Texte intégral
MARC FAUVELLE
Bonjour Olivier VERAN.
OLIVIER VERAN
Bonjour.
MARC FAUVELLE
On va parler de la vaccination avec vous dans quelques instants, du variant indien également, puisque trois cas viennent d'être détectés pour la première fois en métropole. D'abord, le calendrier du déconfinement, qui va donc nous emmener par étapes jusqu'à la fin du mois de juin. Il est gravé dans le marbre ou il peut encore être remis en cause dans les jours qui viennent par l'épidémie ?
OLIVIER VERAN
Le président de la République a donné de la visibilité aux Français, sur les prochaines semaines et les prochains mois. Cette visibilité elle permet d'anticiper, à qui ses vacances, à qui la possibilité de retrouver bientôt le plaisir d'un café en terrasse, la visibilité pour les commerçants qui n'attendaient que de pouvoir ouvrir leur activité, la visibilité pour tous ceux qui font du tourisme, pour tous ceux qui travaillent dans le champ de la culture, du sport. Cette visibilité elle est absolument nécessaire, et si c'est le calendrier que nous avons donné, c'est que c'est bien le calendrier que nous comptons tenir.
MARC FAUVELLE
Vous dites aux Français : « Ne vous emballez pas » ?
OLIVIER VERAN
Mais, nous disons aux Français… les Français n'ont pas besoin qu'on leur dise de ne pas s'emballer, ils savent que la réouverture ne va pas de paire avec la levée de l'attention que nous portons pour nous-mêmes et pour les autres, à la circulation du virus.
MARC FAUVELLE
Ce n'est pas la bamboche le 19 mai.
OLIVIER VERAN
On n'annonce pas la fin des gestes barrières, on n'annonce pas la fin des précautions, on n'annonce pas la fin… elle ne se décrète pas la fin de l'épidémie, c'est nous qui allons la chercher, nous les Français, au quotidien, en faisant attention. Si aujourd'hui le virus baisse de 20 % environ par semaine dans notre pays, c'est bien parce que nous faisons ces efforts. Mais en parallèle de ces efforts, et tout en continuant de lutter activement contre l'épidémie, eh bien nous allons pouvoir retrouver plus de liberté et plus de plaisir de vivre, retrouver une forme d'art de vivre à la française avec l'ouverture d'activités qui ont été fermées. Nous l'avons connu l'année dernière, souvenez-vous au mois de mai, nous l'avons aussi connu de façon moins ample, il est vrai, qu'au cours de l'hiver. Mais l'été n'est pas pareil que l'hiver en termes de circulation du virus, et surtout nous avons une arme nouvelle : la vaccination.
JEAN-JEROME BERTOLUS
Pour être très clair, il y a aujourd'hui 8 départements qui sont au-delà, qui connaissent un taux d'incidence au-delà de 400 pour 100 000. Si ce taux d'incidence ne baisse pas dans les 3 semaines, ces 8 départements seront écartés des réouvertures ?
OLIVIER VERAN
D'abord, je pense et j'espère très sincèrement que le taux d'incidence, que la circulation du virus continuera de baisser partout, permettant d'avoir une réouverture partout. Si tel n'était pas le cas, oui les choses ont été posées très clairement et à raison, vous imaginez bien que si dans une ville ou un département il y avait des clusters importants avec une circulation intense du virus et une pression hospitalière, il ne serait pas bien de rouvrir toute l'activité normale, et ce serait un risque pour tout le territoire.
MARC FAUVELLE
Ça serait à quelle échelle justement ? Ça peut être un quartier, ça peut être une ville, ça peut être une toute une région ?
OLIVIER VERAN
Nous l'avons déjà fait à l'échelle de villes, nous l'avons fait à l'échelle infra-départementale, nous l'avons fait à l'échelle départementale. Ce n'est pas en soi une nouveauté, ce qui est peut-être plus fort, plus appuyé que précédemment, c'est cette visibilité dans la durée, que le président de la République a donnée aux Français.
JEAN-JEROME BERTOLUS
Juste, d'un petit mot, 400, ce taux d'incidence de 400 pour 100 000, c'est très haut par rapport à certains pays européens, par exemple l'Allemagne vise 100 pour 100 000, pour déconfiner, pourquoi on garde un taux d'incidence aussi haut ?
OLIVIER VERAN
Nous avons déterminé des paramètres, des critères de diffusion du virus qui nous permettent d'être pleinement efficace avec le fameux tester/alerter/protéger. Nous avons défini également des paramètres qui nous guident dans les prises de décisions, on n'est pas lié, pieds et poings liés par des chiffres, mais la pression sanitaire, la pression hospitalière, je ne l'oublie pas, il y a encore 5 800 patients atteints du Covid et en réanimation, et les soignants le savent bien, qui continuent de se mobiliser nuit et jour. Mais nous tenons compte aussi du paramètre nouveau qui est la vaccination. Nous avons protégé plus de 10 millions, bientôt… plus de 15 millions d'ailleurs de Français ont reçu une première injection de virus (sic), les plus fragiles d'entre nous…
MARC FAUVELLE
De vaccin, pas de virus.
OLIVIER VERAN
De vaccin, pardonnez-moi le mauvais lapsus…
MARC FAUVELLE
Vous n'êtes pas le premier à la faire, celle-là.
OLIVIER VERAN
… des personnes, des Français qui allaient le plus en réanimation, le plus à l'hôpital, ceux qui faisaient des formes graves. Et donc pour un niveau de circulation du virus identique aujourd'hui, nous considérons qu'il y a moins de risque d'avoir des formes graves et de la mortalité. Mais encore une fois, ça ne veut pas dire relâcher notre vigilance, mais ça les Français l'ont parfaitement compris.
MARC FAUVELLE
Depuis le début de la campagne de vaccination, ça fait quasiment 4 mois aujourd'hui, combien de doses de vaccins ont fini à la poubelle ?
OLIVIER VERAN
Très peu. Je vais vous dire, on avait…
MARC FAUVELLE
Très peu, c'est combien ?
OLIVIER VERAN
Je vais même vous dire quelque chose, quand on a commencé à organiser la campagne de vaccination, les experts, ceux qui ont l'habitude des campagnes, considéraient qu'avec un vaccin à ARN Messagers comme celui-ci on pouvait prévoir un taux de perte supérieur à 20 %, certains disaient 30, pourquoi pas. Nous on a dit qu'on voulait qu'il soit le minimal possible. Aujourd'hui, même en tenant compte des doses qui nous sont livrées, mais qui n'ont pas encore été injectées, ou des doses qui sont livrées mais qui n'ont pas encore été attribuées aux centres, si je prends l'exemple du Pfizer, nous montons à 93 % d'utilisation des doses, ça veut dire que l'on est quasiment…
MARC FAUVELLE
Et pour l'AstraZeneca ?
OLIVIER VERAN
… à 100 % d'utilisation des doses…
MARC FAUVELLE
Et pour l'AstraZeneca ?
OLIVIER VERAN
Pour l'AstraZeneca, nous sommes là à plus de 75 % d'utilisation des doses qui nous ont été attribuées.
MARC FAUVELLE
Ça fait un gros écart avec les autres vaccins.
OLIVIER VERAN
En Moderna nous sommes entre 75 et 80 %, pour d'autres raisons, parce que le Moderna on l'utilise aussi dans des opérations d'aller vers, dans des quartiers fragiles, aux territoires ultra-marins, ce qui fait qu'il peut y avoir parfois des doses qui mettent un peu plus de jours avant d'être utilisées, mais nous continuons d'implémenter, de maximiser l'utilisation de ces vaccins. Mais, si votre question, parce que je la vois venir, c'était : est-ce que des centres sont obligés de balancer des vaccins à la fin de la journée, parce qu'il y a personne, la réponse est non, les centres savent très bien comment fonctionne, ils ouvrent des flacons en fonction des rendez-vous qui sont pris, les autres ne sont pas gâchés, et deux, lorsqu'ils ont des créneaux disponibles, évidemment qu'ils appellent des personnes qui peuvent se faire vacciner.
MARC FAUVELLE
Pourquoi le chiffre des doses jetées, même s'il est très faible, n'est pas public ? On ne connait pas précisément ou on ne peut pas le donner ?
OLIVIER VERAN
S'il y avait des doses qui étaient jetées, je vous dis, ce n'est pas la norme, ce n'est pas la règle, et c'est exactement l'inverse de ce que nous demandons, et les centres sont tenus par des médecins, par des élus, par des infirmières, par des administratifs, des collectivités que je salue. Croyez-moi, leur vocation c'est d'être dans une salle fermée de 08h00 du matin à 20h00, à voir défiler des centaines des Français pour les vacciner, c'est certainement pas de bazarder des doses de vaccins en fin de journée.
JEAN-JEROME BERTOLUS
Mais Monsieur le Ministre, pourquoi… On le voit aujourd'hui tous les jours dans les grands centres de vaccination il y a des grandes files d'attente, il y a des gens qui essaient de se faire vacciner, même s'ils ne remplissent pas tous les critères, pourquoi ne pas élargir beaucoup plus largement la vaccination et donc le rythme de vaccination ?
OLIVIER VERAN
Je vais vous expliquer factuellement les choses. Hier nous avons battu le record, nous avons fait près de 550 000 injections en 24 heures, c'est notre record quotidien, donc quand j'entends qu'il y a des gens, qu'il y a des centres qui ne trouvent pas preneur, je leur dis juste que l'on a battu le record du nombre d'injections réalisées hier. Ensuite, quand vous avez le matin quelques milliers de créneaux qui sont disponibles dans des centres, sachez que depuis le début de la campagne vaccinale en moyenne c'est entre 10 et 15 000 rendez-vous qui sont donnés à la journée même, et donc ce n'est pas quelque chose de nouveaux.
MARC FAUVELLE
Il y en a plus de 300 000 en ce moment, de disponibles, de créneaux.
OLIVIER VERAN
Mais à 50 jours, attention, il y a des confusions. A 50 jours il y a un peu plus de 200 000 créneaux qui étaient ouverts, d'ailleurs beaucoup se remplissent, hier on a augmenté le nombre de prises de rendez-vous de 84 % sur Doctolib par rapport à ce qu'on connaissait. Bien, et aujourd'hui on va encore faire un très gros chiffre de vaccination. Ensuite il y a 4 millions de Français qui ont plus de 60 ans, qui sont très fragiles, et qui n'ont pas encore eu leur rendez-vous. Par contre il y a des disparités territoriales. Un, il y a des endroits où on a mis énormément de vaccins, parce que la situation épidémique y était inquiétante, comme les Alpes-Maritimes. Deux, il y a des endroits dans lesquels on a mis beaucoup de vaccins, parce qu'il y a eu des centres de vaccination supplémentaires, ces fameux vaccinodromes, et certains ont ouvert tardivement quand ils ont su précisément le nombre de vaccins qu'ils auraient, les rendez-vous. Rien n'est perdu, rien n'est jeté, et le président de la République a fait une annonce hier importante : il y a un certain nombre de Français qui âgés de 18 à 55 ans souffrent de maladies chroniques, au premier rang desquels l'obésité…
JEAN-JEROME BERTOLUS
Ah non non, il a parlé des personnes qui souffrent d'obésité…
OLIVIER VERAN
Il a parlé de l'obésité parce que l'obésité est la première maladie chronique ou le premier facteur de risque, en dehors de l'âge, qui expose aux formes graves. Mais nous ouvrons évidemment la vaccination également aux gens qui présentent des comorbidités, comme de l'hypertension du diabète, de l'insuffisance rénale, cardiaque ou des cancers. Donc ça fait…
MARC FAUVELLE
C'est dès demain tout ça ?
OLIVIER VERAN
C'est à partir de demain, oui.
MARC FAUVELLE
Ça représente combien de personnes en France ?
OLIVIER VERAN
Au total ça fait, nous élargissons la vaccination à quelque 4 millions de Français fragiles. Vous avez compris la logique : d'abord les personnes les plus âgées, celles qui vont en réanimation le plus souvent, qui sont exposées au risque de forme grave, ensuite les personnes qui par leur état de santé présentent aussi des risques de faire des formes graves. C'est eux qui nous priorisons, et c'est parce que nous avons cette priorité, parce que nous la tenons depuis le premier jour, que la mortalité en France a été plus faible au cours de la vague, que ce qu'elle aurait été les vagues précédentes. Et c'est parce que nous avons priorisé les publics fragiles, que nous pouvons en sérénité commencer à parler de réouverture progressive dans notre pays.
MARC FAUVELLE
Voilà, 4 millions de personne désormais prioritaires à partir de demain pour la vaccination, c'est ce que vous nous annoncez ce matin Olivier VERAN.
Toujours avec le ministre de la Santé Olivier VERAN. 4 millions de Français éligibles à la vaccination, 4 millions supplémentaires à partir de demain, quelles seront les étapes suivantes ?
OLIVIER VERAN
Les étapes suivantes, le président de la République les a indiquées, ce sera l'âge, nous descendrons la tranche d'âge les 50/60 ans, vous le savez ce sera à la mi-mai. Là nous avons donc encore peut-être 6, 7 millions de rendez-vous de vaccination à accorder aux Français, sachant que nous sommes sur un rythme désormais moyen de 2 millions, 2,5 millions de primo-vaccinations par semaine, donc vous voyez que ça cela va nous emmener à la mi-mai, et ensuite on pourra encore accélérer, et j'entends parfaitement…
MARC FAUVELLE
Et ça va continuer comme ça par tranche d'âge, 50 ans, 40 ans, 40 ans, 30 ans, où il y a un moment où on ouvrira en grand les vannes ?
OLIVIER VERAN
Il y a un moment où à la fois nous aurons protégé les plus fragiles, et à la fois nous aurons des livraisons de vaccins plus importantes encore, donc il y a un moment donné où…
JEAN-JEROME BERTOLUS
A peu près à quel moment, pour vous, vous pouvez nous donner un horizon Monsieur le Ministre ?
OLIVIER VERAN
D'abord j'entends parfaitement à la demande de jeunes qui disent : mais moi j'ai envie de me protéger, et j'espère, et c'est une bonne nouvelle. Je dis simplement que si nous disions aujourd'hui à 40 millions de Français « Vous pouvez prendre rendez-vous », alors que sur les 550 000 vaccinations qui ont été faites hier il y a peut-être 10 000 vaccinations qui ne correspondaient pas encore à des personnes âgées et fragiles, vous comprenez bien l'effet déceptif, l'effet embouteillage, et ce n'est pas rendre service aux centres de vaccination que de voir affluer des masses de personnes. Donc encore une fois j'entends l'envie de vaccination, je l'accompagne, et je souhaite qu'elle dure. Nous aurons besoin au mois de juin, au mois de juillet, au mois d'août, qu'il y ait beaucoup de Français qui souhaitent se faire vacciner, quand bien même l'épidémie semblerait derrière nous, ou en tout cas que le niveau de circulation du virus serait faible. Donc cette envie il faut la conserver dans la durée. Nous accélérons encore une fois au maximum de ce que nous pouvons, en fonction des doses qui nous sont livrées, et les bonnes nouvelles continueront d'arriver semaine après semaine.
MARC FAUVELLE
Vous avez vu Olivier VERAN que certaines villes, Antibes, Cannes, Grenoble, que vous connaissez bien, s'affranchissent des règles que vous venez de rappeler à l'instant et vaccinent tout le monde ou certaines catégories qui ne sont pas jugées aujourd'hui comme prioritaires. Qu'est-ce que vous leur dites ? Qu'elles ont tort de le faire, et que vous allez fermer ces centres de vaccination par exemple ou pour qu'elles peuvent continuer à le faire ? Et qu'est-ce que vous dites à ceux qui en profitent pour se faire vacciner ?
OLIVIER VERAN
Moi je suis pragmatique, ce que je veux, c'est qu'une personne âgée de 75 ans qui n'ait pas encore pu trouver son rendez-vous, puisse se faire vacciner, y compris quand ce n'est pas dans sa commune, avant que son petit-fils de 20 ans puisse se faire vacciner dans la commune.
MARC FAUVELLE
Ce n'est pas forcément ce qui se passe dans …
OLIVIER VERAN
… absolument pas ce qui se passe, il y a des départements dans lesquels il reste encore beaucoup de gens fragiles à vacciner, mais dans les villes de ces départements on vaccine tous les habitants de la ville quel que soit l'âge. Moi je dis que la solidarité territoriale, elle commence par aller chercher y compris les gens qui n'habitent pas votre commune, y compris les gens qui habitent à 20 ou 30 km, voire pourquoi pas de permettre à des communes qui sont un peu plus éloignées que la vôtre mais qui ont encore une liste d'attente importante, de disposer de vaccins supplémentaires. Donc je dis : « faisons attention », et d'ailleurs c'est le cas dans l'immense majorité des cas. Vous avez cité Grenoble, Grenoble a démenti hier avoir ouvert la vaccination à tous âges, et j'ai eu les responsables des centres. Vous savez, c'était quand, avant-hier, j'ai fait une visioconférence avec les 1 700 centres de vaccination de ce pays…
MARC FAUVELLE
A Cannes, c'est bien le cas.
OLIVIER VERAN
Il y avait 8 500 personnes qui étaient présentes pour cette visioconférence. On a pu échanger à bâtons rompus pendant plus d'une heure. Les questions qui étaient posées c'était d'ordre technique, d'ordre médical, mais la demande qui m'était faite n'était pas…
- Brouhaha
JEAN-JEROME BERTOLUS
Excusez-moi, et donc est-ce qu'il y aura, est-ce qu'il y a eu ou est-ce qu'il pourrait y avoir des sanctions à l'égard des centres de vaccination qui ne respectent pas, pour vous citer, le principe de la solidarité au niveau du territoire ?
OLIVIER VERAN
Il m'est arrivé, il m'arrive encore d'appeler certains responsables de centres ou certains maires, pour discuter de la situation avec eux, il arrive aussi que dans le dialogue contractuel entre l'Agence régionale de santé, le préfet et les centres, il y ait un certain nombre de messages qui soit passés. Encore une fois sur 1 700 centres de vaccination on parle de 3, 4 ou 5 centres. Je veux bien qu'on en fasse systématiquement la règle, je ne suis pas sûr que ce soit respecté tous les autres centres qui mobilisent 150 000 personnes par jour et qui permettent actuellement, chaque seconde, de vacciner 6 à 7 Français H 24.
MARC FAUVELLE
Vous avez donné un chiffre il y a quelques instants, Olivier VERAN…
OLIVIER VERAN
Depuis que … il y a plus de 100 Français qui ont reçu une injection de vaccin. Voyez, c'est comme ça que ça fonctionne la vaccination dans notre pays. Donc, parlons des choses qui fonctionnent.
MARC FAUVELLE
Vous avez donné un chiffre il y a quelques minutes, je crois, vous avez dit : il y a 10 000 personnes chaque jour qui sont vaccinées alors qu'elles ne répondent pas aux critères, c'est bien ça ?
OLIVIER VERAN
On estime à peu près, c'est-à-dire c'est des gens qui viennent en fin de journée ou qui…
MARC FAUVELLE
Ah oui, ce ne sont pas forcément des gens qui contournent…
OLIVIER VERAN
Encore une fois, la règle de prise de rendez-vous par anticipations, ce sont des gens fragiles, pour les protéger eux avant tout, parce que le seul critère qui compte c'est : évitons aux gens de faire… des risques de faire des formes graves. Si vous avez un flacon qui est ouvert en fin de journée, qu'il vous reste 4 injections, ne jetez pas les doses…
MARC FAUVELLE
Ce ne sont pas des gens qui trichent ;
OLIVIER VERAN
… vous appelez des gens, et si vous faites 4 injections par, fois 1 700 centres, vous arrivez quasiment aux 10 000. Donc là règle, c'est qu'on vaccine les plus fragiles.
JEAN-JEROME BERTOLUS
Pour l'AstraZeneca, vous avez parlé de pragmatisme, est-ce que par exemple il ne serait pas possible pour les gens qui ont moins de 55 ans, qui souhaitent se faire vacciner, qui le souhaitent. Ardemment, eh bien de signer une décharge et de se faire vacciner avec l'AstraZeneca. Est-ce que c'est une hypothèse sur laquelle vous réfléchissez ?
OLIVIER VERAN
Vous avez 3 façons de procéder. Vous avez la façon à l'espagnol, en Espagne on vous donne rendez-vous, on ne vous dit pas avec quel vaccin vous serez vacciné et quand vous arrivez sur place vous apprenez que c'est de l'AstraZeneca ou du Pfizer. On ne le souhaite pas. On pourrait le faire mais on ne le souhaite pas, on a préféré organiser les choses en transparence et en anticipation pour les Français. La deuxième manière c'est la méthode allemande, qui est une méthode où certaines régions ont dit : quel que soit votre âge vous pouvez recevoir de l'AstraZeneca, on vous explique les risques et vous signez une décharge. J'ai saisi les la Haute autorité de santé sur ce sujet, en disant : est-ce que c'est quelque chose qu'on peut proposer aux Français, est-ce qu'on empêche ou non ? J'attends sa réponse, pour l'instant les premiers échos que j'ai ne sont pas forcément très emballés par cette idée, mais à la rigueur peut-être qu'on pourra trancher en ce sens-là et donner la liberté de choix aux Français, en leur apportant une information claire, loyale, appropriée, aujourd'hui ce n'est pas ça. La troisième méthode, c'est la méthode française, c'est-à-dire que nous appelons toutes les personnes qui peuvent se faire vacciner sans risque, en leur disant : allez-y, ce vaccin il est là pour vous. Hier près de 45 000 Français ont reçu une injection d'AstraZeneca, donc on parle ainsi à nouveau beaucoup de la défiance, mais on ne parle pas suffisamment des dizaines de milliers de médecins, de pharmaciens, d'infirmiers, qui en ville tous les jours vaccinent beaucoup de Français avec AstraZeneca. Donc on n'est pas dans la situation telle qu'elle pourrait je dirais transparaître quand on en parle dans la Presse. On n'est pas à l'arrêt dans la vaccination, elle a même plutôt tendance à augmenter ces derniers jours.
MARC FAUVELLE
On n'a pas parlé des professions prioritaires, les 17 professions dont les plus de 55 ans aujourd'hui sont éligibles au vaccin. A quel moment est-ce qu'ils vont arriver dans le calendrier vaccinal, à quel moment est-ce que l'ensemble de ces professions, les enseignants, les forces de l'ordre, pourront se faire vacciner ?
OLIVIER VERAN
Des précisions seront apportées prochainement, ce sera une intervention probablement du Premier ministre et de moi-même dans le cadre d'une conférence de Presse où nous affinerons encore cette question-là.
MARC FAUVELLE
Ah, c'est le retour de la conférence de Presse du jeudi ?
OLIVIER VERAN
Il y en a eu la semaine dernière, vous savez, ce qui compte en fait c'est de passer l'information aux Français, c'est qu'ils puissent la trouver de la façon la plus diffuse qu'il soit, la conférence de Presse est sans doute une méthode qui permet à tous les canaux media qui le souhaitent de diffuser l'information, et les Français qui souhaitent l'avoir en direct, peuvent l'avoir en direct.
MARC FAUVELLE
Toujours avec le ministre de la Santé Olivier VERAN. Est-ce que comme aux Etats-Unis, Olivier VERAN, les personnes vaccinées qui ont reçu les deux doses ou la dose s'il s'agit du vaccin Janssen pourront bientôt tomber le masque à l'extérieur ?
OLIVIER VERAN
Alors je l'espère mais je ne le sais pas encore puisqu'il faudra pour cela l'avis des autorités scientifiques, du Haut Conseil de santé publique etc. On a de plus en plus d'arguments qui nous permettent de penser que la vaccination protège de la contamination. Auquel cas nous pourrons lever aussi progressivement ces contraintes pour les Français. Si votre question c'est : est-ce que nous souhaitons pouvoir ne pas porter de masque sur la plage quand il fera chaud cet été ?, la réponse est évidemment oui pour des critères de confort, des critères esthétiques, il faut que ça fasse sens. On aura l'occasion de communiquer prochainement sur ces sujets, quand j'aurai toutes les réponses.
JEAN-JEROME BERTOLUS
Trois personnes testées positives avec le variant indien, une personne dans le Lot-et-Garonne, deux personnes dans les Bouches-du-Rhône. Est-ce que vous pouvez nous confirmer ce matin que ces personnes n'ont aucun lien entre elles ? Et comment ça s'est passé depuis qu'elles ont été testées positives avec ce variant ?
OLIVIER VERAN
Ces trois personnes n'ont pas de lien entre elles. Je vais vous donner le dernier cas dont j'ai eu à connaître hier soir dans les Bouches-du-Rhône, quelqu'un qui est arrivé depuis les Pays-Bas en provenance d'Inde antérieurement, qui a été testé à l'aéroport en test antigénique. Positif, isolé, confirmé en laboratoire PCR, placé par arrêté préfectoral en isolement contraint dans un hôtel, de manière à ce qu'il ne sorte pas, et donc toutes les précautions ont été prises. Le contact tracing a été immédiatement activé, notamment à destination des passagers qui étaient dans un périmètre autour de ce passager dans l'avion, et tous les systèmes sanitaires sont en alerte.
MARC FAUVELLE
On a les résultats des autres passagers de cet avion.
OLIVIER VERAN
C'est ce qu'on appelle vraiment une intervention au plus près, une intervention très active et ça se fait quasiment en temps réel désormais. On est capable de le faire.
MARC FAUVELLE
Et on connaît les résultats pour les autres passagers qui étaient autour de cette personne dans l'avion ?
OLIVIER VERAN
Les autres passagers ont forcément bénéficié d'un test à l'arrivée, puisque cette personne-là l'avait été. Elles vont être contactées, on va leur demander de rester chez elles et de réaliser un test PCR qui bénéficiera d'un séquençage génétique, qui est une technique de pointe en laboratoire de recherche notamment, pour déterminer si oui ou non ils sont à risque de porter ce variant. Le variant indien, il circule dans beaucoup de pays aujourd'hui autour de nous, notamment en Angleterre d'ailleurs parce qu'ils ont des relations avec l'Inde qui sont sans doute plus poussées, et puis ils n'ont pas tout de suite fermé les frontières. Ces trois premiers cas ne sont pas une surprise en soi. Ils nécessitent une intervention immédiate des services sanitaires, ce que nous faisons, et je viens de vous donner l'exemple.
JEAN-JEROME BERTOLUS
Mais ç'a été immédiat ? Par exemple, il y a une personne qui sur les trois cas a été testée le 9 avril. On l'a appris seulement il y a quelques heures. Est-ce que cette personne… Qu'est-ce qui s'est passé depuis le 9 avril ? Est-ce qu'elle a été isolée effectivement ou alors est-ce qu'elle était susceptible de transmettre ce variant à d'autres personnes ?
MARC FAUVELLE
Et ça veut dire accessoirement qu'elle est entrée en France avant la mise en place des mesures sanitaires avec l'Inde et la quarantaine.
OLIVIER VERAN
Oui, bien sûr. Avant même que le variant indien soit le variant indien. Donc lorsque les personnes sont testées positives, le séquençage que nous faisons - c'est-à-dire que nous prenons les tests positifs, nous regardons le génome, la carte génétique ; ça, ça prend quelques jours et on peut avoir la réponse un peu plus tard - et donc ensuite on fait du rétro tracing, c'est-à-dire qu'on va chercher toutes les personnes avec qui il a été en contact, les personnes qui auraient pu la contaminer s'il n'y a pas de voyage en Inde. Nous faisons aussi des criblages de tests PCR. Je ne sais pas rentrer dans les détails techniques, mais vraiment sachez qu'on se donne tous les moyens. Aujourd'hui si vous êtes positif, on vous demande systématiquement, quand on vous appelle, si vous avez voyagé en Inde dans les quinze jours qui ont précédé ou si vous avez été en contact avec quelqu'un qui a voyagé en Inde.
MARC FAUVELLE
Oui. Pour revenir sur le cas que citait Jean-Jérôme BERTOLUS il y a quelques instants, vous vous étiez au courant depuis trois semaines puisque cette personne a été testée le 9 avril…
OLIVIER VERAN
Non, non, non.
MARC FAUVELLE
Ou vous l'avez appris hier aussi ?
OLIVIER VERAN
On l'a appris avec les résultats du séquençage. En fait on prend des milliers de tests PCR positifs dans tout le pays et on en fait la cartographie génétique. Pour dépister éventuellement des variants connus comme le variant indien désormais, ou le sud-africain ou le brésilien, mais aussi pour voir si des nouveaux variants apparaissent. C'est ainsi par exemple qu'on avait diagnostiqué et neutralisé le variant breton à Lannion, souvenez-vous.
MARC FAUVELLE
Mais ça veut dire que pendant trois semaines, cette personne ne savait pas qu'elle avait le variant indien.
OLIVIER VERAN
Cette personne ne le savait pas. Nous-mêmes nous ne le savions pas.
MARC FAUVELLE
Et qu'elle n'a pas été soumise à une quarantaine.
OLIVIER VERAN
Nous ne le savions pas puisque ce variant n'était pas identifié en séquençage d'ailleurs d'une part, mais cette personne a été mise en quarantaine parce qu'elle avait un test PCR positif. Elle n'avait pas les mesures de quarantaine renforcées comme celles que j'ai décrites désormais pour le passager qui est arrivé par Marseille.
JEAN-JEROME BERTOLUS
Est-ce qu'on sait l'efficacité des quatre vaccins aujourd'hui disponibles en France par rapport à ce nouveau variant qu'on appelle double mutant ?
OLIVIER VERAN
Il y a encore des zones d'incertitude comme pour les autres variants. Désolé pour ça mais toute la communauté scientifique travaille pour déterminer les deux critères essentiels. Est-ce qu'il est plus contagieux ? Est-ce que, il y a un risque d'échappement immunitaire ? C'est-à-dire est-ce qu'on risque de ré-attraper ce virus-là, y compris quand on est vacciné ? Nous n'avons pas encore les réponses. Le système sanitaire indien n'est pas le système sanitaire européen et les images terribles sur nos écrans de deux ou trois malades par lit qui se passent le masque d'oxygène, ces images-là sont aussi liées à la situation du système sanitaire. Mais je ne néglige pas et certainement pas la dangerosité potentielle de ce variant indien, raison pour laquelle nous le calfeutrons partout où nous l'identifions, nous le traquons partout où il peut être et nous faisons de la recherche active pour mieux le connaître.
MARC FAUVELLE
Mais on ne sait absolument rien aujourd'hui de l'efficacité des vaccins sur ce variant.
OLIVIER VERAN
Nous ne savons pas encore l'efficacité puisqu'il n'y a pas encore eu de résultats de toutes les analyses internationales. C'est mondial, c'est au niveau mondial que les choses se passent. Mais on avait raison d'espérer évidemment, comme d'habitude, que les vaccins soient efficaces. Vous savez très bien que je ne vous dis pas des choses dont je n'ai pas encore la certitude absolue, ce qui m'évite de dire des bêtises et d'être contredit après.
MARC FAUVELLE
Une dernière question, Olivier VERAN. Où sera le ministre de la Santé le soir ou dans l'après-midi du 19 mai, le jour où les terrasses notamment - pas uniquement elles - rouvriront ? Est-ce que vous vous offrirez comme beaucoup de Français un peu de liberté ?
OLIVIER VERAN
Moi je suis comme tous les Français : j'aime profondément mon pays, son art de vivre, j'aime faire la fête, j'aime profiter des cafés. Donc j'irai dans un café…
MARC FAUVELLE
Pour la fête, il y aura le couvre-feu encore.
OLIVIER VERAN
Je suis ministre de la Santé, donc je boirai sans doute plus un café qu'une bière pour montrer quand même l'exemple. Même si, je ne vais pas vous mentir, il m'arrive de boire des bières en terrasse, en tout cas quand les terrasses sont ouvertes. Un film, je n'aurai pas le temps. Par contre une pièce, j'aimerais bien prendre le temps à un moment donné. Et puis quelques semaines plus tard, j'aurai beaucoup de plaisir à retourner en salle de sport. Ça me manque aussi comme beaucoup de Français. Et ministre de la Santé, je n'oublie pas que le sport est indispensable pour la santé. Et oui, Jean-Jérôme BERTOLUS, il y en a…
MARC FAUVELLE
Ça manque infiniment à Jean-Jérôme BERTOLUS également.
OLIVIER VERAN
Bien sûr. Il a déjà son jogging qui est prêt disait-il tout à l'heure. On va tous après cette pandémie, on va tous se mettre au sport, au bien-être, on va bien manger, on va profiter de la vie, on profitera des nôtres. On fera attention évidemment les uns aux autres. On aura beaucoup appris de cette crise. J'en parle au passé et j'espère qu'on pourra en parler au passé le plus tôt possible. Mais franchement, la vaccination avance vite, on se protège de plus en plus. Moi j'y crois, voilà.
MARC FAUVELLE
Merci à vous Olivier VERAN, invité ce matin de France Info. Bonne journée à vous.
Source : Service d'information du Gouvernement, le 3 mai 2021