Texte intégral
LAURENCE FERRARI
Bonjour Monsieur le Ministre.
STANISLAS GUERINI
Bonjour.
LAURENCE FERRARI
Bienvenue dans la Matinale de CNews. Cinquième journée de mobilisation contre la réforme des retraites. Ce sera le jeudi 16 février. Une sixième date, le 7 mars. Les Français vont descendre dans la rue régulièrement, massivement, est-ce que ça vous fait réfléchir ou pas ?
STANISLAS GUERINI
Il y a beaucoup de choses qui nous ont fait réfléchir depuis le début, on a l’impression que parfois, quand on regarde le débat public, que ce texte de loi, le projet de loi qu’on présente, qui est en discussion en ce moment au Parlement, il n’aurait pas bougé, il y a beaucoup, beaucoup de lignes qui ont bougé…
LAURENCE FERRARI
Il ne reste plus rien ?
STANISLAS GUERINI
Depuis le début, d’abord, avec un temps de démocratie sociale, qui est parfaitement légitime, qui a permis d’intégrer beaucoup de mesures, qui fait en sorte…
LAURENCE FERRARI
Lesquelles ?
STANISLAS GUERINI
Je le rappelle toujours, que sur 18 milliards d’économies, il y a 6 milliards d’euros qui seront consacrés à corriger des injustices, un point qui est très symbolique, la retraite minimum, elle était initialement, dans le projet qu’on avait conçu, réservée aux nouveaux entrants dans le système de retraite…
LAURENCE FERRARI
Donc c’était injuste ce que vous proposez !
STANISLAS GUERINI
Elle concernera tous les Français.
LAURENCE FERRARI
Non, je reprends mot par mot, c’était injuste ce que vous proposez ?
STANISLAS GUERINI
Pardon, mais dans notre système de retraite actuel, parfois, j’ai l’impression qu’on l’oublie, il y a plein d’injustices, il y en a…
LAURENCE FERRARI
Donc cette réforme est injuste…
STANISLAS GUERINI
Et le ministre de la Fonction publique, je peux vous le dire, il y a des injustices parfois entre le privé et le public, et on permettra, grâce à cette réforme de régler bon nombre de ces injustices. Mais on a l’impression parfois que le système actuel, il est absolument parfait, et donc que toutes les critiques, entre guillemets, porteraient sur le nouveau système qu’on propose. Notre réforme…
LAURENCE FERRARI
Mais pourquoi avoir proposé une reforme que vous jugez vous-même injuste ?
STANISLAS GUERINI
Mais non, je ne viens pas de vous dire ça…
LAURENCE FERRARI
Si, vous m’avez dit : c’était… on corrige des injustices.
STANISLAS GUERINI
Mais on corrige beaucoup d’injustices, un tiers, Laurence FERRARI, un tiers des économies qui vont être générées par l’effort, je le présente de façon très honnête aux Français, par l’effort qu’on demande, elles vont permettre de corriger des injustices justement. Et donc, le système de retraite après la réforme, il sera moins injuste que le système de retraite actuel…
LAURENCE FERRARI
Alors, deux ans pour tous…
STANISLAS GUERINI
Voilà, c’est extrêmement clair.
LAURENCE FERRARI
Les Français trouvent ça injuste, deux ans de plus, tous les Français trouvent ça, l’immense majorité des Français trouve ça injuste.
STANISLAS GUERINI
Ce qui serait injuste, fondamentalement, c’est d’abandonner notre système par répartition, ça, c’est injuste, pourquoi…
LAURENCE FERRARI
Ça, c‘est un dogme, vous ne bougez pas là-dessus…
STANISLAS GUERINI
Mais ce n‘est pas un dogme, c’est une conviction, très solide, quand on bosse, quand on n’a que le fruit de son travail pour assurer ses vieux jours, eh bien, ça repose aujourd’hui sur le système par répartition. Et donc, un système par répartition qu’on laisse partir dans le décor, c’est-à-dire avec des milliards et des milliards d’euros de déséquilibre, eh bien, ça ne s’appelle plus un système par répartition, et ça, ça serait ce qui serait le plus profondément injuste…
LAURENCE FERRARI
Il y a aussi la possibilité d’une petite dose de capitalisation, David LISNARD, le maire de Cannes, qui était hier à votre place, disait : on peut rajouter une petite dose, là aussi…
STANISLAS GUERINI
C’est un très juste débat…
LAURENCE FERRARI
Et ça existe déjà dans certains régimes…
STANISLAS GUERINI
Et c’est très légitime, voyez, moi, je pense que ce sont des bons débats autour du système des retraites. Ça n’est pas le choix que nous faisons, et c'est pour ça que c'est intéressant d'avoir aussi un débat parlementaire, parce que, on voit les projets alternatifs qui sont proposés, celui-là, sortir d'un système ou sortir progressivement d'un système par répartition…
LAURENCE FERRARI
Rajouter une couche…
STANISLAS GUERINI
Pour aller vers la capitalisation, c'est un choix que David LISNARD peut présenter légitimement aux Français…
LAURENCE FERRARI
Et qui existe déjà dans certains régimes, on est d’accord…
STANISLAS GUERINI
Ça n’est pas notre choix, pourquoi, parce que moi, je ne veux pas…
LAURENCE FERRARI
Vous m’entendez bien, Monsieur GUERINI, ça existe déjà, et ça fonctionne très bien.
STANISLAS GUERINI
Ça existe déjà, mais moi, je ne veux pas, et je l'assume, et c'est ça la transparence du débat démocratique, que nos retraites reposent sur les épargnants d'autres pays du monde, qu'elles soient soumises aux aléas des marchés financiers, moi, je défends un système par répartition, c'est-à-dire dans lequel les actifs d'aujourd'hui paient les retraites des retraités d'aujourd'hui. Et ce système-là, il est juste, c'est pour ça qu'on le défend, je ne le cache pas, moi, je pense qu'il faut être extrêmement lucide et transparent vis-à-vis des Français, en demandant un effort collectif de travailler plus longtemps. Je rappelle que, après la réforme, on continuera d'avoir un système de retraite généreux, peut-être le plus généreux d'Europe, dans un modèle social français qu’il faut défendre et qui est un modèle généreux, et dans lequel la France sera encore un des pays dans lequel on partira le plus jeune à la retraite.
LAURENCE FERRARI
Alors, dans la Fonction publique, la baisse de la mobilisation s’est faire ressentir, il y avait 11,4 % de grévistes contre 19 et 28 le 19 janvier, quelle conclusion vous en tirez ?
STANISLAS GUERINI
Moi, je n'en tire aucune satisfaction particulière…
LAURENCE FERRARI
Pas de triomphalisme j’imagine ?
STANISLAS GUERINI
Evidemment, évidemment, moi, je reste extrêmement attentif, je reste en contact très étroit avec les organisations syndicales, qui représentent les agents de la Fonction publique, j'essaie de convaincre. Et moi, on m'en a même fait le reproche, je ne suis pas au front pour aller voir les agents expliquer ce qu'il y a dans cette réforme, et il y a beaucoup, beaucoup de points dans cette réforme qui vont nous permettre d'améliorer le système pour les fonctionnaires. Vous voyez…
LAURENCE FERRARI
Ah oui, expliquez-moi…
STANISLAS GUERINI
Eh bien, je vais vous en donner un, avant, il n’y avait pas de système de retraite progressive dans la Fonction publique, on ne pouvait pas aménager les carrières pour que, à la fin de sa carrière, on puisse se mettre à temps partiel et garder sa rémunération, ça, c'est un dispositif qui va être intéressant. Les syndicats reconnaissent cela, ça n'enlève en rien notre désaccord sur la question de l'âge, mais on fait avancer le système, vous voyez, je vais vous donner un autre exemple dont je parle moins souvent, il y a beaucoup de contractuels dans la Fonction publique, des gens qui sont pas fonctionnaires, titulaires mais qui sont contractuels, c’est 2 fonctionnaires sur 10 aujourd'hui, eh bien pour eux, parfois quand ils faisaient le même métier que des fonctionnaires qui ont une couverture, parce qu'ils sont catégorie active, eh bien, ils n’avaient rien du tout, eh bien, leurs années maintenant en tant que contractuels, elles vont compter et elles leur permettront de partir à la retraite un peu plus tôt, tout ça, ce sont des améliorations réelles, alors, on n’en parle pas beaucoup dans le débat public, mais je crois qu’on a…
LAURENCE FERRARI
Vous l’avez fait…
STANISLAS GUERINI
A intérêt aussi pour les fonctionnaires à passer cette réforme.
LAURENCE FERRARI
Alors, prenons un professeur, professeur des écoles qui part en moyenne en ce moment en retraite à 62 ans, corrigez-moi si je me trompe…
STANISLAS GUERINI
Oui, c’est ça…
LAURENCE FERRARI
Là, il va se rajouter 2 ans, on est d'accord, il va partir à 64 ans, ce même professeur, vous pensez qu'à 64 ans, on a la même énergie pour tenir une classe de 30 gamins ?
STANISLAS GUERINI
C'est la bonne question…
LAURENCE FERRARI
Voire 33 ?
STANISLAS GUERINI
Je réponds aux deux points que vous soulevez, d’abord, de façon très claire, personne n'aurait compris qu’on demande un effort à tous les Français, aux salariés du privé, qu’on ne demande pas aux fonctionnaires de notre pays, donc de façon, là aussi extrêmement claire, oui, cet effort-là, il est porté de façon symétrique par les agents du public, par les salariés du privé. Après, la bonne question, c'est celle que vous posez, c'est, est-ce que dans la Fonction publique, on est capable de mieux aménager les carrières, j'en ai parlé pour pouvoir par exemple se mettre à temps partiel, mais pourquoi pas changer de métier aussi, et là aussi, le dispositif…
LAURENCE FERRARI
Qu’est-ce que peut faire un prof en fin de carrière alors, par exemple ?
STANISLAS GUERINI
Il peut faire plein de choses…
LAURENCE FERRARI
Quoi ?
STANISLAS GUERINI
Il peut faire plein de choses, quand on a travaillé devant une classe, on peut peut-être faire d’autres choses, on a développé des compétences de lien, on peut travailler dans de la formation, par exemple, on a des besoins immenses pour pouvoir former dans la Fonction publique à des nouveaux métiers, donc, moi je ne crois pas à des carrières… et c'est comme ça que la Fonction publique a été beaucoup pensée, qui soient absolument cloisonnées, ou quand on entre dans un métier, on n'a aucune perspective de pouvoir en changer, je crois, au contraire, et c'est tout l'enjeu des chantiers que j'ouvre pour l'année 2023, avec les organisations syndicales, pour développer des parcours de carrière beaucoup plus divers, beaucoup plus riches…
LAURENCE FERRARI
Et qui rendent attractifs les métiers de la Fonction publique…
STANISLAS GUERINI
Mais bien entendu…
LAURENCE FERRARI
Vous avez énormément de mal à recruter, ce qui quand même assez étonnant, 50.000 fonctionnaires à recruter, ça n'attire plus ces carrières-là et les 64 ans, ça ne va pas les inciter…
STANISLAS GUERINI
D’abord, là aussi, pas de langue de bois, on a du mal à recruter, comme les employeurs du privé ont du mal à recruter.
LAURENCE FERRARI
50.000 fonctionnaires, c’est…
STANISLAS GUERINI
On a un enjeu d'attractivité très particulier sur la Fonction publique, pourquoi, parce qu’il y a des enjeux de rémunération, de perspectives d'évolution de rémunération, et c'est peut-être sur ces sujets-là qu’on n'a pas suffisamment travaillé, voyez, les questions que vous posez sur les professeurs, elles sont aussi liées à cette question-là, la rémunération des professeurs…
LAURENCE FERRARI
Evidemment, c’est pour ça que vous avez du mal à les recruter…
STANISLAS GUERINI
Elle évolue peu pendant de nombreuses années, avant, à la fin de leur carrière, d'avoir un peu de rattrapage, eh bien, tout ça, c'est des choses qu'il faut remettre à plat, et on le fait avec mon collègue ministre de l'Education, Pap NDIAYE. Et je veux réfléchir comme ça pour l'ensemble des fonctionnaires, et puis, il y a aussi des questions de métiers, d'organisation du travail, de qualité de vie au travail, de valorisation de la formation, on n'a pas assez parlé de compétences, métiers, parcours professionnels dans la Fonction publique, je crois que c'est aussi le coeur des enjeux qu’on aura à appréhender. Cette question, elle est très liée à la question des retraites. Mais voyez, il y a beaucoup de sujets sur lesquels on avait des grands discours sur la mobilité dans la Fonction publique, mais on avait l'impression que tout était fait pour la désinciter. Changer de métier, c’était parfois pénalisant, ça l’était sur les retraites, un policier qui changeait de métier, il perdait le bénéfice des années passées en tant que policier…
LAURENCE FERRARI
Là, il peut…
STANISLAS GUERINI
Eh bien, là, on va améliorer aussi le système, voyez, tout ça, ce sont des choses très concrètes, parfois un peu techniques, parce qu'on va dans l'intimité des carrières, mais je pense qu'elles sont absolument essentielles, parce que si on veut des services publics performants, on a besoin d'agents publics qui font des métiers attractifs…
LAURENCE FERRARI
Et qui soient motivés et passionnés et qu’il y ait des perspectives…
STANISLAS GUERINI
Motivés, et on doit leur répondre sur la fiche de paie, mais aussi à côté de la fiche de paie.
LAURENCE FERRARI
J’en reviens aux mobilisations, on voit qu'elles se multiplient, qu’elles grossissent ; est-ce que ; à force de ne pas être entendu ; il n'y a pas un risque de durcissement du mouvement ; de radicalisation du mouvement ?
STANISLAS GUERINI
Moi, d'abord, je constate que ces mobilisations, elles se passent bien, je fais toujours le distinguo entre des Français qui viennent manifester, encadrés par des organisations syndicales qui font bien le job, avec des policiers qu'il faut soutenir chaque jour, parce que c'est justement un métier difficile que de maintenir l'ordre, et puis, il y a quelques casseurs à côté, mais pour l'instant, les manifestations, elles se passent bien, et ça, je pense que ça a beaucoup de valeur dans notre démocratie. C’est un actif collectif pour tout le monde. Donc il faut que ça continue à se passer comme ça, je pense qu’on est capable, y compris d'avoir des désaccords profonds, c'est le cas, il ne faut pas se le cacher, avec les organisations syndicales, mais de pouvoir débattre ; on a aussi besoin d'avoir un débat à l'Assemblée nationale et au Sénat, au Parlement, parce que c’est aussi la démocratie, le temps que nous vivons, c’est un temps parlementaire…
LAURENCE FERRARI
On y vient dans un instant, je voudrais juste revenir aux éléments violents que vous évoquez, il y a un manifestant par exemple qui, le 19 janvier, a lancé des projectiles très importants sur les policiers. Cet homme que l'on voit là, à l'image, en rouge, qui a été ensuite interpellé par les policiers, devait être jugé hier, finalement, pour des raisons juridiques, son procès est repoussé à octobre 2023. Que comprennent les Français ?
STANISLAS GUERINI
Je ne connais pas ce cas-là, mais d’abord…
LAURENCE FERRARI
Non mais la justice n’est-elle pas, dans ce cas-là, trop lente ?
STANISLAS GUERINI
Je récuse le terme de manifestant, ça n’est pas un manifestant.
LAURENCE FERRARI
Alors, vous avez raison, je retire le mot manifestant, un casseur…
STANISLAS GUERINI
C’est un casseur, voire même parfois, des assassins…
LAURENCE FERRARI
D’accord, pourquoi est-ce qu’il n’est pas actuellement devant la justice ?
STANISLAS GUERINI
Il faut le dire. Ces gens-là, et quand on va voir les policiers, moi, je le fais, je l’ai fait aux côtés du ministre de l'Intérieur, Gérald DARMANIN, ils vous disent très bien qu'il y a des gens qui sont en face d’eux pour tuer du flic, et donc ils doivent être non seulement interpellés…
LAURENCE FERRARI
D’accord, pourquoi il n’est pas jugé, là ?
STANISLAS GUERINI
Et jugés…
LAURENCE FERRARI
Pourquoi il n’est pas jugé ?
STANISLAS GUERINI
Avec la plus grande sévérité…
LAURENCE FERRARI
Il n’est pas jugé avant octobre 2023, il va se passer combien de temps, vous croyez…
STANISLAS GUERINI
Je suis incapable, évidemment, de commenter un cas particulier que je ne connais pas.
LAURENCE FERRARI
Non mais est-ce que vous trouvez que c'est normal ou pas ?
STANISLAS GUERINI
Mais, ce que je sais, c'est que bon nombre de manifestants, ou plutôt des casseurs, comme je le disais à l’instant, sont interpelés, jugés rapidement, c'est de la comparution immédiate, et je pense que c’est bon que la justice puisse donner des retours. Après, il y a parfois des faits de procédures qui peuvent éloigner un peu le temps de la justice, mais nous devons avoir…
LAURENCE FERRARI
Mais qui provoquent de l’incompréhension chez les Français.
STANISLAS GUERINI
… je le dis de façon très claire, la plus grande sévérité et la plus grande fermeté.
LAURENCE FERRARI
Les Français ne comprennent pas que ce type d'acte ne soit pas sanctionné immédiatement.
STANISLAS GUERINI
Mais bien sûr, et c'est pour ça qu'on se donne des moyens pour renforcer la justice, pour réduire les délais. On le fait mais comme aucun gouvernement ne l'a fait avant. Vous connaissez très bien l'augmentation des moyens du ministère de la Justice, ce qu'a obtenu Eric DUPOND-MORETTI, pour justement raccourcir les délais. Vous savez, moi je m'intéresse…
LAURENCE FERRARI
Les Français ne le perçoivent pas, ça Monsieur le Ministre. Et je sais que vous n’êtes pas le ministre de la Justice, évidemment, mais…
STANISLAS GUERINI
Mais vous avez raison, je suis le ministre des Services publics, donc je me sens extrêmement concerné par ces questions-là, et en l'occurrence, quand on écoute les Français parler de la justice, leur première attente c'est celle des délais. Leur première attente c'est celle des délais, et donc…
LAURENCE FERRARI
Eh bien là, vous en avez un cas…
STANISLAS GUERINI
… c'est la raison pour laquelle le garde des Sceaux porte à la fois des mesures pour pouvoir recruter des magistrats, des greffiers, qui font le quotidien de la justice, qui permettent d'accélérer ces délais, mais aussi pour simplifier nos procédures, pour pouvoir rendre justice plus rapidement. Il y a des premiers résultats, évidemment, mais je connais les attentes des Français, elles sont immenses. Ils ont raison, on a besoin d'une justice qui juge vite, parce que c'est aussi un gage de confiance dans notre démocratie.
LAURENCE FERRARI
Alors, vous évoquez le Parlement, on y vient, 18 000 amendements déposés par la NUPES, vous dénoncez de l'obstruction parlementaire, mais pourquoi avoir choisi un délai si court pour ces débats qui sont essentiels ? On est sur un dispositif très restreint, 50 jours au total entre le Parlement, enfin, l'Assemblée et le Sénat. Vous provoquez en fait la réaction.
STANISLAS GUERINI
Non, d'abord on aura…
LAURENCE FERRARI
L’obstruction, pardon.
STANISLAS GUERINI
… un temps de débats qui sera plus important que celui qui a été consacré aux réformes des retraites précédentes. Voilà, ça aussi c'est une vérité assez simple qu’il faut pouvoir rappeler. Et puis après, pardonnez-moi, mais je trouve ça un peu contradictoire parfois, d'entendre parler de déni démocratique, de temps de débats trop courts, et de devoir traiter 20 000 amendements, qui parfois à la virgule près présentent exactement la même idée. Il faut choisir ses combats. Moi je souhaite qu'on ait un débat, et je pense que ça permet de voir aussi la vérité des prix, si je puis dire, c'est-à-dire quels sont les projets alternatifs. Il y en a certains sur lesquels on n'a rien compris. Moi je ne comprends pas ce que propose l'extrême droite, et madame LE PEN, dans ce débat des retraites, elle a changé 10 fois d'avis sur ces derniers mois. On voit bien quel est le projet…
LAURENCE FERRARI
Vous aussi vous avez changé d’avis, ce n'est pas la même réforme qu’en 2019, on est tout à fait d’accord.
STANISLAS GUERINI
Ce n'est pas la même réforme qu’en 2019…
LAURENCE FERRARI
On peut changer d’avis.
STANISLAS GUERINI
En 4 ans de temps la situation a pu changer…
LAURENCE FERRARI
Exactement.
STANISLAS GUERINI
…c'est un petit peu plus cocasse d'avoir un changement sur 6 mois de temps aussi radical que celui de madame LE PEN. Mais passons là-dessus. Ce débat démocratique il est utile, parce qu'il fait émerger aussi les projets alternatifs. On peut taxer chaque jour davantage les Français, c'est le projet de la NUPES…
LAURENCE FERRARI
Les riches, ce que demande la NUPES, les super riches.
STANISLAS GUERINI
C’est exactement le projet politique de la NUPES, mais là aussi tout ça c'est respectable, il faut poser les projets sur la table. Nous, ce que nous voulons pour être très clair Laurence FERRARI, c'est avoir un débat, le plus clair possible, idées contre idées, projet politique entre projet politique, et voter ce texte. Moi je…
LAURENCE FERRARI
Alors, les LR vont-ils voter le texte ? Parce que c’est la clé. Est-ce que vous êtes confiant ?
STANISLAS GUERINI
Je souhaite qu’il y ait un vote à l'Assemblée nationale et au Sénat, évidemment, parce que ça a de la valeur dans notre démocratie.
LAURENCE FERRARI
Surtout, pas de 49.3, on est d'accord ?
STANISLAS GUERINI
Mais, nous avons toujours été clairs là-dessus…
LAURENCE FERRARI
Tout sauf le 49.3.
STANISLAS GUERINI
Notre intention n'est pas de faire voter ce texte avec un 49.3. Donc nous voulons construire et bâtir une majorité autour de ce texte, c'est vrai, majorité…
LAURENCE FERRARI
Ils sont divisés les LR, monsieur GUERINI, vous le savez.
STANISLAS GUERINI
… plus probablement se construira avec les Républicains, parce que…
LAURENCE FERRARI
D’accord, mais il y en a une vingtaine qui ne votera pas ce texte.
STANISLAS GUERINI
Je n’en suis pas sûr.
LAURENCE FERRARI
Ça suffira les 40 restants ?
STANISLAS GUERINI
Je pense qu’il faut essayer de convaincre, bâtir cette majorité dont je parlais à l'instant. Ce serait difficilement compréhensible, très sincèrement, pour les Français, que Les Républicains ne votent pas un texte qui correspond à peu près exactement maintenant au projet qu'ils ont porté, y compris dans les dernières élections, il n’y a pas 2 ans ou 3 ans, ce n'était pas en 2019, c'était il y a moins d'un an. Quand on a un projet politique, on le présente devant les Français et ensuite on prend ses responsabilités. Moi je crois que les LR ont au fond une cohérence à faire valoir aussi, ce projet de loi nous voulons le faire voter sans 49.3, et je pense que nous avons les moyens…
LAURENCE FERRARI
Ça serait un échec le 49.3 ? Dites-moi monsieur GUERINI. Ça serait un échec, on est d'accord.
STANISLAS GUERINI
Mais moi je ne parle pas d’échec, je pense que cette réforme elle est indispensable pour le pays…
LAURENCE FERRARI
Non mais ok. Le 49.3, ça serait un échec du débat ?
STANISLAS GUERINI
Je ne souhaite pas que cette réforme soit votée avec un 49.3, parce que je crois que nous pouvons et nous avons les moyens de bâtir une majorité, et que ça donnera une légitimité plus forte encore au projet de loi que nous construisons.
LAURENCE FERRARI
Merci beaucoup d'être venu ce matin à Monsieur le Ministre, dans la matinale de Cnews.
STANISLAS GUERINI
Merci à vous.
Source : Service d’information du Gouvernement, le 10 février 2023