Déclaration de Mme Amélie de Montchalin, ministre de la transformation et de la fonction publiques, sur l'emploi dans les services publics, Paris, 7 février 2022.

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Texte intégral

Bonjour à toutes et à tous,

"  Protéger, innover, soigner, enseigner, accompagner, avancer…  "

Ici, avec nous, à distance, via les réseaux sociaux, vous qui nous écoutez, vous savez à quel point ces actes sont au coeur de la vie de chacune et chacun de nous.

Nous traversons depuis deux ans une crise qui a profondément changé notre rapport au travail, à la famille, aux études, aux loisirs. Notre vie, tout simplement. Autour de nous, beaucoup ont été isolés, malades, certains ont perdu des proches.

Mais dans ces bouleversements, dans ces doutes parfois, nous avons tenu, ensemble. Et c'est aussi grâce à nos services publics. Oui, il faut encore le redire, comme le Président de la République l'a fait il y a 15 jours en Haute-Vienne devant les agents publics. Grâce à nos services publics, à celles et ceux qui se sont mobilisés le jour et la nuit, à celles et ceux qui sont toujours sur le pont, à l'hôpital bien sûr, mais aussi dans tous les services publics.

Les agents publics ont réinventé leur façon de travailler, ils ont pris des risques, ils n'ont pas compté leurs heures, pour soutenir notre pays. Ils ont assuré les soins, la sécurité, l'entretien des espaces publics, la collecte des déchets, la scolarité de nos enfants, les aides d'urgence aux entreprises, l'accompagnement social des plus fragiles.

Ces services publics, les Français les ont plébiscités tout au long de la crise. Et la ministre des agents publics que je suis ne peut que s'en réjouir. Quelle meilleure reconnaissance professionnelle que celle de ses compatriotes ?

Les Français ont toujours été attachés à leurs services publics, mais la crise a sans aucun doute changé leur rapport à celles et ceux qui le font vivre. Elle a constitué un déclic. Au-delà des remerciements, au-delà des applaudissements aux fenêtres, beaucoup ont redécouvert la valeur et les valeurs du service public.

Alors saisissons-nous de cette opportunité pour mieux faire connaître les métiers du service public et attirer de nouveaux talents.

Vous voyez, à rebours de ce que l'on entend aujourd'hui dans le débat public, j'assume totalement ce discours sur les services publics et les fonctionnaires.

Notre choix, en responsabilité, est de faire face aux défis du service public à 15 ans, 30 ans : pour que notre fonction publique reste un exemple de service et d'efficacité, d'excellence et de bienveillance. Qu'elle attire tous les talents de notre société, belle et diverse. Qu'elle nous permette, tout simplement, de continuer à faire tenir l'Etat dont chacun mesure le rôle qu'il joue dans notre cohésion nationale.

Alors, je m'adresse aujourd'hui à vous tous, et en particulier aux jeunes qui nous écoutent. Vous vous demandez quel avenir vous allez construire pour vous et pour les autres, pour votre pays. Vous avez 18, 20, 25 ans, 30 ans, peut-être moins et peut-être plus.

Rejoignez-nous ! Venez renforcer nos services publics ! Venez assurer la relève ! Venez exercer de nouveaux métiers d'avenir ! Venez construire la France de demain ! Je vous le dis : n'écoutez plus ceux qui répètent les mêmes rengaines sur le "  trop de fonctionnaires ".

Rien que pour assurer les missions du service public, nous avons besoin de recruter 100 000 personnes par an, pas d'en supprimer 200 000.

Il ne s'agit pas d'un grand plan de recrutements supplémentaires mais d'une réponse à un risque de pénurie de talents et de compétences nouvelles. Un risque inexorable si nous ne faisons rien.

Car notre fonction publique, aujourd'hui, n'attire plus assez.

- Seulement un jeune sur dix se dit intéressé par les métiers du service public ;
- En 25 ans, le nombre de candidats qui se présentent aux concours de l'Etat a été divisé par trois.

Derrière ces chiffres, il y a une réalité urgente et concrète, une fatalité que nous ne pouvons accepter : si nous continuons sur cette voie, c'est l'efficacité même du service public qui est en jeu, c'est sa capacité à servir tous les Français, dans tous les territoires, qui est menacée.

Cette désaffection, elle s'est nouée sur des malentendus et des préjugés qu'il nous appartient de déconstruire.

Il y a d'abord les discours de campagne ou les propos d'estrade qui ont abîmé les agents publics et nos services publics. Qui d'entre vous rejoindrait une organisation dont ceux qui prétendent la diriger dénigrent les salariés ? Qui voudrait exercer un métier dont on parle chaque jour comme d'une variable d'ajustement budgétaire ? Qui candidate pour une entreprise en plan social massif ?

Mais il y a aussi les clichés du quotidien qui ont la vie dure. Ceux qui dépeignent un monde kafkaïen, des guichets dysfonctionnels, des montagnes de papier, une hiérarchie trop pesante, des routines trop installées.

Bien sûr, tout n'est pas parfait, loin s'en faut.

Mais, en parcourant la France des services publics, j'ai vu des femmes et des hommes exercer mille métiers, dans mille costumes. Sur terre, sur mer, en milieu rural, dans des grandes villes. Sans le bac et avec bac+10.

A travers chacune et chacun d'eux, j'ai vu un seul et même sens du service, un seul engagement, une seule fierté : celle de faire vivre en actes des valeurs qui parlent à tous les Français :

- L'égalité : pour tous, tout le temps, dans tous les services publics, mairies, hôpitaux, préfectures ;
- La continuité : en toutes circonstances, quoi qu'il en coûte, y compris et surtout dans les heures les plus graves de la crise ;
- La neutralité : quelle que soit la personne à qui on s'adresse, ses origines, ses croyances, son identité sexuelle ;
- L'adaptabilité : regardez, quand il a fallu construire une application, la plus téléchargée en France, pour protéger chacun face à la Covid en respectant pleinement les libertés.

C'est tout simplement notre devise que ces agents incarnent chaque jour : liberté, égalité et fraternité. Cette devise qu'ils font vivre au quotidien dans l'éducation, la sécurité, la cohésion sociale, la santé, l'insertion, qu'ils travaillent au sein de l'Etat, des collectivités territoriales, des hôpitaux, des opérateurs sociaux, à Paris ou sur tout le territoire, et à l'étranger.

J'ai voulu aujourd'hui donner la parole à ces femmes et ces hommes. Avec moi :

- Florence, douanière, sécurise nos frontières et lutte contre le trafic de stupéfiants ;
- Kévin s'emploie à prévenir les risques d'inondations en région parisienne et à assure la protection de l'environnement ;
- Malha a consacré toute sa carrière aux jeunes en enseignant puis en les encadrant dans les écoles, les collèges et les lycées, en quartiers prioritaires ;
- Sophie dirige un hôpital, s'assure que les locaux, le matériel, les soignants permettent de sauver des vies, loin des clichés sur l' "  administration administrante ".

Ces grands principes ne sont pas qu'une belle idée. Ils sont anciens, ils font partie de l'identité de la France. Pour autant, ils ne sont en rien contradictoires avec l'innovation, l'efficacité, la modernité. C'est tout le contraire.

Notre fonction publique propose une réelle diversité de métiers et de lieux, la possibilité de réaliser des projets d'intérêt général, à la pointe de nos savoirs et de nos technologies, avec de vraies perspectives de progression. Quel autre employeur peut proposer un tel contrat ?

Alors je sais que beaucoup de ceux qui nous écoutent pensent que la fonction publique est réservée à certains, qu'elle n'est ouverte qu'aux élites. Je vous le dis : rien n'est moins vrai. Notre fonction publique représente la diversité et les talents de toute la société. C'est d'ailleurs pour moi une condition essentielle pour que les citoyens croient en la démocratie, que les Français retrouvent la confiance dans les institutions. Pour cette raison, nous avons profondément transformé nos modes de recrutements. Non, on n'intègre plus le service public seulement par concours. Chaque année des milliers de personnes sont recrutées par contrat et viennent nous apporter une autre vision, d'autres compétences.

Les concours eux-mêmes seront sont toujours plus ouverts et plus tournés vers les qualités et les compétences que vers les savoirs académiques. Non, ce ne sont plus seulement les dissertations de culture générale ou les notes d'anglais qui décideront lequel de nos jeunes réussira le mieux à conduire un projet en faveur de l'inclusion ou de l'environnement, pour le logement ou les mobilités, pour notre sécurité et notre santé.

Les concours ne sont pas réservés aux plus favorisés. Nous avons ouvert 74 prépas Talents en 2021 partout en France pour préparer aux concours accessibles après le bac ou une L3 pour devenir directeur d'hôpital ou commissaire de police. 1 700 places sont offertes avec une bourse annuelle de 4000 €, un tuteur et des facilités de logement. Ces classes Talents permettent de se préparer en confiance et sans autocensure pour intégrer la fonction publique.

Alors, parfois, avant de vous engager, de préparer un concours, vous souhaitez en savoir un peu plus, découvrir nos métiers. C'est pourquoi nous avons multiplié les possibilités pour les jeunes d'avoir une première expérience chez nous : déjà 24 000 jeunes sont apprentis dans les administrations et ont fait un pas vers l'insertion et peut-être vers une vocation du service public. C'est un record. 50 000 stages sont disponibles en 2022 pour vous permettre de découvrir nos métiers. Et toutes les offres sont sur un seul site et disponibles sur 1jeune1solution !

Nous voulons aussi être des employeurs exemplaires car les Français sont en droit de l'attendre de l'Etat. Pour les 62% de femmes qui travaillent dans le service public et celles qui nous rejoignent, pour les femmes, les hommes et les enfants qui partagent leurs vies, nous agissons pour une fonction publique respectueuse des choix de vie de chacun et de chacune, et qui s'attache à respecter un équilibre toujours complexe, entre la vie personnelle et la vie professionnelle ; une fonction publique dans laquelle les inégalités salariales non justifiées n'ont plus leur place, à quelque niveau que ce soit ; une fonction publique qui ne peut tolérer, ni fermer les yeux sur les violences sexistes et sexuelles, avec le déploiement des dispositifs de signalement dans toutes les administrations, pour donner aux personnes qui en seraient victimes un interlocuteur et une écoute en toutes circonstances. Nous nous engageons enfin pour une fonction publique toujours plus inclusive pour les personnes en situation de handicap.

Enfin, et j'en terminerai par-là, nous créons les conditions pour que les agents de la fonction publique soient mieux protégés, mieux équipés, mieux soutenus au quotidien.

Vous craignez les lourdeurs, le management qui enferme. Tout cela a bien changé. J'ai entendu le besoin de nouveaux modes de travail et d'équipements plus modernes ; et je suis convaincue qu'il n'y pas de fatalité à ce que l'administration soit en retard par rapport aux entreprises.

- Nous avons signé à l'unanimité avec les syndicats un accord sur le télétravail dans la fonction publique, qui permet de télétravailler jusqu'à trois jours par semaine avec une indemnité financière.
- Nous avons fait en un an ce que nous aurions fait en cinq pour équiper 99% des agents pour qu'ils puissent télétravailler dans les meilleures conditions.
- Nous avons engagé des moyens financiers considérables dans le cadre du plan de relance pour moderniser nos procédures, numériser nos procédures comme les démarches administratives du quotidien, réduire le volume de papier.

Le Gouvernement a aussi voulu, catégorie par catégorie, métier par métier, adapter les rémunérations au travail et à l'engagement à l'aide d'une politique salariale ambitieuse :

- Nous avons revalorisé de façon inédite certains métiers, avec des rémunérations plus attractives pour les personnels soignants, les enseignants, les policiers par exemple ;
- Nous avons revalorisé les agents les moins bien rémunérés et fait en sorte que personne ne soit recruté en dessous du SMIC et que chacun ait des perspectives de progression ;

Ce que nous avons fait hier pour ces agents, nous le ferons demain pour tous les autres, pour offrir à chacune et à chacun des conditions de rémunération en phase avec l'engagement fourni, les responsabilités exercées, pour donner à tous des perspectives de progression car c'est bien ça la promesse initiale de la fonction publique.

C'est le sens de la grande négociation sur les salaires qui sera engagé sur la base des propositions qui me seront remises à l'issue de la conférence sur les perspectives salariales le mois prochain.

Pour toutes ces raisons, et il faut qu'elles soient davantage connues, je forme le vœu que nous recrutions aujourd'hui et demain les meilleurs, les plus motivés, les plus audacieux parmi vous.


Mesdames, messieurs,

Dans une société d'engagement où chacun veut se dépasser et trouver du sens, je vous propose de choisir le service public.

C'est sur vous que je compte, c'est sur vous que compte tout un pays. C'est vous qui, en choisissant le service public, serez amenés à construire la France de demain, la France de 2030.

Notre pays préside aujourd'hui le Conseil de l'Union européenne alors qu'une crise diplomatique se joue à proximité de nos frontières, entre l'Ukraine et la Russie. La France fait face au défi environnemental et climatique et connaît déjà sur son territoire, en métropole comme en outre-mer, des inondations, des cyclones, des sécheresses qui ruinent des familles et parfois tuent.

Notre pays est aussi une cible du terrorisme et de la criminalité organisée, qui sapent le pacte républicain.

Notre pays affronte des fractures géographiques, sociales, numériques que nous combattons pour préserver la République.

Pour que la France reste une puissance diplomatique, une grande démocratie, une force de science et d'innovation. Pour qu'elle continue de remporter des prix Nobel, en économie, en physique, en chimie. Pour que cette France continue de s'épanouir, de grandir, de briller, pour la santé, le bonheur de ceux qui vous entourent et leur sécurité, des Antilles au Pacifique, de la Corse à la Gironde, du Nord à la Bretagne, je vous propose de servir dès aujourd'hui, dès demain et de choisir le service public. Alors, en un mot : rejoignez-nous !

Mon discours n'est pas un discours politique de plus sur la fonction publique. C'est une invitation à l'action pour l'intérêt général. C'est une incitation à saisir les perspectives de l'emploi public : regardez et candidatez aux 45 000 offres d'emploi actuellement en ligne sur choisirleservicepublic.gouv.fr.

Je vous parle de 20 % des emplois de France, pour une aventure ou pour une carrière. Je vous propose de rejoindre le projet d'une République unie et soudée, protectrice et inclusive.

Pour cela, je dévoile une marque et une bannière, un signe de reconnaissance, une identité et une fierté pour tous ceux qui servent déjà et à l'attention de tous ceux qui veulent nous rejoindre : choisirleservicepublic.gouv.fr, plateforme unique qui rassemble déjà toutes les offres d'emplois, concours, apprentissages de l'Etat, des collectivités territoriales et des hôpitaux.

Elle va réunir d'ici la fin du 1er semestre 2022 toutes les campagnes de recrutement du service public et chacune portera cette marque.

Je vous invite à choisir le sens, l'action, l'audace. Je vous invite à choisir le service public.


Je vous remercie.

Source https://www.transformation.gouv.fr, le 9 février 2022