Déclaration de Mme Jacqueline Gourault, ministre de la Cohésion des territoires et des Relations avec les collectivités territoriales, sur les petites villes, à Paris le 8 novembre 2021.

Prononcé le

Intervenant(s) : 
  • Jacqueline Gourault - Ministre de la Cohésion des territoires et des Relations avec les collectivités territoriales

Circonstance : Clôture du Forum national POPSU sur les petites villes

Texte intégral


Madame la présidente de la Cité de l'architecture et du patrimoine, chère Catherine Chevillot,
Mesdames les députées, chère Célia de Lavergne, chère Sandra Marsaud,
Mesdames et Messieurs les maires et les élus,
Madame la Directrice générale de l'aménagement, du logement et de la nature, chère Stéphanie Dupuy-Lyon,
Monsieur le Président du Conseil stratégique POPSU, cher Jean-Marc Offner,
Madame la secrétaire permanente du PUCA, chère Hélène Peskine,
Monsieur le directeur général du GIP Epau, cher Jean-Baptiste Marie,
Mesdames et Messieurs les acteurs et les chercheurs de la communauté POPSU,


Je suis très heureuse d'être parmi vous ici à la Cité de l'architecture et du patrimoine, pour clôturer ce Forum national POPSU. Je voudrais au préalable vous remercier Madame la présidente, chère Catherine Chevillot. Après les rencontres nationales Action Coeur de Ville, qui auront été un des grands temps fort de cette année, vous accueillez aujourd'hui ce Forum sur les petites villes. Cela illustre, je crois, le rôle essentiel que vous jouez pour faire rayonner l'architecture et le patrimoine des petites et moyennes villes. La Cité est désormais une institution résolument tournée vers les territoires, je tenais à le souligner car je crois que c'est indispensable.

Merci cher Jean-Marc Offner pour cette synthèse qui m'a donné un aperçu de la richesse des échanges qui se sont tenus aujourd'hui. Des échanges entre élus, chercheurs et acteurs, car c'est bien cela l'ADN de POPSU : d'animer ce dialogue entre la recherche et l'action, entre le monde des idées et celui de l'opérationnel, entre le temps long des stratégies et le temps court des projets. Ce dialogue, il se construit autour d'une même exigence : celle du terrain. La recherche, comme l'action publique, elles se font au contact des habitants, des forces vivres, au plus près des dynamiques d'un territoire. Ce beau modèle de co-production de la connaissance – d'une connaissance " située " - POPSU le développe grâce à ses partenaires, et je voudrais les saluer et les remercier : en premier lieu la Direction générale du l'aménagement, du logement et de la nature, chère Stéphanie Dupuy-Lyon, l'ANCT bien sûr, mais aussi l'ADEME, la Banque des Territoires, le Réseau Rural et bien sûr la Cité de l'architecture, Madame la présidente.


Je crois que nous partageons tous ici la conviction que quelque chose est en train de changer dans le rapport des Français aux petites villes. Enquête après enquête, on constate un regain d'intérêt, et on ne compte plus les belles histoires ! Bien sûr, cela ne doit pas nous faire oublier l'immense diversité des trajectoires de nos territoires : certains connaissent depuis des décennies des dynamiques négatives et beaucoup doivent batailler au quotidien pour garder un dynamisme et de l'activité. Mais je suis heureuse de constater qu'un nouveau récit est en train de s'écrire : le récit de petites villes et de campagnes qui réussissent. Phénomène de mode diront certains… Je ne le crois pas. Je pense au contraire qu'une bonne partie des solutions aux grands défis contemporains se trouve aujourd'hui dans les petites villes, comme l'illustrent bien les recherches présentées tout au long de cette journée…

1. Prenons le premier des grands défis, celui de la transition écologique. Les petites villes de France ont cet atout immense qu'elles sont le coeur d'un écosystème, enracinées dans un territoire, je dirais même dans un terroir [les espaces de nature et les champs ne sont souvent qu'à quelques centaines de mètres des centres]. Cette proximité, beaucoup de petites villes la mettent à profit : Tournus comme Dieulefit, par exemple, impulsent la transition du modèle agricole. A leur image, partout en France, des petites villes sont pionnières : Villers-Semeuse, dans les Ardennes, développe les mobilités alternatives, la Vallée de la Roya, durement touchée par la tempête Alex, réinvente un modèle territorial durable et résilient, le Pays des Ecrins engage la transition des activités touristiques de montage...  Grâce à l'engagement des élus, des acteurs et des habitants, les petites villes sont des laboratoires des transformations à l'oeuvre dans notre société et dans notre pays.

2. Il en va de même dans le champ de la transition économique. Car oui, le virage numérique et le développement du télétravail ouvrent des possibilités immenses pour redévelopper des activités productives dans nos territoires peu denses. Cela s'incarne par exemple dans la dynamique des tiers-lieux qui, comme à Digne-les-Bains ou à Arvieu, réinventent un nouveau modèle collaboratif, inclusif, et entrepreneurial. Et puis, on l'oublie trop souvent, mais beaucoup de petites villes sont d'ores-et-déjà à la pointe de l'innovation : Roscoff accueille une station de recherche internationale en biologie marine, Vire comme Vitré concentrent des activités industrielles de pointe…

3. Les petites villes sont aussi au coeur de la grande transition démographique qui est devant nous. Nous savons que le vieillissement de la population les impactera de manière forte, alors qu'elles comptent déjà une population âgée plus importante que la moyenne. Mais partout, déjà, des modèles innovants émergent, autour de solutions d'habitat adaptées à la perte d'autonomie - des solutions situées au coeur des petites villes, comme l'exemple de Xertigny l'illustre bien. Cette révolution de la longévité, elle s'accompagne aussi, en miroir, par une attention au plus jeunes, car si nous voulons faire vivre ce nouveau pacte entre les générations, il faut aussi que les petites villes puissent demain offrir un cadre de vie épanouissant aux étudiants et aux jeunes ménages. Là aussi, de nombreuses initiatives territoriales font aujourd'hui référence, et je pense à l'exemple de Foix.

4. Enfin, les petites villes sont à la pointe de la transition démocratique. Les Français aspirent à retrouver un sens du voisinage, de la relation à l'autre. Cette proximité humaine, c'est bien ce qui caractérise la petite ville. Elle est peut-être une échelle idéale d'exercice de la vie démocratique et politique. C'est ce qu'expérimentent plusieurs villes POPSU, au Porge, à l'Etang-Salé, à Caumont, à Volonne, ou bien à Lavalette Tude Dronne, chère Sandra, où l'on invente de nouveaux modèles pour délibérer, débattre et inventer ensemble le devenir du territoire.


POPSU permet d'éclairer ces différents « chemins de transition », qui sont, je le reconnais volontiers, parfois encore assez obscurs et incertains. Il les éclaire grâce au regard de 450 chercheurs au plan national, qui viennent s'immerger dans les territoires, et qui construisent en retour une compréhension globale des grandes dynamiques de notre pays. Dans cet aller-retour entre le cas d'étude et la montée en généralité, POPSU invite à « apprendre des territoires », à comprendre les histoires locales et à les partager. 

Ce partage d'expérience est essentiel, car il est un déclencheur d'innovation et de projets. C'est pourquoi nous en avons fait un volet important dans l'ensemble des programmes de l'ANCT et en particulier du programme Petites Villes de Demain, dont je salue la directrice nationale, chère Juliette Auricoste.

Ce programme, nous l'avons lancé il y a un an. Depuis, 1600 communes ont été intégrées. Elles bénéficient d'un appui en ingénierie, interne comme externe, et d'une batterie de solutions opérationnelles pour les aider à redonner un nouveau souffle à leurs centralités. Elles sont aussi, donc, intégrées dans un " club " qui rassemble élus et techniciens. C'est bien cela désormais le rôle de l'Etat : accompagner, accélérer les réussites locales et aussi fédérer.

C'est pour cela que nous avons souhaité que POPSU puisse appuyer le programme Petites villes de demain. Il le fait à deux niveaux :

- d'une part POPSU développe des plateformes de recherche dans les petites villes. Une quinzaine de nouveaux territoires seront sélectionnés en début d'année prochaine pour être accompagnés par des chercheurs.
- d'autre part, POPSU lancera dans les prochains mois un " Lab " sur les petites villes, à destination des décideurs locaux, en produisant des ouvrages, des films documentaires, des podcasts, pour partager les expériences et les histoires de petites villes, mais aussi en organisant des événements locaux à travers une " Caravane des territoires ".

Cette approche à deux volets - production de connaissance localement et traduction/diffusion au plan national – elle est très utile. Elle représente une dimension essentielle de l'action que l'Etat mène, pour accompagner au mieux les collectivités dans leurs projets. C'est pourquoi je souhaite que nous puissions déployer cette offre de services sur d'autres programmes de l'ANCT, comme Action Coeur de Ville, Avenir Montagnes ou encore Territoires d'Industrie. La recherche POPSU doit pouvoir nourrir ces programmes opérationnels, leur donner de la " matière à penser ", un " pas de côté " prospectif et évaluatif. Je demande au directeur général de POPSU d'étudier cela.


Mesdames, Messieurs,

Je crois que les petites villes redeviennent pour beaucoup de Français un idéal du « bien-vivre » dans notre pays. C'est heureux, tant leur rôle est structurant dans notre histoire et dans la vie quotidienne de millions de nos concitoyens qui y résident ou qui les fréquentent pour y travailler, y étudier, accéder à des services ou des commerces.

Mais il est faux de dire que la réussite des petites villes se fait au dépend du modèle métropolitain. Il nous faut, je crois, nous garder des oppositions trop faciles. C'est d'ailleurs tout l'objet de l'un des programmes de POPSU qui s'intéresse aux métropoles, et aux relations qu'elles tissent avec leur environnement.

L'avenir de notre pays n'est pas dans la guerre de l'urbain et du rural, des métropoles contre nos campagnes. Il est dans la compréhension des interdépendances, des complémentarités qui nous lient, et qui fondent le destin français.

Je crois que la recherche nous y aide, et je voudrais ici remercier chaleureusement toute la communauté des élus, des chercheurs et des acteurs POPSU qui s'engagent au quotidien, et bien sûr remercier la direction du programme, en particulier Jean-Marc Offner, pour son travail remarquable et toute l'équipe qui l'accompagne [Hélène Reigner, Jean-Baptiste Marie, Hélène Milet, Aurore Meyfroidt, Adèle Fourmigué].

En un mot : bravo à toutes et à tous pour cette belle dynamique !  

Je vous remercie


source : Ministère de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales, le 10 mai 2022