Texte intégral
M. Gabriel Attal, ministre délégué auprès du ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, chargé des comptes publics. Bruno Le Maire a rappelé les aléas auxquels nous faisons face, en matière géopolitique et économique. Si l'on ne fait pas de politique avec une boule de cristal, on peut en faire avec une boussole. La nôtre, depuis le début de ces crises, est la protection des Français. Le budget que nous vous présentons est ainsi un budget de protection.
Le premier axe de protection est d'aider les Français à faire face à l'urgence des fins de mois. Le bouclier tarifaire, détaillé par Bruno Le Maire, représente une des dépenses importantes du budget pour 2023. L'indexation du barème de l'impôt sur le revenu est aussi une mesure forte pour la protection du pouvoir d'achat des Français. J'ai parfois entendu dire que c'était une mesure automatique, appliquée chaque année. Or ce n'est pas le cas : certaines années, le barème n'a pas été indexé sur l'inflation, notamment pour les revenus de 2011 et de 2012. Ensuite, face à un tel niveau d'inflation et compte tenu des implications pour les finances publiques, convenez que la question peut se poser. Très concrètement, plus de 6 milliards d'euros – j'avais annoncé 6,2 milliards, mais ce sera en réalité 6,4 milliards – ne seront pas prélevés sur les Français au titre de l'impôt sur le revenu.
Le deuxième axe de protection est la poursuite du réarmement des services régaliens. Nous prévoyons ainsi 3 milliards supplémentaires pour la défense, conformément à la loi de programmation militaire, et 1,4 milliard de plus pour le ministère de l'intérieur, suivant la trajectoire inscrite dans la loi d'orientation et de programmation du ministère de l'intérieur (LOPMI), ce qui signifie plus de moyens pour les équipements et les technologies numériques, pour renforcer la présence des policiers et des gendarmes sur la voie publique, mais aussi plus de moyens pour les douanes, auxquelles je suis très attaché, en tant que ministre de tutelle – les douaniers bénéficieront de 144 millions supplémentaires entre 2022 et 2025, pour renforcer les équipements mobiles et améliorer notre flotte aérienne et navale. Enfin, nous poursuivrons le renforcement des moyens du ministère de la justice : ils augmenteront de 8 % pour la troisième année consécutive.
Troisième axe de protection, nous préparons l'avenir, en faisant le pari de l'éducation, en gagnant la bataille du plein emploi et en accélérant la transition écologique. Nous prévoyons une augmentation de 3,7 milliards d'euros pour l'éducation. Comme nous nous y étions engagés dans le cadre de la campagne présidentielle, aucun enseignant ne gagnera moins de 2 000 euros net par mois à compter de la rentrée prochaine. Pour ce qui est de la bataille du plein emploi, nous nous sommes fixé pour objectif de la gagner à l'horizon 2027 : 6,7 milliards d'euros de crédits supplémentaires seront investis pour l'emploi et pour l'apprentissage, notamment en vue d'arriver à un million d'apprentis d'ici à 2027. Cette bataille, je le redis, nous ne la gagnerons pas par davantage de pression fiscale. C'est la raison pour laquelle nous avons d'ores et déjà rendu 54 milliards aux ménages et aux entreprises au cours des cinq dernières années. Nous allons continuer à baisser les impôts lorsqu'ils sont néfastes au développement économique de notre pays, en supprimant la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises (CVAE). Et puis, préparer l'avenir, c'est protéger la planète. Nous agissons, vous le savez, d'une manière résolue en ce sens. Outre le fonds de 1,5 milliard d'euros qui a été annoncé par la Première ministre, il y aura 500 millions d'euros de plus pour MaPrimeRénov' et 250 millions supplémentaires pour le plan Vélo.
Le quatrième axe de protection consiste à protéger les comptes publics. Nous sommes sortis du "quoi qu'il en coûte" pour entrer dans le "combien ça coûte". Un euro dépensé est un euro raisonné, évalué et utile à la protection des Français. Nous avons une trajectoire, fixée dans le cadre du programme de stabilité. Nous tiendrons l'objectif de 5 % de déficit l'an prochain, après avoir tenu l'objectif pour cette année. Je rappelle que le déficit était de près de 9 % en 2020 : nous l'avons ramené à 6,4 % en 2021, et il est de 5 % en 2022. Il sera, de même, de 5 % en 2023, et nous serons revenus sous les 3 % en 2027. Nous le ferons, comme Bruno Le Maire l'a dit, en suscitant de l'activité économique par des réformes ambitieuses qui permettent d'améliorer l'emploi dans notre pays – plus il y a de Français qui travaillent, plus les recettes sont élevées et moins il faut de dépenses de réparation pour accompagner des Français qui ne travaillent pas –, mais aussi en maîtrisant la dépense publique. Elle diminuera de 2,6 % en volume en 2023, et la part des dépenses publiques rapportée au PIB se réduira, puisqu'elle passera de 57,6 % à 56,6 % du PIB l'an prochain, puis à 53,8 % en 2027. Nous poursuivrons, par ailleurs, le travail d'évaluation de la qualité de la dépense publique. Le projet de loi de programmation des finances publiques prévoit des outils supplémentaires : son article 7 vise à systématiser les évaluations des dépenses fiscales avant leur éventuelle reconduction. C'est un outil dont le Parlement devra pleinement se saisir : nous sommes tous responsables de nos finances publiques.
Répondre à l'urgence, financer l'essentiel, préparer l'avenir et tenir les comptes, voilà les quatre axes qui structurent notre action et la stratégie que nous vous proposons pour protéger les Français dans cette période exceptionnelle.
Nous avons parfaitement conscience que les défis sont immenses, et c'est précisément pour cela que nous devons inventer ensemble une nouvelle méthode : c'est ce que nous avons voulu en lançant les dialogues de Bercy. Nous verrons dans les prochaines semaines si les pistes que nous avons dessinées ensemble permettent d'enrichir le texte. Je ne minimise en rien nos désaccords sur le fond : il y aura toujours ceux qui veulent augmenter les impôts et ceux qui veulent les baisser. Mais ce n'est pas parce qu'on n'est pas d'accord sur tout qu'on ne peut discuter de rien. Et ces réunions, qui ont duré plus de dix heures et auxquelles une grande partie d'entre vous étaient présents, ont montré que nous étions capables de nous parler, de travailler ensemble et d'identifier des propositions et des solutions au service des Français.
De fait, le texte qui vous est présenté n'est pas celui qui avait été prévu avant le lancement des dialogues de Bercy, et il sera encore enrichi par nos travaux. Toute une série de mesures ont été imaginées à la suite de nos échanges. Ainsi, nous avons décidé de suspendre l'application de l'actualisation des bases locatives, qui était critiquée de toutes parts ; accepté de revaloriser plus encore que prévu les crédits de MaPrimeRénov' et engagé un travail de révision de son barème pour soutenir davantage les rénovations globales ; enrichi le paquet "collectivités locales", notamment en échelonnant sur deux ans la suppression de la CVAE et en décidant de la compenser par une fraction de TVA.
Caroline Cayeux et moi-même venons d'annoncer devant le Comité des finances locales que nous allons renforcer les dotations de péréquation au sein de la dotation globale de fonctionnement (DGF) l'an prochain, à hauteur de 210 millions d'euros ; c'est encore une proposition qui avait été émise dans le cadre des dialogues de Bercy – j'en remercie Christine Pires Beaune. Autrement dit, nous garantissons la stabilité de la DGF au niveau non seulement national, comme nous le faisions depuis cinq ans, mais aussi individuel – pour chaque collectivité –, comme le souhaitait également Jean-René Cazeneuve, grâce à un abondement des dotations de péréquation : la péréquation ne se fera plus "sur le dos" de la dotation forfaitaire, donc de certaines collectivités.
Nous souhaitons poursuivre un travail aussi partenarial que possible, au service de la protection de nos concitoyens.
(…)
M. Gabriel Attal, ministre délégué. Il est important de maintenir la dernière étape de la suppression de la taxe d'habitation. Un impôt dont l'essentiel de la population serait exonéré ne peut perdurer. Surtout, nous ne mettons pas fin à cet impôt pour avantager les 20 % de Français les plus riches, comme je l'entends très souvent, mais les 20 % les moins modestes, ceux dont le revenu fiscal de référence est supérieur à 29 000 euros par an.
Vous trouvez anormal que les bénéfices qui pourraient être retirés de la réforme des retraites financent l'éducation ou la transition écologique. Pourtant, c'est le contraire qui se produit aujourd'hui : l'argent que nous dépensons pour compenser des systèmes de retraite déficitaires manque à l'éducation ou à la transition écologique. Surtout, les moyens supplémentaires que dégagerait la réforme des retraites ne tiennent pas seulement aux économies réalisées mais aussi aux gains qui découleraient de la hausse du taux d'emploi – la hausse des cotisations mais aussi de la consommation améliorera les recettes fiscales.
Monsieur le rapporteur général, les dépenses de l'État baisseront de 2,6 % en volume. La dépense globale en volume diminuera de 1,5 % en 2023, dépenses d'urgence et de relance comprises. La baisse des dépenses de relance et d'urgence représente 8,8 milliards d'euros. Chaque ministère est invité à maîtriser ses dépenses, ce qui n'empêche pas d'augmenter les crédits lorsqu'il convient de financer des mesures prioritaires.
Concernant le budget de la sécurité sociale, les dépenses liées à la crise sanitaire devraient diminuer – ce qui améliorera le déficit de la sécurité sociale en 2023 par rapport à 2022. Le déficit de la branche maladie s'amoindrit grâce à la sortie de la phase aiguë de l'épidémie.
Quant aux collectivités locales, le projet de loi de programmation des finances publiques prévoit de réduire leurs dépenses de fonctionnement de 0,5 % en volume par an.
J'en viens aux reports de crédits. La prévision d'exécution permettra d'affiner les chiffres, en janvier et février. Nous souhaitons limiter le volume des reports par rapport aux dernières années. Ils avaient été très importants en plein cœur de la crise épidémique pour, "quoi qu'il en coûte", soutenir au mieux notre économie et nos concitoyens. Bien évidemment, les crédits destinés à financer les aides aux entreprises énergo-intensives qui n'auraient pas été utilisés en 2022 pourront être reportés en 2023. L'article 36 du projet de loi de finances prévoit une liste de programmes autorisés à dépasser la limite de report de 3 % prévue par l'article 15 de la loi organique relative aux lois de finances.
Pour ce qui est des collectivités locales, fin 2021, leur situation financière était très bonne. Ainsi, leur capacité d'autofinancement était supérieure à celle d'avant la pandémie et leur trésorerie comptait 15 milliards d'euros en plus, grâce à l'État qui a apporté un soutien direct à hauteur de 10 milliards d'euros aux collectivités ainsi qu'un soutien indirect tout aussi massif. Leur situation est plus floue en 2022. Les dépenses augmentent pour l'énergie, l'alimentation mais aussi les ressources humaines du fait de la hausse du point d'indice. En revanche, les recettes grossissent, elles aussi, grâce aux impôts fonciers et à la TVA. Nous avions annoncé aux collectivités locales – régions, départements, EPCI – une hausse de leurs recettes de 2,89 % pour l'année 2022. Les recettes de TVA étant plus importantes que prévu, la hausse des recettes est revalorisée à 9,6 %, plus du triple. Le 20 octobre, les régions, les départements et les EPCI recevront 2,5 milliards de plus qu'annoncé – un milliard pour les régions, un milliard pour les départements, 500 millions pour les EPCI. La fiscalité locale progresse aussi, en raison de l'inflation et de la décision de certaines collectivités de revaloriser leurs taux. Même si la capacité d'autofinancement s'est dégradée par rapport à 2021, elle reste supérieure à celle de fin 2019.
Cela ne veut pas dire que tout va bien pour tout le monde et nous devons poursuivre notre action. Bruno Le Maire agit au niveau européen pour "refroidir" les prix de l'énergie. Nous devrons également accompagner les collectivités les plus fragiles : c'est pour cette raison que vous avez voté cet été, à l'initiative de Christine Pires Beaune, une enveloppe de 430 millions destinée aux communes fragilisées par l'inflation. Le décret sortira dans les prochains jours et les premiers acomptes seront versés aux collectivités en novembre – 25 % des communes pourront en bénéficier. Ainsi, jusqu'à 70 % de la hausse des dépenses d'énergie et d'alimentation et jusqu'à 50 % de la hausse des dépenses salariales seront compensées par l'État. Cela ne signifie pas que l'État pourra compenser, en toutes circonstances, les hausses de dépenses contraintes des collectivités locales. Nous n'en avons pas les moyens, aussi devons-nous accompagner celles qui sont le plus en difficulté.
(…)
M. Gabriel Attal, ministre délégué. Monsieur Lefèvre, le budget vert sera présenté dans les prochains jours. Christophe Béchu, Caroline Cayeux et moi-même travaillons avec les associations d'élus à l'adoption d'un référentiel national de budget vert, ce qui nous permettra de faire la vérité quant au prix de ce budget pour l'État comme pour les collectivités locales. Bercy a connaissance de l'existence d'un tel budget dans une dizaine de collectivités, mais elles sont probablement beaucoup plus nombreuses à l'avoir adopté. C'est le cas, par exemple, d'Issy-les-Moulineaux – chez moi –, qui l'a fait très tôt. Il serait bon de systématiser cette pratique, avec un cadre global afin de parler de la même chose.
Madame Louwagie, le rythme de réduction de la dépense publique prévu par le programme de stabilité, qui s'inscrit très concrètement dans la loi de programmation des finances publique, est l'effort le plus soutenu depuis vingt ans – le rythme de réduction est deux fois supérieur à ce qu'il était durant le quinquennat précédent.
Vous critiquez la marche prévue pour l'année 2023, mais le total s'élève, pour tous les ministères, à 22 milliards d'euros – et non pas 62 milliards, comme je l'ai entendu dire. On peut critiquer ce projet, mais il faut alors nous dire quoi retirer. Les 3 milliards d'euros supplémentaires pour la défense, alors qu'il faut évidemment continuer à la réarmer ? Le 1,4 milliard destiné à nos forces de sécurité, nos forces de police ? Les 3,7 milliards pour l'éducation, qui nous permettent de revaloriser la rémunération des enseignants ? Les 6 milliards en plus pour le travail, qui nous permettent d'atteindre le chiffre d'un million d'apprentis ? Les budgets pour l'écologie, qui nous permettent d'accélérer la transition ? Il y a des choix à faire, mais je suis sûr que vous pourrez, dans le cadre du débat, porter des propositions d'économies structurelles et que nous travaillerons ensemble à cet objectif.
Madame Ferrari, l'article 21 de la loi de programmation des finances publiques fait suite immédiatement aux dialogues de Bercy. Durant la deuxième séance de ces dialogues, nous avons eu un débat assez vigoureux sur la question de la qualité de la dépense publique, dans lequel est intervenu M. Tanguy. A notamment été cité l'exemple des dépenses de logement – on dépense beaucoup plus en France pour le logement que chez nos voisins européens, pour une qualité qui n'est pas vraiment au rendez-vous. Je me suis déclaré très ouvert à l'idée d'inscrire, dans la partie consacrée à la gouvernance de la programmation des finances publiques, un dispositif permettant d'évaluer la qualité de la dépense publique. Nous avons donc intégré dans la LPFP une accroche permettant d'avoir ce débat au Parlement, afin d'enrichir le dispositif. Contrairement donc à ce qu'a pu dire M. Tanguy, les dialogues de Bercy n'étaient pas seulement de la "com'".
Nous proposons donc un cadre et, dans les débats parlementaires que nous aurons, d'établir ensemble une liste de politiques publiques nécessitant une évaluation qualitative de la dépense publique. Ces évaluations auront lieu durant l'hiver et les rapports seront remis concomitamment au dépôt du projet de loi de règlement pour alimenter les travaux du Printemps de l'évaluation, eux-mêmes pouvant ensuite alimenter le prochain PLF. Cet exercice, qui sera répété chaque année, pose une nouvelle brique de notre gouvernance des finances publiques.
Madame Pires Beaune, je suis très ouvert à ce que nous travaillions ensemble au dispositif que nous avons annoncé pour abonder les dotations de solidarité urbaine et de solidarité rurale. Le rapporteur général voulait, lui aussi, proposer un mécanisme permettant de cibler cela le mieux possible.
Monsieur Jolivet, le fonds vert visera notamment à soutenir la performance environnementale des collectivités, en matière notamment de rénovation des bâtiments publics ou de modernisation de l'éclairage public, l'adaptation des territoires au changement climatique du point de vue des risques naturels et de la renaturation, et l'amélioration du cadre de vie. Il portera également à 150 millions d'euros le financement de la stratégie nationale pour la biodiversité.
L'organisation de ce fonds vert relève des prérogatives de Christophe Béchu et de Caroline Cayeux – nous nous contentons, quant à nous, de le financer –, mais je puis au moins vous dire que le Gouvernement veut un dispositif simple et accessible aux petites collectivités. Nous avons retenu l'expérience des appels à projets qui sont multipliés, avec parfois un coût d'entrée très lourd pour de petites collectivités, et nous voulons déconcentrer au maximum les fonds et faire des préfets les interlocuteurs des collectivités. Tout cela est en train d'être défini par mes collègues Béchu et Cayeux.
Pour ce qui est de l'assurance récolte, le montant des crédits bruts budgétaires introduits sur le programme 149 de la mission Agriculture est de 256 millions d'euros au titre du PLF pour 2023. Le plafond de la taxe affectée au Fonds national de gestion des risques en agriculture, assise sur les cotisations d'assurance, est doublé, ce qui la porte à 120 millions. Avec les crédits du Fonds européen agricole pour le développement rural, d'un montant de 184,5 millions d'euros, on atteint un chiffre total de 560 millions d'euros de soutien public pour la gestion des risques en 2023, destinés au subventionnement de l'assurance récolte et aux tâches de solidarité nationale. Ce soutien public doit ensuite passer à 600 millions d'euros en 2025. On voit que l'engagement du Président la République de soutenir nos agriculteurs soumis à des aléas climatiques majeurs est tenu.
Concernant MaPrimeRénov', nous convenons tous qu'il faut recalibrer le soutien pour qu'il aille davantage aux rénovations globales. Alors que l'objectif initial était de rénover 80 000 passoires thermiques en 2021, 2 500 l'ont été : nous n'y sommes pas, et il faut avancer. Nous avons commencé à en parler dans le cadre des dialogues de Bercy et nous allons continuer à travailler ensemble pour mieux calibrer les aides.
Madame Sas, pour ce qui est du niveau de soutien de l'État pour le climat et la rénovation énergétique, je rappellerai l'analyse transmise par l'Institut de l'économie pour le climat, think tank indépendant régulièrement cité, notamment par les Verts : si on additionne les financements pour le climat, les dépenses budgétaires et fiscales et l'action des opérateurs publics et privés, on atteint un chiffre de près de 15 milliards d'euros, ce qui représente, pour la France, un étiage de dépenses acceptable et soutenable, mais il faut mieux centrer certaines aides, dont MaPrimeRénov'.
Monsieur Sansu, vous avez qualifié d'indigent notre soutien aux collectivités locales. Comme vous l'imaginez bien, je ne reprendrai pas ce terme à mon compte alors que 2,5 milliards d'euros de recettes de TVA supplémentaires vont arriver d'ici à la fin de l'année et que nous avons instauré un filet de sécurité de 430 millions d'euros sur 2022 – système que nous sommes disposés, si nécessaire, à rééditer pour 2023. En outre, je ne l'ai pas dit dans mon intervention liminaire mais les concours financiers de l'État aux collectivités locales en 2023 augmenteront de 1,1 milliard d'euros, tout comme le Fonds de compensation pour la TVA (FCTVA), le prélèvement sur recettes de compensation à la suppression des impôts de production et plusieurs concours. Ajoutons à cela le fonds vert et l'abondement des dotations proposé par Mme Pires Beaune, que nous retenons pour un montant de 210 millions d'euros. Cela ne me semble pas du tout indigent, surtout dans le contexte de finances publiques que nous connaissons aujourd'hui.
Monsieur de Courson, nous sommes évidemment ouverts à des amendements et à des propositions d'économies. Quant à savoir pourquoi ne pas remplacer la suppression de la CVAE par un dégrèvement, c'est tout simplement parce que nous ne voulons pas continuer à faire vivre un impôt fantôme, qui mobilise des agents publics chargés de son calcul et impose des obligations déclaratives assez lourdes aux entreprises. Supprimer la CVAE, c'est supprimer de la pression fiscale pour les entreprises et supprimer des modalités et des charges administratives et déclaratives assez lourdes, pour leur simplifier la vie.
(…)
M. Gabriel Attal, ministre délégué. Monsieur Margueritte, les créations d'emplois correspondent aux engagements pris pendant la campagne présidentielle. Le réarmement en matière de sécurité se poursuivra avec le doublement de la présence des forces de l'ordre sur la voie publique d'ici à 2030. Cela passera à la fois par la création de 8 500 postes au cours du quinquennat, dont 3 000 dès l'année prochaine, par une réforme des horaires et rythmes de travail ainsi que par le transfert de certaines missions exercées par les forces de sécurité intérieure – transfert de malades, garde de bâtiments publics.
La Première ministre nous a fixé pour objectif la stabilité de l'emploi public sur la durée du quinquennat. Les ministères qui connaîtront une hausse de l'emploi public seront en nombre limité – je les ai déjà cités : la sécurité, les armées, la justice. Des efforts sont demandés à d'autres ministères. À Bercy, nous sommes bien placés pour le savoir puisque ce ministère supporte l'essentiel des efforts depuis vingt ans – 2 000 suppressions de postes par an en moyenne sous le précédent quinquennat. Notre ministère demeurera exemplaire mais les efforts seront poursuivis à un rythme moins soutenu afin de garantir le bon exercice de ses missions.
Dans certains ministères, notamment l'éducation nationale, les créations de postes seront moins importantes que par le passé – après le bond démographique, on attend 500 000 élèves de moins dans les cinq prochaines années. Pour continuer à améliorer le taux d'encadrement, il n'est pas nécessaire de créer autant de postes qu'auparavant.
La hausse que vous constatez dans le schéma d'emplois est aussi le résultat d'un effort de sincérité budgétaire : désormais, celui-ci comptabilise les accompagnants d'élèves en situation de handicap (AESH). Dès lors que nous voulons remédier à la précarité qui caractérisait ces emplois, le fait de les intégrer au plafond d'emplois de l'État relève de la bonne gestion.
Monsieur Castellani, s'agissant de la Corse, des discussions importantes sont menées en ce moment par Gérald Darmanin. Nous apportons tout le soutien nécessaire sur les volets économique et fiscal. Une réunion doit se tenir fin octobre ou début novembre sur le sujet. Vous avez mentionné l'article 9, qui prévoit d'abroger l'exonération temporaire de l'impôt sur les sociétés en faveur des entreprises créées en Corse dans les secteurs de l'artisanat, de l'industrie, de l'hôtellerie, du bâtiment et des travaux publics. Je vous rassure, il ne s'agit que de nettoyer la législation fiscale en supprimant des dispositions devenues obsolètes. Nous tenons à votre disposition tous les documents permettant d'apaiser les éventuelles craintes des acteurs locaux sur ce point
Madame Dupont, notre stratégie pour lutter contre la pauvreté repose sur le retour à l'emploi. Le taux de chômage est au plus bas depuis quinze ans ; des millions de Français ont retrouvé un emploi sous le précédent quinquennat, ce qui leur a permis de sortir de la pauvreté.
En ce qui concerne l'hébergement d'urgence, les crédits du programme 177 Hébergement, parcours vers le logement et insertion des personnes vulnérables progressent de 100 millions d'euros, afin de financer la revalorisation salariale des métiers de l'accompagnement social mais aussi le deuxième plan Logement d'abord qui favorise l'accès à un logement plutôt que le recours aux nuitées hôtelières. Les crédits de la mission Solidarité, insertion et égalité des chances sont en hausse de 2,1 milliards d'euros, sous le double effet de la revalorisation des prestations sociales liée à l'inflation et de la déconjugalisation de l'allocation aux adultes handicapés (AAH) – important progrès auquel vous avez contribué et qui doit être appliqué au plus tard le 1er octobre 2023.
Monsieur Allisio, s'agissant d'un éventuel plafonnement de la taxe foncière, les impôts fonciers ont toujours varié au gré de l'inflation. Les associations d'élus locaux nous ont implorés de ne pas modifier la règle légale. Ce sujet suscite un débat au sein de la majorité et de l'opposition – lors des dialogues de Bercy, j'ai entendu Jean-René Cazeneuve et Charles de Courson. Celui-ci se poursuivra dans l'hémicycle. Je le répète, j'appelle les collectivités à modérer la hausse des taux de fiscalité locale afin de ne pas ruiner tous les efforts consentis en faveur du pouvoir d'achat des Français.
Certaines collectivités pourraient baisser leur taux pour compenser la revalorisation du coefficient des valeurs locatives cadastrales liée à l'inflation. Certains maires l'ont déjà annoncé.
Monsieur Lottiaux, s'agissant de la compensation de la CVAE, nous avons retenu une période de référence de trois ans car les résultats sur une année ne sont pas homogènes : alors que les recettes de CVAE au niveau national peuvent être très bonnes, celles de certaines collectivités peuvent connaître au même moment un point bas, et inversement. C'est une ressource très volatile. Je prends l'exemple d'une commune sur le territoire de laquelle se trouve une centrale nucléaire à l'arrêt pour cause de maintenance : à Civaux, les recettes passent de 3,8 millions d'euros cette année à 53 000 euros l'an prochain. La compensation telle que le prévoit le PLF apporte aux collectivités de la visibilité et leur assure que les recettes de CVAE ne baisseront pas. C'est une belle garantie que nous leur donnons.
Nous souhaitons que le lien avec le territoire et la dynamique des ressources soit maintenu. Un maire qui accueille des activités économiques sur son territoire doit pouvoir continuer à dire à ses administrés que c'est bon pour les recettes de la ville. Afin de conserver la territorialisation, nous avons donc proposé de nous appuyer sur la cotisation foncière des entreprises (CFE) qui est déjà l'un des critères d'affectation de la CVAE. Lors des dialogues de Bercy, plusieurs interlocuteurs nous ont incités à ajouter d'autres critères. Nous sommes très ouverts aux propositions en la matière.
Non, la norme de dépenses qui est fixée aux collectivités locales ne remet pas en cause leur autonomie. Le Conseil constitutionnel a estimé que les contrats de Cahors, pourtant bien plus contraignants que les nouveaux pactes de confiance, ne portaient pas atteinte à cette dernière. En revanche, un mécanisme est prévu pour infléchir la trajectoire des dépenses en cas de dérapage afin d'en garantir la maîtrise. C'est normal. Contrairement à ce que vous prétendez, la norme ne sera pas la même pour tous. En cas de dérapage, le mécanisme de correction ne s'appliquera qu'aux communes dont le budget est supérieur à 40 millions d'euros, ce qui vise les 500 plus grosses collectivités.
Monsieur Sala, s'agissant des évolutions consécutives aux dialogues de Bercy, je pense en avoir mentionné plusieurs depuis le début de l'audition. Je pense à la suspension de l'actualisation des bases locatives à la demande unanime des groupes. À rebours de notre objectif de redynamisation des centres-villes, à travers le plan Action cœur de ville notamment, elle avait pour effet d'accroître la fiscalité pour les commerces de centre-ville et de la diminuer pour les hypermarchés de la périphérie.
Nous accédons aux demandes qui ont été formulées en abondant de 210 millions d'euros les dotations de péréquation.
Des propositions ont été faites pour mieux protéger la forêt ; nous reprenons l'idée de sanctuariser les effectifs de l'Office national des forêts (ONF) alors que des suppressions de postes étaient prévues, celle d'une incitation fiscale à replanter pour les propriétaires de forêts ainsi que celle d'un fonds pour accompagner les communes forestières victimes de scolytes.
L'article 21 de la loi de programmation pour les finances publiques permettra d'organiser le débat sur la qualité de la dépense publique qui a été réclamé. Les dialogues de Bercy auront été utiles.
Monsieur Ben Cheikh, la mission Action extérieure de l'État bénéficie d'une hausse de crédits de 187 millions d'euros dont 63 millions concernent la masse salariale. Ils visent à financer les priorités définies en 2022, notamment l'immobilier, la sécurité ainsi que le renforcement de la diplomatie culturelle et d'influence – à hauteur de 47 millions d'euros. Les aides à la scolarité dans le réseau de l'enseignement français à l'étranger sont maintenues. Après un renforcement des effectifs de l'administration centrale en 2022, le schéma d'emplois de la mission prévoit 100 ETP supplémentaires en 2023 afin d'accroître notre présence dans l'Indo-Pacifique – plusieurs nominations importantes ont été entérinées ce matin en Conseil des ministres – et notre capacité d'analyse politique dans les postes diplomatiques les plus exposés. La sécurisation des emprises diplomatiques, la cybersécurité et la lutte contre la manipulation de l'information bénéficient également de crédits supplémentaires.
Source https://www.assemblee-nationale.fr, le 7 octobre 2022