Déclaration de Mme Rima Abdul-Malak, ministre de la culture, lors de la remise des diplômes de la promotion 2021 des commissaires priseurs, le 21 novembre 2022.

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Circonstance : Remise des diplômes de la promotion 2021 des commissaires priseurs, au Salon des Maréchaux le 21 novembre 2022

Texte intégral

Monsieur le président du Conseil des Ventes, cher Henri Paul,
Mesdames et Messieurs les représentants de l'Association nationale des élèves commissaires-priseurs,
Mesdames et Messieurs les représentants de la Chambre nationale des Commissaires de Justice,
Chers diplômés,
Chers tous,

Cette 14e cérémonie officielle de remise des diplômes met à l'honneur les élèves et clercs ayant passé leur examen professionnel de commissaire-priseur en 2021.

Vous êtes 32 et vous avez toutes mes félicitations !

Tous mes remerciements ce soir vont à l'Association nationale des élèves commissaires-priseurs, à la Chambre nationale des Commissaires de justice, au Conseil des Ventes Volontaires et son président Henri Paul.

Cette soirée marque le moment où vous devenez officiellement Commissaires-priseurs après des études d'histoire de l'art et de droit, et le passage d'un examen d'accès, suivi de deux ans de formation sous forme de stages comme d'enseignements théoriques à l'ESCP et à l'École du Louvre Partenaire historique depuis 40 ans.

Pour cette promotion le taux de réussite à l'examen d'accès a été de 17% seulement. C'est dire à quel point ce processus est sélectif et combien vous méritez ce moment convivial après tant d'efforts, couronnés de succès !

Cette formation je tenais à le saluer, a connu ces dernières années plusieurs transformations sous l'impulsion du Conseil des fentes à la suite d'un rapport remis par deux de ses membres, Sylvie Maunand, conseillère à la Cour de cassation, et Dominique Soinne, commissaire-priseur :

- la formation a obtenu la certification qualité "Qualiopi",
- un comité scientifique est désormais chargé de l'orientation des programmes,
- des cours du soir sont proposés aux élèves pour les accompagner
- un "rapport du jury" est édité pour aider les candidats se présentant à l'examen
- la formation sera bientôt inscrite au registre national des compétences professionnelles.

Vous êtes désormais outillés pour faire face à toutes les mutations de la profession – Je pense notamment aux bouleversements induits par le numérique et le développement des ventes en ligne, l'apparition des NFT etc. ..

Vous êtes aussi préparés à appréhender les sujets majeurs du secteur : cette année, la conférence d'ouverture a été consacrée à la question de la provenance des œuvres à l'INHA.

C'est une question essentielle non seulement pour les commissaires-priseurs, mais plus généralement pour tout un écosystème, de la salle des ventes aux musées, en passant par les antiquaires et les experts.

Ce sujet est devenu crucial et nécessite un dialogue encore plus écrit entre l'État, tous les Ministères concernés et les acteurs du marché. Il est pour nous important de poser un nouveau cadre de confiance sur trois types de biens : les biens spoliés aux familles juives, les biens pillés pendant la période coloniale notamment en Afrique et les biens volés sur des sites archéologiques.

Je voudrais profiter de l'occasion qui m'est donnée de m'adresser à la fine fleur des commissaires-priseurs pour m'arrêter quelques minutes sur ces questions, car aujourd'hui même la mission chargée de formuler des propositions pour sécuriser les acquisitions des musées m'a remis son rapport.

Ce document, qui s'appuie sur quatre mois de travail, l'audition de plusieurs dizaines de personnalités du monde des musées, du marché de l'art, de l'Unesco, avec l'appui de l'ensemble des ministères concernés, permet d'avoir une vue d'ensemble de cette chaîne de valeurs et de responsabilités qui précède l'entrée d'une œuvre dans les collections publiques. Si la France est aujourd'hui le premier marché européen pour le commerce de l'art, c'est ensemble que nous tiendrons ce rang, d'autant plus sûrement que nous veillerons collectivement, avec une même rigueur, à la provenance des œuvres.

Car il ne s'agit pas seulement d'instruire avec vigilance les procédures d'acquisitions pour les musées, mais de conforter l'ensemble des acteurs qui interviennent tout au long du parcours d'une œuvre, depuis la licence d'importation dans la communauté européenne, à son inscription sur les inventaires des collections publiques. C'est dans cette optique que le rapport préconise les commissaires-priseurs voient leurs diligences en matière de provenance mieux précisées (ainsi que celles concernant la sélection des experts), leur livre de police enrichi et archivé, et véritablement informatisé pour être accessible aux services compétents de l'État. Ces dispositions sont proposées pour protéger les professionnels que vous êtes, en établissant clairement ce que sont ces fameuses "diligences", terme bien vague dont on a vu qu'il s'est trouvé au cœur des procédures judiciaires récentes.

Il me semblait important de dessiner devant vous, qui entrez dans la carrière, cet horizon plus sûr et mieux concerté. Les deux années de formation que vous avez suivies, la série d'épreuves que vous avez traversées, comme celle redoutable et redoutée, des fameux "tours de salle" organisés à l'Hôtel Drouot où le futur commissaire-priseur à 1h30 pour décrire une vingtaine d'objets, qu'il s'agisse de mobilier, bijou, vin, gravure, dessin, sculpture, monnaie, médaille, objet de curiosité… vous ont permis d'obtenir le Certificat de bon accomplissement de stage et je suis très heureuse d'être en quelque sorte la marraine de cette nouvelle génération, et de partager ce patronage avec Sabine Pigalle, ici présente, qui a reçu la mission de réaliser une œuvre qui symbolise votre diplôme.

Après Pierre SOULAGES, Wim Delvoye, Mathieu Mercier, Olivier Sévère, Bernard Venet, Ben, Zeus, Gérard Schlosser, Pierre Le Tan, Claude Viallat, heureuse de voir que le choix s'est porté cette année sur une femme, ce qui est aussi un signe des temps.

Artiste visuelle privilégiant le medium photographique, Sabine Pigalle s'inscrit dans cette nouvelle génération qui navigue entre les frontières de la réalité et de la fiction, interroge les mythes, le patrimoine, la mémoire collective, et se concentre autour du portrait traité comme représentation d'archétypes décalés. Apparentée au mouvement de la Post-photographie, elle produit des œuvres transversales qui hybrident peintures et photographies, art ancien et art contemporain, figuration et abstraction.

Chère Sabine, merci pour cette création. Je vois dans le titre de l'œuvre que vous présentez en ce moment à Citéco, à Paris une forme de présage : votre installation est intitulée "New Economy" et c'est bien d'un new deal que vous allez permettre pour l'ensemble de secteur du marché de l'art.

Vous êtes la relève !

Vous allez contribuer à réinventer, façonner le nouveau visage du marché de l'art Avec passion, avec déontologie, avec rigueur, avec engagement.

Vous êtes prêts pour écrire l'avenir ! et l'avenir, vous ouvre grand les bras !

En attendant, et pour paraphraser une expression de votre profession qu'une célèbre émission de télévision du service public a rendu célèbre, je ne peux que dire : affaire conclue et tournez manège ! Et vous souhaiter le meilleur pour la carrière qui s'ouvre devant vous.


Source https://www.conseildesventes.fr, le 5 décembre 2022