Interview de M. Gérald Darmanin, ministre de l'intérieur, à Europe 1 le 10 novembre 2021, sur l'allocution télévisée du président de la République du 9 novembre, la situation sanitaire, les questions de sécurité et la tension migratoire à la frontière entre la Pologne et la Biélorussie.

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Média : Europe 1

Texte intégral

SONIA MABROUK
Bienvenue sur Europe 1 et bonjour Gérald DARMANIN.

GERALD DARMANIN
Bonjour Sonia MABROUK.

SONIA MABROUK
Le président Emmanuel MACRON a insisté hier soir, à côté, bien sûr, de la situation sanitaire, sur son action, et il a vanté les résultats de son quinquennat, ses réalisations, ce fut un discours meeting d'un président candidat ?

GERALD DARMANIN
Eh bien, le président de la République, il parle aux Français, j'espère qu'en France, on autorise évidemment le président de la République à parler aux Français, à leur dire ce qu'il fait, ce que fait son gouvernement, et de pouvoir, dans des moments difficiles, on se pose encore plein de questions, regardez autour de nous, regardez les pays qui connaissent des taux d'incidence du Covid extrêmement élevés, nous avons une augmentation de ce taux d'incidence aussi, peut-être moins fort qu'ailleurs, peut-être grâce, en partie, aux mesures qu'on a prises, et oui, ça me paraît normal que le président parle aux Français. Il y a beaucoup de gens qui l'attaquent, ce serait bien de temps en temps qu'on l'écoute, et on l'a écouté, je crois, hier.

SONIA MABROUK
On l'a écouté avec attention dire que les résultats sont bons, que les déficits sont maîtrisés, que le pouvoir d'achat augmente. Que répondez-vous aux Français, Monsieur le Ministre, qui peuvent se dire : on ne vit pas dans le même pays ?

GERALD DARMANIN
Le président de la République, il n‘a pas fait une politique béate hier, moi, je l'ai entendu dire que c'était difficile, qu'il y a encore plein d'efforts à faire, qu'on n'avait pas tout réussi, mais qu'il fallait être fier de la France. Et si on regarde les choses de façon factuelle, nous avons le taux de chômage plus bas qu'avant la crise et plus bas depuis dix ans. Nous avons la meilleure croissance de tous les pays européens. Et nous avons fait face, me semble-t-il, à la crise du Covid, alors, avec des défauts, avec des ratés, très certainement, mais finalement, dans quel autre pays vous auriez aimé être soigné du Covid ou vivre, quand vous étiez restaurateur ou salarié ou une personne âgée, ou une personne qui avait des difficultés de santé, que la France, où vos vaccins étaient gratuits, vos tests étaient gratuits, l'hospitalisation était gratuite, où on a pris en charge votre chômage partiel, où on a aidé le restaurateur, il y a moins de défaillances d'entreprises cette année que quasiment les cinquante dernières années. Et quand je suis à Tourcoing, en général, les chefs d'entreprise, le restaurateur, la personne qui tient la pizza, le Basilico, en bas de la grande place de Tourcoing, il a tendance à m'engueuler, amicalement, pour me dire : je ne trouve pas assez de salariés, et il ne me dit : je n'ai pas assez de clients, ou vous ne m'avez pas assez aidé, il dit : ça, c'était formidable, mais je ne trouve pas assez de salariés. Donc je crois qu'on peut se dire quand même que la façon dont le président de la République a géré la crise est une bonne façon de l'avoir gérée, et il l'a rappelé, ce qui ne veut pas dire que nous sommes tous dans un monde merveilleux où tout est formidable pour tout le monde, bien évidemment que non, et c'est pour ça qu'on fait de la politique, sinon, on ferait, je crois, autre chose.

SONIA MABROUK
La situation épidémique, Monsieur le Ministre de l'Intérieur, était évidemment aussi au centre de l'allocution hier du Président. Le pass sanitaire sera donc conditionné pour les plus de 65 ans et les plus fragiles à partir du 15 décembre, à la troisième dose, si on vous entend bien, le message, c'est : la troisième dose, c'est pour conserver la liberté, une obligation devient une liberté ?

GERALD DARMANIN
Eh bien, c'est pour conserver la vie. On ne va pas refaire le débat du Covid, mais enfin, on constate quand même qu'il y a eu beaucoup de débats autour de ce pass sanitaire, et là, personne ne le conteste plus ou quasiment plus, il a permis la liberté, il a permis aux Français de retrouver les restaurants, les musées, les cinémas, de pouvoir se balader dans la rue. Et plein de pays autour de nous qui, au début, étaient dubitatifs, mettent en place ce pass sanitaire désormais, j'ai constaté récemment que le Maroc l'avait mis en place, donc il faut accepter des obligations pour la liberté, la liberté, ce n'est pas une liberté absolue, jamais, c'est toujours une liberté qui permet de ne pas nuire aux autres, et si on veut que notre système de santé ne soit pas HS, si on veut ne pas contaminer les autres, eh bien, il faut un minimum d'obligations pour soi-même.

SONIA MABROUK
Vous dites, ça fait deux fois que vous parlez du système de santé, vous avez dit : nous avons la chance en France de cette gratuité, on paie aussi pour un système et un hôpital normalement dignes de ce nom.

GERALD DARMANIN
Eh bien, l'hôpital…

SONIA MABROUK
On paie beaucoup d'ailleurs, certains disent, et on aimerait avoir un système de soins et un hôpital à la hauteur justement de ces attentes.

GERALD DARMANIN
Oh, je crois que l'hôpital est à la hauteur de nos attentes…

SONIA MABROUK
Il est très fatigué aussi en ce moment…

GERALD DARMANIN
Bien sûr, mais peut-être nous devons encore plus nous poser des questions pourquoi il est fatigué, il est fatigué parce qu'on a fait le numerus clausus pendant des années, qui a empêché d'avoir des médecins en nombre, et que, à l'hôpital public, les gens sont fatigués, et on les comprend, comme dans la campagne, je reviens de Dordogne où le problème principal des habitants de Dordogne, c'est le manque de médecins libéraux ; peut-être que le numerus clausus qu'on a imposé pendant des années était une erreur, on l'a fait sauter, mais il faut 8 à 10 ans pour faire un médecin, donc ça met du temps malheureusement. Nous avons sans doute encore beaucoup de choses à améliorer, moi, j'étais ministre des Comptes publics, je ne l'oublie pas, on peut toujours améliorer la dépense publique, mais on peut être fier, je crois que c'est un beau modèle social, de dépenser autant d'argent pour notre santé, qui a montré sa robustesse, comme on dit techniquement, pendant cette crise Covid, aujourd'hui.

SONIA MABROUK
Il faut que ça continue, et c'est pour ça qu'il y a, dites-vous, ce pass sanitaire, une question importante, Gérald DARMANIN, parce que le contrôle du pass, on l'a entendu dans de nombreux reportages, sur Europe 1, n'est pas ou n'est plus forcément systématique, est-ce que vous allez demander aux policiers de contrôler davantage les lieux où il est exigé ?

GERALD DARMANIN
Oui, oui, vous avez raison, le président de la République me l'a demandé hier, on avait grosso modo en septembre 50.000 personnes qui étaient contrôlées chaque semaine, à peu près 8.000 établissements, et si je regarde les chiffres de la semaine dernière, c'était la moitié, 25.000 personnes contrôlées et à peu près 4.000 établissements. Donc le président de la République, vu l'augmentation du taux d'incidence, l'hiver arrive, et le virus circule plus, eh bien, nous a demandé, demandé aux préfets, aux policiers, aux gendarmes de contrôler davantage, comme avant, comme en septembre, et ce matin, une instruction part aux préfets, et je les réunis bientôt pour pouvoir appliquer ces demandes.

SONIA MABROUK
Nous allons parler dans quelques instants, Gérald DARMANIN, d'insécurité, pensez-vous que ce soit, comment dire, pertinent de demander aux policiers ce travail supplémentaire, même s'il est peut-être nécessaire, ce contrôle accru, alors qu'ils sont sur-sollicités sur le terrain de l'insécurité ou de la sécurité ?

GERALD DARMANIN
D'abord, le ministère de l'Intérieur, ce n'est pas que le ministère de la sécurité, c'est le ministère de la protection au sens large de nos libertés, et la crise sanitaire fait partie des choses que doit gérer le ministère de l'Intérieur, ensuite, quand j'étais petit, le policier, c'était aussi quelqu'un à qui on demandait la rue, où est-ce qu'on devait aller, maman me disait : le policier a toujours un plan sur lui, tu peux toujours lui demander un conseil, voilà, le policier, il n'est pas là que pour contraindre, que pour interpeller, même si c'est sa mission principale, il est là aussi pour aider la population, et ils le font, et c'est pour ça qu'ils sont policiers ou gendarmes, on aimerait tous que des policiers et gendarmes fassent autre chose, on aimerait tous d'ailleurs faire autre chose que de gérer la crise sanitaire très certainement, mais les policiers et les gendarmes, dans des conditions difficiles, et eux-mêmes ont été très touchés pendant la crise Covid, dans une grande responsabilité, le font, et je vais continuer à leur demander de le faire, parce que c'est le besoin des Français.

SONIA MABROUK
Sur la sécurité, Emmanuel MACRON a consacré à peine quelques mots sur ce sujet hier, affirmant que les résultats sont là, l'opposition, Monsieur le Ministre, fustige de son côté vos manques de résultats, prenant l'exemple sur ce qui s'est passé en quelques jours, permettez-moi de le décrire, et vous le connaissez très bien, à Marseille, le Palais omnisports été envahi par une horde de jeunes casseurs, à Lyon, la bande des Dalton nargue et provoque l'autorité, à Argenteuil, on tire sur un commissariat, les candidats, LR, Eric ZEMMOUR, pointent votre impuissance. Est-ce que c'est votre talon d'Achille aujourd'hui ?

GERALD DARMANIN
Bon, d'abord, j'ai peu d'expérience politique, mais j'ai quand même commencé à adhérer à un parti politique à 16 ans, c'est-à-dire, il y longtemps, j'ai toujours constaté que le ministre de l'Intérieur était très attaqué, c'est normal, c'est le rôle du job, et c'est sans doute le jeu de la démocratie. Et à chaque fois…

SONIA MABROUK
En l'occurrence, c'est les policiers qui sont attaqués sur le terrain…

GERALD DARMANIN
Et à chaque fois, je vais y revenir, mais à chaque fois, on retrouve des faits divers, et évidemment, ils sont scandaleux…

SONIA MABROUK
Ce sont des faits divers ?

GERALD DARMANIN
Il y a des faits divers, bien évidemment…

SONIA MABROUK
Ce que je vous ai cité, ce sont des faits divers ?

GERALD DARMANIN
J'y arrive, ne vous inquiétez pas, Madame MABROUK, si on peut avoir plus, un tout petit peu de temps de réflexion, plutôt que le réflexe…

SONIA MABROUK
Bien sûr, allez-y…

GERALD DARMANIN
Je pense que c'est aussi la qualité d'Europe 1. Je me suis permis de dire que c'était un poste très attaqué, voilà, il y a toujours eu des ministres de l'Intérieur très attaqués, c'est normal, parce que c'est un sujet important pour les Français, mais prenons vos trois faits très intéressants, Argenteuil, il y a eu 22 interpellations depuis 15 jours et 17 kilos de cannabis qui ont été saisis dans un quartier très compliqué, près de la Dalle d'Argenteuil, qu'il y ait des réactions de gens qui gagnent désormais moins d'argent parce que la police est très présente sur la Dalle d'Argenteuil, oui, et j'ai fait rouvrir, Madame, le commissariat qui avait été fermé sur la Dalle d'Argenteuil, premièrement. Donc, oui, c'est difficile, mais les policiers sont là, ils font un travail très difficile, prenons Marseille, alors la horde de casseurs, je ne sais pas si c'est une horde de casseurs, en tout cas, il y a eu des gamins de 12 ans…

SONIA MABROUK
Vous allez nous dire, c'est des sauvageons peut-être…

GERALD DARMANIN
Non, oui, c'est peut-être de sauvageons, c'est vrai, parce que c'est des gamins de 12, 13 ans, c'est ça, des gamins de 12, 13 ans…

SONIA MABROUK
Mais parfois, à 12, 13 ans…

GERALD DARMANIN
Mais vous avez bien raison, qui sur un réseau social se sont donnés rendez-vous dans une patinoire de la ville de Marseille, c'est tout à fait inacceptable, je ne suis pas tout à fait certain que ce soit le travail des policiers que de gérer des enfants de 12 ans, il me semble que c'est plutôt le travail des parents, on se demande d'ailleurs pourquoi l'Education nationale ou les parents n'ont pas été responsabilisés les années précédentes, parce que, avant que, à 12 ans, on aille casser une patinoire, il s'est passé quelque chose auparavant, ce n'est peut-être pas tout à fait la responsabilité du président de la République, mais moi, je constate, et je peux vous le dire ici, que la personne qui est responsable de cette volonté de venir casser dans cette patinoire a été interpellée, voilà, et elle va répondre de ses actes devant les juges.

SONIA MABROUK
Vous nous dites donc que les interpellations sont là, que les consignes sont données…

GERALD DARMANIN
Pour les délinquants que sont ces gens qui font du rodéo, moi, je refuse de les appeler d'un mot sympathique, qui me rappelle une bande dessinée quand j'étais enfant, ce matin même, à l'heure du laitier, deux interpellations ont eu lieu, des gardes à vue sont en cours, et ils répondront devant la justice de ces actes, je voudrais remercier d'ailleurs les policiers de Lyon qui ont fait plusieurs interpellations, une dizaine d'interpellations sur ce groupe d'individus, et qui les ont présentés à chaque fois devant la justice, et dont des personnes, je l'espère, feront de la prison préventive, parce que je crois que c'est tout à fait inacceptable, donc, oui, il y a des faits inacceptables, bien sûr qu'il y a des actes de délinquance, et vous savez quoi, il y en aura toujours des actes de délinquance tant que la société sera la société, mais notre réponse, elle est ferme, et à chaque fois, nous avons des résultats.

SONIA MABROUK
Et Monsieur le Ministre, est-ce que les instructions données sont tout aussi fermes ? Que répondez-vous par exemple à ceux qui affirment que les policiers préfèrent parfois reculer plutôt que se défendre, craignant s'ils font usage de leur arme à feu, de ne pas être soutenus, voire d'être accusés de violences policières, vous l'entendez ce message ?

GERALD DARMANIN
Moi, je crois qu'on a constaté quand même que j'avais tendance à soutenir les policiers, y compris contre…

SONIA MABROUK
Mais dans toute la hiérarchie…

GERALD DARMANIN
Toute la hiérarchie le fait. Moi, je voudrais saluer le courage par exemple des policiers de Cannes qui ont répliqué avec leur arme, j'ai été les féliciter le matin même, dans des conditions qui me paraissent tout à fait conformes à la déontologie, quand quelqu'un s'attaque à un policier, il faut qu'il s'attende évidemment à une réponse des policiers ; j'ai toujours pensé cela, ensuite, il faut savoir que les policiers évidemment ou les gendarmes, ce n'est pas comme n'importe quelle personne, c'est quelqu'un qui a une arme, qui a un code de déontologie, qui a une façon de travailler professionnelle, on doit mieux les former, on doit avoir plus d'effectifs, on doit avoir plus de matériels, et ça, c'est mon travail, mais je soutiens les policiers, comme chacun le sait, je crois, avec beaucoup, beaucoup, beaucoup de forces.

SONIA MABROUK
Vous venez de parler, Monsieur le Ministre, de Cannes, après l'attaque au couteau de policiers, trois personnes dans l'entourage de l'assaillant ont été interpellées, pourquoi le Parquet antiterroriste n'est-il pas encore saisi ?

GERALD DARMANIN
Moi, je ne suis pas le procureur anti-terroriste, et je respecte la séparation des pouvoirs.

SONIA MABROUK
Vous avez un doute sur le fait que ce soit un attentat islamiste ?

GERALD DARMANIN
Moi, je ne souhaite pas parler d'enquêtes, surtout dans des enquêtes qui sont compliquées et qui peuvent faire naître des détails qui peuvent informer des personnes qui nous écoutent, ce qui est sûr, c'est que la police et la justice dans cette affaire, comme toutes les affaires que j'ai eu à traiter de ce niveau, travaillent très sérieusement.

SONIA MABROUK
Pourquoi le président de la République n'a-t-il quasiment pas évoqué l'immigration hier, est-ce à dire que c'est un sujet qu'il ne considère pas comme un sujet important pour cette présidentielle ? Vous êtes d'accord qu'il ne l'a pas évoqué ? Vous avez entendu le même discours...

GERALD DARMANIN
Les commentaires sont rigolos, parce que c'est : pourquoi le président de la République a parlé pendant 23 minutes ou 26 minutes, et maintenant, pourquoi il n'a pas encore parlé de ça, bon…

SONIA MABROUK
Monsieur le Ministre, il a parlé du travail, du nucléaire, du chômage…

GERALD DARMANIN
Eh bien, d'abord, parce qu'il a peut-être laissé le soin à son ministre de l'Intérieur de répondre à vos questions, donc si vous en avez, je réponds bien volontiers. Je ne suis pas sûr qu'il faille qu'on ait tous une obsession sur l'immigration…

SONIA MABROUK
Il y a une situation explosive à la frontière polonaise.

GERALD DARMANIN
Il y a une situation obsessionnelle de la part de certains candidats sur l'immigration, qui me paraît ni une chance, ni une malchance pour la France, c'est un fait, nous sommes beaucoup à être issus de d'immigration, c'est ni une fierté, me semble-t-il, ni un défaut, voilà, et c'est la France.

SONIA MABROUK
Oui, mais quelle action, parce que, précisément, la tension monte, je vous donne cet exemple-là, la frontière de la Pologne, dénonce quand même une invasion migratoire, ce sont les mots qui ont été dits, avec près de 4.000 migrants qui sont aussi dans le froid et dans la misère et qui veulent forcer les frontières, Varsovie dénonce un acte hostile, organisé par la Biélorussie, et la Russie qui utiliserait ces migrants comme arme de déstabilisation, que dit ce matin le ministre de l'Intérieur de la France, qu'est-ce qu'on fait dans une telle situation ?

GERALD DARMANIN
Bon, d'abord, c'est effectivement scandaleux, mais la France connaît avec les pays de la Méditerranée cette situation depuis longtemps, aujourd'hui, c'est l'Est qui le connaît, nous avons soutenu cet été, à la demande du président de la République, les Pays Baltes qui avaient ce genre d'attaques, par migrants, c'est, pour que chacun de nous comprenne, ce n'est pas les migrants qui attaquent, mais des pays qui utilisent la misère des personnes pour les envoyer vers d'autres pays, afin de mettre une pression politique, médiatique et d'intégration dans ces pays, et aujourd'hui, la Biélorussie utilise des migrants qui viennent d'ailleurs, souvent d'Afghanistan d'ailleurs, pour pouvoir les forcer à aller vers la Pologne, notamment pas que la Pologne, mais vers la Pologne. C'est évidemment inacceptable, et d'ailleurs c'est pour ça que nous nous battons, et la présidence française de l'Union européenne, c'est dans deux mois, nous nous battons…

SONIA MABROUK
Mais avec quoi, les nouvelles menaces de sanctions sur le régime biélorusse ne servent à rien, rien n'y fait ? !

GERALD DARMANIN
Non, mais, d'abord, on va parler des gens, on peut parler des Etats, mais il y a des femmes, des enfants, des hommes qui, dans des conditions extrêmement difficiles, vous l'avez dit, c'est l'hiver, en Biélorussie, voilà, en Pologne, sont poussés à la rue, voilà, et donc à la fois, on doit respecter me semble-t-il la souveraineté de la Pologne et les Etats Baltes de ne pas accueillir n'importe qui chez eux, parce qu'il y a des questions sécuritaires qui se posent, parce que c'est la souveraineté d'un pays, c'est tout à fait normal, et en même temps, on ne peut pas être insensible à cela, donc nous aidons bien évidemment parce qu'on a mis les moyens, on a envoyé des femmes et des hommes dans les pays Baltes, si la Pologne nous demande un soutien, nous le ferons très certainement, mais le travail diplomatique de mettre une pression, une saine pression sur ces pays, est au rendez-vous, maintenant, on est bien d'accord qu'on ne va pas faire la guerre à des Etats pour ce genre de choses, on doit essayer de comprendre ce qui se passe dans le monde, et ce qui se passe dans le monde, c'est une augmentation générale de la pression migratoire…

SONIA MABROUK
Oui, et que ça va se répéter à nos frontières européennes.

GERALD DARMANIN
Mais nous avons nous-mêmes à nos frontières depuis la fin du Covid une pression migratoire très forte, en Italie, en Espagne, chacun le voit, en Grèce, et nous devons tous vivre avec cela, ça fait 20 ans que ça existe, Calais, je le signale quand même, que je n'avais pas le brevet des collèges qu'il y avait déjà beaucoup de migrants à Calais, très bien, et on peut penser que dans les 15 ou 20 années qui viennent, parce qu'il y a la Libye, parce qu'il y a la Syrie, parce qu'il y a l'Afghanistan, parce qu'il y a l'islamisme au Sahel, parce qu'il y a des réfugiés climatiques, il y aura dans les 20 ans, et quels que soient les discours des démagogues à la télévision, une pression migratoire à nos frontières.

SONIA MABROUK
Démagogues, dites-vous, et vous m'avez dit, il y a quelques instants obsession sur l'immigration, qui a cette obsession, est-ce que ça veut dire que c'est un sujet sur lequel on parle trop, vous estimez qu'il prend une place trop importante, disproportionnée par rapport à la réalité du problème ou du sujet ?

GERALD DARMANIN
Je pense que c'est un sujet important, mais qu'il ne doit pas être l'alpha et l'oméga de tout, c'est comme tous ceux qui vous expliquent que le climat c'est l'alpha et l'oméga de toute politique, il y a des gens qui vous expliquent que l'immigration, c'est l'alpha et l'oméga de toute politique, s'il fait beau ou moche dans la rue, ce n'est pas parce qu'il y a de l'immigration, donc je pense qu'on peut en parler raisonnablement, on peut aimer avoir des frontières, choisir ces personnes qui viennent sur le territoire national, avoir une volonté de les intégrer, vouloir qu'elles parlent et qu'elles apprennent le français et vibrer au son de la Marseillaise, expulser les personnes qui commettent des méfaits sur le sol de la République, sans en parler matin midi et soir.

SONIA MABROUK
On va quand même continuer à en parler, mais sans en faire évidemment un sujet obsessionnel, celui-là et d'autres. Merci Gérald DARMANIN. Vous restez avec nous. On poursuit l'entretien avec Dimitri PAVLENKO et Mathieu BOCK-COTE qui va nous rejoindre.

GERALD DARMANIN
Merci à vous.


Source : Service d'information du Gouvernement, le 17 novembre 2021