Déclaration de M. Emmanuel Macron, président de la République, sur les priorités de l'Union européenne en matière de politique étrangère, sanitaire, économique et d'Etat de droit.

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Circonstance : Arrivée au Conseil européen

Texte intégral

Le président de la République : "D'abord nous allons tenir un Conseil qui va couvrir beaucoup de sujets en commençant par retrouver le Secrétaire général des Nations Unies, que je félicite pour sa réélection et son nouveau mandat, et couvrir toute une série de sujets internationaux, ce qui va me permettre d'abord d'expliquer notre stratégie au Sahel mais de couvrir aussi beaucoup de thématiques en termes de relations étrangères sur lesquelles la France est engagée depuis plusieurs mois. A l'issue d'un travail collectif que nous avons mené sur la Turquie, nous allons clarifier les lignes d'un réengagement du dialogue dont je me félicite, d'un travail conjoint sur le sujet des migrations et une politique de stabilité en Méditerranée orientale.

Nous aurons à évoquer également la Russie et sur ce sujet, je considère que le travail qui a été mené, le rapport que nous avions demandé, permet véritablement d'avancer. Nous assumons d'avoir un dialogue pour défendre nos intérêts en tant qu'européens, avec exigence. Et donc nous définissons l'unité des européens dans ce dialogue avec la Russie, nous assumons ce dialogue, qui est un dialogue nécessaire à la stabilité du continent européen mais exigeant parce que nous ne cédons rien de de nos valeurs, ni de nos intérêts. Je pense que c'est la bonne méthode. Nous ne pouvons pas rester dans une logique purement réactive à l'égard de la Russie, au cas par cas, alors que de manière très légitime on a assisté il y a quelques semaines à une discussion structurée entre le président Biden et le président Poutine. Vous savez que c'est cette ligne que la France tient depuis maintenant un peu plus de deux ans et je souhaite que nous puissions, avec une vraie coordination européenne et une unité européenne, avoir ce dialogue exigeant et ambitieux.

Nous aurons également à aborder d'autres sujets internationaux lors du déjeuner puis cet après-midi. Ensuite, on parlera évidemment de la pandémie. L'Europe continue d'avancer, de déployer sa stratégie de vaccination et nous voyons les résultats qui sont là avec les réouvertures progressives. Néanmoins nous devons tous être vigilants parce que le fameux variant delta arrive, qui se diffuse beaucoup plus rapidement que les précédents variants et, on le voit, qui touche les personnes qui ne sont pas vaccinés ou qui n'ont eu qu'une seule dose et ce qui nous implique, ce qui nous impose, d'être encore plus rapide dans cette campagne de vaccination et surtout très coordonné entre européens. Pour moi l'un des enjeux de la discussion, c'est de véritablement prendre des décisions de coordination en termes d'ouverture de frontières avec les pays tiers et en termes de reconnaissance de vaccins, parce que nous devons véritablement à ce stade nous limiter aux vaccins qui ont été homologués par l'autorité européenne du médicament.

Suite à cette discussion nous parlerons aussi de reprise économique. Les plans nationaux sont en train d'être validés par la Commission, l'argent commun a été levé et donc les décisions de juillet dernier deviennent des réalités et je m'en félicite. Sur ce volet-là, je porterai aussi la stratégie de sortie de crise que nous avons bâtie, en particulier en mandatant des économistes du monde entier sous la houlette de Monsieur Blanchard et Tirole. Ils m'ont remis hier un rapport conséquent sur la stratégie climatique, la stratégie de croissance, la lutte contre les inégalités et le défi démographique. Je souhaite que ce rapport puisse être partagé avec tous les Européens pour que ce soit un coeur de doctrine de l'Europe.Nous poursuivrons ces débats demain matin avec un sommet zone euro qui permettra là aussi d'avancer car je pense qu'il nous faut aujourd'hui accélérer en termes d'ambition de sortie de crise.

Enfin, nous aurons à parler ce soir des sujets d'Etat de droit et évidemment aussi de lutte contre les discriminations et de défense de toutes les minorités. Sur ce sujet, moi je n'ai qu'une parole. Elle est simple : c'est la voix des européens. Nous avons des valeurs qui sont notre socle avant même la construction de l'Union européenne et qui en constituent le socle fondamental. Ces valeurs de l'Europe ce sont celles du Conseil, ce sont aujourd'hui celles de l'Union européenne. Elles reposent sur le respect de la dignité de chacun et donc la lutte contre les discriminations et aucune faiblesse à l'égard de celles et ceux qui mettent en danger l'Etat de droit. Il nous faut avoir une discussion entre États membres. Elle sera franche, elle sera ferme et j'attends ensuite que les institutions européennes au nom de tous et au nom de nos principes, mettent en place les procédures qui sont attendues dans ce cas.

Q - Vous allez demander à Monsieur Orban de retirer sa loi ?

Le président de la République : Je pense que dans le dialogue, on va voir ce qu'il dira, mais j'ai du respect pour la souveraineté donc j'aurais une prudence quand on vient à demander ou exiger d'un autre dirigeant de retirer un texte mais je défendrai nos valeurs. Je dirais qu'aujourd'hui la loi telle qu'elle est mise sur la table ne me paraît pas conforme à nos valeurs et à ce qu'est l'Europe. J'espère que dans ce dialogue on trouvera aussi un chemin qui lui permettra de porter ce que sont ses priorités mais en respectant pleinement nos valeurs et donc de porter lui-même un changement de ce texte.

Q - Pourquoi est-ce le moment de discuter avec M. Poutine ? M.Rutte a dit jamais à cause du MH17.

Le président de la République : Non mais il y a des dossiers qui sont contentieux que nous connaissons et ces sujets ne sont pas réglés. Nous avons aussi la question de l'Ukraine et donc nous connaissons les préconditions à des réengagements positifs. Mais sur ces sujets-là, nous ne pouvons pas rester dans une absence de dialogue. Nous devons parler, y compris de nos désaccords : c'est le seul moyen de les régler. Donc coordination des européens, unité des européens, définition de nos cinq principes et dialogue exigeant pour essayer d'ouvrir des voies et résoudre nos différends. Ca ne veut pas dire du tout qu'on oublie ces différends ou qu'on aurait quelques faiblesses".


Source https://ue.delegfrance.org, le 28 juin 2021