Déclaration de Mme Catherine Colonna, ministre de l'Europe et des affaires étrangères, sur le budget 2023 pour le ministère de l'Europe et des affaires étrangères, à l'Assemblée nationale le 4 octobre 2022.

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Circonstance : Audition devant la commission des affaires étrangères de l'Assemblée nationale

Texte intégral

Le 2 septembre 2022, lors de la Conférence des ambassadrices et des ambassadeurs, j'avais réaffirmé qu'accroître notre ambition diplomatique impliquait d'augmenter les moyens du MEAE - comme cela avait déjà eu lieu depuis plusieurs années pour les autres ministères régaliens. Une augmentation avait été amorcée prudemment ces deux dernières années ; elle est renforcée dans le projet de budget qui vous est soumis. La hausse sensible des moyens du ministère bénéficie tant à la mission Action extérieure de l'État qu'à notre politique en matière d'APD. Vous l'avez souligné, ce budget prévoit aussi une hausse de nos moyens humains, inédite en près de trente ans, ce qui est très important pour le ministère.

Cette évolution prend tout son sens à la lumière de l'environnement international, que j'ai déjà eu l'occasion d'évoquer devant votre commission et qui ne s'est guère amélioré depuis. Un environnement brutal où il est urgent que la diplomatie intervienne encore plus activement. Les moyens supplémentaires que je m'apprête à vous présenter répondent à ces enjeux. Ils nous permettront de déployer une diplomatie combative, agile et innovante ; une diplomatie de résultats concrets, au service des Français.

Dans un premier temps, je vous présenterai l'économie générale de ce budget. Le MEAE comprend deux missions. La mission Action extérieure de l'État comporte les programmes 105 Action de la France en Europe et dans le monde, 151 Français à l'étranger et affaires consulaires et 185 Diplomatie culturelles et d'influence. La mission Aide publique au développement comprend le programme 110 Aide économique et financière au développement, qui est géré par le ministère de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, et le programme 209 Solidarité à l'égard des pays en développement, qui relève du Quai d'Orsay.

La trajectoire d'augmentation de notre budget se confirme et s'amplifie. En 2023, il devrait ainsi atteindre 6,65 milliards d'euros en crédits de paiement (CP), pour l'ensemble de ses missions, avec une augmentation de 543 millions d'euros - soit une progression de 9 % par rapport à la loi de finances initiale pour 2022.

Cette hausse bénéficiera à hauteur de 160 millions d'euros à la mission Action extérieure de l'État, qui atteindra 3,218 milliards d'euros. Cela constitue une augmentation substantielle. Elle s'inscrit en outre dans la trajectoire d'augmentation des moyens de la mission Aide publique au développement. Le programme 209, rattaché au Quai d'Orsay, en bénéficiera à hauteur de 383,1 millions d'euros. Il atteindra 3,436 milliards d'euros et deviendra donc prépondérant dans le budget du ministère.

J'ajoute que les deux programmes de la mission Aide publique au développement, qui est pilotée par ce ministère et regroupe les programmes 209 et 110, atteindront 5,77 milliards d'euros. Cela représente une hausse de 17 % par rapport à 2022 et un doublement des crédits par rapport à 2017.

Par ailleurs, fait particulièrement notable cette année, nos effectifs vont croître pour la première fois en trente ans, avec 100 ETP supplémentaires. Les effectifs avaient baissé de 30 % au cours des deux dernières décennies et de 17 % depuis 2006 - et cela sans modification substantielle du périmètre du ministère. Le PLF 2023 marque une rupture avec cette tendance, qui n'était plus soutenable. Mon prédécesseur parlait d'hémorragie des emplois. Cette évolution était d'autant plus intenable que la situation internationale ne s'est pas améliorée et que les moyens de nos principaux partenaires ont crû ces dernières années. Le plafond d'emplois du ministère est ainsi porté à 13 634 équivalents temps pleins travaillés (ETPT). Pour un ministère comme le nôtre, il s'agit d'une augmentation substantielle. Elle visera pour l'essentiel à mieux répondre à des besoins accrus par la multiplication des crises internationales.

Afin de financer à la fois la hausse de notre plafond d'emplois et la poursuite des réformes en cours au sein du ministère, sa masse salariale connaîtra une hausse de 6 % par rapport à la loi de finances initiale (LFI) pour 2022.

Ces moyens nouveaux permettront d'accélérer la réforme des ressources humaines, au bénéfice de toutes les catégories d'agents : titulaires, contractuels ou de droit local. Ces moyens nouveaux s'établissent à 15,7 millions d'euros. Ils permettront de financer la poursuite de la mise en œuvre du plan de modernisation des ressources humaines, amorcée dans le cadre de la loi de finances pour 2022, ainsi que des mesures nouvelles à hauteur de 8 millions d'euros.

Grâce à ces moyens, nous continuerons à renforcer l'attractivité des métiers diplomatiques, en agissant tout au long des carrières. Lors du recrutement d'abord, en adaptant les épreuves des concours à l'exercice de nos métiers mais aussi en diversifiant les viviers de recrutement, afin que le ministère reflète tous les visages de notre pays. Je veillerai ainsi à ce que soit poursuivie l'expérience très réussie des deux premières académies diplomatiques d'été de La Courneuve, où est implantée une partie du ministère.

Nous amplifierons ensuite notre effort de formation, initiale et continue, afin que nos agents disposent de toutes les compétences nécessaires à l'exercice de leurs métiers. C'est le sens de l'école pratique des métiers de la diplomatie (EDI), implantée à La Courneuve et créée à l'initiative de Jean-Yves Le Drian.

Enfin, les rémunérations doivent pouvoir garantir des conditions de vie et d'exercice professionnel satisfaisantes. Nous avons veillé à ce que les mesures bénéficient à toutes les catégories d'agents. Après le plan ressources humaines financé en 2022, qui a notamment permis une augmentation des rémunérations des titulaires comme des contractuels en administration centrale, nous poursuivrons en 2023 la mise en œuvre du plan de convergence des rémunérations entre agents titulaires et contractuels, en lui consacrant 6,4 millions d'euros. J'insiste sur ce point, parce que le MEAE emploie 52 % de contractuels. Il entend rester pionnier dans la mise en œuvre du principe "à fonction égale, salaire égal". Une dotation de 1,6 million d'euros sera également consacrée à la revalorisation des volontaires internationaux, ces jeunes collègues qui font un travail remarquable dans nos ambassades. Enfin, 3 millions d'euros sont prévus pour l'harmonisation des rémunérations des agents de droit local.

Ces mesures salariales s'accompagnent en outre de dépenses visant à améliorer la vie et le parcours de nos agents. Le budget de 4,8 millions d'euros consacré à l'école pratique des métiers de la diplomatie, fortement augmenté en 2022, est reconduit en 2023. Il s'agit ainsi de consolider l'offre de formation accessible à tous les agents.

Pour répondre aux besoins, une attention particulière sera portée au logement social, y compris d'urgence, avec un budget de 2 millions d'euros, qui prolonge l'important effort d'augmentation du parc de logements consenti l'an dernier.

Face aux effets de l'inflation, nous avons prévu une provision de 24 millions d'euros destinée à soutenir la rémunération de nos agents à l'étranger, y compris ceux de droit local.

Enfin, le ministère va poursuivre la mise en œuvre de la réforme de la haute fonction publique, en faisant évoluer son organisation et son fonctionnement, afin de jouer pleinement son rôle de chef de file interministériel de l'action extérieure de l'État, rôle rappelé par le président de la République et la première ministre.

Après cette présentation générale, j'en viens à la mission Action extérieure de l'État, qui regroupe les programmes 105, 151 et 185.

Le PLF 2023 consacre le renforcement durable des moyens de notre diplomatie au service de trois priorités. La première concerne le programme 105. Il s'agit de nous donner les moyens d'agir efficacement dans un monde en voie de fracturation.

En ce sens, il est essentiel de maintenir un outil diplomatique universel, capable de se déployer partout dans le monde et d'agir dans la quasi-totalité des organisations régionales et internationales. La France dispose du troisième réseau diplomatique mondial, fort de 163 ambassades, de 16 représentations permanentes et de 90 consulats généraux. Nous sommes présents partout, et nous sommes en mesure de parler à tout le monde. C'est un atout majeur pour bâtir les coalitions qui nous permettent d'obtenir des votes favorables à l'organisation des Nations unies (ONU), comme par exemple lors de la dernière Assemblée générale, où nous sommes parvenus à faire condamner l'agression en Ukraine et à isoler la Russie, ce qui n'était pas acquis. C'est également un outil puissant au service de nos ressortissants. C'est grâce à ce réseau universel que nous avons été en mesure de les aider pendant la pandémie de Covid-19, partout dans le monde.

Ainsi, en 2023, le programme 105 verra ses crédits croître de 77,9 millions d'euros, hors dépenses de personnel, pour s'établir à 1,308 milliard d'euros.

Cela concerne tout d'abord les contributions de la France aux organisations internationales et aux Nations unies, qui matérialisent notre engagement en faveur du multilatéralisme, du maintien de la paix et de la sécurité internationale, ainsi qu'en faveur de la souveraineté de l'Union européenne (UE).

Au sein du programme 105, les contributions augmenteront de 45,5 millions d'euros pour tenir compte notamment des effets de change : plus de la moitié de nos versements sont réalisés en dollars américains, devise utilisée par les Nations unies. Elles s'établiraient ainsi à 829,1 millions d'euros.

La contribution du MEAE à la facilité européenne pour la paix (FEP), fortement sollicitée dans le cadre des actions de soutien à l'Ukraine, s'élève à 67,8 millions d'euros ; l'autre part de la contribution française est financée par le ministère des armées.

Je me réjouis également de la hausse de 2,3 millions d'euros de la contribution française au budget de la Cour pénale internationale (CPI), dont l'activité augmente depuis l'agression russe en Ukraine et dont le travail est essentiel pour poursuivre les exactions et crimes de guerre perpétrés par la Russie. La lutte contre l'impunité est un axe fort de notre action car il n'y a pas de paix sans justice. J'ai ainsi reçu Karim Khan, le procureur de la CPI. De même, la contribution française au Conseil de l'Europe augmente de 4,8 millions d'euros, conséquence de l'exclusion de la Russie.

Enfin, nous poursuivons l'effort mené depuis 2020 pour les contributions volontaires sur les thématiques climatiques et de développement, assurées par le programme 209, qui augmenteront de 59 millions d'euros cumulativement avec celles retracées par le programme 105.

Alors que nos partenaires décident de hausses importantes de leurs contributions, cet effort vise à conforter l'action des organisations internationales sur des sujets prioritaires pour nos intérêts, ainsi qu'à consolider l'influence française dans le système multilatéral.

Les crédits du programme 105 augmenteront aussi pour l'entretien et la modernisation de l'exceptionnel patrimoine immobilier du ministère, en France comme à l'étranger. Ce patrimoine est un outil de travail mais aussi de rayonnement et d'influence. En 2023, nous pourrons nous appuyer sur les moyens supplémentaires affectés à la direction des immeubles et de la logistique du ministère, qui disposera d'un budget de 119,7 millions d'euros. Les crédits supplémentaires permettront de poursuivre la mise en œuvre de notre programmation immobilière.

J'ai par ailleurs décidé de quintupler la dotation annuelle aux projets de verdissement des ambassades et des consulats, qui atteindra ainsi la somme de 1 million d'euros. Ils ont été pionniers en la matière et aux avant-postes de la sobriété énergétique dans le service public dès la préparation de la COP 21. Ils ont été exemplaires et doivent le rester.

Dans un contexte de persistance et souvent d'aggravation de la menace, les moyens nouveaux du programme 105 concernent aussi la sécurisation des emprises. L'enveloppe croît de 5 millions d'euros en autorisations d'engagement (AE) et de 3 millions d'euros en CP. Cela permettra notamment de renforcer la sécurité des postes d'Islamabad, de Bagdad ou d'Addis-Abeba et, plus largement, de sécuriser les ambassades là où nos agents sont exposés à des situations de crise ou d'instabilité.

La progression des crédits du programme 105 bénéficiera aussi au numérique, pour lequel nous continuons à consentir des investissements soutenus. Il s'agit d'améliorer l'efficacité de nos outils, de pallier les inégalités de déploiement selon les pays et de renforcer la cybersécurité de notre réseau, le deuxième le plus attaqué après celui de la présidence de la République.

La stratégie d'investissement numérique se poursuivra donc en 2023 et les moyens de la direction du numérique s'établiront à 52,2 millions d'euros, en augmentation de 4,4 millions d'euros.

Enfin, la hausse des crédits du programme 105 s'appliquera à la communication stratégique. C'est un enjeu de plus en plus pressant, alors que nous sommes confrontés à des opérations de désinformation et de propagande hostiles, souvent d'origine russe, qui visent à attiser les discours antifrançais sur les réseaux sociaux, notamment en Afrique ou en Europe. Afin de mieux lutter contre ces pratiques, nous augmenterons de 2,5 millions d'euros les moyens de la direction de la communication et de la presse.

S'agissant de communication stratégique, la deuxième priorité assignée à la mission Action extérieure de l'État et au programme 185 est de renforcer notre politique d'influence, à l'heure où nos compétiteurs en font un véritable outil de puissance. L'influence est au cœur de batailles mondiales de plus en plus féroces. Elle est nécessaire pour maintenir un espace de dialogue et de coopération avec les sociétés civiles, alors que les tensions entre États s'aggravent. L'apprentissage du français, l'enseignement supérieur ou le rayonnement de nos industries culturelles et créatives sont autant d'enjeux stratégiques.

En 2023, la diplomatie culturelle et d'influence verra ainsi ses crédits augmenter de 11 millions d'euros, après transfert de la subvention de l'opérateur Atout France au ministère de l'économie, des finances et de la souveraineté numérique et industrielle. À périmètre constant, cela représente une augmentation de près de 40 millions d'euros. Le programme 185 disposera donc d'un budget total de 671,2 millions d'euros, hors dépenses de personnel.

Cette hausse permettra de soutenir les axes centraux de la diplomatie culturelle et d'influence.

Premier axe : l'éducation en français et à la française. Avec 566 établissements et près de 390.000 élèves dans 138 pays, le réseau d'enseignement français à l'étranger est un instrument unique d'influence. L'Agence pour l'enseignement du français à l'étranger (AEFE) poursuit la mise en œuvre de son plan de développement, conformément à l'objectif de doublement du nombre d'élèves à horizon 2030, réaffirmé par le président de la République en mars 2018. Les moyens de l'agence seront renforcés à hauteur de 30 millions d'euros.

Deuxième axe : la diplomatie économique et la politique d'attractivité. Nous voulons aider l'offre française à rayonner à travers le monde et convaincre toujours plus d'entreprises étrangères d'investir en France. Pour la troisième année consécutive, la France a été en 2021 le pays européen qui a accueilli le plus d'investissements étrangers directs. Dans cette perspective, nous financerons en 2023 des contributions additionnelles à des événements qui renforceront la visibilité internationale de l'excellence française : coupe du monde de rugby et sommet Choose France en 2023, Jeux olympiques et paralympiques de Paris en 2024, exposition universelle d'Osaka en 2025, entre autres. Le projet "marque France" va aussi monter en puissance dans les prochains mois. Cet effort, que l'opérateur Business France aura la charge de mettre en œuvre sous le pilotage du Quai d'Orsay, sera financé à la fois par des redéploiements et par des crédits nouveaux.

Enfin, l'année 2023 marquera la poursuite et le renforcement des dispositifs d'intervention du ministère en administration centrale et dans le réseau culturel, avec la reconduite des moyens de 2022. À cela s'ajouteront 2 millions d'euros pour les projets d'influence dans la zone indopacifique, pour renforcer l'attractivité française en matière d'expertise muséale et pour créer un fonds consacré aux innovations dans le domaine de la diplomatie d'influence.

La troisième priorité de la mission Action extérieure de l'État, c'est de mieux protéger et aider les Français de l'étranger. Comme chacun a pu le constater lors de la pandémie, le Quai d'Orsay est aussi le grand service public de nos concitoyens qui vivent hors de France.

En 2023, l'action consulaire retracée par le programme 151 sera dotée de 141,1 millions d'euros, hors dépenses de personnel - soit une légère baisse d'environ 900.000 euros en CP par rapport à 2022, année électorale. Le coût de l'organisation des élections présidentielle et législatives s'est élevé à 13,5 millions d'euros, somme qu'il est inutile d'inscrire en 2023 compte tenu de l'absence d'élections nationales. Pour autant, il est prévu d'augmenter de 12,6 millions d'euros les moyens consacrés aux Français de l'étranger et à l'action consulaire. La qualité du service rendu à nos compatriotes ne sera donc en rien entamée.

Alors que nombre d'entre eux sont confrontés à des contextes économiques dégradés, ils pourront continuer à compter sur une gamme d'aides sociales inégalée chez nos partenaires. Je voudrais que l'on mesure mieux qu'on ne le fait à quel point le niveau de service offert par les consulats et les ambassades est sans comparaison dans le monde.

Les bourses scolaires destinées aux enfants français qui étudient dans les établissements du réseau de l'AEFE retrouveront leur niveau de 2021, avec un budget de 105,8 millions d'euros, qui comprend des bourses spécifiques pour les enfants en situation de handicap. Des crédits supplémentaires seront alloués à l'aide sociale, les inégalités ayant progressé pendant la crise pandémique (16,2 millions d'euros en 2023, soit 1 million de plus qu'en 2022). Le dispositif de secours occasionnel de solidarité - dit "SOS Covid" -, qui représentait 12 millions d'euros en 2021 et 4,3 millions d'euros en 2022, sera remplacé par une aide sociale classique pour ceux de nos compatriotes qui en auraient besoin. Ils pourront en outre compter sur le soutien des organismes locaux d'entraide et de solidarité (dotés de 1,4 million d'euros en 2023) et sur celui des associations agissant en faveur des Français de l'étranger, grâce au dispositif de soutien au tissu associatif des Français à l'étranger (STAFE) - 2 millions d'euros en 2023. Toutes ces aides sont distribuées en liaison avec les élus consulaires, qui constituent de précieux relais des besoins des Français de l'étranger et de nos actions.

Être aux côtés des Français de l'étranger, c'est aussi leur faciliter la vie en simplifiant leurs démarches. En ce sens, nous poursuivrons la modernisation de l'action consulaire à travers trois projets phares : la numérisation du registre de l'état-civil ; l'amélioration continue du dispositif de vote par internet ; la mise en place de l'expérimentation du service France Consulaire. Depuis ses débuts en octobre 2021, celui-ci a été étendu à treize pays : Croatie, Danemark, Hongrie, Irlande, Lettonie, Lituanie, Malte, Moldavie, Norvège, République tchèque, Roumanie, Slovénie et Suède. Son extension en Europe se poursuivra jusqu'en 2023, avec la Grèce dès cette année, puis la Bulgarie ou encore Chypre, avant de se prolonger dans le reste du monde en fonction des moyens disponibles.

Aider les Français de l'étranger, c'est également développer de nouveaux services, comme l'expérimentation du renouvellement des passeports sans comparution, qui débutera en 2023 au Canada et au Portugal. Ou encore le déploiement à grande échelle de la nouvelle application de rendez-vous consulaires.

J'en viens maintenant à notre action de solidarité à l'égard des pays en développement, conduite par le programme 209. La priorité du PLF 2023 est claire : renforcer et moderniser l'APD.

Ses crédits sont gérés par les programmes 209, qui relève du Quai d'Orsay, et 110, qui dépend de Bercy. La progression importante de ces crédits traduit les engagements pris lors du vote de la loi de programmation du 4 août 2021. Cet effort doit permettre de concrétiser l'ambition du président de la République en matière d'APD, en conservant une trajectoire très dynamique en volume. Cela représente près de 860 millions d'euros d'augmentation sur l'ensemble de la mission, dont 383,1 millions d'euros pour le programme 209 et 476 millions pour le programme 110.

En attendant le prochain comité interministériel de la coopération internationale et du développement (CICID), qui devrait se tenir d'ici à la fin de l'année sous l'égide de la première ministre, nos priorités restent celles fixées par celui de 2018, confirmées par la loi du 4 août 2021. Il s'agit de cinq priorités sectorielles et de priorités géographiques. Les premières concernent la santé, le climat, l'égalité entre les femmes et les hommes, l'éducation, la prévention des crises et le traitement des fragilités. Les secondes nous amènent à concentrer l'aide sur dix-huit pays d'Afrique subsaharienne et sur Haïti.

Au-delà de ces priorités, la capacité à répondre aux crises humanitaires est aujourd'hui un enjeu majeur. Ce projet de budget en prend pleinement la mesure. L'aide humanitaire programmée atteint ainsi 642 millions d'euros par le biais de trois canaux principaux : 200 millions d'euros mis en œuvre par le fonds d'urgence et de stabilisation (+ 30 millions d'euros) ; 160 millions d'euros destinés à l'aide alimentaire programmée (AAP) (+ 41,7 millions d'euros) ; 200 millions d'euros pour les contributions volontaires humanitaires aux Nations unies (+ 19,5 millions d'euros). L'initiative FARM recevra 75 millions d'euros, afin de répondre à l'aggravation de l'insécurité alimentaire mondiale provoquée par l'invasion de l'Ukraine et par le blocus de la mer Noire.

Afin d'être les plus réactifs possibles, cette programmation a été doublée par la constitution d'une provision pour crises majeures, que nous avons réussi à plus que décupler, en la portant de 23 millions à 270 millions d'euros. Un tel saut quantitatif devient qualitatif et il doit permettre de répondre efficacement à de nouvelles urgences humanitaires. En tout, ce sont donc 912 millions d'euros qui sont susceptibles d'être consacrés à l'aide humanitaire en 2023.

Je voudrais enfin rappeler que, conformément à la loi du 4 août 2021, la part d'aide bilatérale sera rehaussée, passant de 1,6 milliard d'euros en 2022 à 2,1 milliards d'euros en 2023. Outre l'aide humanitaire que je viens d'évoquer, cela se traduit par une augmentation de l'aide-projet (+ 84 millions d'euros), dont 20 millions d'euros pour les projets mis en œuvre par les organisations non gouvernementales (ONG) et 10 millions d'euros pour l'enveloppe allouée au fonds de solidarité pour les projets innovants (FSPI). Ces projets sont plébiscités par les ambassades du fait de leur impact rapide et visible. Leur enveloppe sera donc portée à 80 millions d'euros. Enfin, 20,6 millions d'euros supplémentaires seront affectés aux experts techniques internationaux (ETI), conformément à l'objectif présidentiel de doublement de leur nombre à l'horizon 2023.

La santé mondiale restera une priorité l'année prochaine. Je pense notamment au fonds mondial de lutte contre le SIDA, la tuberculose et le paludisme (FMSTP), qui a sauvé 50 millions de vies en vingt ans d'existence et qui, comme l'a rappelé récemment le président de la République, a l'ambition de faire disparaître ces maladies d'ici à 2030. Nous y prendrons toute notre part. Outre 70 millions d'euros pour la reconstitution 2020-2022 du fonds, nous allons lui consacrer 300 millions d'euros supplémentaires pour le prochain cycle triennal 2023-2025, soit près de 1,6 milliard d'euros sur l'ensemble de la période.

La part du programme 209 consacrée à la coopération européenne s'établira à 374 millions d'euros à travers le fonds européen de développement (FED). Elle poursuivra sa diminution jusqu'à extinction des projets démarrés dans le cadre du 11e FED, qui sera définitivement remplacé en 2027 par le nouvel instrument de voisinage, de coopération au développement et de coopération internationale (IVCDCI).

Les ressources du programme 209, comme celles du programme 110, sont complétées par le fonds de solidarité pour le développement (FSD), géré par l'Agence française de développement (AFD) pour le compte de l'État. Doté de 738 millions d'euros, dont 487 millions d'euros au titre de la quote-part du MEAE, le FSD poursuivra le financement de plusieurs fonds multilatéraux dans les domaines de la santé et de l'éducation.

Avant de conclure, un mot du nouveau mécanisme de restitution des biens mal acquis, créé au sein de la mission Aide publique au développement par la loi de finances pour 2022. Sous la responsabilité du MEAE, le programme 370 doit permettre, à terme, de restituer sous la forme de projets de coopération et de développement avec les populations concernées les recettes issues de la cession de biens mal acquis. Les financements vont progressivement se mettre en place dès que les procédures judiciaires aboutiront. Le MEAE suit attentivement la montée en puissance de ce dispositif, qui dépend de l'avancée des procédures judiciaires.

(...)

Vous me contraignez à un choix cruel en me demandant de répondre, dans un temps imparti nécessairement bref, sur le budget et à des questions d'actualité, voire de politique générale. Je m'efforcerai de faire un peu des deux, en risquant ainsi de mécontenter tout le monde et de ne donner satisfaction à personne.

M. Ledoux a parlé du réarmement et même de la réinvention de notre outil diplomatique. Je tiens à préciser que nous sommes un ministère pacifique, même s'il faut parfois préparer la guerre pour assurer la paix. En employant le terme "réarmement", je m'inscrivais dans le mouvement général observé ces dernières années pour les ministères régaliens. Certains en avaient déjà amplement bénéficié, comme les ministères des armées, de l'intérieur et, désormais, de la justice. Il était temps qu'il en soit de même pour le Quai d'Orsay.

Le terme de réinvention est un bon terme. En évoquant ce concept, je voulais aussi dire qu'il faut que le MEAE développe davantage une culture de l'innovation. Le monde change, nous devons être agiles. Nous le ferons en matière de communication, dans la limite de nos moyens. Nous le faisons aussi à travers les stratégies d'influence, qui sont devenues capitales. Je crois au terrain et je soutiendrai les propositions qui en émaneront, si elles paraissent prometteuses. C'est ce que nous avons fait, Monsieur Julien-Laferrière, dans le domaine du développement. Nous avons soutenu des idées émises par les ambassades, avec des projets souvent modestes, rapidement réalisables, adaptés aux besoins locaux et visibles par les populations. Nous allons donc développer la flexibilité et la réactivité. Je concède que nous étions un peu en retard en la matière.

Madame Le Pen, je me réjouirais presque de vous entendre plus souvent. Merci de rappeler la qualité des ambassadeurs, des diplomates en général et celle de notre outil diplomatique. Mais j'aimerais tenter de corriger une confusion. La disparition de certains corps ne signifie ni la disparition des individus, ni celle des emplois. Au contraire, nous créons des emplois. Il fallait le faire, car il faut des gens pour assurer les missions et garantir que la machine fonctionne. Au demeurant, le décret du 16 avril dernier ne supprime pas les deux corps que vous citez. C'est au contraire le texte réglementaire qui matérialise les garanties obtenues par mon prédécesseur.

Les états généraux de la diplomatie vont s'ouvrir dès ce mois d'octobre, la décision ayant été prise par le président de la République et par la première ministre, sur ma proposition. Il est nécessaire de mener une réflexion avec tous ceux qui sont concernés : les élus, des partenaires extérieurs, les jeunes diplomates et toutes nos forces vives. Cette réflexion doit se projeter au-delà de la réforme des corps et permettre de répondre au besoin de sens du personnel tout en lui faisant connaître les priorités que l'État fixe. Un premier bilan de ces états généraux devrait pouvoir être réalisé au début de l'année prochaine. Il s'agira alors de dessiner les lignes directrices qui permettront de renforcer notre diplomatie.

Je n'ai pas vu l'émission de Complément d'enquête mais nous la regarderons avec attention. Le thème que vous mentionnez a déjà été exploré par le passé. Si des faits nouveaux qui relèvent de la justice étaient révélés, il y aurait bien entendu matière à enquête. Les registres du mobilier des ambassades sont très précisément tenus et font l'objet d'un examen annuel. Chaque ambassadeur doit signer les documents d'inventaire au début et à la fin de ses fonctions : il engage ainsi sa propre responsabilité.

Mme Leboucher a évoqué les services consulaires aux Français et les délais d'obtention de rendez-vous. Sans doute avez-vous perçu dans le vœu que j'ai formé une petite critique sur la situation actuelle. La pandémie de Covid-19 et les confinements successifs ont empêché pendant plusieurs mois les personnels de travailler au même rythme que d'habitude. Même si les services consulaires français n'ont jamais fermé - contrairement à ceux d'autres pays -, un retard certain s'est partout accumulé. Nous pensons pouvoir améliorer la situation dès la fin de cette année grâce à une nouvelle plateforme de prises de rendez-vous. Je profite de l'occasion pour appeler nos compatriotes à la responsabilité. Trop de rendez-vous sont pris mais ne sont pas honorés et restent bloqués car on ne prend pas la peine de les annuler. La nouvelle plateforme est en cours de déploiement et va être mise en place très bientôt. Dans les pays où les besoins sont les plus urgents, des renforts ponctuels d'effectifs pourront être déployés. Nous avons également travaillé avec le ministère de l'intérieur pour faciliter certaines démarches administratives, notamment en supprimant la deuxième comparution lors des renouvellements de passeport. Des expérimentations en ce sens sont menées dès cette année dans deux pays.

L'AFD est en effet une banque, et c'est nécessaire si nous voulons qu'elle lève des fonds sur les marchés internationaux et assure son rôle. Ne confondons pas l'instrument et le pilotage. L'AFD est un opérateur de l'État. Elle est placée sous la triple tutelle du MEAE, de Bercy et du ministre délégué chargé des outre-mer. Une programmation et un pilotage politique sont donc assurés et j'espère qu'un CICID se tiendra bientôt. Un comité du développement présidé par le président de la République sera peut-être même organisé, ce qui serait une bonne chose en début de législature.

Il faut relever que les dons ont nettement plus progressé que les prêts : c'est le résultat de ce pilotage politique. Ces dons représentent 1 milliard d'euros au titre de l'aide-projet, 80 millions d'euros s'agissant du FSPI - avec des projets innovants qui sont très utiles localement - et 600 millions d'euros au titre de l'aide humanitaire. Cela permet de concentrer les efforts dans les pays les plus fragiles, alors que les prêts vont bénéficier aux pays dits intermédiaires, que les ratios actuels d'endettement rendent éligibles aux mécanismes d'emprunts.

J'en viens au Burkina Faso, premier sujet évoqué par M. Herbillon. Notre priorité est et demeure la sécurité des ressortissants français. La situation a évolué dans le sens d'un relatif retour au calme. Néanmoins, nous avons pris tout de suite les mesures nécessaires. Un dispositif a été arrêté à cet effet, sur lequel je ne m'étendrai pas. Je rappelle qu'il s'agit d'une crise politique intérieure au Burkina Faso. Elle ne nous concerne pas directement et nous n'en sommes pas partie prenante. Il y a eu des actions de désinformation, très clairement organisées par des petits groupes qui ont peut-être été manipulés. Je ne ferai pas de commentaires sur les commanditaires potentiels ; certaines images en disent plus que je ne peux le faire dans ma fonction. Des appels irresponsables ont eu lieu sur les réseaux sociaux. Nous avons demandé qu'ils cessent. Nous avons pu arrêter des tentatives d'intrusion. La situation a évolué un peu plus favorablement mais nous restons mobilisés et prudents. Parallèlement, des missions diplomatiques s'organisent. Une mission de haut niveau de la Communauté économique des États d'Afrique de l'Ouest (CEDEAO) se déroule sur place. Nous espérons qu'elle pourra apporter un peu de raison et rappeler que le Burkina Faso a besoin du respect du calendrier de retour à l'ordre constitutionnel, perturbé depuis trop longtemps. Les dommages subis par l'ambassade de France sont évalués entre 2 millions et 2,5 millions d'euros.

La situation générale au Sahel mériterait à elle seule un débat. Je rappelle simplement que, par notre engagement, nous avons évité que le Mali ne bascule et que Bamako ne soit prise par les groupes djihadistes. Mais cela n'a pas suffi à assurer la stabilité du pays. Je vous remercie d'avoir rendu hommage aux soldats français qui ont perdu la vie dans cette noble mission, qui a permis de marquer des points contre les groupes terroristes armés (GAT). Malheureusement, les autorités maliennes - issues d'un double coup d'État - n'ont pas poursuivi la même politique. Par leur action et par leurs alliances avec des mercenaires, elles ne font pas preuve de beaucoup d'efficacité dans la lutte contre les GAT.

Je reviens brièvement sur les questions de communication et de lutte contre la désinformation soulevées par Mme Vichnievsky. Nous voulons mieux anticiper les attaques informationnelles et voir d'où elles proviennent, en accroissant nos capacités de veille sur les réseaux sociaux. Une nouvelle sous-direction de la direction de la presse et de la communication du Quai d'Orsay sera désormais chargée de le faire. Une fois que l'on a veillé, observé et identifié, il faut ensuite agir. Nous nous employons à toucher de nouveaux publics, sur de nouvelles plateformes et dans de nouvelles langues, ce qui suppose des moyens. Il faut aussi que les ambassades soient en mesure d'être plus réactives, en augmentant leurs moyens à l'aune de ceux qui nous sont donnés. Il faut toujours se souvenir que les pays où sévit la désinformation sont les mieux armés pour lutter contre elle. L'action d'influence que nous menons et l'APD que nous leur apportons sont des moyens dont il ne faut pas oublier l'importance dans cette lutte contre les fausses informations.

Peut-être avez-vous appris qu'une nouvelle opération de rapatriement d'enfants retenus dans des camps en Syrie a été menée aujourd'hui. Je ne comptais pas la confirmer mais le parquet national antiterroriste l'a fait. Nous essayons de ramener ces enfants lorsque c'est possible et si nous pensons que les conditions locales le permettent. Nous n'assurons pas, bien évidemment, le contrôle effectif de ces territoires et les conditions sur place sont très difficiles. Ce sont des opérations délicates, sur lesquelles nous ne communiquons jamais en amont pour des raisons évidentes. Je rends hommage à tous les services de l'État qui sont impliqués dans ces opérations d'une très grande complexité.

Monsieur David, quelles que soient les modalités de financement de l'audiovisuel public, le MEAE restera vigilant à ce que les moyens accordés à l'audiovisuel extérieur soient maintenus, voire augmentés. Il est indispensable que ces médias puissent répondre à leur mission de presse libre et indépendante, qu'ils diffusent une information professionnelle et de qualité et qu'ils luttent contre la désinformation qui se répand à bas bruit. L'année 2023 sera celle de la consolidation du rôle de cet audiovisuel extérieur. Nous avons par exemple mis en place un dispositif d'accueil de journalistes ukrainiens en exil, grâce à France Médias Monde. Par le biais de RFI Romania, nous pouvons émettre une information fiable et de qualité, en ukrainien et en russe. Quant à votre réflexion sur le contrat d'objectifs et de moyens, elle dépasse ma compétence et concerne les années 2024 et 2025.

M. Portarrieu a posé deux questions sur le déficit commercial. Je crois avoir répondu par anticipation en ce qui concerne les moyens que le MEAE peut consacrer à l'amélioration de l'attractivité de la France, avec plutôt de bons résultats. Cela ne suffit pas à réduire le déficit commercial mais c'est un sujet qui dépasse la compétence du seul MEAE. Vous avez également abordé la question de l'autonomie et de la résilience de certaines filières industrielles. Nous sommes bien informés des points d'attention particuliers que la société Airbus a évoqués s'agissant de certains métaux nécessaires. De manière plus générale, il faut diversifier nos fournisseurs. C'est ce qu'Airbus a entrepris de faire mais il lui faudra encore quelques mois pour être moins dépendante, d'un pays en particulier.

Monsieur Julien-Laferrière, les sommes mobilisées dans le cadre du FSD ne sont pas considérables. Il s'agit cependant d'un outil intéressant qui est plébiscité, tant par les ambassadeurs que par les pays ou les populations qui peuvent en bénéficier. Ce qui compte, ce n'est pas la provenance des crédits de l'APD, c'est leur total - et il augmente considérablement en volume. Vous me direz probablement que ce total ne progresse pas suffisamment en pourcentage. Mais l'objectif de 0,5 % prévu par la loi du 4 août 2021 pour cette année est atteint. Pour ce qui est des années suivantes, vous avez formulé un vœu par voie d'amendement, auquel je souscris. J'observe que la croissance du produit intérieur brut (PIB) permet une augmentation considérable en volume de notre aide au développement. Elle a doublé depuis 2017, ce qui est un beau résultat. Il est plus facile d'assurer le pilotage politique de l'APD dans le cadre de la mission Aide publique au développement plutôt qu'en dehors de celle-ci. Je souscris à la demande de votre assemblée d'assurer un pilotage politique étroit de ces activités, et notamment de l'AFD.

Madame Youssouffa, j'ai bien noté votre préoccupation. Nous sommes conscients des difficultés économiques, sociales et migratoires à Mayotte. Vous m'aviez interrogée à ce sujet lors des questions au Gouvernement. J'avais à cette occasion rappelé les chiffres des expulsions, qui sont très importants. Le faible niveau de développement de certains territoires, comme les Comores, conduit nombre de leurs habitants à émigrer. Nous ne sommes, par conséquent, pas favorables à la fin de l'APD. Au contraire, il faut trouver des solutions pour que les pays les moins avancés se développent, afin qu'il y ait moins d'émigration. On ne réglera pas ce problème si l'on n'agit pas sur les causes de ces migrations. Pour les Comores, un plan de développement de 150 millions d'euros est prévu. Il a pour objectif d'agir sur les causes pour prévenir davantage les départs de migrants clandestins vers Mayotte. Il s'agit de favoriser et de multiplier les possibilités de développement économique aux Comores, en ciblant en particulier l'île d'Anjouan.

Monsieur Dupont-Aignan, j'ai dit aujourd'hui même lors des questions aux Gouvernement que la France se tenait sans ambiguïté aux côtés du peuple arménien. J'ai rappelé notre souhait, qui est celui de tous les amis de l'Arménie, qu'une solution négociée et pacifique soit trouvée au conflit entre ce pays et l'Azerbaïdjan. Enfin, j'ai rappelé qu'en droit international exécuter des prisonniers de guerre constitue un crime de guerre. Il faudra donc que les auteurs de ces faits soient jugés. Nous avons immédiatement demandé une enquête indépendante.

En ce qui concerne l'Ukraine, ne confondons pas les choses. Si quelqu'un punit la Russie, ce sont ses responsables politiques et en particulier le premier d'entre eux, le président Poutine. N'oublions pas non plus que c'est l'armée russe qui est en Ukraine et non l'inverse. Elle y commet des crimes, des crimes de guerre et peut-être même des crimes contre l'humanité. Elle devra rendre des comptes. La position de la France a été rappelée hier par la première ministre et par moi-même lors du débat consacré à l'Ukraine, au titre de l'article 50-1 de la Constitution.

(...)

Monsieur Metzdorf, les États membres du Forum des îles du Pacifique (FIP) ont été conviés par le président américain à Washington à la fin du mois de septembre 2022. La France n'est pas membre du FIP. En revanche, elle a obtenu en 2016 que la Nouvelle-Calédonie et la Polynésie française puissent en devenir membres à part entière et être ainsi mieux insérées dans leur environnement. C'est à ce titre, et à ce titre seulement, que nos territoires ont été invités par les États-Unis. Pour qu'il n'y ait pas d'ambiguïté, j'ajoute que c'est bien par l'intermédiaire de l'État français que cela a été fait. La France a autorisé les gouvernements de la Nouvelle-Calédonie et de la Polynésie française à se rendre à Washington pour participer à cette réunion. Il n'y a donc pas d'atteinte à la souveraineté de l'État, avec laquelle nous ne saurions transiger.

M. Seitlinger m'a interrogée sur les questions immobilières. Si l'on prend un peu de recul, on peut relever qu'au cours des dix dernières années le MEAE a procédé à 188 cessions, pour un montant de 789 millions d'euros. Sur ce total, 200 millions d'euros ont contribué au désendettement de l'État. Cette politique de cessions est aujourd'hui moins dynamique, d'abord parce qu'il y a moins de biens à vendre, ensuite parce que le marché immobilier est plus déprimé, ce qui rend les ventes moins intéressantes. Nous ne pouvons pas compter sur une ressource aléatoire pour répondre à des besoins permanents d'entretien des ambassades et résidences. C'est la raison pour laquelle le ministère a obtenu, grâce à la représentation nationale, un renforcement significatif de ses crédits budgétaires. Pour la troisième année consécutive, notre dotation augmente. Elle est aujourd'hui portée à presque 57 millions d'euros en AE. Cette tendance devra être confortée à l'avenir car nos besoins restent importants à l'étranger. Ils sont estimés non pas à 57 millions d'euros par an mais plutôt à 80 millions d'euros. Il y a donc encore beaucoup à faire.

Concernant l'autre volet de ce dossier des cessions de biens à l'étranger, nous devons encore récupérer 36 millions d'euros de versements issus du CAS 723. L'arbitrage rendu par nos autorités a été favorable. Nous attendons donc la fin de gestion pour les récupérer, comme il se doit. Je n'ai pas manqué de le rappeler à mon collègue ministre délégué chargé des comptes publics.

Madame Abomangoli, le programme 209 dispose de 1458 ETP en 2022. Les choix de répartition pour 2023 seront examinés lors des réunions de programmation avec la direction des ressources humaines du ministère, au plus près des besoins. Il faudra prendre en compte l'augmentation de l'APD, et donc le besoin de personnel qualifié pour la mettre en œuvre. Tous les choix ne sont pas encore faits. J'en reste à me réjouir de cette augmentation des effectifs du ministère, la première depuis trente ans.

Quant à la TTF, comme j'ai pu le dire à monsieur Julien-Laferrière, ce qui compte n'est pas d'où viennent les crédits mais qu'ils arrivent et qu'ils augmentent.

Nous suivons de très près la situation de nos deux compatriotes au Nicaragua, Madame Caroit. L'ambassade de France et les autorités françaises à Paris sont mobilisées. Nous avons déposé une demande d'accès consulaire à ces deux ressortissantes, cet accès étant garanti par la convention de Vienne.

Quant à l'AEFE, elle a réformé le statut de ses personnels expatriés et ses modalités de recrutement. C'est donc une avancée par rapport à la situation que vous avez évoquée. On peut s'en réjouir collectivement, en premier lieu pour les personnels concernés. Cette réforme entraîne un surcoût pour l'AEFE, que l'on évalue à environ 15 millions d'euros pour 2023. Le MEAE soutiendra l'AEFE en prenant en charge près de la moitié de cette somme, soit 7 millions d'euros.

Monsieur Le Gall, la répartition précise des 100 emplois créés cette année n'est pas encore finalisée, au-delà de la répartition générale de deux-tiers d'emplois à l'étranger et d'un tiers en France. J'éviterai le saupoudrage, au demeurant difficile au vu du nombre d'emplois créés. Toutes les catégories sont concernées par ces nouveaux postes de titulaires, en France et à l'étranger, expatriés et recrutés locaux. Permettez-moi de réserver les choix finaux à la direction des ressources humaines et à la direction générale de l'administration et de la modernisation du ministère.

Nous suivons le cas de notre compatriote Salah Hamouri depuis le départ, et pas seulement depuis la lettre que vous m'avez adressée, Madame Soudais. La diplomatie française a multiplié les contacts à tous les niveaux - à Paris, à Tel Aviv et à Jérusalem -, afin d'obtenir des explications et des assurances sur ses conditions de détention. Notre droit de visite consulaire a déjà été exercé à cinq reprises depuis le mois de mars, tandis que la famille de M. Hamouri a été reçue à de nombreuses reprises au Quai d'Orsay ; ce fut le cas hier encore.

Pour le reste, je ne commenterai pas vos propos sur la nature de l'État d'Israël, afin de ne pas avoir à m'en distancier.

J'indiquerai néanmoins que nous évoquons bien entendu la situation de M. Hamouri avec les autorités israéliennes. Le président de la République, lui-même, l'a fait lorsqu'il a reçu le Premier ministre Lapid, il y a très peu de temps.

M. Hamouri doit être libéré. Il doit pouvoir mener une vie normale, là où il le souhaite, y compris à Jérusalem, où il est né et où il réside. Ses enfants et son épouse doivent en outre pouvoir s'y rendre et le retrouver. C'est ce que nous ne cessons de dire aux autorités de l'État d'Israël, y compris au plus haut niveau.

(...).


source https://www.diplomatie.gouv.fr, le 14 octobre 2022