Entretien de M. Franck Riester, ministre du commerce extérieur et de l'attractivité, avec "Les Echos" le 10 décembre 2020, sur l'attractivité économique de la France.

Prononcé le

Intervenant(s) : 
  • Franck Riester - Ministre du commerce extérieur et de l'attractivité

Média : Energies News - Les Echos - Les Echos

Texte intégral

Q - Les investissements étrangers vont chuter cette année en France, comme dans la plupart des pays. Comment comptez-vous les attirer demain ?

R - Je viens d'échanger avec une soixantaine d'investisseurs étrangers des secteurs de la santé, de l'agroalimentaire, de la technologie ou du développement durable. Ils continuent d'être très intéressés par la France et ce que fait le gouvernement. Leur présence est importante pour l'emploi dans nos territoires, et nous permet également d'aller conquérir les marchés étrangers. Le plan de relance est une accélération de la transformation du pays engagée en 2017. Nous avons baissé les impôts, qu'il s'agisse des impôts sur le capital ou de l'impôt sur les sociétés, et nous ne reviendrons pas sur ces réformes. Désormais, le coût horaire d'un salarié dans l'industrie manufacturière est 4 euros plus bas en France qu'en Allemagne. Nous allons aussi réduire les impôts de production pour améliorer la compétitivité de nos entreprises.

Q - Mais l'attractivité ne se résume pas au seul coût du travail...

R - Nos atouts structurels sont importants et nous voulons créer des leviers complémentaires. Nous investissons dans la R&D, la formation et la décarbonation de l'industrie. Le but est de préparer l'avenir et ça marche : en 2019, nous étions le premier pays européen en matière d'accueil d'investissements directs étrangers. Nous voulons aller plus loin et mettre en place au premier trimestre un dispositif d'accueil pour les talents et leurs familles en France, notamment en simplifiant les démarches administratives dans l'Hexagone.

Q - Craignez-vous une compétition encore plus forte à l'avenir entre les pays européens pour attirer sur leur territoire les entreprises ?

R - La concurrence est d'abord entre l'Europe et les deux autres zones géographiques importantes, les Etats-Unis et la Chine. Nécessairement, la compétition sera plus forte dans les prochaines années pour attirer les investissements étrangers tout simplement parce que ces investissements seront moins nombreux. C'est pourquoi nous avons besoin d'une équipe de France de l'attractivité qui soit plus efficace, à l'image de ce que nous avons fait avec l'export il y a deux ans. L'idée est d'encore mieux accueillir les projets d'investissement en rassemblant tous les acteurs : les régions, les services déconcentrés de l'Etat, Business France, bpifrance, la Banque des territoires. Aujourd'hui, les réseaux diplomatiques fonctionnent bien et savent orienter les investisseurs étrangers intéressés par la France. Le problème, c'est après. La complexité administrative, les délais de mise en oeuvre des investissements, tout cela peut peser. Nous avons besoin de simplifier et d'accélérer.

Q - La concurrence sera-t-elle surtout fiscale entre les pays ?

R - Les investisseurs que je rencontre ne me citent plus la fiscalité française comme un problème majeur. Nous avons agi sur nos propres déterminants, et portons par ailleurs activement les sujets de fiscalité, notamment du numérique, au niveau de l'OCDE. Les investisseurs étrangers sont aussi très attentifs à la qualité de vie, les infrastructures, la formation. Il nous faut aussi repenser nos chaînes de valeur, en maintenant notre compétitivité. C'est pourquoi une des pistes à explorer, c'est la colocalisation de chaînes de production aux pourtours de l'Europe, dans des pays partenaires comme ceux du Maghreb ou ceux à l'est de l'Europe. Nous pourrons faire la différence sur les secteurs d'avenir.


Source https://www.diplomatie.gouv.fr, le 11 décembre 2020