Texte intégral
la présidente. L'ordre du jour appelle la discussion du projet de loi portant report du renouvellement général des conseils départementaux, des conseils régionaux et des assemblées de Corse, de Guyane et de Martinique (nos 3812, 3827).
Présentation
Mme la présidente. La parole est à Mme la ministre déléguée chargée de la citoyenneté.
Mme Marlène Schiappa, ministre déléguée chargée de la citoyenneté. Les élections locales sont une composante essentielle de la démocratie parce qu'elles sont un moment démocratique pour les Français. Ils élisent des élus de proximité, qu'ils ont souvent l'occasion de connaître et de rencontrer ; ils choisissent aussi à cette occasion des élus qui exerceront des compétences qui touchent à la vie quotidienne, que ce soit la solidarité s'agissant des départements ou encore l'emploi, l'attractivité, l'activité économique s'agissant des régions.
Ces élections essentielles de la démocratie locale étaient prévues pour mars prochain. L'épidémie de covid-19 nous oblige, vous le savez, à proposer le report à juin 2021 du renouvellement général des conseils départementaux, des conseils régionaux et des assemblées de Corse, de Guyane et de Martinique.
M. Sylvain Maillard. Très bien !
Mme Marlène Schiappa, ministre déléguée. Pourquoi reporter le double scrutin qui était prévu pour mars prochain et rallonger le mandat des conseillers départementaux et régionaux ? Un tel report des échéances électorales n'est évidemment jamais une décision facile. Celle-ci est directement et exclusivement liée au contexte pandémique que nous traversons.
Pour prendre cette décision touchant au report du scrutin, le Gouvernement a d'ailleurs souhaité bénéficier de tout l'éclairage nécessaire. C'est pourquoi le Premier ministre a confié le 23 octobre dernier à M. Jean-Louis Debré, ancien président du Conseil constitutionnel,…
M. Pierre Cordier. Il a subi des pressions !
Mme Marlène Schiappa, ministre déléguée. …une mission visant à étudier si et dans quelles conditions pourraient se tenir les élections départementales et les élections régionales dont le législateur avait fixé la date à mars 2021.
Je tiens, au nom du Gouvernement, à saluer le travail réalisé par M. Jean-Louis Debré…
M. Pierre Cordier. Il est bien Jean-Louis !
Mme Marlène Schiappa, ministre déléguée. …et le rapport qu'il a remis au Premier ministre le 13 novembre dernier. Dans un court laps de temps, il a en effet consulté toutes les forces politiques comme des associations d'élus locaux.
M. Pierre Cordier. Avec des gens de chez vous !
Mme Marlène Schiappa, ministre déléguée. Son analyse est ainsi exempte de tout esprit partisan…
M. Pierre Cordier. Très bien !
Mme Marlène Schiappa, ministre déléguée. …et son rapport intègre les recommandations du Conseil scientifique sur la question du covid-19. Il a permis, je crois, d'aboutir à un diagnostic partagé sur le sujet essentiel qu'est le scrutin dans une démocratie, après avoir étudié différentes possibilités et plusieurs scénarios de report, il estime « raisonnable » – c'est le terme même employé par M. Jean-Louis Debré – que ce double scrutin se tienne au mois de juin 2021.
Les recommandations de ce rapport sont claires, elles sont pragmatiques. Le Gouvernement les a donc suivies en proposant ce projet de loi qui tend à reporter les élections départementales et régionales au mois de juin prochain. Nous pensons qu'il faut donner de la lisibilité, aux électeurs et aux électrices, aux candidats et aux candidates ainsi qu'aux élus sortants concernés par cette échéance.
Le Gouvernement entend que ces élections se tiennent en juin prochain et fait tout pour cela. Le Gouvernement partage d'ailleurs pleinement cet objectif de lisibilité pour chacun, notamment pour les maires et pour les préfets qui organisent ces élections. C'est pourquoi, si le Parlement adopte le report des élections régionales et départementales à juin prochain, le décret de convocation des électeurs sera pris dès la promulgation de la loi, et ce décret proposera d'organiser le scrutin le 13 et le 20 juin prochains.
Seule la loi peut décider d'un éventuel nouveau report à une autre date que juin prochain ce que, je le dis très clairement, le Gouvernement ne souhaite pas.
M. Pierre Cordier. C'est nouveau !
Mme Marlène Schiappa, ministre déléguée. Cela supposerait que les conditions sanitaires ne se soient pas améliorées. En tout état de cause, le Parlement sera parfaitement informé de la situation sanitaire par le biais d'un rapport qui lui sera remis au plus tard le 1er avril 2021.
Tout est donc mis en oeuvre pour que ce double scrutin puisse se tenir dans les meilleures conditions possible les 13 et 20 juin prochains.
Je partage l'objectif, poursuivi par la commission des lois et par les députés aux travers des différents amendements qui ont été déposés – et, pour certains d'entre eux, adoptés – sur ce texte, de permettre au plus grand nombre d'électeurs de prendre part au double scrutin de juin prochain et de choisir ainsi librement leurs représentants au sein des collectivités territoriales.
M. Pierre Cordier. Ça va faire mal pour la majorité !
Mme Marlène Schiappa, ministre déléguée. Je salue notamment les initiatives très concrètes de votre rapporteur, dont je voudrais saluer le travail et l'engagement pour faciliter la campagne électorale. C'est le sens de l'amendement qui, adopté par la commission, tend à donner accès à un numéro vert gratuit (Exclamations sur les bancs du groupe LR) aux frais du candidat, afin de lui permettre de répondre aux questions posées par les électeurs.
Le Gouvernement entend lui aussi mettre en oeuvre les mesures nécessaires pour leur permettre d'exercer ce droit et ce devoir de citoyen. Il s'agit ainsi de concilier la sécurité sanitaire et la tenue d'un scrutin dans les conditions les plus parfaites de liberté, d'équité, de sincérité (M. Sébastien Jumel s'exclame), en évitant tout risque inconsidéré de fraude électorale.
Ainsi, le Gouvernement a entendu les arguments renouvelés de votre rapporteur et de la commission en faveur de l'instauration d'une double procuration, c'est-à-dire de la possibilité, pour une personne, d'être mandataire de deux électeurs. Toutefois, seul le contexte épidémique justifierait cette possibilité, qui doit donc être strictement limitée au double scrutin de juin prochain.
En tout état de cause, le Gouvernement partage votre souci de permettre à tous les citoyens de prendre part à ce scrutin. D'ailleurs, plusieurs mesures sont en cours de préparation dans cet objectif, visant par exemple à sécuriser la tenue des bureaux de vote. Des mesures vont être prises pour limiter le risque sanitaire pour les personnes qui s'y rendent. Je voudrais en rappeler ici très brièvement les principes, qui bénéficient désormais d'une expérience de mise en oeuvre dans plusieurs protocoles sanitaires : limiter les contacts par un aménagement des bureaux de vote, mettre à la disposition des membres du bureau de vote et des électeurs le matériel de protection sanitaire nécessaire ou encore éviter que la carte d'électeur ne passe de main en main.
Au-delà de ces aménagements sanitaires, le Gouvernement a adopté des mesures réglementaires pour faciliter l'exercice du vote. Tout d'abord une téléprocédure sera ouverte pour permettre l'obtention d'une procuration qui sera complémentaire de la procédure papier. Même s'il restera nécessaire de se rendre au commissariat ou à la gendarmerie, la démarche sera simplifiée et l'information du citoyen sera améliorée puisqu'il sera informé que la commune a bien pris en compte sa demande.
En outre, un décret pris après avis du Conseil d'État facilitera l'organisation du double scrutin pour les communes, donc pour les électeurs. Vous le savez, la jurisprudence du Conseil constitutionnel sur ce double scrutin est très stricte. Il faut par exemple dédoubler les bureaux de vote pour ne pas créer de confusion dans l'esprit des électeurs.
Tout en respectant ce principe, le Gouvernement a donc prévu les aménagements suivants pour juin prochain : les fonctions de président et de secrétaire du bureau de vote seront mutualisées, tout en conservant un niveau suffisant de surveillance des opérations électorales. Dans les cas où les deux bureaux pour les deux scrutins sont ouverts dans la même salle, les isoloirs seront mutualisés.
M. Philippe Gosselin. C'est le bon sens !
Mme Marlène Schiappa, ministre déléguée. Dans les bureaux dotés de machines à voter, les deux scrutins pourront être organisés sur la même machine et tous les membres du bureau de vote seront mutualisés. Enfin, dans le contexte de l'épidémie de covid-19 où les personnes âgées sont plus vulnérables, il est proposé que, en l'absence d'assesseurs, l'électeur le plus jeune soit désigné par défaut puis, s'il manque encore un assesseur, l'électeur le plus âgé.
En plus de ces aménagements, qui doivent aider les communes comme les électeurs, le ministère de l'intérieur hébergera sur son site les professions de foi des candidats qui le souhaitent. Il n'y aura bien sûr pas de suppression du support papier pour les candidats qui souhaitent le conserver.
M. Pierre Cordier. Encore heureux !
Mme Marlène Schiappa, ministre déléguée. S'agissant de la campagne électorale, le support électronique permettra un accès sûr, d'un point de vue sanitaire, à l'information.
En outre, et toujours pour rendre possible une campagne électorale dynamique malgré l'épidémie, mais aussi pour tenir compte de l'allongement de la période de campagne, le Gouvernement propose dans ce projet de loi une augmentation des dépenses électorales en majorant les plafonds de dépenses autorisées de 20 %. Notre objectif commun, c'est bien que les citoyens participent le plus massivement possible au scrutin des 13 et 20 juin prochains, sans risque pour leur santé ou pour la maîtrise de l'épidémie, si elle devait être encore active au printemps prochain.
À cet égard, le Gouvernement prévoit des aménagements qui permettront la tenue de ce double scrutin en juin prochain, sans pour autant prendre un risque de fraude ou de déficit de confiance dans le résultat.
Vous le savez mieux que personne, mesdames et messieurs les députés, les élections sont le fondement même du fonctionnement de notre démocratie, et ce au niveau local comme au niveau national. Dans la situation inédite où la pandémie de covid-19 nous a plongés, un report de quelques mois – et de quelques mois seulement – de ces élections nous a semblé être une nécessité. Avec les préfets et avec les maires, qui organisent concrètement les élections dans les territoires, nous donnerons donc aux Français la possibilité de choisir leurs élus départementaux et leurs élus régionaux en juin prochain, en toute sécurité et en toute sérénité, je l'espère. (Applaudissements sur les bancs des groupes LaREM et Dem.)
source http://www.assemblee-nationale.fr, le 16 février 2021