parce que vous avez partagé la cause d'un certain nombre de féministes et qu'aujourd'hui, elles en ont…

MARLENE SCHIAPPA
Bien sûr, et cette cause, elle a été soutenue par Gérald DARMANIN quand il était ministre de l'Action et des comptes publics, ce sont des choses qui ont été peu reprises, mais par exemple, à chaque fois que j'ai eu besoin d'argent, concrètement, j'ai appelé le ministre de l'Action et des comptes publics, qui nous a débloqué de l'argent. Je suis partie en laissant 5 millions d'euros supplémentaires à ma successeuse, grâce à une décision commune que nous avons fait acter auprès du Premier ministre Edouard PHILIPPE à l'époque. Le ministre de l'Action et des comptes publics de l'époque, Gérald DARMANIN, et la secrétaire d'Etat, chargée de l'Egalité femmes hommes, Marlène SCHIAPPA, ensemble, nous avons obtenu ces 5 millions supplémentaires, et dès son entrée en fonction, Gérald DARMANIN a réuni les directeurs d'administration et leur a demandé de présenter rapidement des feuilles de route pour construire un objectif de 50 % de nominations de femmes aux plus hauts postes du ministère de l'Intérieur…

APOLLINE DE MALHERBE
Donc vous avez pu compter sur lui…

MARLENE SCHIAPPA
Absolument.

APOLLINE DE MALHERBE
Nominations de femmes, là aussi, quand même un point, vous vous étiez battue pour qu'il y ait des femmes partout, vous dites d'ailleurs aux entrepreneurs notamment, si vous voulez vraiment une femme, vous les trouverez, et quand vous voyez qu'Emmanuel MACRON à deux reprises avait dit : je souhaite que le Premier ministre soit une femme et qu'il n'en a pas trouvé, c'est qu'il n'a pas bien cherché ?

MARLENE SCHIAPPA
Non, ce n'est pas la question, la question, c'est de regarder la composition du gouvernement, et qui est plus que paritaire, et moi, je m'étonne que personne ne l'ait relevé, il y a plus de femmes…

APOLLINE DE MALHERBE
Oui, mais comment ça se fait qu'en haut de la pyramide quand même, encore une fois, il n'y en a eu qu'une en tout dans toute l'histoire de la 5ème République…

MARLENE SCHIAPPA
Oui, mais je pense qu'il faut qu'il y ait davantage de femmes en politique, il faut qu'il y ait davantage de femmes qui s'engagent, on a contribué à féminiser fortement l'Assemblée nationale, de la volonté d'Emmanuel MACRON, et moi, j'étais…

APOLLINE DE MALHERBE
Mais Marlène SCHIAPPA, c'est vous-même qui le disiez, vous le dites à vos interlocuteurs, vous dites décider d'y mettre une femme, pourquoi vous n'avez pas dit ça Emmanuel MACRON ?

MARLENE SCHIAPPA
Absolument, d'abord…

APOLLINE DE MALHERBE
Ou alors, vous lui avez peut-être dit, mais il ne l'a pas fait…

MARLENE SCHIAPPA
D'abord, juste peut-être, est-ce qu'on peut remettre les choses sur la table, la prérogative de la nomination du Premier ministre, elle revient au président de la République, et personne ne va frapper à sa porte pour lui dire : il faut faire ci, il faut faire ça, c'est le président de la République qui prend cette décision, et moi, je me réjouis, parce qu'en France, on regarde sur ce qui ne va pas, et je pense qu'on peut regarder aussi les avancées et les efforts, je me réjouis qu'à l'approche des 10 ans de la loi Copé-Zimmermann pour qu'il y ait davantage de femmes aux responsabilités, je me réjouis qu'on ait un gouvernement avec davantage de femmes que d'hommes, je crois que c'est la première fois que ça arrive, en tout cas une des rares fois dans cette proportion, je crois que c'est 17-14…

APOLLINE DE MALHERBE
Il y a eu quelques petites périodes…

MARLENE SCHIAPPA
Oui, on est à 17-14, c'est quand même quelque chose qui est important, avec des femmes aux Armées, le ministère des Armées avec Florence PARLY Geneviève DARRIEUSSECQ, il est 100 % féminin, et puis, beaucoup de féministes, on a Brigitte BOURGUIGNON qui a présidé la Commission des Affaires sociales, on a Roselyne BACHELOT, que je ne présente pas évidemment, on a Barbara POMPILI qui est numéro 2 dans l'ordre protocolaire des ministres et qui incarne ce sujet, elle a été coprésidente, la première femme à coprésider un groupe à l'Assemblée nationale. Donc moi, j'entends bien qu'il faille critiquer et voir ce qui ne va pas dans le gouvernement, je ne dis pas ça pour vous, je dis ça pour l'ensemble des commentaires, c'est normal que les Français soient sceptiques au début, eh bien, jugez-nous sur les actes, et ce gouvernement agira comme il l'a toujours fait pour l'égalité femmes-hommes.

APOLLINE DE MALHERBE
Et donc pas d'état d'âme en tout cas, et heureuse de son nouveau job, Marlène SCHIAPPA, ministre déléguée auprès du ministre de l'Intérieur chargée de la Citoyenneté.

MARLENE SCHIAPPA
Merci.

APOLLINE DE MALHERBE
Merci à vous d'être venue sur RMC et sur BFM TV ce matin.

MARLENE SCHIAPPA
Merci à vous. Avec plaisir.


Source : Service d'information du Gouvernement, le 20 juillet 2020