Extraits d'un entretien de M. Franck Riester, ministre du commerce extérieur et de l'attractivité, avec RFI et France 24 le 21 juin 2022, sur l'attractivité économique de la France.

Prononcé le

Intervenant(s) : 
  • Franck Riester - Ministre du commerce extérieur et de l'attractivité

Texte intégral

(...)

Q - On va parler de l'attractivité, puisque c'est votre dossier, donc la France s'est hissée, pour la troisième année consécutive, au premier rang européen de l'attractivité, selon le dernier classement. Cependant, la France a encore du mal à attirer de nouvelles entreprises étrangères sur le sol français, notamment en matière énergétique peut-être ?

R - Non, non. Elle n'a pas du mal, au contraire. Elle n'a jamais autant accueilli d'entreprises étrangères qu'en 2021 : plus de 1222 projets d'investissements étrangers en France...

Q - Mais il n'y a pas encore des efforts à faire ?

R - Toujours et je vais y revenir. Plus de 50% de plus que l'Allemagne. On est le premier pays d'Europe depuis trois ans, et ça, ce n'est pas le fruit du hasard. C'est le fruit de la politique d'amélioration de la compétitivité du pays : baisse de la fiscalité, simplification administrative ; miser sur les talents, la formation, l'apprentissage. C'est ça qui permet, aujourd'hui, aux investisseurs du monde entier de dire "on choisit la France plutôt que l'Allemagne, plutôt que l'Espagne, plutôt que l'Italie, plutôt que la Grande-Bretagne".

On ne se repose pas sur nos lauriers pour autant. Nous avons besoin de continuer cette politique de compétitivité. Cela passe par la baisse toujours et encore des impôts de production ; cela passe par la formation, toujours et encore ; c'est pour cela que dans notre projet, il y a la réforme de la formation professionnelle, c'est pour cela que nous voulons continuer une politique d'accueil des talents qui sont à l'étranger et qui veulent venir travailler en France. Et cette politique d'attractivité qui repose sur la compétitivité, la formation et le soutien aux talents, est la meilleure politique qui permette de créer de l'emploi partout dans les territoires ; parce que 50% de ces investissements sont dans des villes de moins de 20.000 habitants. Donc ça irrigue partout le territoire.

Q - Est-ce que vous ne craignez pas, à propos de l'attractivité, que l'épisode du Stade de France, de la finale de la Ligue des champions marquée par des violences et par un incroyable cafouillage - au sujet d'ailleurs duquel le Sénat a conduit une mission d'enquête parlementaire - est-ce que cela ne risque pas d'avoir abîmé assez gravement l'image de la France ? Par exemple chez les Britanniques, c'est fait ; très largement.

R - Ecoutez, ce n'était pas une bonne image, c'est clair, cela n'a pas donné une bonne image de la France.

Q - "Pas bonne", c'est peut-être un minima. Déplorable même peut-être, non ? En tout cas...

R - Vous jugez l'adjectif qui vous convient. Moi, je dis que cela n'a pas été une bonne image pour la France. Il y a beaucoup de formidables tournois, matches de foot, de concerts qui se passent très, très bien au Stade de France, qu'il va falloir valoriser. On a la chance, en France, d'avoir des talents exceptionnels, des réussites formidables, des savoir-faire dont on peut être très fiers, eh bien, à nous aussi de peut-être mieux les mettre en avant, et ça fait partie d'ailleurs des missions qui sont les miennes, notamment de travailler à la communication sur l'image de la marque France, la marque du pays France, et qui passe par la mise en avant...

Q - C'est quoi, la marque France ? Qu'est-ce que vous comptez dans la marque France ?

R - La marque France, c'est l'image de la France, c'est toute son audace, c'est tout son savoir-faire, c'est sa culture, c'est sa capacité à innover, c'est sa capacité à investir dans l'avenir, dans la recherche, dans l'innovation. C'est ça, la France. Et donc ça, il faut qu'on puisse continuer à véhiculer cette bonne image. Et puis effectivement, quand il y a un événement comme celui-là, cela ne nous aide pas, mais ce n'est pas dramatique et ce n'est pas en tout cas rédhibitoire.

Q - Un mot, puisque vous serez demain à Bruxelles pour la signature de ce qu'on appelle...

R - Quand je dis "ce n'est pas dramatique", ce n'est pas dramatique en termes d'image. Ça a été quelque chose qui a généré une très mauvaise image...

Q - Est-ce que vous voulez qu'on parle de l'instrument de réciprocité ?

R - Oui, bien sûr. Mais...

Q - Il ne nous reste pas beaucoup de temps.

R - Mais il y a effectivement besoin d'en tirer toutes les leçons pour ne pas que cela se reproduise, bien sûr.

Q - Je le disais, donc vous serez à Bruxelles demain pour la signature de l'instrument européen de réciprocité dans les marchés publics ; on peut dire pour résumer, qu'il s'agit de mieux accéder aux marchés publics de nos partenaires commerciaux, c'est ça ?

R - Oui, c'est rompre avec la politique commerciale naïve européenne. Le Président de la République, depuis son discours de la Sorbonne, essaie et réussit à changer, avec ses partenaires européens, la politique commerciale européenne, pour que l'on protège mieux nos entreprises, pour que l'on fasse en sorte que l'ouverture par exemple des marchés publics ne soit pas simplement le fait de l'Europe, mais aussi de nos partenaires commerciaux. Aujourd'hui, l'Europe ouvre tous ses marchés publics aux entreprises du monde entier...

Q - Ce qui n'est pas le cas par exemple aux Etats-Unis.

R - 30% uniquement sont ouverts aux entreprises européennes ; le Japon : 30%, et la Chine : aucun. Eh bien avec l'instrument qu'on a voté, on va dire à nos partenaires...

Q - C'est incitatif ou c'est contraignant ?

R - C'est les deux.

Q - Ah bah non ! Enfin...

R - Si, si ! Eh bien si !

Q - Bon d'accord, expliquez-moi.

R - Mais si, c'est les deux ! C'est de dire "ouvrez vos marchés publics ; on a besoin de pouvoir proposer nos services, nos produits, partout dans le monde. Si vous ne le faites pas, eh bien on refermera les nôtres". Donc, c'est incitatif, c'est-à-dire "ouvrez vos marchés, vous allez avoir la possibilité de bénéficier de nos produits, de nos savoir-faire, de nos offres compétitives, et ça peut peut-être permettre de jouer sur la lutte contre l'inflation dans votre pays ; mais si vous ne le faites pas, on ne va pas continuer, nous, à ouvrir tous nos marchés publics à vos entreprises, si vous ne jouez le jeu de votre côté"...

Q - Ça va avoir un impact économique fort ?

R - Mais oui. Parce que ça montre à nos entreprises qu'on les défend et qu'on arrête en Europe d'être naïf. Et ça, le Président de la République, il se bat sur cette question-là depuis maintenant cinq ans et on a des résultats concrets. Et on a des résultats concrets aussi en matière de lutte contre les pratiques déloyales. On a des résultats concrets sur des subventions abusives qui viennent mettre de la concurrence déloyale dans les marchés pour nos entreprises. Et c'est le meilleur moyen de protéger l'activité de nos entreprises et l'emploi.

Q - Merci beaucoup.

R - Merci à vous.


Source https://www.diplomatie.gouv.fr, le 28 juin 2022