Texte intégral
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Merci Josep. Avant de compléter ton propos, je voudrais faire une déclaration concernant la réincarcération de notre compatriote française binationale Fariba Adelkhah. Nous avons appris avec stupéfaction que les autorités iraniennes avaient décidé, sans aucune explication, sans aucune information préalable, de réincarcérer Fariba Adelkhah. Je vous rappelle que Mme Adelkhah a été incarcérée une première fois le 5 juin 2019, et qu'elle bénéficiait depuis le 3 octobre 2020 d'une mesure d'assignation à résidence sous le contrôle d'un bracelet électronique.
Comme nous l'avons souligné, à plusieurs reprises, la condamnation de Mme Adelkhah n'est fondée sur aucun élément sérieux. Elle est purement politique et arbitraire. La décision de sa réincarcération, que nous condamnons, ne peut qu'avoir des conséquences négatives sur la relation entre la France et l'Iran, et réduire la confiance entre nos deux pays. La France exige donc la libération immédiate de Mme Adelkhah.
Je voudrais maintenant revenir sur le déroulé de ce Gymnich informel. Avec Josep Borrell, hier soir, on se disait que c'était sans doute la réunion informelle la plus importante à laquelle nous avions, l'un et l'autre, participé dans notre histoire politique, qui est tout de même assez ancienne. Et je suis très heureux que cette réunion se soit tenue à Brest, dans ma région d'origine, dans la région que j'ai eu l'honneur de présider pendant une dizaine d'années.
Ma première remarque concernant le déroulé de cette réunion informelle porte sur le premier point qui nous a mobilisés en "jumbo" sur la boussole stratégique, ce document qui est, je l'ai dit hier, le premier véritable Livre blanc de la défense européenne et qui sera un élément essentiel de l'affirmation de la souveraineté européenne, sujet sur lequel la présidence française veut pouvoir aboutir au cours de cette présidence, et singulièrement, si possible, au Conseil du mois de mars.
Je crois que cet échange a été majeur et a permis de fixer les priorités pour la politique de sécurité et de défense jusqu'à l'horizon 2030. Et - je ne t'en ai pas parlé, mais j'ai eu ce drôle de sentiment que nous étions déjà en application de la boussole stratégique, au cours de cette réunion informelle, avant même qu'elle ne soit mise en oeuvre, puisque nous avons été amenés, depuis hier après-midi, à engager des discussions sur des sujets centraux concernant notre sécurité.
Tout se passait comme si on avait déjà anticipé la boussole stratégique.
Je dois dire que sur les questions liées à la Russie et à l'Ukraine, ce qui m'a frappé le plus, et je l'ai dit hier soir, c'est la détermination et l'unité de l'ensemble de nos collègues, sur trois points majeurs.
D'abord, la réaffirmation d'une posture dissuasive ferme vis-à-vis de toute nouvelle atteinte éventuelle à l'intégrité territoriale de l'Ukraine. Le Haut représentant a rappelé tout l'heure les dix points, on pourrait appeler cela le décalogue de Borrell, les dix points... le décalogue de Brest. En tout cas, cette posture dissuasive ferme, en application d'ailleurs des engagements qui avaient été pris au moment du Conseil européen du 16 décembre - toute nouvelle agression militaire contre l'Ukraine aurait des conséquences massives et un coût sévère en réponse - cela a été réaffirmé de manière extrêmement forte et extrêmement solidaire.
J'ai noté aussi cette convergence sur l'importance de poursuivre un dialogue exigeant avec la Russie, notre volonté de le faire, sous réserve que les paramètres de discussion soient partagés, et qu'il ne se fasse pas sous la forme d'un ultimatum. Mais nous souhaitons que le plus haut niveau d'engagement européen possible soit effectué dans les différentes enceintes du dialogue, que ce soit l'enceinte du format Normandie, où la France et l'Allemagne vont poursuivre leurs efforts pour obtenir des gestes de retour vers la mise en oeuvre des accords de Minsk. Annalena Baerbock et moi-même, nous nous sommes entretenus sur ce sujet et nous ferons une visite commune en Ukraine, dans les jours qui viennent. Mme Baerbock va se rendre en Ukraine, parce que c'est son premier déplacement, je crois lundi, et elle va préparer un déplacement commun de l'Allemagne et de la France sur la ligne de sécurité, la ligne de démarcation, et à Kiev.
Dans ce cadre-là, nous souhaitons bien réaffirmer la position européenne que le Haut représentant a pu réaffirmer lors de son déplacement récent en Ukraine. Nous voulons la réaffirmer aussi dans le cadre de la discussion russo-américaine sur la maîtrise des armements nucléaires stratégiques, la suite de New Start, et l'appréciation de la mise en oeuvre de New Start aujourd'hui. Cela, nous le faisons en coordination très étroite avec notre allié américain. Nous souhaitons affirmer notre présence forte à l'OTAN où nous avons été très actifs dans la préparation du Conseil OTAN-Russie, et nous souhaitons aussi que sur ce sujet la discussion sur la maîtrise des armements, nucléaires, intermédiaires et conventionnels, puisse se poursuivre. Nous nous sommes exprimés sur ce sujet ; et puis, poursuivre aussi à l'OSCE, où des discussions ont commencé sur la maîtrise des armements conventionnels et sur les grands principes de l'architecture de sécurité européenne, et l'Union européenne s'y est exprimée d'une seule voix.
Et puis, ce qu'a dit tout à l'heure Josep Borrell était très important sur la coordination. Nous allons renforcer notre coordination pour être cohérents dans l'ensemble des formats sur lesquels nous avons à nous exprimer et faire en sorte que cette coordination puisse apporter la présence forte de l'Union européenne et l'unité des positions européennes qui ont été actées au cours de cette réunion informelle. Nous le ferons, évidemment, en relation très étroite avec le secrétaire d'Etat Blinken.
Je voudrais dire deux mots sur le Mali, puisque nous avons traité cette question. Tout à l'heure Josep Borrell a rappelé notre position. Nous avons apprécié la posture courageuse, ferme, de la CEDEAO, lors de sa réunion, dimanche dernier, prise à l'unanimité, avec la volonté de préserver la démocratie au Mali, avec aussi la condamnation de la présence et du développement de la société de mercenaires Wagner. Et comme l'a dit Josep Borrell, nous sommes déterminés à soutenir la CEDEAO dans l'appui à ces démarches et la mise en oeuvre des mesures qui ont été décidées, à la fois dans le gel des appuis budgétaires, qu'ils soient européens ou qu'ils soient nationaux, puisqu'en qui ce concerne la France, ce sera le cas, à condition que cela ne porte pas atteinte à la population ; et donc, les opérations liées au développement seront maintenues. Et ce qu'a dit Josep, tout de suite, je le partage : nous sommes et nous voulons rester au Mali, mais pas à n'importe quel prix. Et nous sommes au Mali pour combattre le terrorisme, et pas pour autre chose.
Donc, nous continuons à suivre la situation de très près et nous allons réunir, après la rencontre des ministres des affaires étrangères du G5-Sahel que va initier le Haut représentant, la Coalition internationale pour le Sahel. Il y a 60 membres dans cette coalition dont des Etats européens, des Etats africains, les Etats-Unis, d'autres et plusieurs organisations internationales, pour faire le point de la situation après les décisions prises par la CEDEAO à la suite de la volonté de la junte de ne pas mener la transition dans les délais qu'elle avait initialement prévus.
Un mot sur l'état des discussions sur le nucléaire iranien, parce que nous avons abordé cette question. J'ai eu l'occasion, il y a quelques jours, de déclarer que cette négociation qui a repris, après cinq mois d'interruption, et après une situation de blocage, encore avant la fin de l'année dernière, a repris plutôt mieux au début de l'année, mais cette négociation avance beaucoup trop lentement.
Chacun est conscient que le choix, aujourd'hui, n'est pas de conclure dans quelques semaines ou dans quelques mois, mais le choix, il est de choisir entre un accord de retour au JCPoA très rapide, et une crise de prolifération relancée avec l'Iran. Donc, il importe que nous puissions accélérer, parce que cette négociation se trouve devant une forme d'urgence vitale. Il faut maintenant aboutir et trancher. Ou bien les Iraniens veulent conclure, et alors, on a le sentiment que la flexibilité et l'agilité de la posture américaine pourra être au rendez-vous ; ou ils ne veulent pas conclure, et à ce moment-là nous sommes devant une crise majeure de prolifération. En tout cas, nous avons souhaité, et les uns et les autres, qu'il y ait une vraie accélération.
Je précise d'ailleurs à cet égard que l'enjeu iranien est un véritable enjeu européen ; à la fois par la géographie, la proximité, les risques que cela représente, les menaces qui sont plutôt sur nos territoires ; à la fois historiques, puisque ce sont les Européens en 2003 qui ont été à l'initiative du processus de négociation pour éviter la prolifération nucléaire ; et à la fois pratiques, puisque c'est le Haut représentant qui assure la coordination du travail du groupe qui réunit à la fois les trois Européens, les Etats-Unis - qui n'y sont plus - la Chine, la Russie et l'Iran évidemment. Cette coordination est européenne et elle doit se poursuivre, mais aujourd'hui, c'est un signal d'alerte, ça va beaucoup trop lentement pour aboutir à un résultat. Si ça se poursuit ainsi, il n'y aura plus rien à négocier, puisque l'avancée des Iraniens vers la production de matière fissile se poursuit, et à un moment donné il ne sera plus nécessaire de négocier puisqu'il n'y aura plus rien à discuter.
Enfin, nous avons eu une réunion extrêmement importante avec le président Moussa Faki et Mme Aissata Tall Sall, ministre des affaires étrangères du Sénégal, - le Sénégal présidant l'Union africaine à partir du 5 février prochain-, pour préparer le sommet UE-UA qui se tiendra les 17 et 18 février prochains à Bruxelles. C'est un sommet stratégique, il ne se réunit que tous les trois ans ; et chacun a souhaité que ce soit le début d'une nouvelle donne entre l'Afrique et l'Europe, entre l'Union africaine et l'Union européenne, autour des thèmes de la prospérité, de la sécurité et des mobilités partagées : une forme de "New deal" européen qui a pour objectif de renforcer la souveraineté des Etats africains, qui est aussi un élément important de la souveraineté européenne.
Inévitablement nous serons amenés à parler aussi dans ce sommet du mois de février des enjeux de santé, de la lutte contre le Covid-19, en particulier en Afrique, mais on sera aussi amenés à évoquer l'ensemble de l'architecture euro-africaine de sécurité, sans doute pour essayer de rebâtir un dispositif qui soit plus sécurisant et plus performant, en articulation et en partenariat avec nos collègues africains.
Je m'arrête là, Monsieur le Haut représentant, parce qu'autrement on va prendre trop de temps.
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Pour compléter sur l'Iran, parce que ce n'était pas le sujet de départ, mais il n'y a plus rien à négocier si rien ne se passe, ni pour éviter l'accession de l'Iran à l'arme nucléaire, mais ni, parallèlement, pour l'Iran, de bénéficier de la levée des sanctions. Cela veut dire les deux choses. Je le dis là, pour les Iraniens. S'il n'y a pas d'accélération, il n'y a pas non plus de levée de sanctions.
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Q - Est-ce que vous pouvez nous préciser un peu ce que concrètement veulent dire les contre-propositions, les positions européennes, dont vous avez discuté, que vous avez esquissées, dans le dialogue avec les Russes et les Américains, d'une part, et d'autre part, ce matin, en arrivant, la ministre suédoise a dit que la Suède allait suspendre sa participation à la force Takuba ainsi qu'à la mission de formation européenne au Mali, est-ce que vous avez noté d'autres désistements de la sorte et qu'est-ce que cela a comme conséquence, par rapport à l'engagement européen ?
R - Il n'y a pas de désistement de la Suède. C'est une illusion d'optique. Dans la mesure où il y a un certain nombre de pays qui se sont engagés dans l'opération Takuba, une dizaine, et lorsqu'ils s'engagent dans l'opération Takuba, ces pays membres, dont la Suède, disent : moi, je ferai l'opération Takuba de telle date à telle date, avec tant d'effectifs. Or ce qu'a dit la ministre suédoise, elle est venue me le dire, parce qu'elle n'était pas d'accord avec la manière dont une dépêche d'agence avait été rédigée ou interprétée, peu importe... À la fin de l'année, c'est la fin du contingent de Takuba suédois. Et on va passer à un contingent d'un autre pays membre. Donc, il n'y a pas de départ. Il y a simplement l'application des engagements pris par la Suède à l'égard de la communauté internationale. Donc, il faut laisser les choses là où elles sont, et non pas ailleurs.
Concernant les engagements et la position, par ailleurs, qu'a rappelés Josep Borrell, c'est : nous sommes au Mali, nous y restons. On ne rajoute pas dans n'importe quelles conditions. Et c'est la raison pour laquelle nous allons nous retrouver dans la conférence de la coalition que nous allons organiser dans quelques jours à Bruxelles.
Sur les contre-propositions, je pense que le décalogue qui a été évoqué, il y a un instant par le Haut représentant, représente des contre-propositions. Elles sont connues, ce ne sont pas de nouvelles contre-propositions. Les contre-propositions, c'est revenir au grand principe de l'acte final d'Helsinki et de la charte de Paris de 1990, qui proclame l'inviolabilité des frontières, qui indique que chaque Etat doit s'abstenir de toute menace ou d'utilisation de la force contre un autre Etat en Europe, qui dit que les droits humains et les libertés fondamentales doivent être respectés, que chaque Etat est libre d'appartenir à telle ou telle organisation internationale. Ce sont les éléments de l'acte final d'Helsinki et de la charte de Paris validés en 1975 par l'URSS.
Ça, c'est pour les grands principes. Donc c'est en particulier au sein de l'OSCE que nous voulons poursuivre ces propositions. Dans le dialogue OTAN/Russie, nous souhaitons qu'il puisse être mis en oeuvre les paramètres d'un nouvel instrument qui permettrait de gérer la suite du traité FNI qui n'existe plus, qui est caduc, et peut-être d'autres ; mais aussi peut-être de se mettre d'accord par ailleurs sur la transparence, sur les opérations militaires conventionnelles, et en particulier sur les manoeuvres militaires conventionnelles. Et puis, à l'OSCE, peut-être, faire en sorte de moderniser le document de Vienne qui vise à renforcer la prévisibilité des activités militaires et faire en sorte qu'il y ait une plus grande transparence.
Nous avons mis tout cela sur la table. On va le remettre. Ce que vient de dire le Haut représentant conforte cette position. Après, il faut les instances pour en parler. Elles ont été définies, on les connaît. Et évidemment, le signe ukrainien sera, à cet égard, un signe tout à fait essentiel de la part de la Russie.
Q - Considérez-vous comme une erreur le fait que le gouvernement lituanien n'ait pas qualifié le bureau de représentation commerciale de Taïwan en Lituanie de représentation commerciale de Taipei, comme c'est habituellement le cas ?
Q - Sur la Lituanie et la Chine.
R - Nous avons exprimé aujourd'hui et ce n'était pas la première fois, notre totale solidarité avec la Lituanie. Et la condamnation des actes de coercition menés par la Chine. Comme vous le savez, il y a un dispositif anti-coercition qui a été mis sur la table par la Commission il y a peu de temps. Et une forme de nos réponses, ce sera d'aboutir à ce que sous présidence française, il y ait une accélération de ce texte pour permettre de réagir aussi à l'égard des mesures d'intimidation et de coercition que mène la Chine à l'égard de la Lituanie, pays avec lequel nous sommes totalement solidaires.
Q - [Question sur la cyberattaque contre l'Ukraine] (...) Pour le ministre, je voulais savoir, vous étiez ministre de la défense au moment de l'envoi des forces françaises... Est-ce que vous n'êtes pas déçu, est-ce que vous ne regrettez pas cet engagement d'être venu au secours du Mali, est-ce que vous n'êtes pas un peu amer de voir comment la situation a tourné ?
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R - Dans cette perspective-là, je ne parle pas comme président de la conférence mais comme ministre français, la France est tout à fait disposée, par l'ANSSI, à contribuer à cette mission technique, si elle est demandée par les Ukrainiens.
J'ai souvenir de janvier 2013. J'ai souvenir de la fin d'après-midi du jour où l'on a déclenché les opérations, et de la mort de Damien Boiteux, premier mort français, mort pour que le Mali vive libre. J'ai aussi toujours, en présence, le monument aux morts que j'ai initié dans les jardins de l'ambassade de France à Bamako, en mémoire à tous les soldats français qui sont morts pour la liberté du Mali. Malheureusement, après que j'ai quitté le ministère de la défense, il y a encore eu des noms à s'ajouter. Nous avons combattu pour la liberté des Maliens. Et nous sommes toujours là pour combattre les terroristes qui veulent porter atteinte à cette liberté.
Et si nous n'étions pas intervenus au mois de janvier 2013, alors ce pays serait devenu un Etat islamique, comme le projet en était de Daech à Raqqa. Et cette intervention a permis d'une part d'éviter cela, et d'autre part de mettre en oeuvre un processus démocratique puisque dès 2013, il y eu des élections présidentielles, il y a eu des élections législatives qui se sont retrouvées après. Donc, ce qui ne s'est pas passé après, c'est la mise en oeuvre des accords d'Alger et la volonté politique de les mettre en oeuvre. Mais les accords d'Alger sont toujours là ; et la volonté politique n'est toujours pas là. La prise de position de la CEDEAO est une prise de position non seulement courageuse mais aussi qui fait référence à l'histoire et à la propre sécurité des pays africains de l'Afrique de l'Ouest.
C'est la raison pour laquelle, Josep Borrell le rappelait tout à l'heure, il y a eu unanimité de nos collègues pour appuyer la démarche de la CEDEAO. C'est une démarche d'initiative africaine.
Je me permets une dernière observation puisqu'il y a, aujourd'hui, des manifestations à Bamako, et puisque la raison qui est invoquée par la junte d'allonger la transition jusqu'à une durée de cinq ans, ce sont des raisons de sécurité, " on ne peut pas procéder à des votes parce que nous ne sommes pas en sécurité ". Je pense que si on est sécurité pour manifester, on doit sûrement être en sécurité pour voter.
Q - Monsieur le Haut Représentant, Monsieur le Ministre, est-ce que vous seriez d'accord pour dire qu'il y a eu, au sortir de ces réunions, un rapprochement des positions des 27 sur les questions de sécurité ? Ces positions étaient précédemment assez divergentes. Est-ce que vous pensez qu'il y a eu un rapprochement, une prise de conscience commune à la faveur, si j'ose dire, de la crise en Ukraine, des positions de sécurité des 27 ? Merci.
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R - Je ne peux que confirmer ce que dit le Haut représentant. J'ai senti pendant tout ce forum informel une très grande solidarité, une très grande détermination, une volonté de coordination, de convergence et de cohérence, que le Haut représentant a pour mission d'activer, et le sentiment d'avoir un destin commun. Le destin commun, ça veut dire d'assurer sa sécurité ensemble. C'était, je crois, très frappant ; je le dis d'autant plus facilement que cela fait dix ans que je participe à des réunions de ce type. Je n'ai jamais senti ça.
Q - Bonjour. C'est une question pour vous deux. Tout d'abord, vous demandez si vous estimez qu'avec, ce que vous avez appelé Monsieur le Ministre, le décalogue de Borrell on est arrivé au bout de ce que les Européens peuvent déposer comme, disons, contre-proposition ou comme alternative commune ? Et si c'est le cas, si donc ce travail-là est effectué, est-ce que vous estimez qu'il est opportun de prendre une initiative directe de l'Union européenne vis-à-vis de la Russie, sous un format à définir, que ce soit une nouvelle visite de M. Borrell à Moscou, ou comme la Chancelière allemande Merkel et le Président Macron l'avaient imaginé, un petit peu à la surprise générale, en juin dernier, un nouveau sommet directement avec le Kremlin ? Ou bien, est-ce que vous estimez collectivement, s'il y a une position commune, qu'on ne discute pas, je dirais, un pistolet sur la tempe, comme on peut le dire, de temps en temps ?
R - Je pense que les positions ne sont pas des positions nouvelles. C'est la déclinaison, ce que vient de faire le Haut représentant, de positions que nous avons en commun, mais qui avaient peut-être été trop enfouies et qu'il nous faut bien manifester dans la cohérence et dans la suite logique des engagements que nous avons pris ensemble, les Européens, à la fois - c'est très ancien - dans l'acte final d'Helsinki, mais surtout dans la charte de Paris.
Ça, c'est, sur la table. De l'autre côté, la partie russe a mis sur la table sa volonté d'un traité avec les Etats-Unis et d'un traité avec l'OTAN. A partir du moment où il y a sur la table des éléments, il faut prendre les moyens du dialogue. Nous avons dit, tout à l'heure, et l'un et l'autre, que l'affirmation d'une dissuasion, s'il y avait une atteinte supplémentaire à l'intégrité de l'Ukraine, est très claire et très largement partagée et très vigoureuse. En même temps, nous avons toujours dit qu'il faut essayer de trouver le chemin du dialogue. Et le chemin du dialogue, nous avons des bases communes pour le faire. Alors, après, de quelle manière cela peut se faire, il faut laisser le temps ouvrir les opportunités. (...).
source https://www.diplomatie.gouv.fr, le 18 janvier 2022