Interview de M. Christophe Béchu, ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, à Europe 1 le 14 décembre 2022, sur les transports confrontés aux intempéries, les hébergements d'urgence pour les sans abris, l'état du réseau électrique et la question de la biodiversité.

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Média : Europe 1

Texte intégral

DIMITRI PAVLENKO
Prudence sur la route ce matin, sur le nord du pays, de la Bretagne à l'Alsace, 33 départements sont en vigilance orange neige-verglas, alors comment ça va se passer sur la route, sur le rail, dans les aéroports, sans compter la demi-finale de la Coupe du monde ce soir qui complique encore un peu plus la situation, les autorités sont sur le pont. Bonjour Christophe BÉCHU.

CHRISTOPHE BÉCHU
Bonjour.

DIMITRI PAVLENKO
Bienvenue sur Europe 1, vous êtes le ministre de la Transition écologique et de la Cohésion des territoires, de bonne heure en studio avec nous sur Europe 1 ce matin, vous surveillez la situation comme le lait sur le feu. Il y a une vraie inquiétude du Gouvernement pour cet événement météo neige-verglas Christophe BÉCHU ?

CHRISTOPHE BÉCHU
Il y a une vraie inquiétude parce qu'il survient après plusieurs jours de froid, donc avec un sol qui est suffisamment froid pour que le verglas puisse tenir et pour que la neige puisse tenir, c'est ce qui explique à la fois le niveau de vigilance qui a été arrêté par MÉTÉO FRANCE, et les consignes de sécurité qui ont été prises, ou les décisions de restriction de circulation qui l'ont été en fonction des départements, dans l'ouest de la France le préfet de la zone de défense a par exemple abaissé de 20 km/h les vitesses et interdit les dépassements, vous avez évoqué les transports scolaires qui sont annulés sur une partie du territoire, et dans la région Ile-de-France c'est interdiction totale de circulation des poids lourds, depuis hier soir 22h jusqu'à ce soir 22h, et puis une voie en particulier, la RN 118, qui a été totalement interdite à la circulation…

DIMITRI PAVLENKO
Il y a une jurisprudence autour de ce fameux axe, la RN 118, on se souvient qu'il y a quatre ans vous aviez plus de 1000 voitures qui s'étaient retrouvées bloquées comme ça après des chutes de neige, et on sait que ça a durablement marqué les autorités publiques, Christophe BÉCHU.

CHRISTOPHE BÉCHU
On sait que c'est un maillon qui est un peu fragile et qu'à l'intérieur de tout ça on peut se retrouver avec des situations qui sont très compliquées et une difficulté à faire accéder les véhicules pour dégager ceux qui se seraient mis en travers de la route à cause des conditions météo, et donc dans ces conditions appliquer un principe de précaution pour éviter ensuite qu'on ait des drames, ça semble être extrêmement légitime. J'ajoute…

DIMITRI PAVLENKO
Est-ce qu'on ne manque pas…

CHRISTOPHE BÉCHU
J'ajoute une dernière chose…

DIMITRI PAVLENKO
Pardon, je vous laisse finir.

CHRISTOPHE BÉCHU
C'est la recommandation qui est quand même faite à tout le monde de se dire que si vous êtes dans les zones qui sont concernées, évitez de se déplacer, utilisez des transports en commun, télétravaillez, ou si vous le faites, le faire dans des conditions de sécurité où vous réduisez votre vitesse, ce sont des choses qu'il faut qu'on rappelle pour éviter de se retrouver avec des accidents.

DIMITRI PAVLENKO
Est-ce qu'on a assez de sel, Christophe BÉCHU, on se souvient aussi qu'à certains hivers les quantités de sel sont parfois limites, est-ce que là, pour cet hiver, ça va tenir ?

CHRISTOPHE BÉCHU
À la minute où je vous parle nous n'avons aucune inquiétude sur ce point, le ministre délégué chargé des Transports était hier soir avec des équipes de saleuses, on n'a pas de souci, je veux aussi rendre hommage aux équipes qui travaillent pour les collectivités départementales, et pour les départements, parce qu'il n'y a pas que l'État qui sale, il y a tous ceux qui sont gestionnaires de réseaux, les concessionnaires autoroutiers, et on n'a aucune inquiétude, dans ce domaine, à l'heure où je vous parle.

DIMITRI PAVLENKO
Alors, Paris a déclenché le plan grand froid hier après-midi, alors c'est très particulier, c'est quand les températures ressenties descendent jusqu'à -18, donc on y est là actuellement, Christophe BÉCHU, dans les rues de Paris, c'est -18 ressenti ?

CHRISTOPHE BÉCHU
Alors on est avec des températures ressenties particulièrement fraîches dans un certain nombre de secteurs, pas qu'à Paris, et le plan grand froid il a été déclenché sur une partie du territoire, c'est un dispositif…

DIMITRI PAVLENKO
Toutes les régions sont invitées à se préparer aujourd'hui.

CHRISTOPHE BÉCHU
Exactement, dès qu'on est sur des températures qui sont basses, et qui le restent, avec des températures en dessous de 0, les collectivités locales et l'État regardent comment ouvrir des salles polyvalentes, des gymnases, pour assurer la mise à l'abri, au-delà des places d'hébergement d'urgence, pour qu'on puisse faire face, compte tenu de ces températures, à un hébergement particulier, maraudes sociales, élargissement des accueils de jour en termes d'horaires, bref, tous les dispositifs qui permettent de veiller aussi aux plus fragiles de manière renforcée.

DIMITRI PAVLENKO
La demi-finale de Coupe du monde, est-ce que ça vient aggraver, alourdir, compliquer un peu plus la situation ? On entendait Gérald DARMANIN dans le journal de 7h sur Europe 1 expliquer que plusieurs portes du périphérique allaient être fermées, les transports en commun également allaient être réduits, journée vraiment très très compliquée !

CHRISTOPHE BÉCHU
Alors, on peut espérer que des gens seront chez eux, ou vont rester chez eux, pour précisément regarder le match, ce qui permettra de limiter une partie de la tension sur les axes de circulation, mais c'est vrai que forcément c'est un événement, quand on voit les audiences et les succès des matches précédents, et puis le niveau de compétition auquel nous sommes rendus, il y a une tension particulière, on sait que tous les grands événements aujourd'hui engendrent une tension, et ce match France-Maroc de cet après-midi, lui aussi il est un facteur de vigilance.

DIMITRI PAVLENKO
Il y a une attention particulière autour de cette rencontre, Christophe BÉCHU.

CHRISTOPHE BÉCHU
Il y a d'abord une attention sportive, pour les Marocains qui, pour la toute première fois, arrivent à ce stade de la compétition, avec donc une fierté et une envie d'aller plus loin, pour les Français, parce qu'on ne s'habitue pas, j'allais dire, à gagner tous les quatre ans dans ce genre de chose sans que ça suscite à chaque fois un véritable enthousiasme collectif, et la rencontre de nos deux nations, qui sont proches à beaucoup d'égards, avec une communauté marocaine qui est importante en France et dont on a vu les effusions au cours des épisodes précédents, participe à ce que tout le monde soit vigilant pour que ça reste une fête.

DIMITRI PAVLENKO
Christophe BÉCHU, qu'en est-il du réseau électrique, on sait que le froid le met à rude épreuve, va-t-il tenir le choc, les craintes de coupures de courant, on sait que c'est une grande inquiétude des Français, qu'est-ce que vous pouvez nous dire à ce stade des choses ?

CHRISTOPHE BÉCHU
Que si collectivement nous continuons à faire, comme nous le faisons depuis début d'hiver, plus attention qu'un hiver normal, nous passerons cet hiver sans difficulté. Chaque semaine qui passe des réacteurs sont reconnectés au réseau, puisqu'on qu'on a ce sujet d'avoir une indisponibilité du parc nucléaire en début d'hiver qui est venu aggraver la situation provoquée par l'absence de gaz et de pétrole russe après l'invasion de l'Ukraine, mais à la minute où on se parle, si nous continuons à être collectivement responsables, on n'aura pas de difficultés pour cet hiver.

DIMITRI PAVLENKO
Autre sujet pour vous, je me permets une question quand même Christophe BÉCHU parce que ça fait partie de votre périmètre, la COP 15 a lieu en ce moment à Montréal, elle a démarré la semaine dernière, on discute de la conservation de la nature avec l'objectif, d'ici 2030, de protéger 30 % des terres et des mers de la planète, ça veut dire quoi exactement protéger les terres et les mers de la planète, ça veut dire on les sanctuarise complètement ?

CHRISTOPHE BÉCHU
Ça veut dire qu'à la minute où on se parle, nous tranquillement ce matin, on a 1 million d'espèces, animales et végétales, qui sont menacées d'extinction, ça veut dire que les trois quarts de la planète sont touchés par de la pollution, ça veut dire que 85 % des zones humides de la planète ont disparu sous l'effet des activités humaines. Si on ne protège pas une partie des terres et des mers, qu'on continue à saper le vivant, les lieux qui permettent aujourd'hui à la nature y compris de nous nourrir, de nous aider à résister à une part du dérèglement climatique, on accélère le déclin de toutes les espèces vivantes.

DIMITRI PAVLENKO
Mais ça veut dire, j'insiste quand même…

CHRISTOPHE BÉCHU
Très concrètement, je serai à Montréal précisément demain pour la partie négociations qui va commencer à l'échelle des gouvernements, on est 112 pays, derrière la France et le Costa Rica, à défendre… c'est 30 % des terres et c'est 30 % des mers qui seraient sanctuarisées, dans lequel on limiterait les activités industrielles, dans lequel on limiterait les activités de pêche, dans lequel on limiterait les activités humaines qui ont des conséquences sur les écosystèmes, mais c'est un des enjeux des négociations, parce qu'on est 112 pays, il y en a 200 dans le monde, et on a 80 qui nous disent "attention, on a besoin de chaque espace de notre territoire pour se développer", ou d'autres qui nous disent "on veut bien faire prendre 30/30, mais si ce n'est pas 30 trop stricts, si ce n'est pas 30 trop durs", ou alors "on veut bien faire 30 % sur la terre, mais on ne veut pas faire 30 % sur la mer", ça va vraiment être le sujet des deux prochains jours.

DIMITRI PAVLENKO
Quelle partie de la terre faut-il sanctuariser, 30 % de la France par exemple ? On aura l'occasion d'en reparler sur Europe 1, merci d'être venu nous voir ce matin sur Europe 1.

CHRISTOPHE BÉCHU
Merci à vous.

DIMITRI PAVLENKO
Christophe BÉCHU, le ministre de la Transition écologique, était notre invité ce matin.


Source : Service d'information du Gouvernement, le 15 décembre 2022