Texte intégral
LEA SALAME
Bonjour, bonjour Gérald DARMANIN.
GERALD DARMANIN
Bonjour.
LEA SALAME
Merci d'être avec nous en direct et en chair et en os, on a attendu hier soir assez tard le résultat de votre test Covid pour savoir – mais il faut tout raconter – pour savoir si on faisait l'interview en duplex ou en studio. Finalement, vous êtes négatif, contrairement au Premier ministre, tout va bien.
GERALD DARMANIN
Jusqu'ici, tout va bien.
LEA SALAME
Jusqu'ici, tout va bien, mais vous êtes masqué et nous aussi. Justement, avant d'aller sur la Guadeloupe, la situation en Guadeloupe, un mot sur le contrôle des pass sanitaires, le président du Conseil scientifique, Jean-François DELFRAISSY, qui était à votre place il y a quelques jours, regrettait qu'il y ait un relâchement des contrôles, il disait : il suffit d'aller au restaurant pour voir que, une fois sur deux, on n'est pas contrôlé. Est-ce qu'il a raison ?
GERALD DARMANIN
Oui, il y a un eu un relâchement des contrôles en octobre, septembre, octobre, après l'été, on était à 20.000, on est redescendu à 20.000 contrôles pour les forces de police par semaine, là, on a remonté, à la demande du président de la République et du Premier ministre, on est à peu près à 50, à 60.000 par semaine. Donc on a multiplié par trois les contrôles des forces de l'ordre des restaurateurs, des ERP, comme on dit, des salles qui accueillent du public, des personnes, et à la demande du Premier ministre, j'ai demandé à chaque préfet hier de convoquer, d'inviter les responsables de la restauration de chaque département, de l'hôtellerie de chaque département pour leur rappeler les règles, parce que le Covid augmente, l'incidence augmente, l'hospitalisation augmente. Et il faut absolument que chacune et chacun, chacun des restaurateurs, chacun des hôteliers applique le pass sanitaire et son contrôle, sinon, on aura des problèmes.
LEA SALAME
Mais il y a des amendes qui sont mises, là, ces dernières semaines ?
GERALD DARMANIN
Il y a des amendes, il y a eu 460 verbalisations qui ont été mises par les contrôles lors des forces de l'ordre, mais les forces de l'ordre…
LEA SALAME
Quand, au mois d'octobre ?
GERALD DARMANIN
Non, non, c'est par semaine, pardon.
LEA SALAME
Par semaine.
GERALD DARMANIN
La dernière semaine, 460 verbalisations. Bon, le but des forces de l'ordre, ce n'est pas non plus de mettre des verbalisations, c'est d'essayer de faire de la pédagogie, de répéter évidemment des choses. La répétition fixant la notion. Si on fait ça, c'est surtout pour que les restaurateurs, c'est surtout pour que les hôteliers, c'est surtout que pour ceux qui reçoivent du public appliquent le contrôle du pass sanitaire. Sinon, on sera obligé de faire comme d'autres pays, c'est-à-dire, des restrictions de notre liberté de commerce, de notre liberté de vie, et personne n'a envie de retourner à cette situation.
LEA SALAME
La situation en Guadeloupe maintenant, Gérald DARMANIN, secouée depuis une semaine par des violences, à l'origine du mouvement, la protestation contre le pass sanitaire et la vaccination obligatoire des soignants. Hier, sur notre antenne, le président de la Chambre de commerce et d'industrie des îles de Guadeloupe, Patrick VIAL-COLLET, décrivait – je cite – une situation quasi-insurrectionnelle, parlant de véritable guérilla ; vous reprenez ses mots ce matin ?
GERALD DARMANIN
Eh bien, c'est une situation très difficile en Guadeloupe aujourd'hui, et d'ailleurs, je veux avant tout dire que nous condamnons toute forme de violences qui sont fortes, il y a eu des tirs à balles réelles sur les gendarmes, et il y a des barricades qui sont mises pour empêcher les gens de circuler, d'aller à leur travail, pour empêcher par exemple les dialysés d'aller à l'hôpital, pour empêcher les repas d'être livrés aux centres hospitaliers. Il y a des situations d'extrêmes violences, effectivement, en Guadeloupe, et c'est pour ça que nous avons décidé l'envoi de forces très importantes pour rétablir l'ordre public, ils sont arrivés dimanche, et…
LEA SALAME
Quelle est la situation aujourd'hui à l'heure où nous parlons ?
GERALD DARMANIN
Aujourd'hui, enfin, au moment où je vous parle, on est dans la nuit en Guadeloupe, donc je ne vais pas commenter quelque chose qui est en train de se dérouler, la situation est toujours très difficile, puisque le travail des forces, ce n'est pas non plus de rajouter et de participer à cette violence, et de faire dans des façons… dans une nuit très difficile, le rétablissement de l'ordre public. Ce qui est certain, c'est que le rétablissement de l'ordre public est le préalable à toute discussion évidemment.
LEA SALAME
Mais à l'heure où nous parlons, donc l'ordre public n'est pas revenu en Guadeloupe ?
GERALD DARMANIN
Alors, plusieurs nuits ont été extrêmement violentes, notamment jusqu'à dimanche. L'arrivée des forces, me semble-t-il, a calmé une partie des difficultés, mais il y a encore beaucoup de difficultés, et le travail des forces de l'ordre aujourd'hui est difficile, courageux, mais difficile.
LEA SALAME
Quelle est la situation en Martinique voisine, on sait qu'il y a eu un appel à la grève générale lancé, comment ça se passe, là, en Martinique ?
GERALD DARMANIN
Non, la situation n'est pas du tout la même, il n'y a pas de barricades, il n'y a pas de violences, je veux revenir sur la Guadeloupe où il y a eu plus de 90 interpellations, plus de 60 gardes à vue et des comparutions immédiates dès hier. Donc la réponse de l'Etat est ferme, tant sur la police que sur la justice, je veux ici le saluer, mais on ne peut pas dire aujourd'hui que la situation en Martinique est la même ; les choses sont très différentes.
LEA SALAME
Hier matin, à ce micro, Xavier BERTRAND se demandait pourquoi vous n'y allez pas, moi, président de la République, je demanderais au ministre de l'Intérieur d'y aller, si on avait les mêmes problèmes en métropole, il y serait, il y a deux poids, deux mesures entre la métropole et l'outre-mer, vous allez y aller ?
GERALD DARMANIN
Eh bien, c'est tout à fait faux, d'abord, on a vu tous les maires de Guadeloupe lorsqu'ils étaient… ils étaient à Paris, je voudrais le dire d'ailleurs, parce que c'était le congrès des maires tout simplement. Deuxièmement, lorsqu'un ministre se déplace, qui plus est le ministre de l'Intérieur, il est beaucoup protégé, il embête parfois plus les forces de l'ordre qu'autre chose, parce que, par définition, il essaie de faire de la politique médiatique alors qu'il faut les laisser travailler, lorsqu'on envoie 60 hommes et femmes du GIGN et du RAID, ce n'est pas pour protéger le ministre, c'est pour protéger les populations.
LEA SALAME
Enfin, si ça s'était passé à Grenoble, vous y seriez allé, Gérald DARMANIN ?
GERALD DARMANIN
Et ce n'est pas le cas, ce n'est pas les cas, les violences urbaines qui ont eu lieu ces derniers temps en France métropolitaine ne m'ont pas conduit à y aller, au contraire, nous y allons en général quand les choses sont rétablies, que les policiers ont fait le travail et qu'on peut discuter de nouveau avec les acteurs économiques et sociaux.
LEA SALAME
Autres réactions politiques sur ce qui se passe et votre réponse en Guadeloupe, Adrien QUATENNENS, de la France insoumise, vous demande : c'est quoi l'ordre républicain quand un tiers de la Guadeloupe n'a même plus accès à l'eau courante, quant à Eric ZEMMOUR, il estime qu'il faut arrêter – je cite – d'être aussi brutal, il y a une vraie incompréhension entre les populations guadeloupéennes, antillaises, françaises et Emmanuel MACRON, il a un problème avec le peuple.
GERALD DARMANIN
Non, mais là, on voit bien que beaucoup de gens ont perdu l'entendement, que ce soit à la droite extrême ou à la gauche-extrême, quand on n'est même pas capable de condamner des tirs à balles réelles sur les gendarmes et qu'on préfère faire de la politique politicienne, il n'y a pas de commentaires à faire que, un tout petit peu de distance vis-à-vis malheureusement de la feuille, comme dirait KUNDERA, qui est la feuille morte, c'est-à-dire celle qu'on ne voit, et qu'on ne discute que quand elle tombe.
LEA SALAME
La Guadeloupe et la Martinique, mais aussi des émeutes aux Pays-Bas, en Belgique, en Autriche, contre les restrictions sanitaires ; craignez-vous une contagion dans les prochains jours à la France métropolitaine, les mesures, les restrictions semblent de moins en moins acceptées ?
GERALD DARMANIN
Non, bon, d'abord, effectivement, il y a un mouvement mondial, mais qui a toujours été là, depuis le début de cette crise Covid, non, mais, regardons la Guadeloupe telle qu'elle est, aujourd'hui, il s'agit de quoi, il s'agit de l'obligation vaccinale que l'on impose notamment aux médecins, aux soignants, pas à toute la population. Hier, lorsqu'on a reçu les élus avec monsieur le Premier ministre, il y a eu un quiproquo sur ça : est-ce que toute la population était concernée, d'abord, je veux le redire ici, c'est les soignants. 87% des soignants de Guadeloupe sont vaccinés, de quoi parle-t-on, 87% ; donc on voit très bien que la population guadeloupéenne, les soignants l'ont compris, voilà…
LEA SALAME
C'est aussi contre le pass sanitaire, et par contre, la vaccination en Guadeloupe est beaucoup plus faible qu'ailleurs, je crois qu'il y en a 35% seulement qui ont reçu une première dose.
GERALD DARMANIN
Effectivement, on est un petit peu autour de 40% désormais, effectivement, qui ont reçu une deuxième dose, pourquoi on fait ça, pour protéger la population guadeloupéenne, si on acceptait la revendication d'une minorité violente et agissante qui consiste à dire : pas de vaccination en Guadeloupe, on accepterait de facto que la population guadeloupéenne est moins bien protégée contre une maladie mortelle que la population métropolitaine, et là, les commentaires de monsieur MELENCHON ou de monsieur ZEMMOUR seraient exactement inverses, ils diraient : mais, il y a deux poids, deux mesures, il y a ceux que vous protégez bien, c'est-à-dire les métropolitains, et puis, il y a ceux que vous ne protégez pas bien, c'est-à-dire, les Guadeloupéens…
LEA SALAME
Donc c'est politicien pour vous uniquement ?
GERALD DARMANIN
Non, mais, encore une fois, je sais que c'est difficile de remettre de la raison dans le débat public en ce moment, mais quand on tire à balles réelles sur des gendarmes, et quand on se bat, l'Etat, pour protéger des populations en les vaccinant, quand on envoie 1.300 soignants de métropole en Guadeloupe pour les protéger, lorsqu'on paye par exemple 100%, ça n'existe nulle part ailleurs, de l'hôpital public de Guadeloupe, je pense qu'on peut simplement dire que ceux qui tirent à balles réelles à cause de ça sur les gendarmes sont en dehors du champ républicain, et ça ne coûte à personne de condamner ces actes, malheureusement, je constate que le combat politicien l'emporte sur la raison.
LEA SALAME
Gérald DARMANIN, vous affirmiez ce week-end dans une longue interview au Parisien, je vous cite, que la délinquance générale a baissé depuis cinq ans, sur la délinquance, il faut dire la vérité, il est difficile de… les chiffres se contredisent souvent, mais tout de même, une note du renseignement territorial affirme que les règlements de comptes ont fait 79 morts depuis le début de l'année, soit une hausse de 46% par rapport à 2020, que les agressions envers les forces de l'ordre ont bondi de 7% cette année, une hausse encore plus spectaculaire de 28% en Ile-de-France, ce n'est pas vraiment… on ne peut pas vraiment se réjouir d'une baisse de la délinquance, non ?
GERALD DARMANIN
Alors, c'est un fait, la délinquance, elle a baissé depuis cinq ans, là, les chiffres, ils ne se contrarient pas, ils sont exactement cela, ça a baissé grosso modo entre 25% et 10% selon les cambriolages, les vols à main armée, les vols sans arme, les difficultés de la vie quotidienne de la délinquance que nous connaissons…
LEA SALAME
Les homicides également ? Gérald DARMANIN, les homicides ont baissé ?
GERALD DARMANIN
Par exemple, il y a eu 15 %, c'est très intéressant, de feux de véhicules ou de vols de véhicules en moins, ce que tout le monde commentait à la télévision les années précédentes. En revanche, il y a eu deux augmentations, l'augmentation des violences conjugales, plus de 10% à peu près, de plaintes qui ont été prises. Et c'est un phénomène sur lequel il faut effectivement qu'on mette beaucoup plus encore de moyens et d'écoute. Et puis, des règlements de comptes qui sont la conséquence, c'est ce que dit aussi la note du renseignement, c'est dommage de ne pas la citer complètement, la conséquence de l'activité de la police et de la justice dans un certain nombre de quartiers, puisque des saisies de drogues, vous l'avez vu, sont tout à fait exponentielles, et le travail de la police et de gendarmerie est extrêmement efficace, comme un point de deal, c'est entre 50.000, 60.000, parfois 100.000 euros d'argent liquide, on comprend très bien que malheureusement, lorsqu'on arrête des trafiquants, lorsqu'on les met en prison, d'autres essayent de prendre la place, et malheureusement, à 100.000 euros d'argent liquide, il y a beaucoup de règlements de comptes, oui, c'est vrai, et c'est la conséquence, le thermomètre de l'activité de la police…
LEA SALAME
Les homicides et tentatives d'homicides n'ont elles pas augmenté cette année ?
GERALD DARMANIN
Il y a une augmentation en continu depuis plus de 15 ans des tentatives d'homicides, c'est un fait tout à fait vrai.
LEA SALAME
Mais par exemple, si on compare les premiers mois de cette année par rapport à 2019, avant le Covid, n'y a-t-il pas une augmentation de 12% ?
GERALD DARMANIN
Cette année, c'est encore trop tôt, puisque vous savez très bien que l'homicide, ce n'est pas seulement quand la police le constate, mais quand la justice a résolu l'enquête. Donc il y a toujours un effet retard. Et ce n'est pas parce que la police le constate et qu'elle dit : c'est un homicide que c'en est un. La vérité, c'est que depuis 15 ans, il y a une augmentation, on est autour de 900 homicides chaque année, et un petit peu plus, voilà, c'est effectivement une difficulté que nous connaissons, je rappelle quand même que la population augmente en proportion chaque année.
LEA SALAME
Dernière question sur le football, vous recevez les acteurs du football à 9h30, place Beauvau, après ce qui s'est passé dimanche soir avec le match interrompu entre l'OL et l'OM, c'est la sixième agression dans le monde du foot ces derniers mois. La Ligue de foot a déjà décidé que l'OL serait sanctionné de matchs à huis clos au total ; c'est suffisant comme sanction ou il faut aller plus loin ?
GERALD DARMANIN
En tout cas, de nouveau, moi, je veux constater des faits de violence qui reviennent dans le football, ce qui est tout à fait inacceptable, et donc ce matin, avec le Garde des sceaux, avec la ministre des Sports, on a invité l'ensemble des acteurs du football, de pouvoir en discuter avec les préfets, de tenir un certain nombre de décisions fermes, que j'essaie de prendre et qui sont parfois contestées, par exemple, ne pas accepter que des supporters aillent dans tel ou tel match, parfois, il faut comprendre que ces décisions, elles sont nécessaires. Et on arrive à la fin d'un certain nombre d'interdictions de stades aussi, qui ont été prononcées il y a quelques années, on voit malheureusement qu'il faut sans doute qu'on aille plus loin pour que la fête, c'est le football, et qu'on n'accepte pas que ce soit la violence.
LEA SALAME
C'est ça la sanction, l'interdiction de stades, c'est ça qui est…
GERALD DARMANIN
On va en discuter ce matin, il y a la responsabilité des clubs, il y a la responsabilité de l'Etat, il y a les caméras de vidéo protection qui nous aident, et il y a des interdictions de justice qui sont prononcées, il y a des pays comme l'Angleterre qui ont réussi à quasiment éradiquer la violence dans les stades, on n'y a pas tout à fait réussi, donc, c'est l'objet de la réunion de ce matin.
LEA SALAME
Merci Gérald DARMANIN, d'avoir été avec nous merci. Merci et belle journée.
GERALD DARMANIN
Merci à vous.
Source : Service d'information du Gouvernement, le 24 novembre 2021