Interview de Mme Barbara Pompili, ministre de la transition écologique, à France Info le 4 mars 2022, sur l'état de la sécurité nucléaire de la centrale de Zaporijia (Ukraine) et l'officialisation de la candidature du président à un 2e mandat.

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Média : France Info

Texte intégral

MARC FAUVELLE
Bonjour Barbara POMPILI.

BARBARA POMPILI
Bonjour.

MARC FAUVELLE
On va parler bien sûr de l'entrée en campagne d'Emmanuel MACRON, des prix de l'énergie aussi puisque c'est déjà l'un des sujets de cette campagne présidentielle. D'abord les dernières informations qui nous viennent d'Ukraine. Vous avez sans doute suivi comme nous cet incendie qui a touché cette nuit la plus grande centrale nucléaire du continent européen dans le centre de l'Ukraine, incendie désormais éteint. D'après l'Ukraine, ce sont des chars russes qui ont tiré sur un bâtiment de la centrale. Quelles sont les informations dont vous disposez, vous ?

BARBARA POMPILI
Oui, alors ce sont des informations qui sont transmises par les autorités ukrainiennes à l'Agence internationale de l'énergie atomique qui concentre un peu toutes les informations. Effectivement aujourd'hui, l'incendie est arrêté. Il ne touchait pas un réacteur, il touchait un bâtiment annexe et nous disposons dans tout le territoire européen de balises qui permettent de repérer la radioactivité.

MARC FAUVELLE
Que disent-elles ?

BARBARA POMPILI
Toutes les balises aujourd'hui nous disent qu'il n'y a pas d'augmentation de la radioactivité autour, ce qui est plutôt rassurant et ce qui montre qu'a priori, rien n'a été touché dans la centrale qui pourrait être problématique. Donc ça, c'est très important. L'important aussi, c'est de voir qu'on est sur des sites sensibles et que tous les messages que nous lançons et l'appel qui a été lancé aussi par l'Agence internationale de l'énergie atomique de sanctuariser ces lieux est très important et qu'il faut absolument, là, qu'on s'engage dans la désescalade.

MARC FAUVELLE
C'est-à-dire au minimum un cessez-le-feu autour de ces centrales.

BARBARA POMPILI
C'est ce que demande l'Agence de l'énergie.

MARC FAUVELLE
C'est ce que demande la France aussi ?

BARBARA POMPILI
Mais évidemment. Il faut sanctuariser ces territoires qui sont des territoires qui sont sensibles, même si les réacteurs nucléaires, les centrales nucléaires, sont protégés et sont très résistants. Maintenant il faut éviter…

MARC FAUVELLE
Y compris un tir de char ou un tir de missile ?

BARBARA POMPILI
Oui. Après, moi dans des informations dont je dispose, les installations nucléaires font partie des plus résistantes des installations qui peuvent exister sur Terre, on peut dire, parce qu'elles sont prévues pour être très résistantes. Après, on ne peut rien garantir et c'est pour ça qu'il faut absolument faire en sorte qu'on évite les tirs autour des centrales et sur les centrales.

MARC FAUVELLE
Vous pensez que ça peut relancer le débat sur le nucléaire en France, puisqu'Emmanuel MACRON - on va parler de sa candidature - a décidé d'en faire l'un de ses thèmes de campagne, le nucléaire ?

BARBARA POMPILI
Vous savez, la question de la sûreté nucléaire est une question absolument fondamentale et qui est prise très au sérieux. On a des autorités en France, que ce soit l'Autorité de sûreté nucléaire qui est une autorité indépendante, ou l'IRSN qui est l'institut technique qui garantissent jour après jour la sécurité nucléaire dans notre pays. Des niveaux très, très élevés d'exigence qui font d'ailleurs que quand il y a le moindre problème, nos réacteurs sont mis à l'arrêt. Aujourd'hui on a des réacteurs mis à l'arrêt en France parce qu'il y a certains points à vérifier.

MARC FAUVELLE
La question, Barbara POMPILI, c'est de prévoir l'imprévisible. Fukushima personne ne l'avait vu venir, l'Ukraine non plus.

BARBARA POMPILI
Fukushima a donné lieu par la suite à des nouvelles normes de sécurité qui ont été appliquées dans toutes les centrales nucléaires, notamment en Europe, et donc y compris des informations dont je dispose sur la centrale de Zaporijia qui est concernée là, il y a aujourd'hui ce qu'on appelle des diesels de sûreté qui permettent, même quand les réacteurs sont arrêtés de manière un petit peu imprévue parce qu'il y a une coupure de courant, des diesels de sûreté permettent d'alimenter les zones importantes à alimenter de ces réacteurs grâce du pétrole en fait, tout simplement.

MARC FAUVELLE
Barbara POMPILI, Emmanuel MACRON a donc officialisé ce que tout le monde savait, c'est-à-dire sa candidature à un deuxième mandat à l'Elysée [par une] lettre aux Français publiée dans la presse régionale. Il y dit qu'il ne pourra pas faire campagne comme il l'aurait souhaité en raison de cette guerre, ce sera une campagne a minima.

BARBARA POMPILI
Ecoutez, je pense que personne ne pouvait souhaiter les événements que nous devons gérer en ce moment, qui sont des événements qui prennent du temps. Tout le monde peut comprendre que le chef de l'État est à son poste et le tient. On en a besoin.

MARC FAUVELLE
Donc il n'aura pas le temps de débattre par exemple avec les autres candidats ?

BARBARA POMPILI
Mais le Président a dit aussi que la campagne, il ne pouvait pas la mener comme il le souhaitait mais que, bien évidemment, il pourrait y avoir des débats d'idées dans le cadre de cette campagne, des débats sur le projet.

MARC FAUVELLE
Débats d'idées ou débats entre candidats ?

BARBARA POMPILI
On verra comment ça va se présenter mais en tout cas bien sûr que le débat politique et que les projets doivent être proposés aux Français pour que les Français puissent faire leur choix. Et ça c'est parfaitement normal, et le président de la République fera évidemment tout son possible pour pouvoir présenter son projet, pour pouvoir évidemment avoir l'occasion d'en débattre. Mais pour l'instant, ce n'est pas à moi de vous dire comment ça va se passer.

MARC FAUVELLE
Les Français s'inquiètent de la hausse des prix des carburants. Le litre de sans plomb se vend déjà plus de 2 euros dans certaines station-service. Ça peut monter jusqu'où comme ça, Barbara POMPILI ? 2,50 euros, 3 euros ?

BARBARA POMPILI
Aujourd'hui, on voit : la situation de la guerre en Ukraine fait que la volatilité des prix s'est accélérée. On est déjà en train de protéger les Français. On les protège sur l'électricité, on les protège sur le gaz et on va prolonger la protection - le bouclier gaz - jusqu'à la fin de l'année donc on prend des mesures. Sur le carburant, ça fait partie du fameux plan de résilience que le Premier ministre va annoncer la semaine prochaine. Il y aura des mesures pour continuer de protéger les Français.

MARC FAUVELLE
Mesures pour les automobilistes ?

BARBARA POMPILI
Pour continuer de protéger les Français sur les hausses des carburants, je ne vais pas tout vous dire maintenant, Monsieur FAUVELLE.

MARC FAUVELLE
Mais plus particulièrement sur les automobilistes puisque, vous avez dit vous-même, il y a des mesures sur le gaz, sur l'électricité, pas sur le carburant.

BARBARA POMPILI
Tous ceux qui vont être touchés par cette hausse des prix, que ce soient des automobilistes mais je pense aussi à certaines entreprises par exemple.

MARC FAUVELLE
Les pêcheurs, les routiers.

BARBARA POMPILI
Voilà. Nous sommes en train de mettre en place un dispositif pour les protéger. Après, attention, on le sait, le Président l'a dit, le Premier ministre l'a dit : cette guerre ne va pas être indolore. On va en avoir les conséquences aussi sur notre territoire.

MARC FAUVELLE
Les Français paieront une partie de la facture de la guerre, en dépit des mesures qui seront annoncées.

BARBARA POMPILI
En tout cas, on va faire en sorte de les protéger. Après, bien évidemment, nous ne sommes pas dans un vase clos et donc des conséquences existent. Aujourd'hui, on est en train de travailler sur les approvisionnements pour faire en sorte notamment qu'on ait suffisamment de gaz pour l'hiver prochain. C'est un travail qui fait aussi l'objet du plan de résilience que nous allons mettre en place. Parce que ce que nous montre cette guerre, c'est que nous devons aujourd'hui être souverains et indépendants énergétiquement par rapport à la Russie et par rapport à d'autres pays.

MARC FAUVELLE
Un mot d'une famille politique qui a été la vôtre pendant des années, Barbara POMPILI, Europe Ecologie-Les Verts. Sandrine ROUSSEAU, arrivée deuxième à la primaire, vient d'être exclue j'allais dire manu militari de la campagne de Yannick JADOT pour ses critiques à répétition. Qu'est-ce que ça vous inspire ?

BARBARA POMPILI
Ça ne m'étonne pas et ce que je trouve terrible quand même c'est, de ce que je comprends, elle a été limogée on peut dire parce qu'elle critiquait Yannick JADOT quand Yannick JADOT défendait finalement les valeurs qui sont les valeurs des Verts depuis toujours, qui est l'Europe et le pacifisme, et qui quelque part disait qu'il fallait qu'on soit tous unis face à ce qui se passe en en Ukraine pour porter le projet européen et pour que l'Europe soit forte et pour demander la désescalade. C'est ce que nous faisons, nous, et c'est quelque chose qui doit nous rassembler et nous souder. Que Sandrine ROUSSEAU renie les valeurs des Verts et qu'elle critique son candidat tout simplement parce qu'il ne rentre pas dans les politiques politiciennes sur des sujets aussi importants, je comprends la réaction de Yannick JADOT.

MARC FAUVELLE
Barbara POMPILI, Ministre de la Transition écologique, merci à vous.

Source : Service d'information du Gouvernement, le 8 mars 2022