Interview de M. Jean-Baptiste Djebbari, ministre délégué chargé des transports, à France 2 le 18 février 2022, sur la grève à la RATP pour le pouvoir d'achat et le port du masque dans les transports en commun.

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Média : France 2

Texte intégral

JEFF WITTENBERG
Bonjour à tous. Bonjour Jean-Baptiste DJEBBARI.

JEAN-BAPTISTE DJEBBARI
Bonjour à vous.

JEFF WITTENBERG
Le ministre délégué aux Transports, en ce jour de grève massive à la RATP. Quel est l'état des lieux ce matin, dans les transports franciliens ? Un peu plus, un peu moins ou finalement aussi peu de métros et de RER qu'annoncés ?

JEAN-BAPTISTE DJEBBARI
Non c'est plus, c'est mieux qu'annoncé. Il y aura des perturbations fortes, la RATP avait communiqué dès mercredi le plan de transport initial, et nous avions recommandé, autant que faire se peut, d'exercer à distance ou de différer les trajets, mais ce sera mieux, il y aura par exemple plus de RER…

JEFF WITTENBERG
C'est-à-dire ?

JEAN-BAPTISTE DJEBBARI
… il était prévu d'avoir des RER jusqu'à 21h30, sur la ligne A, ce sera 23h30, et puis il y aura plus de métros sur la ligne 6, sur la ligne 11. Donc j'invite chacun à se reporter sur l'application et le site de la RATP, pour avoir le détail des améliorations, heure par heure.

JEFF WITTENBERG
Les lignes fermées le seront bel et bien.

JEAN-BAPTISTE DJEBBARI
Il y aura des lignes fermées, et effectivement, cette grève a été suivie.

JEFF WITTENBERG
C'est une grève, effectivement, qui s'annonçait très suivie. Quel est le pourcentage de grévistes, d'agents grévistes, que vous connaissez ce matin ?

JEAN-BAPTISTE DJEBBARI
C'est une grève suivie, nous n'avons pas encore les chiffres, nous les aurons à 10h00, mais cette grève, effectivement elle est suivie. Et par ailleurs vous savez que la Direction a amené des…

JEFF WITTENBERG
Ça veut dire quoi ? Plus de 60%, de 75% de grévistes ?

JEAN-BAPTISTE DJEBBARI
Autour de ces chiffres-là. C'est une grève effectivement qui est suivie.

JEFF WITTENBERG
C'est-à-dire ?

JEAN-BAPTISTE DJEBBARI
Je n'ai pas le chiffre exact. Je ne voudrais pas dire un chiffre qui soit inexact. Nous aurons le chiffre à 10h00, on communiquera évidemment en toute transparence, mais c'est une grève qui est suivie. En découlent effectivement des perturbations qui sont très importantes et qui évidemment entravent la circulation d'un très grand nombre de Franciliens.

JEFF WITTENBERG
Vous avez fortement encouragé les usagers au télétravail. Est-ce que vous vous attendez aussi à une journée noire sur le réseau routier, à des bouchons, à un fort trafic qui a commencé ce matin, d'autant que c'est aussi une journée de départs en vacances ?

JEAN-BAPTISTE DJEBBARI
Alors, depuis le début de la crise on observe quand même que les lundis et les vendredis, certainement sont plus télétravaillés, et nous avons, d'une manière générale, depuis le début de la crise Covid, moins de monde sur les routes le lundi et le vendredi. Mais nous cumulons cela effectivement avec le phénomène de départs en vacances. Cela dit, là aussi, depuis quelques années maintenant, les gens qui partent en vacances, étalent leurs départs entre le vendredi, le samedi et le dimanche, donc nous nous attendons à une journée du samedi très très chargée en termes de départs.

JEFF WITTENBERG
Mais aujourd'hui ?

JEAN-BAPTISTE DJEBBARI
Aujourd'hui, les choses devraient se passer de façon assez fluide et harmonieuse, et nous invitons évidemment chacun à prendre patience le cas échéant.

JEFF WITTENBERG
Alors, sur le fond, sur les raisons de ce conflit, il s'agit d'une grève lancée par l'ensemble des syndicats, et d'une ampleur qu'on n'avait pas connue depuis la réforme des retraites. Qu'est-ce qu'ils dénoncent les syndicats ? Eh bien l'augmentation trop faible des salaires que propose aujourd'hui la RATP, qui est selon eux de 0,4%. Est-ce que c'est un motif que vous recevez, que vous entendez, puisque la RATP, je le rappelle, est une entreprise publique ?

JEAN-BAPTISTE DJEBBARI
Non non, la RATP, la Direction de la RATP, c'est la patronne, Catherine GUILLOUARD a fait une proposition très honorable, raisonnable, pour l'augmentation des salaires, c'est 2,7% quand on prend l'ensemble des éléments, les mesures catégorielles, l'ancienneté, la rémunération, certaines mesures transverses, 2,7%. Et s'ajoutera…

JEFF WITTENBERG
Mais vous savez ce que vous répondent les syndicats, monsieur DJEBBARI, 2,7%, ça comprend des mesures individuelles, l'augmentation générale, elle, n'est que de 0,4%. Est-ce que vous allez changer ça ?

JEAN-BAPTISTE DJEBBARI
Ça va être 2,7%, c'est ce que les agents de la RATP auront sur leur fiche de paie. Et donc il faut parler très concrètement sur ce qu'auront les…

JEFF WITTENBERG
Tous ? Tous, monsieur DJEBBARI ?

JEAN-BAPTISTE DJEBBARI
En moyenne, 2,7%....

JEFF WITTENBERG
En moyenne, mais donc certains seront plus augmentés, d'autres moins, là ils partent d'une augmentation générale.

JEAN-BAPTISTE DJEBBARI
Mais vous savez qu'à la RATP, la RATP est une entreprise publique, certes, avec des niveaux de rémunération plus élevés que le revenu médian en France, et donc c'est une entreprise avec laquelle, dans laquelle un dialogue social est nourri. Et par ailleurs, en mars du fait des bons résultats du groupe RATP, il y aura une prime, prime d'intéressement qui sera au moins égale et très certainement supérieure à celle de l'an passé, c'était 1 000 € par agent en moyenne. Donc le dialogue social est nourri, la proposition de la Direction de la RATP est une bonne proposition, et moi j'invite les syndicats à la saisir.

JEFF WITTENBERG
La bonne proposition de la Direction de la RATP, comme vous dites, elle ne va pas bouger, si on vous entend bien, vous en resterez, enfin l'État et la présidente de la RATP en restera aux propositions qui sont faites, il n'y a pas de marge de négociations, c'est ce à quoi doivent s'attendre les syndicats ?

JEAN-BAPTISTE DJEBBARI
Vous avez compris que l'État qui est donc l'actionnaire public de la RATP, soutient la proposition de la Direction de la RATP.

JEFF WITTENBERG
Il n'y aura donc pas de négociations, puisque des négociations doivent avoir lieu ce matin.

JEAN-BAPTISTE DJEBBARI
Mais parce que c'est, pas par dogmatisme, parce que c'est une bonne proposition. Moi j'ai écouté précisément ce que voulaient les syndicats, la réalité c'est que sur les fiches de paie, en moyenne, on aura + 2,7%, ce qui est une…

JEFF WITTENBERG
En moyenne.

JEAN-BAPTISTE DJEBBARI
En moyenne.

JEFF WITTENBERG
On a bien compris, donc ce n'est pas tout le monde.

JEAN-BAPTISTE DJEBBARI
+ 2,7%, plus au moins 1 000 € par argent en mars.

JEFF WITTENBERG
Alors, les agents disent qu'ils ne sont pas récompensés, en quelque sorte, du maintien du service public pendant la pandémie, des efforts qui ont été consentis, que l'inflation aujourd'hui atteint 2,9%. La CGT par exemple vous demande 90 € d'augmentation mensuelle. Pourquoi ne répondez-vous pas, finalement, à cette revendication ?

JEAN-BAPTISTE DJEBBARI
Non, mais nous répondons sur l'ensemble du secteur des transports, à ces revendications, raison pour laquelle il y a un dialogue social. Après, il faut regarder très concrètement, en fonction des entreprises, quelles sont les capacités de l'entreprise. Je prends un exemple : le transport routier, par exemple, a consenti des investissements, des augmentations de rémunérations importantes, autour de 6%, parce que le trafic le permettait, la situation financière des entreprises le permettait. Je rappelle…

JEFF WITTENBERG
Et ce n'est pas le cas à la RATP.

JEAN-BAPTISTE DJEBBARI
Je rappelle quand même que sur le réseau francilien, d'une manière générale, depuis la crise nous n'avons jamais retrouvé le niveau de fréquentation. Nous sommes remontés à quasiment 85%, et redescendu au gré des crises Covid autour de 65%. Ce qui fait que l'État paie chaque année, en ce moment, plusieurs centaines de millions d'euros à Ile-de-France Mobilités, pour en quelque sorte équilibrer le modèle financier. Donc nous sommes dans un moment où il y a des incertitudes de moyen terme sur le modèle économique des transports en commun, raison pour laquelle aussi…

JEFF WITTENBERG
Donc, ce que vous nous dites, c'est que l'État n'a pas les moyens aujourd'hui de remonter les salaires.

JEAN-BAPTISTE DJEBBARI
Non, mais l'État regarde lucidement la situation. Il y a le sujet effectivement de l'inflation, nous avons mis en place des dispositifs de droit commun. Il y a les sujets des entreprises. Nous soutenons la proposition de la Direction de la RATP, et puis il y a le contexte global dans lequel se déroulent les transports en commun, et vous avez compris qu'il y a encore des incertitudes.

JEFF WITTENBERG
Et il y a aussi une inquiétude sur la concurrence qui va s'ouvrir, à partir de 2025 pour les bus, normalement 2040 pour les métros et pour les RER. Est-ce que vous comprenez que là aussi il y ait une inquiétude des agents de la RATP aujourd'hui ?

JEAN-BAPTISTE DJEBBARI
Je comprends. Raison pour laquelle il y a maintenant quelques années nous avons posé des cadres, un cadre vraiment précis, dans la loi qui vise à organiser une concurrence qui soit saine et équitable. Et c'est ce que nous avons traduit dans les textes, et c'est ce qui va s'exercer.

JEFF WITTENBERG
Elle se fera ?

JEAN-BAPTISTE DJEBBARI
Elle se fera de façon saine et équitable. Après, vous savez que c'est la région, sans faire de politique ici, c'est la région…

JEFF WITTENBERG
Dirigée par Valérie PECRESSE.

JEAN-BAPTISTE DJEBBARI
C'est la région qui organise les appels d'offres, et moi je souhaite que les appels d'offres soient organisés conformément à l'esprit et à la lettre de la loi, c'est-à-dire en organisant une concurrence saine et équitable, et en ne tirant pas les prix vers le bas.

JEFF WITTENBERG
Autre sujet, Jean-Baptiste DJEBBARI, est-ce que le masque sera bientôt un souvenir dans les transports ? Vous avez annoncé qu'il ne serait plus obligatoire à la mi-mars, mais pourquoi attendre la mi-mars alors qu'on l'a dit, aujourd'hui l'épidémie observe une baisse nette, est-ce qu'il faut attendre encore ? On se contamine encore dans le métro, dans les trains, dans le RER ?

JEAN-BAPTISTE DJEBBARI
D'abord, le masque c'est l'outil de protection principal dans les transports en commun depuis le début de la crise. On a aujourd'hui un seul pays, à l'échelle du continent européen, qui l'a retiré, c'est le Royaume-Uni, et donc aujourd'hui on regarde avec nos homologues européens, pour les transports notamment internationaux, comment se coordonner au mieux, parce que l'idée c'est quand même d'avoir un dispositif harmonisé à l'échelle de l'Europe, au moins. Et puis deuxièmement, on a des critères objectifs, qu'a précisé Olivier VERAN hier, c'est-à-dire d'avoir au moins une circulation du virus relativement faible, c'est le sujet du taux d'incidence, et de ne plus saturer les hôpitaux.

JEFF WITTENBERG
Plus tard il sera quoi ? Il sera juste recommandé ?

JEAN-BAPTISTE DJEBBARI
Voilà. L'idée c'est probablement de passer d'une obligation à une recommandation dans un premier temps, et puis après nous verrons aussi avec l'OMS. Ces sujets des épidémies. Aujourd'hui ce sont des sujets…

JEFF WITTENBERG
Jean-Baptiste DJEBBARI, est-ce que la…

JEAN-BAPTISTE DJEBBARI
Juste là-dessus…

JEFF WITTENBERG
Je vous en prie.

JEAN-BAPTISTE DJEBBARI
Il n'est pas impossible que parfois, au cœur des épidémies, quels que soient d'ailleurs les virus intéressés, nous ayons des recommandations de port du masque, plus souvent le cas…

JEFF WITTENBERG
Mais la recommandation, justement, est-ce qu'elle n'est pas, est-ce qu'elle a une efficacité dans la mesure où on sait que lorsqu'on porte le masque on protège surtout les autres.

JEAN-BAPTISTE DJEBBARI
Oui, mais c'est pour ça que le critère est sanitaire. Il faut que sanitairement les choses soient sous contrôle. C'est-à-dire un taux d'incidence, une circulation des virus relativement faible, contrôlé, contrôlable, et une désaturation des hôpitaux, et notamment la capacité de reprogrammer des opérations qui ont été déprogrammées.

JEFF WITTENBERG
Mais l'échéance…

JEAN-BAPTISTE DJEBBARI
L'échéance de mi-mars parait, en tout cas c'est une étape, c'est une borne de réflexion que nous allons évidemment engager.

JEFF WITTENBERG
Une dernière question. Vous êtes le champion si j'ose dire des réseaux sociaux dans le gouvernement, puisque vous avez un réseau TikTok, on ne va pas faire de publicité, mais c'est comme ça, qui a 800 000 abonnés…

JEAN-BAPTISTE DJEBBARI
C'est un beau réseau.

JEFF WITTENBERG
Mais pourquoi justement vous avez choisi ce réseau…

JEAN-BAPTISTE DJEBBARI
Je vous invite à vous y abonner, monsieur WITTENBERG.

JEFF WITTENBERG
… qui est surtout regardé par les plus jeunes. Est-ce que c'est votre public ?

JEAN-BAPTISTE DJEBBARI
D'abord parce que je suis sur tous les réseaux, Instagram, Twitter et TikTok. TikTok, c'est vrai que c'est un peu plus jeune, et l'idée c'était d'avoir un ton un peu plus, un peu décalé, en tout d'adresser, de faire savoir l'activité du ministre des Transports, du ministère des Transports aux plus jeunes, et je constate que ça marche, et donc c'est plaisant de voir que ça marche, et que les gens qui m'arrêtent dans la rue me parlent des trains de nuit, me parlent de l'avion du futur, et donc je constate que c'est le fond du sujet qui est transmis, et c'est bien ça, bien sûr, qui m'intéresse.

JEFF WITTENBERG
Est-ce qu'ils ne vous parlent pas aussi du fait qu'on vous voit dans une séquence TikTok très connue, virale comme on dit maintenant, en vélo, en train, mais aussi en avion, en voiture de course, en bateau. On vous reproche parfois de promouvoir les transports de riches, les transports particuliers, au détriment des transports en commun.

JEAN-BAPTISTE DJEBBARI
Si le vélo est un transport de riches…

JEFF WITTENBERG
C'est ce que certains disent. Eh bien, quand on vous voit à bord par exemple d'un avion, je rappelle que vous êtes pilote professionnel…

JEAN-BAPTISTE DJEBBARI
On me voit aussi à bord de TER, à bord de bus, aussi à bord de péniches. Je ne suis pas sûr que ça qualifie…

JEFF WITTENBERG
Vous êtes partout, enfin vous ne privilégiez pas particulièrement les transports en commun dans vos vidéos.

JEAN-BAPTISTE DJEBBARI
Non non, j'essaie de parler…

JEFF WITTENBERG
Pour quelles raisons ?

JEAN-BAPTISTE DJEBBARI
J'ai fait plusieurs vidéos dans le métro par exemple. Donc non non, j'essaie de parler de toute l'actualité du ministère des Transports. J'observe que souvent on a tendance à lire que les jeunes ne s'intéressent pas à la politique en général, et aux politiques publiques en particulier. Moi j'observe que c'est certainement les politiques qui n'arrivent pas à trouver les bons moyens de s'exprimer auprès des jeunes, parce que les jeunes sont engagés, c'est vrai de la transition écologique, mais ils sont intéressés par les différentes politiques, et je trouve que c'est un bon canal pour leur passer des messages d'un ton, avec un ton un peu différent.

JEFF WITTENBERG
Merci Jean-Baptiste DJEBBARI.

JEAN-BAPTISTE DJEBBARI
Merci à vous.

JEFF WITTENBERG
Ministre délégué aux Transports, et on suivra donc cette actualité des grèves dans les transports franciliens aujourd'hui, avec vous.

JEAN-BAPTISTE DJEBBARI
Merci à vous.

JEFF WITTENBERG
Merci. Et c'est la suite de Télématin.

MAYA LAUQUE
Et ministre TikTokeur, donc. On rappelle, sur cette grève massive à la RATP, que selon vous les choses devraient se passer de manière fluide. Quant aux revendications des grévistes, vous indiquez avoir soutenu la proposition honorable, dites-vous, et raisonnable sur les hausses de salaires à la RATP. Merci beaucoup.

Source : Service d'information du Gouvernement, le 21 février 2022