Texte intégral
Q - Nous accueillons le secrétaire d'Etat aux affaires européennes, bonjour Clément Beaune.
R - Bonjour.
Q - Merci d'avoir accepté notre invitation ce matin. On va revenir ensemble, si vous le voulez bien, sur les premières évacuations de ressortissants français, mais aussi d'Afghans. 184 Afghans exfiltrés ont atterri hier à Paris, un nouveau vol est attendu aujourd'hui. Combien de personnes ont besoin de protection - pour reprendre le terme des autorités françaises -, vont être accueillies en France ?
R - Ecoutez, on ne peut pas donner un chiffre exact aujourd'hui parce que nous sommes en train d'ailleurs de recenser un certain nombre de besoins très urgents, on parle sans doute de quelques milliers de personnes. Vous l'avez rappelé, nous sommes en train de mettre en place une forme de pont aérien entre Kaboul et Paris, en passant par Abou Dabi. Il y a déjà eu trois rotations des avions de nos armées, cela fait à peu près 400 personnes. Le troisième vol arrivera aujourd'hui à Paris.
Et dans ces 400 personnes, ce sont très majoritairement des Afghans qui sont précisément en besoin urgent de protection, souvent parce qu'ils travaillaient pour des structures françaises. Je précise aussi que nous avions commencé un certain nombre d'évacuations, depuis le mois de mai, pour protéger 600 personnes, afghanes essentiellement, qui travaillaient justement pour notre ambassade, pour les structures françaises présentes en Afghanistan. Nous continuerons cela. Il n'y a pas un plafond chiffré que nous mettons, mais toutes les personnes qui sont directement en urgence, menacées, nous essaierons de les évacuer le plus vite possible.
Q - Toutes les personnes, c'est très vague. Sur quels critères vous estimez que les besoins sont très urgents, pour reprendre votre terme ?
R - Alors, il y a deux choses. Il y a d'abord l'urgence absolue, ce sont les personnes, nos ressortissants bien sûr, un certain nombre de ressortissants européens, puisque la France aide aussi un certain nombre de ses partenaires. Dans chaque vol que vous avez vu, il y a quelques ressortissants de pays alliés, européens ou autres d'ailleurs, et puis majoritairement des Afghans. Cela, c'est l'urgence absolue. On parle, je le dis, de quelques milliers de personnes, je ne sais pas vous dire exactement combien, tous les jours, avec d'ailleurs des personnes de tous univers politiques.
J'étais en contact avec le député européen Raphaël Glucksmann, avec des associations. Nous recensons au ministère des affaires étrangères, avec notre ambassade, les personnes qui ont le besoin urgent de protection. Au-delà de cette urgence immédiate, de quelques jours, quelques semaines, c'est ce qu'a indiqué le Président de la République, nous serons aussi au rendez-vous d'un accueil, d'un asile, pour des personnes qui se trouveraient, par leurs convictions politiques, par leur militantisme, par leur engagement, des femmes surtout, menacés par le nouveau régime afghan. Nous continuerons au-delà de ce pont aérien.
Q - Justement Clément Beaune, le chef de l'Etat l'a dit, il souhaite une initiative européenne en lien avec l'Allemagne, sur l'accueil des réfugiés, mais aussi la lutte contre l'immigration clandestine. Faut-il des objectifs chiffrés, par pays, en matière d'accueil ?
R - Alors, vous avez raison de le rappeler, parce que le propos du chef de l'Etat a été, malencontreusement, je pense, délibérément dans certains cas, tronqué. L'initiative européenne, ce n'est pas sur les flux migratoires irréguliers que le chef de l'Etat s'est prononcé.
Q - La deuxième partie de la phrase.
R - Il y avait plusieurs éléments, dont la solidarité dans l'accueil, avant tout la solidarité dans l'accueil. Pourquoi ? Parce qu'au niveau européen, on doit s'organiser et accueillir tous, au titre de l'asile. La France le fait en premier lieu, en premier lieu en Europe, des Afghans qui sont en difficulté. Et il faut définir, justement, ces critères. Si vous avez un pays européen qui n'accueille personne, ou qui accueille différemment de la France ou de l'Allemagne, cela ne marchera pas. Donc c'est ce que nous ferons dans les prochains jours, d'abord avec l'Allemagne, et sans doute, dans les jours qui viennent, avec tous nos partenaires européens.
Q - Cela veut dire qu'il y aura un sommet européen extraordinaire consacré à cette question ?
R - Je ne sais pas vous le dire aujourd'hui. C'est possible qu'il y ait un sommet extraordinaire européen, mais vous savez, il ne faut pas faire - au fond, notre travers en Europe - un sommet pour le principe. Il faut d'abord travailler, dans l'urgence, mais aussi dans le sérieux, pour avoir ces critères.
Je suis très surpris par le débat qui s'est noué en France depuis lundi, parce que le chef de l'Etat est le seul en Europe à s'être adressé à toutes les Françaises et les Français, à tout son peuple, pour dire "voilà ce qui est la gravité de la situation, voilà ce que fait et ce que fera la France en termes d'abord d'accueil et de soutien à l'Afghanistan". Personne d'autre ne l'a fait en Europe. Nous sommes, je le dis, pas seulement cette année, nous le serons certainement cette année, mais déjà les années précédentes, en Europe, le premier pays d'asile pour les Afghans.
Alors, vous avez ceux qui vous disent "il ne faut accueillir personne", ou ceux qui brandissent la menace de la vague migratoire qui va nous submerger. C'est irresponsable et ce n'est pas vrai, et la France se déshonorerait à se désintéresser de ce qu'il se passe en Afghanistan. D'ailleurs ce n'est même pas notre intérêt, et donc oui, nous accueillerons au titre de l'asile. Et puis vous avez ceux qui vous disent, à travers des slogans, "accueillons tout le monde". Mais le projet politique, pour l'Afghanistan lui-même, ne peut pas être d'accueillir quarante millions d'Afghans en Europe ou aux Etats-Unis. Ce n'est pas cela l'avenir qu'on propose aux femmes d'Afghanistan ou à la jeunesse d'Afghanistan. D'ailleurs je crois que si les gens étaient honnêtes, j'écoute un certain nombre d'élus écologistes ou de la France Insoumise, ils diraient la vérité. Je crois qu'aucun n'a le projet sérieux, aucun élu, aucun militant de ces partis, d'accueillir tout l'Afghanistan en Europe. Donc il faut organiser, avec des critères européens, dans l'urgence maintenant, c'est ce que nous faisons, et dans la durée.
Q - Mais vous faisiez une comparaison internationale, Clément Beaune. D'autres dirigeants, dans d'autres pays, ont fait aussi des annonces chiffrées un peu plus concrètes. Quand on entend Emmanuel Macron, tout miser sur une réponse commune européenne, est-ce que ce n'est pas une manière aussi d'éviter de prendre ses responsabilités au niveau national ?
R - Non, je le dis, nous prendrons nos responsabilités. Regardez ce qu'il se passe déjà. Depuis le début de l'année, il y a eu plus de 7 000 demandes d'asile traitées, avant la chute du régime, en provenance d'Afghanistan. Nous avons, une année normale, à peu près 10 000 demandes d'asile qui sont autorisées en France au titre de l'Afghanistan. C'est la première nationalité en France, nous sommes le premier pays en Europe, d'accueil des réfugiés Afghans.
Cette année, je peux vous le dire indicativement, on est à 10 000 d'habitude, on sera sans doute au-delà. Ce qu'a annoncé, par exemple, le Premier ministre britannique Boris Johnson hier : "20 000 personnes pourraient être accueillies d'Afghanistan", il l'a dit d'ailleurs lui-même à titre indicatif, c'est 5 000 en 2021, dans les annonces de Boris Johnson. Nous sommes déjà au-delà, nous ferons déjà plus.
Donc il ne s'agit pas d'avoir - d'ailleurs cela a été le débat au Parlement britannique hier - une espèce de cible chiffrée. Moi je ne sais pas vous dire aujourd'hui en Afghanistan, je crois que personne ne peut le faire, combien, malheureusement, de personnes auront besoin, aujourd'hui et dans les semaines qui viennent, de notre protection. Mais pour toutes celles, tous ceux, qui ont droit à l'asile, et il y en a beaucoup sans doute cette année, nous serons là, nous les accueillerons, en France et en Europe. Moi j'assume cet accueil. Si c'est quelques dizaines de milliers de personnes dans toute l'Europe, nous le ferons, parce que là nous en avons besoin, c'est notre devoir, et d'ailleurs c'est notre droit, c'est prévu dans la Constitution.
Q - Vous parliez des écologistes. Un certain nombre de maires écolos, mais aussi socialistes, ont dit être prêts à accueillir dans leur commune des réfugiés afghans. Est-ce que ce n'est pas du ressort de l'Etat ?
R - Alors oui, vous savez, c'est un peu attristant dans cette période qu'il y ait une sorte de polémique malsaine. Que des maires veuillent accueillir dans leur commune, tant mieux, mais bien sûr cela ne se fera pas contre l'Etat. C'est l'Etat, ce sont nos armées, aujourd'hui, nos diplomates, je leur rends hommage parce qu'ils sont très courageux - nous sommes, là aussi, les seuls à avoir gardé notre ambassade ouverte dans Kaboul -, qui vont rapatrier et permettre cette première étape de l'accueil. Ensuite, bien sûr, les gens vont quelque part, et donc tant mieux si un certain nombre de communes sont prêtes à accueillir. Mais cela se fait avec les services de l'Etat, avec des services départementaux, donc on n'a aucun intérêt, très franchement, à opposer les uns aux autres. En revanche, on a besoin de ne pas pratiquer le cynisme, et d'un esprit de responsabilité.
Nous accueillerons beaucoup d'Afghans, nous accueillerons tous ceux qui ont droit à l'asile, c'est défini dans notre droit, c'est défini par l'Office de protection de l'asile en France. Mais le projet européen ne peut pas consister à dire aux Afghans, pour les Afghans eux-mêmes d'abord, "écoutez, tentez votre chance, risquez votre vie, passez entre les mains des passeurs, pendant des semaines, des mois, faites-vous violenter, racketter, parfois violer, et puis si au bout du chemin vous arrivez en Europe, nous serons là". Ce n'est pas cela un projet politique humaniste. L'accueil c'est sérieux. C'est accueillir les gens dans de bonnes conditions, et c'est organiser, j'assume le mot, c'est organiser les choses pour que des personnes viennent d'Afghanistan, aidées par nous, et arrivent en France avec des critères. Ce n'est pas tout le monde, avec des paramètres. Nous le ferons.
(...)
Q - Alors, la question des réfugiés afghans que l'on évoquait il y a quelques instants, occupe une grande partie du débat aujourd'hui bien sûr, mais il y a une autre question essentielle, c'est celle de la nouvelle relation qui sera nouée, ou pas, entre les pays occidentaux et l'Afghanistan des Taliban. Et à ce propos, je voudrais vous faire écouter votre ministre de tutelle, Jean-Yves Le Drian, qui disait mardi sur France Info, que la porte du dialogue n'était pas fermée. Ecoutez le ministre des affaires étrangères.
[Extrait de l'entretien du ministre de l'Europe et des affaires étrangères avec France Info :
C'est vrai que ce n'est pas la même génération, c'est vrai qu'ils sont rentrés dans des négociations, en particulier dans les négociations avec les Etats-Unis. Ils déclarent vouloir acquérir de la respectabilité, de l'honorabilité, et c'est à eux de faire la preuve. Ils ont annoncé qu'ils respecteraient les droits acquis au cours des vingt dernières années en Afghanistan, il faut qu'ils le démontrent."]
Q - Jean-Yves Le Drian a dit souhaiter un gouvernement inclusif, il a été très critiqué pour ses propos. Fait-il preuve de naïveté ?
R - Non. Je crois que Jean-Yves Le Drian, qui connaît par coeur les sujets internationaux, ne fait preuve d'aucune naïveté en la matière. Soyons clairs, il n'y a aucun contact politique, il n'y aura aucune complaisance, aucune connivence de quelque sorte que ce soit, avec le régime taliban. Il n'y a pas de talibanisme soft.
Ce que Jean-Yves Le Drian a rappelé, il l'a clarifié encore hier, c'est qu'il y a malheureusement une victoire militaire, on l'a vu ces derniers jours, des Taliban, en Afghanistan, à Kaboul, et il y a un processus politique qui se déroulait entre Afghans, depuis un certain nombre de mois, et dont on ne peut que souhaiter qu'il se poursuive. On a aujourd'hui le pire en Afghanistan, on ne peut pas souhaiter pour ce pays le pire du pire, et dire qu'aucun processus politique ne va continuer.
Il y a des discussions, je suis prudent, parce qu'elles sont en cours, et je ne sais pas ce qu'elles donneront, entre l'ancien Président Hamid Karzaï, entre les anciennes autorités afghanes, M.Abdullah Abdullah, les Taliban qui sont arrivés récemment de fait au pouvoir. Si les choses sont un peu moins pire, si je puis dire, qu'on ne peut le craindre, tant mieux, mais il n'y aura aucune reconnaissance, contact politique aucun, avec les Taliban eux-mêmes.
Et il y a un processus politique qui se poursuit. Si au gouvernement il y avait d'autres factions politiques que les Taliban dans un gouvernement plus large - c'est cela que veut dire Jean-Yves Le Drian en parlant d'inclusif, ce n'est pas autre chose -, ce serait une un peu moins mauvaise nouvelle.
Q - Cela veut dire qu'on pourrait discuter avec ce gouvernement-là.
R - Ecoutez, cela n'est pas du tout à l'ordre du jour aujourd'hui, nous ne savons pas ce qui va se passer. Pour l'instant, nous avons au Palais présidentiel de Kaboul, des Taliban, et avec les Taliban on ne discute pas.
Q - On poursuit avec l'Europe qui nous fait un beau chèque aujourd'hui, un beau chèque à la France, cinq milliards d'euros sur les quarante milliards attendus au total, pour le plan de relance français. À quoi va servir précisément cette somme ?
R - Vous avez raison de le rappeler, c'est une très bonne nouvelle qu'on a longtemps, un peu trop longtemps attendue, mais que le plan de relance européen devient très concret. Aujourd'hui même, la France va recevoir plus de cinq milliards d'euros de l'Union européenne, dans le cadre de ce plan de relance. C'est une première tranche, nous aurons au total quarante milliards d'euros. J'insiste aussi sur le fait que cet argent européen, ce n'est pas de l'argent qui est en l'air, il finance un seul plan de relance, c'est le plan de relance français que nous avons commencé à mettre en oeuvre...
Q - Cent milliards au total.
R - Pour cent milliards au total, déjà quarante milliards précisément dépensés, pour financer de la rénovation énergétique, le soutien au ferroviaire, le soutien des mobilités nouvelles type vélo, pour soutenir le plan "Un jeune, une solution", qui a permis déjà à plusieurs centaines de milliers de jeunes de trouver un emploi malgré la crise.
Donc c'est ce plan français que nous avons présenté, sans tarder, en septembre dernier, il y a presque un an, qui va être abondé, soutenu par l'Europe. Et même si l'argent a un peu tardé à arriver, c'est vrai, du point de vue européen, cet argent européen était déjà programmé dans nos cent milliards, donc il a déjà aidé à faire cet effort de relance français qu'avec Bruno Le Maire nous portons, pour que dans tous ces domaines - je pense notamment, évidemment, à la transition écologique -, nous agissions et nous fassions une relance efficace.
Q - Et le reste de l'enveloppe, allouée à la France ?
R - Le reste arrivera dans les semaines qui suivent. Nous aurons sans doute, cette année, une deuxième tranche plus importante encore, et les quarante milliards d'euros au total seront reçus sur deux années. Mais, encore une fois, il y a la trésorerie, comme le savent les commerçants et les chefs d'entreprise ; et puis il y a la certitude que vous avez d'avoir l'argent, et c'est ça qui est le plus important. Nous aurons plus de quarante milliards d'euros venant de l'Europe, en plusieurs fois, mais cet argent est là. Sans les quarante milliards d'euros qui étaient garantis par l'Europe depuis quelques mois, nous n'aurions pas pu faire un plan de relance à cent milliards qui est efficace aujourd'hui.
Q - Toujours au niveau européen, Clément Beaune, la COP26 va se réunir en novembre à Glasgow, après le rapport alarmiste des experts du GIEC sur le réchauffement climatique. Quelles propositions, concrètement, veut porter la France ?
R - D'abord, nous avons un engagement français et européen, c'est nous qui l'avons porté au niveau européen, ce qu'on appelle la neutralité carbone 2050. C'est l'Europe qui l'a initiée, c'est la France en Europe qui l'a engagée, c'est-à-dire que nous avons pris l'engagement, nous le solenniserons à cette COP, d'être neutre en carbone, nous tous Européens, premier grand marché du monde, à l'horizon 2050.
On se dote, depuis le 14 juillet, c'est une proposition qu'a faite la Commission européenne avec le soutien de la France, d'un plan pour atteindre, secteur par secteur, avec des mesures parfois difficiles, sur l'automobile, sur la rénovation énergétique des logements justement, les obligations nouvelles. Donc nous nous donnons les moyens d'atteindre cet objectif de neutralité 2050, avec une étape parce que 2050 c'est loin, c'est un peu abstrait, avec une étape importante dans moins de 10 ans, en 2030 nous aurons divisé par plus de deux nos émissions, -55%. Cela c'est concret.
J'insiste sur un point aussi, c'est qu'on ne peut pas faire cet effort tout seul, nous Français, nous Européens, et nous sommes moins de 10% des émissions de gaz à effet de serre dans le monde. C'est pour cela que nous avons proposé aussi, et l'Union européenne l'a repris, l'idée d'une forme de taxe carbone - pas celle qu'on a connue -, aux frontières de l'Europe, contre les exportateurs étrangers, pour que ceux, par exemple, venant de Chine, qui exportent des produits beaucoup moins exigeants sur le plan climatique, paient la différence, paient un prix du carbone qui les fasse participer à l'effort collectif.
Q - Mais vous savez Clément Beaune, que c'est aussi la principale critique que font les défenseurs de l'environnement, dire "finalement, on attend que ce soit les autres qui fassent des efforts, et nous, on ne veut pas être les bons élèves tout seul".
R - Mais pas du tout, on est les bons élèves, d'abord. Les Européens sont les meilleurs élèves du monde en matière écologique : nous sommes les premiers à nous être dotés de cet objectif de neutralité carbone, et d'un plan qui est le plus ambitieux au monde pour l'atteindre. En France, nous avons un des mix énergétiques, des émissions comme on dit, les moins carbonés, les moins émetteurs de gaz à effet de serre d'Europe.
Donc on n'a pas attendu les autres. Mais ce que je dis, c'est que cela n'est pas juste et cela n'est pas efficace si on fait cela tout seul. Et vous pouvez faire la décroissance chez vous, mais si vous représentez 1 ou 2% des émissions de gaz à effet de serre mondial, il faut le faire, mais cela n'est pas sérieux, cela n'est pas suffisant.
Q - La décroissance prônée par Delphine Batho, donc l'une des candidates à la primaire écologiste, alors que les écolos font leur rentrée aujourd'hui à Poitiers, pour vous, cela n'est pas réaliste ?
R - Surtout, moi je ne sais pas ce que cela veut dire. Chez les écologistes, on a le droit à l'alternative entre la punition et le gadget, ou les deux à la fois. Donc un coup on supprime le sapin de Noël et puis un coup, on fait la décroissance complète. La décroissance, c'est quoi ? C'est couper le moteur de tout et arrêter de produire ? J'entendais une concurrente de Mme Batho, Mme Rousseau je crois, qui disait "il faut investir massivement dans des énergies vertes, dans l'économie circulaire, les déchets". Cela, c'est de l'investissement, c'est de la croissance, c'est de l'emploi. La question, c'est le bon modèle de croissance. Mais miser sur la décroissance, c'est-à-dire le non investissement, la baisse de l'emploi, la non-consommation, d'abord c'est un projet flou, et je ne crois pas que c'est ça qui fasse avancer en pratique nos objectifs écologiques.
Source https://www.diplomatie.gouv.fr, le 23 août 2021