Interview de M. Jean-Michel Blanquer, ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse, à BFMTV le 9 décembre 2021, sur l'épidémie de Covid-19 et la situation sanitaire dans les écoles.

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Texte intégral

JEAN-JACQUES BOURDIN
Jean-Michel BLANQUER, bonjour.

JEAN-MICHEL BLANQUER
Bonjour Jean-Jacques BOURDIN.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Ministre de l'Education nationale, Jean-Michel BLANQUER, parlons du Covid évidemment, combien de classes fermées aujourd'hui ?

JEAN-MICHEL BLANQUER
On est un tout petit peu plus de 3000 classes fermées donc ça s'est stabilisé à ce chiffre en cette fin de semaine.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Un peu plus de 3000 classes fermées, fin de… pas fin, forte hausse plutôt, forte hausse du Covid, des cas de Covid, école élémentaire, collège, lycée, puisque maintenant il y a un nouveau protocole.

JEAN-MICHEL BLANQUER
Oui le sujet se pose…

JEAN-JACQUES BOURDIN
On ne ferme pas une classe…

JEAN-MICHEL BLANQUER
Quand je dis les classes fermées, je parle de l'école primaire puisque comme vous le savez dans l'enseignement secondaire, il y en a très peu, du fait que les enfants sont vaccinés à 80 % maintenant, enfin les adolescents. Les plus de 12 ans et nous sommes d'ailleurs, nous sommes un des pays d'Europe qui a le plus vaccinés les plus de 12 ans et nous pouvons en être heureux et fiers, ça veut dire plus de 80 % de nos élèves des collèges et lycées qui sont vaccinés et donc des problèmes à la marge dans l'enseignement. Donc c'est à l'école primaire qu'évidement les choses se posent le plus puisque les enfants ne sont pas vaccinés et là le nouveau protocole que nous avons, qui comme vous le savez, fait qu'on ne revient que si on a un test négatif eh bien ce nouveau protocole fait qu'on ferme moins de classe que précédemment, mais en même temps on fait beaucoup plus de tests, on fait six fois plus de tests, vous vous rendez compte les enfants avaient trois fois moins de test que les adultes avant les vacances de la Toussaint et depuis le retour c'est trois fois plus de tests que les adultes.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Oui même si on manque d'équipes mobiles de laboratoires.

JEAN-MICHEL BLANQUER
Oui enfin il y a d'un côté les équipes mobiles qui représentent environ 200 000 tests par semaine et puis de l'autre les tests faits par les parents.

JEAN-JACQUES BOURDIN
C'est moins que prévu quand même les équipes mobiles.

JEAN-MICHEL BLANQUER
Non les équipes mobiles c'est parce qu'on en propose 400 000 et on en fait 200 000 parce qu'il y a 50 % d'acceptation par les parents et donc on voit bien que la nouvelle méthode est vraiment très complémentaire parce que là par contre les parents sont très motivés pour le faire puisque c'est ça qui conditionne le retour à l'école.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Alors protocole sanitaire niveau 2 à partir d'aujourd'hui, ça veut dire quoi, ça veut dire port du masque pour les enfants à l'intérieur comme à l'extérieur dans les cours de récréation, sports collectifs restreints, ça veut dire quoi à la cantine ?

JEAN-MICHEL BLANQUER
Eh bien à la cantine c'est une classe à la fois, et rappelons que quand vous dites protocole 3, c'est pour l'école primaire.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Pour l'école primaire oui tout à fait.

JEAN-MICHEL BLANQUER
L'enseignement secondaire justement toujours grâce au vaccin reste en protocole 2. Et donc effectivement c'est une classe à la fois à la cantine, port du masque dans toutes les circonstances y compris pour l'éducation physique et sportive et puis désinfection accentuée, donc ça c'est les collectivités locales qui sont en train de s'adapter à cela mais elles sont habituées, dans les périodes précédentes on a eu des adaptations de ce genre.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Les sorties scolaires. Je ne sais pas une classe qui veut aller au théâtre ou je ne sais pas dans un musée ?

JEAN-MICHEL BLANQUER
Elles sont toujours plutôt restreintes malheureusement d'autant plus que nous sommes en train de prendre des mesures indépendamment de la crise Covid vous savez avec le Pass culture qui va faire qu'on va plus financer dans le futur les sorties scolaires à partir du mois de janvier, mais espérons que les conditions sanitaires dans les mois à venir permettront de tirer pleinement partie de cela. Mais aujourd'hui elles sont évidemment plutôt restreintes. Ceci étant quand une classe se déplace dans un milieu où il n'y a pas d'autres personnes alors il n'y a pas de restriction spécifique, si ce n'est le fait évidemment de porter le masque et de respecter tous les gestes barrières.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Alors vous l'avez décidé Jean-Michel BLANQUER, les vacances de Noël ne seront pas avancées mais si l'épidémie s'aggrave est-ce qu'on repoussera le retour à l'école ?

JEAN-MICHEL BLANQUER
A priori non mais…

JEAN-JACQUES BOURDIN
Vous ne l'excluez pas.

JEAN-MICHEL BLANQUER
Je n'exclue jamais rien, je ne veux pas que vous titriez après, je n'exclue pas, parce que ce n'est pas l'hypothèse privilégiée, il faut vraiment le dire, mais je dis toujours aussi sur ce type de sujet qu'on est pragmatique, on regarde ce qui se passe et donc nous verrons évidement. D'abord je ne le souhaite pas et ensuite je ne pense pas que ce sera nécessaire.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Le vaccin efficace, vous l'avez dit, chez les collégiens, chez les lycéens, efficace contre la maladie, tout le monde le sait, est-ce qu'on ne doit pas… parce que le pass sanitaire c'est très bien, ça a permis la vaccination mais il arrive peut-être au bout du chemin si je puis dire, est-ce qu'on ne doit pas passer au pass vaccinal aujourd'hui ?

JEAN-MICHEL BLANQUER
En tout cas ce qui est certain, c'est que la méthode du pass sanitaire a été une réussite, ce qui a décidé le président de la République au mois de juillet a permis à la France d'être un des pays les plus vaccinés et sur un mode non obligatoire, c'est quand même une victoire à double titre puisque quand on rend les choses obligatoires, c'est qu'on n'a pas vraiment essayé toutes les autres solutions. Or on a essayé autre chose, le pass sanitaire et ça fonctionne. Alors ce qui est vrai, c'est qu'aujourd'hui parfois on sent certaines limites puisqu'on est obligé justement de durcir. Et puis quand j'entends par exemple ce professeur de médecine de Toulouse qui dit que 90 % de ses patients en réanimation sont des non vaccinés, d'abord ça fait mal au coeur pour les personnes en question parce qu'on se dit, mais bon sang si elles s'étaient vaccinées, on n'en serait pas là et puis ça fait mal au coeur pour notre nation, notre pays.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Et le personnel.

JEAN-MICHEL BLANQUER
Pour le personnel, pour tout le monde. Donc c'est vrai que déjà çà votre micro ce qu'il faut dire, c'est vaccinez-vous. Moi, je connais récemment un proche qui est mort malheureusement, il était anti vaccin et il est mort. Donc il faut le dire c'est quelque chose de très grave pour les personnes concernées mais aussi pour le reste de la population.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Journée nationale de la laïcité aujourd'hui. Les atteintes au principe de la laïcité dans les écoles, collèges et lycées. Quels sont les chiffres ?

JEAN-MICHEL BLANQUER
Alors, là nous avons pour ce trimestre, 610 signalements qui sont remontés. Ce sont des chiffres qui sont à peu près stables, légèrement…

JEAN-JACQUES BOURDIN
Plus importants quand même, par rapport au trimestre précédent.

JEAN-MICHEL BLANQUER
C'est vrai, tout à fait, c'est légèrement en hausse, avec deux raisons que l'on peut indiquer. D'abord l'hommage à Samuel PATY a fatalement été l'occasion pour certains de montrer leur non-respect de la laïcité, donc ça a été signalé et sanctionné. Par ailleurs nous sommes de plus en plus forts et je dirais affirmatifs sur le fait de signaler, et donc il y a forcément plus de signalements. Quand on regarde à l'intérieur de ces signalements, le point intéressant c'est qu'il y en a un peu moins à l'école primaire que précédemment…

JEAN-JACQUES BOURDIN
Il y en a plus au collège.

JEAN-MICHEL BLANQUER
Il y en a plus, ça a augmenté au collège et baissé à l'école primaire. C'est intéressant à regarder, parce que précédemment, dans les trimestres précédents, vos avions constaté une montée à l'école primaire, chose qui m'inquiétait beaucoup, parce que concrètement ça signifiait, soit de l'agressivité de parents d'élèves vis-à-vis du corps enseignant, soit des élèves finalement endoctrinés à la maison et qui en classe faisaient, qui l'apologie du fondamentalisme ou qui refusaient de telle ou telle activité. Eh bien ces sujets-là nous les prenons à bras-le-corps. Ce qui est très important Jean-Jacques BOURDIN, c'est de dire que depuis le début, depuis que j'ai pris mes fonctions, nous n'avons rien lâché sur la laïcité. Nous avons défini les normes, avec la création d'un Conseil des sages de la laïcité, nous avons créé des équipes, nous avons maintenant une formation systématique de tous les professeurs, qui maintenant part sur tout le pays, pour concerner tous les professeurs de France, et nous avons une culture du signalement maintenant qui est installée et qui est faite pour lutter contre ce phénomène. Il n'y a pas de fatalité, et d'ailleurs j'observe que dans certains endroits nous réussissons à gagner du terrain. Est-ce que la situation est bonne pour autant, non, et c'est pour ça qu'il faut être, ne rien lâcher tout simplement…

JEAN-JACQUES BOURDIN
Ne rien lâcher, oui, j'ai quelques questions. Lors de la commémoration, tiens, après l'assassinat de Samuel PATY, un an après l'assassinat de Samuel PATY, combien d'incidents ?

JEAN-MICHEL BLANQUER
Alors, sur le moment on en a vu 98. Aujourd'hui, quand on prend du recul sur tout cela, c'est-à-dire des incidents qui ont pu avoir postérieurement, et les signalements qui se sont faits avec du retard, on est autour de 200. Donc 200 signalements liés à l'hommage lui-même.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Et encore une fois, essentiellement au collège.

JEAN-MICHEL BLANQUER
Essentiellement au collège, c'est vrai. Evidemment ils ne sont pas tous de la même gravité, et donc ça c'est quand on agglomère tout, il y en a une dizaine qui étaient particulièrement graves, mais tous ont fait l'objet de suivi, parfois même avec les familles, parfois de signalements d'ailleurs aux cellules de lutte contre la radicalisation, que nous avons créées à l'échelle des départements, et ceci donc nous permet de montrer que la République est ferme sur ces sujets. Il n'y a pas de laxisme sur ces questions. Le phénomène existe bien sûr, chacun le sait et je suis le premier à le dire et à l'avoir dit depuis longtemps. Mais nous ne faisons pas que le constater, nous agissons.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Il y a une réalité. Je regardais et on va en parler ensemble, je regardais l'étude de l'IFOP pour la Ligue contre le racisme et l'antisémitisme, la LICRA. 1 006 lycéens interrogés, regardons certains chiffres, pas tous mais certains, 40 % des lycéens estiment que les normes et règles édictées par leur religion, sont plus importantes que les lois de la République.

JEAN-MICHEL BLANQUER
Oui, alors…

JEAN-JACQUES BOURDIN
40 % des lycéens, et parmi ces 40 %, il y a 30 % de catholiques et 65 % de musulmans ! Vous vous rendez compte ?

JEAN-MICHEL BLANQUER
Oui, bien sûr.

JEAN-JACQUES BOURDIN
40 % des élèves qui pensent que la loi religieuse prime sur la loi de la République.

JEAN-MICHEL BLANQUER
Alors, d'abord il faut remercier la Licra de faire de tels sondages, parce que moi j'ai toujours été partisan de regarder les réalités en face, donc je ne suis pas vraiment surpris par les résultats, parce que j'ai toujours dit qu'il y avait un phénomène, j'allais dire Dieu sait que j'ai été critiqué sur ces sujets, que l'on a considéré que parfois que j'exagérais ou que j'en faisais trop. Non, il faut être lucide, regarder, d'ailleurs ni exagérer ni minimiser, parce qu'il y a de toute façon une République qui est là, qui est forte, des élèves qui ont besoin qu'on leur explique certaines choses, après il y a des élèves à l'intérieur d'une telle réponse, il y a aussi ceux, vous avez droit dans votre for intérieur d'être très religieux, c'est tout à fait, ça s'appelle la liberté de religion, la liberté de la foi, heureusement c'est ce que notre République garantit justement, et puis il y a tout simplement que dans la vie collective, c'est évidemment la loi de la République qui prime.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Autre chiffre. 61 % des lycéens pensent qu'il est justifié de montrer des caricatures se moquant des religions, afin d'illustrer la liberté d'expression. 61 %, c'est beaucoup peu ?

JEAN-MICHEL BLANQUER
C'est toujours trop…

JEAN-JACQUES BOURDIN
Non non, 61 % pensent qu'il est justifié.

JEAN-MICHEL BLANQUER
Ah oui, bien sûr. Mais « trop », je pensais en creux 49 % qui ne…

JEAN-JACQUES BOURDIN
Oui, aux 39 % qui restent.

JEAN-MICHEL BLANQUER
39, oui, pardon. Oui, bien sûr, mais c'est pour ça, si vous voulez, c'est l'histoire du verre aux ¾ plein ou au quart vide ou aux 2/3 plein et tiers vide. C'est-à-dire qu'on a besoin aujourd'hui de s'appuyer sur ce qui est évidemment encore fort et solide dans notre République, c'est-à-dire que l'immense majorité de la population, y compris nos compatriotes de confession musulmane, évidemment, est convaincue de la pertinence de la laïcité, que la laïcité ça nous garantit la liberté, le respect des uns par les autres, la liberté de religion, la neutralité des services publics, des choses qui sont précieuses au dernier degré, eh bien l'immense majorité de nos concitoyens sont totalement convaincu de ça. Donc, il ne faut pas non plus être dans une sorte de panique ou d'exagération, il faut être dans la sérénité, et sur ce socle qui est solide, ne rien lâcher vis-à-vis de ceux qui, minoritaires, cherchent sans arrêt à donner des coups de boutoir dans la République, dans la laïcité. Et donc je me trouve très ferme par rapport à ça, au travers des différentes mesures que nous prenons.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Alors, on va parler de certaines mesures que vous allez prendre en plus. 8 % des lycéens ne condamnent pas l'assassinat de Samuel PATY. 8 % des collégiens, des lycéens,13 % des lycéens musulmans et 5 % de lycéens catholiques.

JEAN-MICHEL BLANQUER
Oui. Eh bien on retrouve ce que l'on disait, c'est-à-dire il y a en effet une petite minorité qui est à la dérive sur le plan de sa vision du monde et de sa grille de lecture, donc une fois que l'on sait ça, eh bien il faut avec lucidité lutter contre ce phénomène. Parfois ces personnes-là, ces jeunes-là qui sont encore dans une période de formation de leur esprit, ils doivent sentir que la République est forte, qu'on ne laisse pas ce type d'idéologie se développer, l'apologie du terrorisme, l'apologie de la supériorité de l'homme sur la femme, des choses de ce genre. Eh bien ces choses-là en fait ne sont pas acceptées dans notre système scolaire, et le message est parfaitement clair, et aujourd'hui nous nous sommes donné les moyens, les moyens humains en particulier, de faire en sorte que ça cesse. Et tout acteur de l'Education nationale, professeur ou autre, sait ou doit savoir que l'institution est là pour le soutenir ou pour la soutenir, chaque fois qu'il y a des faits qui vont à l'encontre des valeurs de la République.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Dernier chiffre avant de passer aux actes. 19 % des lycéens souhaitent que soient servis des menus conformes à leur religion. 19 % des lycéens, c'est tout de même assez important.

JEAN-MICHEL BLANQUER
Encore une fois une petite minorité, et cette minorité doit savoir que ce n'est pas…

JEAN-JACQUES BOURDIN
Minorité, le 5e.

JEAN-MICHEL BLANQUER
Oui, c'est ça, eh bien elle doit avoir une réponse ferme, claire, sereine, nette, précise, qui dit : eh bien non. Voilà.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Pas de table organisée en fonction de la religion.

JEAN-MICHEL BLANQUER
Bien sûr que non.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Ça existe pourtant. Pas de WC séparés.

JEAN-MICHEL BLANQUER
Après, qu'il y ait des tentations chez certains élèves, de se regrouper par communautés, ça existe bien entendu, et c'est ce que constatent bien des gens, et donc c'est contre cela qu'on doit lutter, précisément par la mixité dans les établissements, par toute une série, par notre façon de parler de ces sujets, par l'esprit de fraternité, par les projets que l'on a, par le fait de mieux se connaître les uns les autres, bref, qui est tout à fait le projet de l'école républicaine. Eh bien c'est contre cela qu'on doit lutter évidemment.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Formation obligatoire de tout le personnel des écoles publiques à la laïcité, c'est-ce que vous allez annoncer ?

JEAN-MICHEL BLANQUER
Oui, on l'a enclenché, ça y est…

JEAN-JACQUES BOURDIN
Vous l'avez enclenché. Formation obligatoire.

JEAN-MICHEL BLANQUER
Vous savez, il y a eu un rapport d'un Inspecteur général honoraire bien connu sur ces sujets, Jean-Pierre OBIN. Nous avons… j'ai retenu toutes les conclusions de son rapport. L'une des conclusions c'est la formation systématique, non seulement des futurs professeurs, ça nous le faisons déjà, mais maintenant de tous les professeurs qui sont déjà en poste, donc 850 000 professeurs de France, qui ont vocation à suivre au cours des temps qui viennent, des formations laïcité…

JEAN-JACQUES BOURDIN
Donc les contractuels…

JEAN-MICHEL BLANQUER
J'ai moi-même introduit ce cycle en parlant aux 1 200 formateurs de l'ensemble de ces professeurs, qui ont eux-mêmes une vision commune, claire, nette, précise, fixée par le Conseil des sages de la laïcité, et qui est une vision encore une fois nette et précise de la laïcité, sans fioriture.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Autres mesures…

JEAN-MICHEL BLANQUER
Alors, il y a le fait que nous avons désormais auprès de chaque recteur, ce que nous appelons le carré régalien, c'est-à-dire des équipes dédiées, sur 4 sujets : les valeurs de la République et de la laïcité, la lutte contre la radicalisation, les violences, et le harcèlement. Sur ces 4 sujets vous avez les rectorats qui interviennent dans les établissements, chaque fois qu'un établissement le demande. Chaque fois qu'on se sent un peu en difficulté par rapport à ces sujets, normalement le mieux c'est d'arriver à le régler en interne, parfois ça n'est pas possible, eh bien une équipe vient, et encore une fois la force reste du côté du droit, et la République s'affirme forte et sereine.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Trois choses. Est-ce que l'on va interdire les horaires différenciés selon les genres dans les piscines ? Je crois que c'est l'une des mesures qui va être annoncée.

JEAN-MICHEL BLANQUER
Vous savez, la loi confortant les principes de la République a évidemment traité la question du sport, le sport, c'est vrai, peut être l'occasion d'une sorte d'entrisme communautariste, et c'est la tentation que du fondamentalisme arrive par le sport, et évidemment nous n'en voulons pas, c'est pourquoi on a créé les contrats d'engagement républicain, et on ne doit pas arriver à de la différenciation homme-femme ou à des manifestations de prosélytisme au travers du sport. L'exemple typique c'est ce qu'a fait, à juste titre, la Fédération française de football, elle a, dans son règlement intérieur, prévu qu'on ne pouvait pas porter le hijab dans des équipes de football féminines, j'ai vu qu'une association fondamentaliste attaquait cela devant le Conseil d'Etat, la Fédération française de football, et Noël LE GRAET, savent très bien qu'ils ont mon entier soutien, j'en ai parlé d'ailleurs avec le président LE GRAET, parce que le sport ne doit pas être la porte d'entrée des fondamentalismes.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Donc pas d'horaires réservés en fonction du genre, dans les piscines ?

JEAN-MICHEL BLANQUER
Non, en tout cas c'est ma préconisation, après vous avez parfois des municipalités, qui ont le pouvoir en la matière, et qui sont tentées d'aller dans ce sens, et évidemment il faut condamner cela.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Un mot au passage, le droit de vote à 16 ans, vous y êtes favorable ou pas ?

JEAN-MICHEL BLANQUER
Non, mais je pense par contre qu'on doit avoir des phénomènes d'engagement à 16 ans…

JEAN-JACQUES BOURDIN
Oui, c'est intéressant.

JEAN-MICHEL BLANQUER
Vous savez, il y a le moment où vous êtes un enfant et un adolescent, et puis le moment où vous devenez un adulte. L'école, avec la famille, vous aide à passer ces différents stades, et c'est tout un… des rites de passage, d'une certaine façon, de la vie, il est très important que le civisme soit l'une des choses les plus importantes que nous transmettions à nos enfants, et ce civisme c'est cela qui va vous permettre d'être un électeur à 18 ans. Auparavant, vous avez du civisme sous d'autres formes que le suffrage, et notamment maintenant le Service National Universel, à 16 ans, d'ailleurs tout le monde peut encore s'inscrire, j'en profite pour le dire, tous les jeunes de 16 ans qui nous écoutent, ou leur famille, doivent le savoir, puisque le SNU ça permet justement d'avoir une semaine où on est tous ensemble, là aussi, avec de la mixité sociale, la mixité des provenances géographiques et tous ordres, et on fait société, on fait République, on fait France ensemble, et on apprend toute une série de choses sur le secourisme, la sécurité civile, l'amour de notre pays, son esprit de défense, etc., et donc c'est, moi aussi au travers du collège et du lycée, que je souhaite que de plus en plus on ait des encouragements à l'engagement, c'est comme ça qu'on a créé des éco-délégués, des classes avec la gendarmerie, la police, les pompiers, bref toutes ces choses qui doivent faire que nos enfants s'engagent dans leur pays, et puis un jour ils arrivent à maturité, à 18 ans, ils peuvent voter puisqu'ils ont eu ce sens de l'engagement, c'est en tout cas l'idéal qu'on doit avoir et cet idéal est en réalité très concret.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Jean-Michel BLANQUER, vous êtes ministre de l'Education nationale, mais vous avez en charge les sports aussi, les Etats-Unis, l'Australie, la Nouvelle-Zélande, la Grande-Bretagne et d'autres pays décident de boycotter diplomatiquement les Jeux olympiques d'hiver 2022 qui se tiendront à Pékin, est-ce que la France va boycotter ?

JEAN-MICHEL BLANQUER
Il y a deux sujets, il y a ce que nous disons sur la Chine d'une part, et notre attitude sur les manifestations sportives d'autre part. Sur la Chine, la France est sans ambiguïté, nous avons condamné par exemple les phénomènes de persécution de minorités, comme les Ouighours, les violations des droits de l'homme, j'ai dit mon inquiétude par rapport à cette joueuse de tennis, pour laquelle nous avons encore de larges inquiétudes sur ce qui lui arrive…

JEAN-JACQUES BOURDIN
Toujours, encore et toujours.

JEAN-MICHEL BLANQUER
Donc là aussi c'est pareil, nous devons être fermes, nets, clairs, sur le fait que nous n'acceptons pas.

JEAN-JACQUES BOURDIN
N'empêche que nous allons en Chine.

JEAN-MICHEL BLANQUER
Mais le sujet du boycott des Jeux olympiques c'est une autre histoire parce que…

JEAN-JACQUES BOURDIN
Non, mais boycott diplomatique, est-ce que la France va boycotter diplomatiquement ?

JEAN-MICHEL BLANQUER
La France ne le fait pas…

JEAN-JACQUES BOURDIN
La France ne le fera pas ?

JEAN-MICHEL BLANQUER
Vous savez, si on doit…

JEAN-JACQUES BOURDIN
Non, mais attendez Jean-Michel BLANQUER, je voudrais que la réponse soit claire, elle ne l'est pas…

JEAN-MICHEL BLANQUER
Elle l'est, si, je viens de…

JEAN-JACQUES BOURDIN
Est-ce que la France ne le fera pas ?

JEAN-MICHEL BLANQUER
La France ne le fera pas, mais je tiens à dire que… nous devons toujours être très attentifs sur le rapport entre sport et politique, ça a un rapport d'ailleurs avec ce que je disais précédemment. Le sport est un monde en soi qui doit être préservé au maximum des interférences politiques, sinon ça peut partir dans n'importe quelle direction, et on finira par tuer l'ensemble des compétitions, donc il faut condamner les violations des droits de l'homme en Chine, parce qu'il y en a et elles doivent être condamnées, je sais le faire, je l'ai fait d'ailleurs largement avant d'être ministre, maintenant il faut savoir, s'agissant des compétitions sportives, avoir l'attitude adéquate et adaptée. Cela dit, je n'irai pas à Pékin, en tant que ministre des Sports, Roxana MARACINEANU ira, de même Sophie CLUZEL ira au titre des Jeux paralympiques, mais nous aurons des messages qui sont clairs sur le plan politique.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Alors dernier point, après le match de foot OL-OM les sanctions, un point retiré à Lyon, le match à rejouer à Lyon à huis clos, ça, ça ne vous concerne pas directement, en revanche, en revanche, des décisions seront prises dans quelques jours.

JEAN-MICHEL BLANQUER
Si, bien sûr nous sommes… là, de nouveau, il est très important que les acteurs du sport soient responsabilisés sur ce type de phénomène, ils le sont, mais il est important que les pouvoirs publics, que nous sommes, soient en appui des mesures qui doivent être prises, et ces mesures doivent être extrêmement fermes.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Qu'est-ce que vous allez décider ?

JEAN-MICHEL BLANQUER
D'ailleurs, il y a une spécificité du football, que je veux signaler, c'est un phénomène qu'on trouve dans le football, presque pas dans les autres sports, nous devons mettre fin à ce type de réalité, d'autant plus que quand on veut, on peut, et c'est pour cela que, avec Gérald DARMANIN, avec Roxana MARACINEANU, on a vraiment décidé, en partenariat avec les acteurs, notamment la Ligue, de changer la donne dans les temps qui viennent, parce que c'est inacceptable pour tout le monde.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Qu'est-ce que vous allez changer ?

JEAN-MICHEL BLANQUER
Nous donnerons les mesures dans quelques jours…

JEAN-JACQUES BOURDIN
Une mesure, par exemple.

JEAN-MICHEL BLANQUER
Il faut d'abord avoir un contrôle individuel des gens qui s'adonnent au hooliganisme, beaucoup plus serré, donc il y aura des mesures à prendre, mais ça je laisse le ministre de l'Intérieur le dire, il y a aussi tout ce que nous devons faire en matière d'encadrement de ce qu'on appelle le « supporterisme », là Roxana MARACINEANU a dit des choses très claires ces derniers jours, y compris… là aussi on retrouve les enjeux de civisme si vous voulez, pour qu'il y ait une façon d'être au stade, que l'on connaît bien d'ailleurs, vous qui aimez le rugby…

JEAN-JACQUES BOURDIN
Oui, moi j'aime le rugby et le foot, j'aime les deux sports…

JEAN-MICHEL BLANQUER
Moi aussi, je suis dans le « en même temps » sportif.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Oui, mais j'enverrai quand même mon enfant au foot !

JEAN-MICHEL BLANQUER
Moi aussi.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Contrairement à ce que dit Roxana MARACINEANU.

JEAN-MICHEL BLANQUER
Ah non, non, moi j'encourage le football, ça il n'y a aucun doute, et j'aime être dans un stade de football, j'aime le tonus qu'il y a dans un stade, mais le tonus doit être bon enfant, le tonus doit être dans le soutien des équipes, de nouveau c'est pareil…

JEAN-JACQUES BOURDIN
Mais qui doit décider de l'arrêt d'un match, l'arbitre ?

JEAN-MICHEL BLANQUER
99 % des gens pensent comme ce que je viens de dire, le problème c'est le 1 % qui gâche tout, eh bien on va lutter contre ce 1 % avec…

JEAN-JACQUES BOURDIN
Et c'est l'arbitre qui doit décider de l'arrêt d'un match ?

JEAN-MICHEL BLANQUER
Bien sûr.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Pas une autre instance ?

JEAN-MICHEL BLANQUER
Elle peut s'appuyer sur l'extérieur.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Oui, mais c'est l'arbitre qui décide.

JEAN-MICHEL BLANQUER
C'est toujours important d'avoir un pouvoir de décision qui soit quand même clair et net.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Merci Jean-Michel BLANQUER d'être venu nous voir.

JEAN-MICHEL BLANQUER
Merci à vous.


Source : Service d'information du Gouvernement, le 10 décembre 2021