Déclaration de M. Alain Griset, ministre chargé des petites et moyennes entreprises, sur le soutien à l'activité économique face à l'épidémie de Covid-19, à l'Assemblée nationale le 5 mai 2021.

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  • Alain Griset - Ministre chargé des petites et moyennes entreprises

Circonstance : Débat à l'Assemblée nationale sur le déploiement et l'efficacité des aides octroyées dans le cadre du soutien à l'activité économique face au covid-19

Texte intégral

M. le président.
L'ordre du jour appelle la suite du débat sur le déploiement et l'efficacité des aides octroyées dans le cadre du soutien à l'activité économique face au covid-19.

(…)

M. le président.
La parole est à M. le ministre délégué chargé des petites et moyennes entreprises.

M. Alain Griset, ministre délégué chargé des petites et moyennes entreprises.
Je tiens tout d'abord à remercier le groupe Agir ensemble et son président Olivier Becht pour l'organisation de ce débat. Depuis le premier jour de la crise, nous avons fait le choix de protéger les TPE et les PME. Nous continuerons de défendre ce choix aussi longtemps que la situation sanitaire nous conduira à prendre des mesures de restriction dans l'activité des entreprises.
La stratégie du " quoi qu'il en coûte " a permis à notre économie de résister. Elle permettra à notre économie de rebondir. Le premier trimestre 2021 l'a montré, avec une croissance de 0,4%. Depuis le début de la crise, la rapidité et l'adaptabilité ont été les maîtres mots de notre action. Je remercie ici très sincèrement les parlementaires qui ont positivement appuyé l'action du Gouvernement.
L'objectif que nous nous sommes fixé avec Bruno Lemaire depuis plusieurs mois n'a pas changé : toute entreprise saine avant la crise doit, grâce au soutien de l'État, être prête au moment de la reprise. Nous ne sommes pas encore au bout du chemin, mais je peux vous assurer que le Gouvernement répondra présent pour accompagner les entreprises, y compris durant la période de reprise.
Depuis le mois d'octobre, face à la dégradation de la situation sanitaire en France, le Gouvernement s'est continuellement adapté pour répondre à la situation des entreprises. Grâce à une mobilisation de tous les instants, qu'a soulignée M. Potterie, nous avons pu identifier les manques – ces fameux " trous dans la raquette " – et en combler une grande partie. Comme je l'ai dit à plusieurs reprises, j'espère que la raquette de tennis ne sera plus, dans quelques jours, qu'une raquette de ping-pong, et que nous aurons donc répondu à l'ensemble des préoccupations des entrepreneurs.
Depuis le début de l'année, nous prenons en charge les coûts fixes non couverts des entreprises réalisant plus d'un million d'euros de chiffre d'affaires, ou ayant des charges fixes élevées, comme les salles de sport et de loisirs d'intérieur, les eaux et le thermalisme. J'ai reçu cet après-midi des représentants des discothèques, et leur ai indiqué qu'ils seraient désormais exigibles à ce dispositif. (Applaudissements sur les bancs des groupes LaREM, Dem, Agir ens et UDI-I.)
Les commerces du secteur de l'habillement, de la chaussure, de la maroquinerie et du sport bénéficieront d'une aide forfaitaire pour compenser une partie de la dépréciation de leurs stocks. Cette aide sera versée dès la fin mai, et correspondra à 80% de l'aide perçue au titre du fonds de solidarité pour le mois de novembre. Aucune démarche complémentaire ne sera nécessaire de la part des entreprises. Je salue le travail de la députée Stella Dupont sur ce sujet et l'assure de mes échanges réguliers avec la Fédération nationale de l'habillement (FNH).
Les commerces multiservices, qui ne sont pas éligibles au fonds de solidarité parce qu'ils ne perdent pas 50% de leur chiffre d'affaires, bénéficieront d'une aide à la prise en charge d'une partie de leurs coûts fixes. Le décret permettant l'application de cette mesure sortira dans les prochains jours. (Applaudissements sur les bancs du groupe LaREM.)
Enfin, les entreprises ayant racheté un fonds de commerce et qui ont été administrativement fermées bénéficieront également d'une compensation de leurs coûts fixes – là encore, le décret sera publié prochainement.

Mme Stella Dupont.
Très bien !

M. Alain Griset, ministre délégué.
Mesdames et messieurs les députés, je pense que l'État a été au rendez-vous des besoins des entreprises, en instaurant des dispositifs simples d'accès qui, pour beaucoup, ont avant tout bénéficié aux plus petites entreprises. Par exemple, 93% des 700 000 entreprises bénéficiaires des PGE sont des PME, et plus de 95% des 2 millions de bénéficiaires du fonds de solidarité sont des TPE et des PME.
Autre exemple de notre réactivité : près de 400 000 entreprises ont perçu le fonds de solidarité pour le mois de mars depuis l'ouverture du guichet, le 20 avril. Cela correspond au versement de près de 2 milliards d'euros en moins de deux semaines. Je tiens d'ailleurs à saluer le travail des agents de l'administration centrale comme dans les territoires, les agents de la direction générale des finances publiques et de la direction générale des entreprises, pour le travail quotidien qu'ils assument. (Applaudissements sur les bancs du groupe LaREM.)
Le rapport de Benoît Coeuré confirme d'ailleurs l'appréciation très favorable des entrepreneurs sur l'action économique du Gouvernement pendant cette crise.
Une conséquence, particulièrement visible, se mesure concrètement : nous avons constaté en 2020 une baisse significative du nombre de défaillances d'entreprises, qui se poursuit au cours du premier trimestre 2021. Néanmoins, lors de la reprise de l'activité, je resterai vigilant quant à la solvabilité des entreprises et au remboursement de leur emprunt, car nombre d'entre elles craignent de ne pouvoir assumer leurs dettes.
Alors que le Président de la République a indiqué un calendrier de réouverture, j'entends la préoccupation de certains secteurs, qui ne reprendront pas une activité normale dès la levée des restrictions sanitaires : je pense notamment au secteur de l'événementiel, aux discothèques ou encore aux restaurants et aux hôtels dépendant du tourisme international, en particulier à Paris.

M. Sylvain Maillard.
Très bien !

M. Alain Griset, ministre délégué.
Je vous confirme que le Gouvernement sera aux côtés de chacun de ces secteurs : comme Bruno Le Maire l'a annoncé, nous prolongerons le fonds de solidarité dans sa forme actuelle pour le mois de mai. Puis nous l'adapterons pour accompagner la reprise d'activité : il indemnisera alors partiellement les pertes de chiffre d'affaires, même lorsque celles-ci seront inférieures à 50%. Cela permettra à la fois d'inciter à rouvrir les entreprises qui ne pourront le faire qu'en respectant une jauge contraignante, et de les accompagner dans leur reprise.
Concernant les exonérations de cotisations, nous maintenons en mai le dispositif actuel. Ce mécanisme sera par ailleurs maintenu autant que nécessaire pour les entreprises soumises à une fermeture administrative. À compter du mois de juin, le dispositif évoluera également pour s'adapter davantage à un contexte de reprise d'activité.
Enfin, le dispositif de l'activité partielle, plus adapté à une période de crise qu'à une période de reprise, sera adapté pour tenir compte de la reprise progressive de l'activité.
Tout au long de cette semaine, avec mes collègues Bruno Le Maire, Élisabeth Borne et Jean-Baptiste Lemoyne, nous menons des concertations avec l'ensemble des professionnels touchés par la crise, notamment afin d'aborder les protocoles de réouverture par étapes et les aides qui en découleront. À l'issue des concertations, nous préciserons dans les prochains jours les paramètres envisagés pour l'évolution des différents dispositifs.
Mesdames et messieurs les députés, je rappelle qu'à ce jour, malgré des restrictions sanitaires, près de 90 % de l'économie fonctionne normalement.

M. Sylvain Maillard.
Eh oui !

M. Alain Griset, ministre délégué.
Notre objectif premier est désormais d'accompagner les 10% d'entreprises restantes, comme nous l'avons fait depuis le début de la crise.
Enfin, au-delà de l'accompagnement de la reprise d'activité, nous devons accélérer le déploiement du plan de relance pour garantir une reprise solide et durable de notre économie. Notre objectif est de retrouver rapidement la situation économique d'avant la crise, moment où notre pays était redevenu l'un des plus attractifs de l'Europe et où nos entreprises connaissaient une belle dynamique de croissance et de création d'emplois.
Pour atteindre cet objectif, le Gouvernement a annoncé, le 3 septembre dernier, un plan de relance de 100 milliards d'euros axé sur trois priorités : l'écologie par la relance verte, la compétitivité par la relance de notre souveraineté économique et de notre indépendance technologique, et la cohésion par une relance sociale et territoriale. Ce plan de relance se déploie vite : 30 milliards d'euros ont déjà été décaissés. Le Président de la République a également évoqué un deuxième temps dans la relance, un temps de simplification et d'accélération des investissements.
Le succès de la relance économique dépendra de la mobilisation de tous : Gouvernement, élus, entreprises. La mobilisation de chacun a été déterminante au moment de l'instauration des mesures d'urgence, elle le sera davantage pendant les mois à venir pour sécuriser la relance de notre pays. (Applaudissements sur les bancs des groupes LaREM, Dem, Agir ens, UDI-I et LT.)


M. le président.
Nous en venons aux questions. Je rappelle que leur durée, ainsi que celle des réponses, est limitée à deux minutes, sans droit de réplique.
La parole est à M. Loïc Kervran.

M. Loïc Kervran (Agir ens).
Le 9 février dernier, il y a presque trois mois, j'ai interrogé M. le ministre de l'économie, des finances et de la relance lors de la séance de questions au Gouvernement au sujet de la multi-activité et de ce que d'aucuns appelleraient un trou dans la raquette du fonds de solidarité. J'avais alors évoqué dans l'hémicycle la situation de Maud et Benoît et leur ferme-auberge dans le Cher. Nombreux sont ceux qui se retrouvent ainsi, oubliés de la solidarité nationale et victimes d'une approche de la compensation fondée sur le chiffre d'affaires, et qui échoue donc jusqu'à présent à prendre en compte la situation de la multi-activité. Souvent, l'une des activités, ouverte, génère trop de chiffre d'affaires pour que les intéressés puissent prétendre à l'aide du fonds de solidarité, mais très peu de résultats, alors que l'activité qui générait la marge a été fermée administrativement, étranglant les entreprises et leurs gérants.
Fermes-auberges, bars-tabac, épiceries-bars, garages automobiles vendant également du carburant, autant d'entreprises qui présentent au moins deux points communs : être situées en zone rurale et être des TPE. Il y a urgence : depuis des mois, elles n'ont touché aucune aide, elles ont été laissées sur le bord du chemin.
Quels dispositifs pourraient être instaurés pour que ces activités qui le méritent, puissent bénéficier de la solidarité nationale, et sous quels délais ?

Mme Marie-Christine Verdier-Jouclas.
Très bien !

M. le président.
La parole est à M. le ministre délégué.

M. Alain Griset, ministre délégué.
Vous évoquez un sujet qui me tient à coeur et sur lequel je travaille avec mes équipes et celles de Bruno Le Maire depuis plusieurs semaines déjà. Les entreprises multiservices, en particulier dans le milieu rural, jouent un rôle économique et social de proximité particulièrement important. Or, vous avez raison, le fonds de solidarité a été construit en partant du principe que seule une perte de chiffre d'affaires d'au moins 50% d'une activité à code APE – activité principale exercée – pouvait rendre éligible au fonds : partant, les entreprises multiservices font partie des oubliés que j'évoquais tout à l'heure.
En réalité, les dispositifs instaurés ont été pensés pour traiter des dossiers en nombre, de façon quasi industrielle, et assurer rapidité et efficacité. Or nous n'avions pas les critères ni la possibilité de traiter directement et rapidement le cas des entreprises multiservices, qui bien souvent, ne déploraient pas une perte de chiffre d'affaires de plus de 50 % en raison de la multi-activité et ne répondaient donc pas au critère classique.
Nous avons beaucoup travaillé et examiné de nombreuses solutions possibles. Je conçois que cette période peut sembler longue, surtout pour ceux qui attendent, vous l'avez rappelé, mais nous avons désormais trouvé un dispositif qui permettra de les récompenser de leur patience et de répondre – du moins je l'espère – à leurs besoins et aux propositions des parlementaires. Ce dispositif sera géré non à l'échelle nationale, mais au niveau départemental. Des aides pouvant aller jusqu'à 5 000 euros permettront d'accompagner les entreprises en multi-activité, avec une rétroactivité au mois de janvier, afin de leur permettre de continuer à jouer un rôle essentiel dans nos territoires. Je remercie les parlementaires qui, à plusieurs reprises, ont insisté sur ce sujet, et les assurer que le Gouvernement a été sensible à leurs demandes. (Applaudissements sur les bancs des groupes LaREM, Agir ens et UDI-I.)

M. le président.
La parole est à M. Michel Zumkeller.

M. Michel Zumkeller (UDI-I).
Ma question porte sur la situation de certaines associations d'insertion – je ne crois pas qu'il soit nécessaire de rappeler la part qu'ont prise ces associations dans la crise sanitaire.
Pour illustrer mon propos, je prendrai l'exemple d'une association de ma circonscription, l'association Pluri'Elles, qui fait un travail remarquable et permet à de nombreuses personnes – principalement des femmes – de se réinsérer en confectionnant des vêtements professionnels, notamment à destination des hôteliers et cafetiers. Cette association s'est trouvée touchée de plein fouet par la crise.
Or, au plus fort de cette crise, le préfet du territoire de Belfort l'a sollicitée pour fabriquer des blouses et autres éléments d'habillement sanitaire pouvant servir dans les EHPAD et maisons de retraite. L'association a bien volontiers accédé à sa demande, à des coûts très faibles. Les femmes et les hommes ont travaillé tous les jours, dans des conditions extraordinaires : nous étions au coeur de la crise, il n'y avait que très peu de protections, et ils étaient donc en première ligne.
Mais au moment de faire son bilan, à la fin de l'année, l'association est en déficit de 38 000 euros. Elle demande l'aide du fonds de solidarité, mais on lui explique qu'elle n'est pas éligible, puisqu'elle a maintenu plus de 50 % de son activité. La situation est donc la suivante : des personnes ont oeuvré, comme elles le font toujours, au service de la collectivité ; elles ont oeuvré, je le répète, au quotidien et en première ligne. Et alors qu'il leur manque seulement 38 000 euros, personne ne peut les leur donner !
Ma question est donc simple : alors que le Président de la République prône souvent le « quoi qu'il en coûte », le Gouvernement est-il prêt à faire concrètement un geste et à verser 38 000 euros – c'est le prix du « quoi qu'il en coûte » dans ce cas précis – pour permettre à une association qui oeuvre pour l'insertion des femmes depuis des années de survivre, et reonnaître ainsi l'excellent travail qu'elle a fourni en plein coeur de la crise ?

M. Jean-Paul Lecoq.
Très bonne question !

M. Jean-Louis Bricout.
C'est un cas d'école.

M. le président.
La parole est à M. le ministre délégué.

M. Alain Griset, ministre délégué.
Je tiens tout d'abord à réaffirmer la volonté du Président de la République et du Premier ministre de prendre en considération le travail formidable mené sur le terrain par ces associations, comme le confirme la nomination d'Olivia Grégoire au poste de secrétaire d'État chargée de l'économie sociale, solidaire et responsable, qui accompagne parfaitement ces entreprises.
Vous évoquez un cas particulier, permettez-moi de détailler précisément ce qui a été fait pour l'association Pluri'Elles.
Je commence par saluer l'engagement de cette association, reconnue à la fois pour la qualité du service public rendu aux personnes les plus éloignées de l'emploi, dont elle favorise la réinsertion professionnelle, et pour sa mobilisation durant la crise, que vous avez évoquée ; elle a en effet confectionné des masques et des surblouses pour les personnels de santé. La structure d'insertion par l'activité économique Pluri'Elles a dû recruter du personnel pour participer à cet effort, alors que nombre de structures fermaient ou mettaient leurs employés en chômage partiel. Ces embauches ont été financièrement accompagnées et conventionnées par l'État. Pour l'année 2020, celui-ci a ainsi débloqué une aide exceptionnelle à la consolidation financière à hauteur de plus de 19 000 euros.
Par ailleurs, l'association a répondu à un appel à projets régional pour assurer son développement, consistant à moderniser son atelier de couture afin de répondre aux commandes régionales et nationales privées. Le projet a été accepté par l'État, à hauteur de 18 000 euros, auxquels s'ajoutent 9 000 euros en fonds propres. Au-delà des 288 000 euros qu'elle a reçus au titre des aides au poste d'insertion, la structure a également perçu plus de 37 000 euros pour couvrir les pertes de l'année 2020, tout en se donnant les moyens de répondre aux appels d'offre. Elle recevra prochainement un financement complémentaire de plus de 11 000 euros au titre de 2020, lié à la qualité des efforts réalisés en termes de types de publics accompagnés, d'insertion et de sortie vers l'emploi et la formation.
Soyez assuré, monsieur le député, que les services de l'État sur le territoire de Belfort sont pleinement mobilisés pour aider l'association Pluri'Elles, déjà bien connue et reconnue localement. Je vous confirme ainsi qu'au titre de l'année 2021, l'association pourra bénéficier, à hauteur de plusieurs milliers d'euros, d'une aide exceptionnelle à la consolidation des structures. L'État tient ainsi sa part d'engagement dans l'accompagnement financier de cette structure qui le mérite bien. (Applaudissements sur les bancs des groupes LaREM et Dem.)

M. le président.
La parole est à M. Paul Molac.

M. Paul Molac (LT).
Je vais moi aussi vous interroger, monsieur le ministre délégué, sur les commerces multiservices qui assurent les activités d'épicerie, de café, de restaurant, de boulangerie, de tabac, de réception de colis ou encore de vente de journaux. Nous avions évoqué ce sujet lors de notre rencontre le 26 janvier dernier à Bercy et étions alors convenus que le seuil de 50% de perte de chiffre d'affaires n'était pas pertinent. Je ne citerai qu'un exemple, celui d'une entreprise que je connais bien, qui est à la fois un bar et une épicerie, et qui emploie des salariés. Le bar est fermé, alors que c'est cette activté qui apporte la plus grande part du bénéfice. Sans que le chiffre d'affaires ait baissé, la rentabilité de l'entreprise n'est plus du tout la même qu'auparavant.
Lorsque nous nous étions vus, monsieur le ministre délégué, nous avions longuement évoqué la spécificité de ces commerces dont certaines activités sont fermées tandis que d'autres restent ouvertes, et la question de leur rentabilité. Depuis, j'ai écrit quasiment tous les mois à votre conseillère parlementaire pour lui demander la date de publication du décret. Vous nous avez indiqué que cette date était proche ; pouvez-vous nous en dire plus et préciser la façon dont vous comptez aider ces commerces multiservices ? Je sais que ce sujet vous tient particulièrement à coeur et vous en remercie.

Mme Marie-Christine Verdier-Jouclas.
Très bien !

M. le président.
La parole est à M. le ministre délégué.

M. Alain Griset, ministre délégué.
Je voudrais tout d'abord, monsieur le député, vous associer aux remerciements que j'ai formulés tout à l'heure, car vous avez fait partie de ceux qui m'avaient interpelé sur le sujet. Conformément à la façon dont j'essaye d'exercer ma fonction, je vous avais très vite invité à Bercy avec quelques uns de vos collègues, afin que nous puissions analyser la situation ensemble et construire le meilleur modèle possible. Je vous avais immédiatement fait part de ma détermination pour trouver une solution, ce qui s'est avéré plus complexe que je ne l'avais imaginé. Il nous a donc fallu un peu de temps pour trouver la solution adaptée, non seulement pour déterminer les entreprises éligibles au dispositif mais aussi pour mettre en oeuvre sur le plan opérationnel le paiement des aides qui avaient été décidées.
L'ensemble du dispositif a désormais été calé, avec d'autres collègues ministres que j'associe à cette réussite : Jacqueline Gourault, ministre la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales, et Gérarld Darmanin, ministre de l'intérieur. J'espère que le décret sera publié la semaine prochaine et que, de façon quasi immédiate, les services de l'État pourront ensuite étudier les dossiers en partenariat avec des associations locales désignées à cet effet, afin que soit mis en place un dispositif d'aides dont le montant, limité à 5 000 euros, sera décidé au niveau local. Rétroactive à partir de janvier 2020, cette aide répondra – je l'espère – aux besoins des commerces multiservices. Ceux-ci sont essentiels pour les services qu'ils rendent à la population, sur le plan économique comme sur le plan social. Je renouvelle mes remerciements aux parlementaires qui nous ont sollicités sur ce sujet.

M. le président.
La parole est à M. Hubert Wulfranc.

M. Hubert Wulfranc (GDR).
Avec mes collègues Sébastien Jumel et Jean-Paul Lecoq, que j'associe à ma question, nous profitons de ce débat pour vous interpeler de façon urgente sur un dossier brûlant : la situation du groupe Manoir Industries à Pîtres et de sa filiale ACPP près de Cherbourg. Si le groupe est aujourd'hui en redressement judiciaire, cela ne provient ni d'un manque de savoir-faire, puisque les donneurs d'ordre des secteurs de la pétrochimie, de l'énergie, du ferroviaire ou de l'industrie navale sont tout à fait satisfaits de la qualité des aciers produits, ni d'un manque de perspectives, puisque le carnet du commande est rempli. Il s'agit tout simplement d'un problème de trésorerie qui n'est pas insurmontable, pour peu que l'on considère l'enjeu que représentent les emplois industriels du groupe et de sa filière et la souveraineté industrielle de notre pays. Il s'agit en effet, vous l'avez compris, d'une filière stratégique.
Ce que nous vous demandons, c'est de guider l'engagement de fonds publics vers le soutien à cette entreprise et à sa filière. Nous demandons notamment l'organisation de deux tables rondes en urgence, à Pîtres et à Cherbourg, afin que l'ensemble des acteurs publics concernés et les grands donneurs d'ordres – dont l'État a souvent les clés – puissent aider à la mise en oeuvre d'un investissement pour l'emploi, le savoir-faire et l'outil de travail. Nous souhaitons également que soient évitées des reprises partielles, souvent fragiles. Monsieur le ministre délégué, pouvez-vous transmettre d'urgence à vos services notre demande d'organiser deux tables rondes ? Il y a là une question d'emploi à laquelle il est urgent de répondre, pour notre pays et pour la Normandie.

M. Jean-Louis Bricout.
Très bien !

M. le président.
La parole est à M. le ministre délégué.

M. Alain Griset, ministre délégué.
Comme vous l'avez bien noté, cette entreprise ne fait pas partie de celles que je suis au sein du ministère dont j'ai la charge aujourd'hui. Au nom de Bruno Le Maire et de Agnès Pannier-Runacher, qui suit ces entreprises, je vais néanmoins vous répondre. Cette filiale du groupe Manoir Industries emploie aujourd'hui, à ma connaissance, 223 salariés. Elle dispose d'un savoir-faire reconnu dans le domaine de la chaudronnerie nucléaire au service de clients stratégiques tels qu'Orano, le Commissariat à l'énergie atomique et aux énergies alternatives – CEA – ou encore Naval Group. Comme le groupe Manoir Industries, cette filiale est victime d'un manque d'investissements qui fait suite aux difficultés rencontrées par différents actionnaires du groupe, aujourd'hui défaillants.
Dès les premières difficultés, en août 2020, Bruno Le Maire a décidé d'intervenir en finançant la recherche de repreneurs crédibles, entité par entité, par l'intermédiaire d'un prêt direct de l'État au groupe à hauteur de 15 millions d'euros. Grâce à cette intervention, une liquidation judiciaire de l'ensemble du groupe, incluant le pôle chaudronnerie avec ACPP et CTI-ACDN dans la Manche, le pôle forge de Bouzonville – dossier suivi par la députée Hélène Zannier – et le site de Pîtres, a pu être évitée de justesse.
Les services du ministère ont également mobilisé différents clients du groupe, en particulier Orano, qui a très vite soutenu l'entreprise ACPP en confirmant plusieurs contrats dans le carnet de commande et en sollicitant plusieurs de ses partenaires pour chercher une solution de reprise. De nombreuses marques d'intérêt ont été exprimées et trois projets d'industriels français sont aujourd'hui en compétition. Le tribunal pourra examiner le 11 mai prochain au moins deux offres pérennes permettant de maintenir l'activité et le savoir-faire de l'entreprise ACPP sur le territoire.
Nous mesurons bien entendu les craintes et les attentes légitimes des salariés des différents sites, dont la situation est suspendue à l'espoir que de futurs repreneurs industriels redonnent un avenir pérenne à leur site. L'État a actionné tous les leviers afin d'offrir les meilleures chances à des projets pérennes de reprise industrielle et afin de définir les meilleurs accompagnements possible pour les salariés qui ne seraient pas repris. Le Gouvernement consacre par ailleurs un demi-milliard d'euros à la filière nucléaire dans le cadre du plan France Relance, preuve que la France entend affirmer sa place de leader dans le monde et que cette énergie occupera une place stratégique dans notre mix énergétique. Le ministre tient à redire à Sébastien Jumel et à vous-même, monsieur le député, sa mobilisation totale sur le sujet.

M. le président.
La parole est à M. Stéphane Buchou.

M. Stéphane Buchou (LaREM).
Avant la crise, l'activité économique vendéenne se portait bien. Évidemment, la covid-19 a mis un coup de frein brutal à une situation enviée dans beaucoup d'autres départements. Heureusement, les aides instaurées par le Gouvernement ont été nombreuses et efficaces ! Plus de 17 000 entreprises ont pu en bénéficier, pour un montant total de 118 millions d'euros. L'activité partielle a quant à elle concerné plus de 80 000 salariés. Ces mesures de soutien et d'accompagnement ont joué un rôle déterminant dans le maintien de l'activité économique du département et de ma circonscription, quel que soit le secteur d'activité concerné. J'ai visité – et continue de visiter – de nombreuses entreprises de toutes tailles dans lesquelles les carnets de commande sont pleins et les perspectives de développement, soutenues par le plan France Relance, sont prometteuses, mais où malheureusement les problèmes de recrutement sont toujours une réalité.
Je souhaite néanmoins – c'est l'objet de mon intervention – évoquer plus particulièrement le secteur du tourisme, capital dans ma circonscription littorale qui s'étend de l'Île de Noirmoutier jusqu'aux Sables-d'Olonne. L'an dernier, les entreprises du secteur ont limité la casse, la baisse globale de leur chiffre d'affaires oscillant entre 15% et 20% par rapport à celui de l'année précédente. Cette année, malgré les annonces de réouverture, la reprise s'annonce plus compliquée. Deux problèmes majeurs sont identifiés.
Le premier est celui du recrutement des saisonniers. Malgré les dernières annonces d'Élisabeth Borne et de Jean-Baptiste Lemoyne, les entreprises ont toujours beaucoup de mal à trouver de la main-d'oeuvre. Jusqu'à maintenant, celle-ci a en effet préféré s'orienter vers des secteurs d'activité comme la grande distribution dans lesquels, même si la situation sanitaire se dégradait, l'emploi serait très vraisemblablement maintenu, pour ne pas dire garanti.
Le second problème concerne les règles futures de réouverture avec jauges du secteur des cafés, hôtels et restaurants, dont chacun comprend qu'elles sont évidemment corrélées à la situation sanitaire. De telles conditions ne permettront pas d'atteindre les seuils de rentabilité minimaux : le maintien des aides sera donc nécessaire pour permettre de passer le cap et pour accompagner le retour à une vie normale.
C'est pourquoi j'appelle votre attention, monsieur le ministre délégué, sur ces points extrêmement importants, en prise directe avec le terrain, afin que nous puissions agir le plus efficacement possible en faveur de ces commerces qui sont le coeur battant de nos territoires.
Enfin, je ne peux pas conclure mon propos sans évoquer une situation que vous avez citée tout à l'heure : celle des discothèques, qui resteront fermées au moins jusqu'au 30 juin et qui, pour l'instant, n'ont aucune perspective au-delà de cette date.

M. le président.
La parole est à M. le ministre délégué.

M. Alain Griset, ministre délégué.
Vous m'interrogez sur des sujets qui me préoccupent grandement. Le département dans lequel se situe votre circonscription, la Vendée, connaît traditionnellement un taux de chômage relativement faible par rapport à d'autres départements – un taux que ma région d'origine lui envie. Depuis quelques semaines, alors que l'on parle de reprise, des secteurs qui ont été touchés depuis quelques mois – l'événementiel, le tourisme, les cafés, hotels et restaurants – nous alertent sur leurs craintes profondes de ne pas pouvoir reprendre une activité le moment venu, faute de trouver le personnel compétent et nécessaire. C'est une préoccupation réelle dont je me souviens qu'elle était déjà exprimée en février 2020 par de nombreuses organisations patronales.
L'inadéquation entre les besoins de recrutement des entreprises et la qualification des demandeurs d'emploi, qui restent très nombreux, est une particularité de notre pays. Élisabeth Borne a demandé à Pôle Emploi de mener une action résolue à destination des personnes qui recherchent un emploi pour les orienter vers les entreprises que vous évoquiez et pour les former, grâce à des outils très puissants. J'espère très sincèrement que cette action aura des résultats.
Quant aux discothèques, j'ai indiqué à leurs représentants que j'ai rencontrés cet après-midi que nous nous engagions à leur donner le 15 juin prochain une date possible de réouverture, sous réserve bien sûr de l'évolution de la situation sanitaire. Nous allons continuer à travailler avec eux et à les accompagner car nous savons combien cette fermeture de quatorze mois pèse sur ces 1600 entreprises.

M. le président.
La parole est à M. Sylvain Maillard.

M. Sylvain Maillard (LaREM).
Le soutien aux entreprises dans notre pays est sans précédent. En tant qu'élu parisien, j'ai pu constater combien le plan de relance avait permis d'aider de manière significative les chefs d'entreprise à faire face à la crise sanitaire. À Paris, plus de 55 000 PGE ont été signés pour un encours de 18,6 milliards d'euros ; 3,1 milliards d'euros ont été engagés par l'État pour le chômage partiel depuis mars 2020 ;1,4 milliard d'euros d'aides ont été versés au titre du fonds de solidarité à 142 516 entreprises. Ces chiffres, je veux qu'on les entende.

M. Jean-Paul Lecoq.
Oui, pour les régionales !

M. Sylvain Maillard.
Cependant, malgré ces aides massives, des milliers d'entreprises de ma circonscription restent fragilisées.
Citons d'abord les hôtels qui, comme le Westin dans le Ier arrondissement, dont j'ai rencontré la direction et les salariés, ont connu une année blanche. Ils vont multiplier les plans sociaux, ce qui menacera plusieurs milliers de postes malgré les aides financières reçues car le retour à la normale n'est pas espéré avant 2024.
Autre exemple : les parcs de stationnement, dont l'activité est en partie liée à ces hôtels. Les dirigeants du parking Blanche-Pigalle, dans le IXe arrondissement, entreprise familiale qui emploie quatre agents de stationnement, m'ont également fait part de leurs difficultés. Leur parking est situé au coeur de la vie nocturne parisienne et leurs principaux partenaires sont les restaurants, les théâtres, les hôtels, tous fermés depuis plusieurs mois. Pourtant, malgré une baisse significative de leur chiffre d'affaires, de 48% en moyenne, les parcs de stationnement ne figurent pas sur les listes S1, S1 bis et S2.
Monsieur le ministre délégué, je salue les évolutions du fonds de solidarité pour les discothèques. Est-il possible de poursuivre l'adaptation des critères d'éligibilité, voire de les rendre applicables rétroactivement, sous conditions, afin de permettre aux qui ont investi à Paris de poursuivre leurs activités au sortir de la crise ?
Par ailleurs, serait-il possible d'avoir des précisions sur les aides de l'État versées aux hôteliers, aux restaurateurs et autres gérants de bar à partir du mois de juin ?

M. le président.
La parole est à M. le ministre délégué.

M. Alain Griset, ministre délégué.
Merci, monsieur le député, d'avoir souligné que nous avons été au rendez-vous pour soutenir les entreprises de la capitale, dont on connaît l'importance économique. Nous savons qu'à Paris et peut-être dans quelques autres grandes villes de France, il est quasiment certain que les hôtels et certains restaurants ne pourront pas bénéficier tout de suite d'une reprise économique très forte, en l'absence de la clientèle liée au tourisme, notamment au tourisme d'affaires. Il sera nécessaire de les accompagner : c'est l'engagement que nous avons pris cette semaine auprès de leurs représentants. De très nombreux restaurants vont connaître une forte reprise, d'autres moins, et nous travaillerons dans le détail pour prendre en compte ceux qui seront en difficulté. Il y aura peu de touristes étrangers cette année en France et il sera nécessaire d'accompagner les hôtels à partir du mois de mai. Pour ce mois, le fonds de solidarité sera reconduit dans les mêmes conditions qu'en avril, mais à partir de juin, ses aides seront dégressives et nous avons prévu une clause de revoyure le 31 août pour décider d'adaptations éventuelles, en fonction de la situation.
Vous avez évoqué les parkings et appelé le Gouvernement à prendre en compte leur cas. Sachez que le Gouvernement continuera d'adapter les différents dispositifs en fonction de l'évolution de la situation, pour tenir compte de tous les secteurs d'activité parce que notre économie a besoin de l'ensemble des secteurs économiques. N'oublions pas que la France fait partie des pays qui ont le mieux accompagné, sur le plan social, les salariés et les demandeurs d'emploi. Je me tiens à votre disposition, avec mes équipes, pour examiner la situation des secteurs qui seraient encore insuffisamment accompagnés ou les cas particuliers qui appellent une action spécifique.

M. le président.
La parole est à M. Vincent Rolland.

M. Vincent Rolland (LR).
La saison de sports d'hiver 2021 aura été une saison de misère, veillons à ce qu'elle ne devienne pas mortifère. Oui, l'État a été présent auprès des acteurs économiques à travers différents dispositifs d'aide massifs mais ce soir, je voudrais parler des oubliés. Il y a des professions qui n'ont pas encore été prises en compte : coiffeurs exerçant dans les stations de sports d'hiver, cabinets d'esthétique, travailleurs indépendants ne pouvant mettre en avant une année de référence en 2019 parce qu'ils étaient blessés, en congé maladie ou en congé maternité, repreneurs ou créateurs d'entreprise de l'année 2020. Il faut de absolument trouver une solution pour tous ceux qui sont passés à côté des dispositifs.
En outre, nous avons pu constater que le dispositif de prise en charge des coûts fixes n'était pas approprié pour nos professionnels de montagne. L'Union sport & cycle, les résidences de tourisme, les centres de vacances vous ont à plusieurs reprises saisi de ce problème. Une évolution est nécessaire.
J'ajouterai que la Savoie a été fortement affectée par la non-ouverture des remontées mécaniques. Beaucoup de dossiers sont en attente auprès des services fiscaux. Leurs agents font un travail remarquable, mais je crois qu'il faudrait encore renforcer les moyens humains car les listes d'attente sont extrêmement longues.
La prochaine saison n'aura lieu qu'en décembre 2021 et pour permettre aux différents acteurs d'atteindre cette rive, il importe, de l'avis commun, de prolonger les dispositifs d'accompagnement au-delà du mois de juin prochain pour les appliquer jusqu'au mois de novembre ou de décembre. Sinon, cette saison risque fort pour beaucoup d'être mortifère : la France pourrait ne pas retrouver la première place pour les destinations de sports d'hiver qu'elle a souvent occupée.

M. le président.
La parole est à M. le ministre délégué.

M. Alain Griset, ministre délégué.
Monsieur le député, les sujets sur lesquels vous appelez l'attention du Gouvernement ne sont pas tous spécifiques à la montagne – je pense aux périodes de référence 2019 ou 2020, ou à la situation des créateurs ou des repreneurs d'entreprise – mais dans le temps réduit qui nous est imparti, je me concentrerai sur ceux qui le sont.
En Savoie, où je me suis rendu il y a quelques semaines, j'ai pu directement discuter avec les acteurs de la montagne et leur rendre hommage. Avec le Premier ministre, au cours de plusieurs réunions, nous avons eu des échanges constructifs avec ces hommes et ces femmes animés de la volonté de conserver tout son dynamisme à ce secteur économique qui fait partie des fiertés de notre pays.
Nous avons répondu massivement sur le plan financier pour accompagner les structures fermées, en particulier les remontées mécaniques, et je pense avoir entendu que ces dispositifs correspondaient aux attentes. Nous avons préservé les infrastructures de la montagne.
Vous évoquez la nécessité d'adapter les dispositifs à quelques situations en particulier. Nous avons décidé que la période de référénce serait les six premiers mois de 2021 pour permettre une comparaison de chiffre d'affaires avec les six premiers mois de 2019. Cette globalisation, qui évitera toute difficulté liée à un mois en particulier, simplifiera les choses.
S'agissant des coiffeurs, j'ai travaillé avec des responsables de l'Union nationale des entreprises de coiffure. Il est évident que les coiffeurs travaillant dans des salons situés dans les vallées ne sont pas touchés comme ceux qui oeuvrent dans les stations, qui sont peut-être en Savoie 40 ou 50 sur un total de 2 000. Nous avons demandé des dossiers pour essayer de voir si nous pouvons trouver des accompagnements spécifiques. De manière générale, nous allons prendre en compte les cas un peu particuliers, périphériques, pour répondre à la situation de l'ensemble des entreprises de la montagne.

M. le président.
La parole est à M. Bernard Perrut.

M. Bernard Perrut (LR).
Depuis le début de la crise sanitaire, l'État a mobilisé d'importants moyens pour soutenir les entreprises, et je connais votre détermination en ce domaine, monsieur le ministre délégué. Pourtant, il reste certains trous dans la raquette. Je vais évoquer devant vous une entreprise qui n'a eu accès ni au fonds de solidarité ni au dispositif de prise en charge des coûts fixes. " Le quoi qu'il en coûte, c'est zéro pour nous ", me disait, il y a quelques jours, son dirigeant .
Fabricant français de prêt-à-porter, l'entreprise Avona, qui se situe dans l'agglomération de Villefranche-sur-Saône, est fortement affectée par la crise sanitaire, plus particulièrement par les fermetures imposées des dix magasins de vente au détail de ses vêtements, mais aussi par la fermeture de ceux de ses clients indépendants. Alors que l'année dernière, cette entreprise s'était mobilisée rapidement pour fabriquer des masques, après avoir été contactée par vos services, elle ne bénéficie aujourd'hui d'aucune aide de l'État. Elle se sent seule : pourra-t-elle survivre ? Même si elle a de multiples activités, dont la vente au détail, elle est considérée par l'administration uniquement comme fabricant de vêtements. De ce fait, elle ne peut prétendre à aucune aide, alors qu'elle aurait pu toucher toucher 10 000 euros par mois pour chacun des magasins fermés s'ils avaient constitué autant de sociétés différentes.
La perte de chiffre d'affaires se monte déjà à plusieurs centaines de milliers d'euros et les reports, annulations, voire l'absence de commandes accentuent cette diminution. Les pertes de chiffre d'affaires accumulées depuis mars 2020 ne pourront plus être récupérées après la réouverture des magasins d'habillement. Près de quatre-vingts à quatre-vingt-dix emplois de stylistes, de modélistes, de patronneuses, de couturières et de vendeurs sont directement menacés, sans compter les emplois indirects des prestataires. Le patron de cette entreprise n'a d'ailleurs pas pu renouveler les CDD – de cinquante salariés l'année passée. Le plus grave est sans doute de voir que deux entreprises de grossistes, qui importent leurs vêtements de l'autre bout du monde, sont pour leur part éligibles aux aides et préservent ainsi leurs emplois. N'y-a-t-il pas ici une forme d'injustice ?
Que pouvez-vous faire pour cette entreprise qui n'a jamais été soutenue depuis le premier confinement et qui risque de ne pas survivre après ce troisième confinement ? Il est temps de prendre en considération ce secteur d'activité. Soutenir nos créateurs, les fabricants français et leur donner enfin accès au fonds de solidarité, les intégrer dans la liste S1 bis et prendre en charge leurs coûts fixes de manière rétroactive. Tel est l'appel que je vous lance, monsieur le ministre délégué. Ce soir, le dirigeant et les salariés de cette entreprise attendent de vous un signe d'espoir.

M. le président.
La parole est à M. le ministre délégué.

M. Alain Griset, ministre délégué.
Vous savez bien que je ne vais pas vous dire ici que tout est déjà réglé. J'ai eu l'occasion de rencontrer les responsables d'un nombre considérable de secteurs et de trouver pour eux, je crois, des solutions avec Bruno Le Maire, mais je dois dire que si nous nous étions déjà penchés sur la situation des grossistes et des commerces de vêtements, personne n'avait jusqu'à maintenant appelé notre attention sur les particularités des fabricants.
Vous avez raison, on peut être surpris que les grossistes aient été soutenus alors que la production vient de l'étranger, et que la fabrication française, elle, ne l'aurait pas été.
Je m'engage auprès de vous, monsieur le député, à prendre contract dès demain avec le dirigeant d'Avona pour voir comment nous pourrions accompagner cette entreprise qui fabrique sur notre territoire, qui a joué un rôle dans le contexte de la crise sanitaire et qui, de mon point de vue, mérite d'être aidée. Je vous tiendrai informé très rapidement de la solution que nous aurons trouvée.

M. Philippe Michel-Kleisbauer.
Très bien !

M. le président.
La parole est à M. Patrick Loiseau.

M. Patrick Loiseau (Dem).
Le Gouvernement a su répondre rapidement et massivement à l'urgence économique, dès le début de la crise du covid-19, avec toujours le même objectif : améliorer et ajuster le dispositif en fonction des remontées de terrain et en restant à l'écoute de l'ensemble des acteurs.
C'est ainsi que 470 milliards d'euros ont été mis sur la table pour soutenir les entreprises, en particulier les TPE et les PME : 1,7 million d'entreprises ont bénéficié du fonds de solidarité ; 600 000 se sont vu accorder un prêt garanti par l'État, soit une enveloppe de plus de 120 milliards ; enfin, l'exonération de cotisations sociales représente plus de 3 milliards pour les TPE et les PME qui ont été fermées administrativement.
Dans mon département de la Vendée, dont vous avez rappelé le dynamisme, le total des aides s'est élevé à plus de 435 millions d'euros, répartis de la façon suivante : 307 millions affectés à la cohésion et destinés à soutenir directement l'emploi – dont 231 millions versés au titre de l'activité partielle et, ce qui me semble très important, au plan « 1 jeune, 1 solution » qui a concerné plus de 5 000 jeunes – ; 112 millions consacrés à la compétitivité ; 15,2 millions dédiés à l'écologie et notamment MaPrimeRénov'.
Nous entrons désormais non seulement dans une phase de reconstruction, avec un plan de relance historique qui permettra de sauver de nombreuses entreprises, mais aussi dans une phase de transformation. En effet, il n'est plus possible de déverser des milliards d'euros de subventions, y compris dans des secteurs dont on sait qu'ils ne peuvent plus opérer comme avant. Il faut investir prioritairement dans les domaines les plus porteurs.
Monsieur le ministre délégué, comment peut-on continuer à adapter les aides à chaque cas individuel ? Quand des PGE ont été accordés, prévoyez-vous des modalités de remboursement ciblées pour certaines entreprises, qui pourraient se trouver encore en grande difficulté – elles sont nombreuses – et peu en mesure de rembourser les sommes prêtées ?

M. le président.
La parole est à M. le ministre délégué.

M. Alain Griset, ministre délégué.
Près de 700 000 entreprises ont bénéficié des PGE pour un montant de 134 milliards d'euros et l'État garantit ces prêts à hauteur de 90%. Dès l'origine, nous avons prévu un an de différé et cinq ans pour effectuer le remboursement, puisqu'il s'agit d'un dispositif encadré au niveau européen qui prévoit une durée totale de prêt de six ans. Au regard de la durée de la crise, nous avons, avec les banques, décidé d'allonger le délai de différé à deux ans, laissant ainsi quatre années pour rembourser. De nombreuses entreprises s'interrogent sur leur capacité à le faire en quatre ans et j'ai souligné à plusieurs reprises notre volonté de négocier un allongement de ce délai. Pour rassurer les entreprises concernées, je rappelle que, pour l'instant, la première échéance n'est prévue qu'en mars-avril 2022. Je comprends néanmoins leur inquiétude.
Deuxième élément très important : au-delà des aides massives consenties, vous l'avez évoqué, il faut désormais accompagner les secteurs qui ont besoin de se transformer et mieux cibler les dispositifs. Dans un premier temps, nous viserons en priorité les secteurs qui auront du mal à reprendre leur activité : l'événementiel, les cafés, hôtels et restaurants, le secteur de la culture, les salles de sport.
Enfin, Bruno Le Maire a annoncé la mise en place d'un dispositif de prêts participatifs pour un total de 12 milliards d'euros, qui ont pour objectif d'accompagner la transformation et l'investissement des entreprises. Ces prêts participatifs, qui présentent l'avantage de ne pas être considérés comme des dettes dans les bilans des entreprises, seront naturellement affectés aux entreprises porteuses de projets d'investissement et de transformation. J'ai la certitude que ce sera un outil efficace pour accompagner la reprise souhaitée, favoriser la transformation et soutenir positivement l'investissement.

M. le président.
La parole est à Mme Christine Pires Beaune.

Mme Christine Pires Beaune (SOC).
Depuis le début de l'épidémie il y a maintenant plus d'un an, l'État a mis en place un vaste système d'aides et a globalement été au rendez-vous, la plupart des entreprises, des commerces, des indépendants ayant été soutenus grâce à des dispositifs qui se sont adaptés au fur et à mesure de la prolongation de la crise. Je le reconnais bien volontiers.
Cependant, pour certains professionnels, ces aides n'ont pas été suffisantes. C'est notamment le cas des commerçants installés dans les galeries marchandes des centres commerciaux de plus de 20 000 mètres carrés. Depuis le début de la pandémie, ces commerces ont été contraints de fermer leurs portes à trois reprises : de mars à mai 2020, en novembre 2020 et, enfin, depuis le 1er février 2021. Ils devraient normalement rouvrir le 19 mai prochain, si la situation le permet, mais ils seront alors soumis à des jauges.
Pendant les mois de fermeture, ces commerçants ont pu bénéficier du fonds de solidarité. Néanmoins, les aides n'ont pas permis de couvrir les charges fixes dont ils ont eu à s'acquitter, les obligeant ainsi à puiser dans leur trésorerie, notamment lors du premier confinement où l'indemnisation était plafonnée à 1 500 euros par mois. Ils ont en outre été exclus du dispositif d'indemnisation des coûts fixes institué en mars dernier, dans la mesure où le plancher de chiffre d'affaires pour y accéder – 1 million d'euros mensuels –, privilégie les plus grosses entreprises. Pourtant, leurs frais fixes dépassent souvent les 10 000 euros versés par le fonds de solidarité. Afin de respecter le principe d'égalité, un dispositif intermédiaire aurait dû être instauré ; il aurait fallu abaisser, voire supprimer, ce plancher de chiffre d'affaires.
La reprise de l'activité ne fera pas disparaître comme par magie les difficultés accumulées par ces commerçants tout au long de l'année 2020, bien au contraire ! Leurs trésoreries sont largement entamées, voire totalement épuisées et ils devront, dans les mois à venir, rembourser le PGE.
C'est donc aujourd'hui et demain que l'État doit être présent à leurs côtés afin que la levée des restrictions sanitaires et de l'état d'urgence ne soit pas synonyme pour eux de fermeture définitive. Comment envisagez-vous d'accompagner ces commerçants dans les mois à venir ?

M. le président.
La parole est à M. le ministre délégué.

M. Alain Griset, ministre délégué.
Vous avez raison, le fonds de solidarité a considérablement évolué depuis les mois de mars-avril 2020. À l'origine, l'aide était plafonnée à un montant de 1 500 euros et limitée aux entreprises de moins de onze salariés ayant un chiffre d'affaires inférieur à 1 million d'euros. Nous l'avons fortement augmentée au mois de novembre, la portant à 10 000 euros. Enfin, depuis le mois de décembre, un double dispositif s'applique avec une aide égale soit à 10 000 euros, soit à 20% du chiffre d'affaires. Pour les groupes les plus importants, il existe un dispositif frais fixes.
Vous évoquez le cas particulier des commerces dans les galeries marchandes des centres commerciaux. Je peux vous apporter deux éléments de réponse très précis. Nous avons décidé de prendre en charge les loyers et les charges locatives de ces commerçants qui, d'ailleurs, supportent des frais dus en grande partie à leur loyer, généralement très élevé dans ce type d'endroits. Nous devons mener – c'est en cours – une négociation spécifique sur ce sujet avec la Commission européenne. Cela prendra encore quelques semaines, mais nous comptons bien aboutir et prendre en charge les loyers et les charges locatives des commerçants concernés. Tel est notre objectif.
Je rappelle en outre que ces commerçants bénéficient de l'activité partielle, de l'exonération des cotisations sociales et du fonds de solidarité qui, aujourd'hui, leur est accessible pour un montant soit de 10 000 euros soit égal à 20% de leur chiffre d'affaires. Avec la prise en charge des loyers, nous répondrons à leurs attentes et les accompagnerons au niveau nécessaire pour leur permettre de reprendre une activité correcte.
Quant aux jauges qui s'appliqueront, ce sont celles, classiques, dans les centres commerciaux, qui prennent en compte non le nombre de clients mais la superficie des magasins. J'ai confiance dans le fait que ces entreprises pourront, dès la reprise, exercer une activité normale.

M. le président.
Le débat est clos.


Source http://www.assemblee-nationale.fr, le 7 mai 2021