Conclusions de la réunion extraordinaire du Conseil européen sur le conflit en Ukraine, les questions économiques, les migrations, les relations entre la Serbie et le Kosovo et le tremblement de terre en Turquie et en Syrie, le 9 février 2023.

Prononcé le

Texte intégral

Le Conseil européen a procédé à un échange de vues avec le président ukrainien sur la guerre d'agression menée par la Russie contre l'Ukraine et sur le soutien de l'Union européenne à l'Ukraine et à sa population.

I. UKRAINE

1. Le Conseil européen condamne à nouveau résolument la guerre d'agression menée par la Russie contre l'Ukraine, qui constitue une violation manifeste de la Charte des Nations unies. La guerre brutale menée par la Russie, qui dure depuis près d'un an déjà, inflige d'immenses souffrances et destructions à l'Ukraine et à sa population. La Russie doit immédiatement mettre un terme à cette guerre atroce. L'Union européenne se tiendra aux côtés de l'Ukraine pour lui apporter un soutien sans faille aussi longtemps qu'il le faudra.

2. Le soutien de l'Union européenne à l'indépendance, à la souveraineté et à l'intégrité territoriale de l'Ukraine à l'intérieur de ses frontières internationalement reconnues, ainsi qu'à son droit naturel de légitime défense contre l'agression menée par la Russie, reste inébranlable. L'Union européenne maintiendra la pression collective exercée sur la Russie pour qu'elle mette un terme à sa guerre d'agression et qu'elle retire ses troupes et ses équipements militaires d'Ukraine, et elle cherchera à accentuer encore cette pression, en concertation avec les partenaires internationaux. Afin d'accroître encore le coût pour la Russie de sa guerre d'agression, un plafonnement des prix des produits pétroliers a été adopté. L'Union européenne se tient prête à continuer de renforcer ses mesures restrictives en étroite coordination et coopération avec les partenaires mondiaux. Les mesures anticontournement seront renforcées.

3. Le Conseil européen réaffirme qu'il est fermement attaché à l'établissement des responsabilités. Les frappes meurtrières que la Russie continue de mener sans discrimination contre des civils et des infrastructures civiles constituent des crimes internationaux et doivent cesser. Le droit international humanitaire, y compris en ce qui concerne le traitement des prisonniers de guerre, doit être respecté. Il faut permettre immédiatement le retour en toute sécurité des Ukrainiens, en particulier des enfants, qui ont été transférés de force en Russie.

4. L'Union européenne est fermement résolue à ce que toutes les personnes ayant ordonné ou commis des crimes de guerre et d'autres crimes parmi les plus graves en lien avec la guerre d'agression menée par la Russie contre l'Ukraine, ainsi que les personnes s'en étant rendues complices, aient à répondre de leurs actes. Le Conseil européen soutient pleinement les efforts déployés par l'Ukraine et la communauté internationale à cet égard, y compris l'établissement d'un mécanisme approprié pour les poursuites relatives au crime d'agression, qui concerne l'ensemble de la communauté internationale. Il souligne que l'Union européenne appuie les enquêtes menées par le procureur de la Cour pénale internationale ainsi que la mise en place, à La Haye, d'un centre international chargé des poursuites pour le crime d'agression contre l'Ukraine. Ce centre sera lié à l'équipe commune d'enquête existante, soutenue par Eurojust.

5. Le Conseil européen réaffirme que l'Union européenne se tient prête à soutenir l'initiative de l'Ukraine en faveur d'une paix juste fondée sur le respect de la souveraineté et de l'intégrité territoriale de l'Ukraine. À ce jour, la Russie n'a fait preuve d'aucune réelle volonté concernant une paix juste et durable. Le Conseil européen exprime son soutien à la formule de paix présentée par le président Zelensky et réaffirme que l'Union européenne est déterminée à travailler activement avec l'Ukraine sur le plan de paix en dix points. L'Union européenne soutient l'idée d'un sommet consacré à la formule de paix afin d'en lancer la mise en oeuvre. L'Union européenne coopérera avec l'Ukraine pour assurer la participation internationale la plus large possible.

6. Le Conseil européen prend acte des efforts considérables que l'Ukraine a déployés ces derniers mois pour atteindre les objectifs qui sous-tendent son statut de pays candidat à l'adhésion à l'UE. Il salue les efforts de réforme menés par l'Ukraine en ces temps difficiles et l'encourage à poursuivre sur cette voie et à respecter les conditions énoncées dans l'avis de la Commission sur sa demande d'adhésion afin de progresser vers une future adhésion à l'UE. L'Union européenne prend acte de la détermination de l'Ukraine à satisfaire aux exigences requises afin d'entamer les négociations d'adhésion le plus rapidement possible. L'Union européenne entend travailler en étroite collaboration avec l'Ukraine et la soutenir dans ses efforts visant à satisfaire pleinement à toutes les conditions. Le Conseil européen réaffirme que l'avenir de l'Ukraine se trouve au sein de l'Union européenne.

7. Le Conseil européen réaffirme les engagements pris dans le cadre de la déclaration conjointe publiée à l'issue du sommet UE-Ukraine. L'Union européenne continuera de fournir un soutien politique, économique, militaire, financier et humanitaire fort à l'Ukraine et à sa population aussi longtemps qu'il le faudra. L'ensemble de l'aide apportée à l'Ukraine et à sa population par l'Union européenne et ses Etats membres s'élève à ce jour à au moins 67 milliards d'euros. L'Union européenne et l'Ukraine exploiteront pleinement le potentiel de l'accord d'association, y compris la zone de libre-échange approfondi et complet, de manière à mettre en place les conditions d'un renforcement des relations économiques et commerciales en vue d'une intégration de l'Ukraine au sein du marché unique de l'UE.

8. L'Union européenne a approuvé une septième tranche de soutien militaire à l'Ukraine, d'un montant de 500 millions d'euros, au titre de la facilité européenne pour la paix, et a lancé la mission d'assistance militaire de l'UE en vue de former un effectif initial de 30 000 soldats en 2023. Le montant total du soutien militaire apporté par l'Union européenne et ses Etats membres est ainsi porté à près de 12 milliards d'euros. Compte tenu de la situation actuelle, le Conseil européen se félicite de la mise à disposition rapide d'équipements militaires à l'Ukraine par les Etats membres.

9. L'Union européenne reste déterminée à soutenir la stabilité macrofinancière de l'Ukraine. Le Conseil européen accueille avec satisfaction les travaux de la Commission et de la Banque européenne d'investissement, de la Banque européenne pour la reconstruction et le développement et de la Banque mondiale sur des projets visant à étendre rapidement l'utilisation des corridors de solidarité pour accroître les options commerciales dans l'ensemble des secteurs et les possibilités d'exportation depuis l'Ukraine.

10. L'Union européenne reste résolue à soutenir, avec ses partenaires, la réparation, le rétablissement et la reconstruction de l'Ukraine. Dans ce contexte, le Conseil européen se félicite de la mise en service de la plateforme de coordination des donateurs. L'Union européenne, avec ses partenaires, intensifie ses travaux visant à utiliser les avoirs russes gelés et immobilisés pour soutenir la reconstruction de l'Ukraine et à des fins de réparation, conformément au droit de l'UE et au droit international.

11. Le Conseil européen souligne en outre l'importance du soutien et de la réhabilitation psychologiques et psychosociaux, ainsi que de la réinsertion des anciens combattants dans la vie sociale active. L'Union européenne et ses Etats membres renforceront l'appui aux programmes en la matière, y compris par une expertise spécialisée. La fourniture d'une assistance au déminage sera également amplifiée.

12. L'Union européenne réaffirme sa détermination à renforcer son soutien aux personnes déplacées, tant à l'intérieur de l'Ukraine qu'au sein de l'Union européenne, y compris au moyen d'une assistance financière appropriée et flexible aux Etats membres qui supportent la plus grande partie des dépenses consacrées aux réfugiés en matière de frais médicaux, de frais d'éducation et de frais de subsistance.

II. ECONOMIE

13. Face à la nouvelle réalité géopolitique, l'Union européenne agira avec détermination pour assurer sa compétitivité et sa prospérité à long terme ainsi que son rôle sur la scène mondiale. L'Union européenne renforcera sa souveraineté stratégique et adaptera sa base économique, industrielle et technologique aux transitions écologique et numérique. Elle approfondira le marché unique et assurera des conditions de concurrence équitables tant à l'intérieur de ses frontières qu'à l'échelle mondiale.

14. Il est essentiel que l'Union européenne améliore sa compétitivité et sa productivité à long terme. Une stratégie globale devrait permettre d'exploiter davantage le plein potentiel du marché unique, qui soutient la prospérité de l'Europe depuis sa création il y a 30 ans. Rappelant ses conclusions de décembre 2022, notamment l'invitation qu'il a adressée à la Commission afin qu'elle présente une stratégie au niveau de l'UE visant à stimuler la compétitivité et la productivité, le Conseil européen reviendra sur ces questions lors de sa prochaine réunion.

15. En s'appuyant sur la communication de la Commission relative à un plan industriel du pacte vert pour l'ère de la neutralité carbone, et compte tenu de son analyse approfondie à venir, il faut d'urgence faire avancer les travaux sur les volets d'action suivants :

a) politique en matière d'aides d'Etat : il est nécessaire de simplifier et d'accélérer les procédures ainsi que d'en accroître la prévisibilité, et de faire en sorte qu'une aide ciblée, temporaire et proportionnée puisse être déployée rapidement, y compris au moyen de crédits d'impôt, dans les secteurs qui revêtent une importance stratégique pour la transition écologique et sur lesquels les subventions étrangères ou les prix élevés de l'énergie ont une incidence négative. Une attention toute particulière devrait également être accordée à la préservation de la compétitivité des PME. Il faut maintenir l'intégrité du marché unique ainsi que des conditions de concurrence équitables en son sein. Le Conseil européen demande en outre que les instruments de l'UE, tels que les projets importants d'intérêt européen commun (PIIEC), soient mis en oeuvre de manière efficace en augmentant la transparence et en rationalisant les procédures, notamment en accélérant les phases de conception et d'évaluation. Le Conseil européen invite la Commission à rendre régulièrement compte au Conseil de l'incidence de cette politique en matière d'aides d'Etat sur le marché unique ainsi que sur la compétitivité mondiale de l'UE ;

b) financement au niveau de l'UE : dans le même temps, afin de faciliter la transition écologique dans l'ensemble de l'Union et d'éviter la fragmentation du marché unique, un accès équitable aux moyens financiers est indispensable pour que la réponse apportée par l'UE soit pleinement efficace. À cette fin, il convient de déployer de manière plus flexible les fonds existants de l'UE et d'étudier des possibilités permettant de faciliter l'accès au financement. Le Conseil européen invite la Commission et le Conseil à veiller à ce que les fonds disponibles et les instruments financiers existants soient pleinement mobilisés, de manière à fournir en temps utile un soutien ciblé dans des secteurs stratégiques sans que soient affectés les objectifs de la politique de cohésion. Il convient par ailleurs d'exploiter pleinement le potentiel de la Banque européenne d'investissement ;

c) environnement réglementaire : il est essentiel que les conditions-cadres applicables aux investissements dans l'Union européenne soient simples, prévisibles et claires. Il convient de simplifier et d'accélérer les procédures administratives et les procédures d'octroi de permis, notamment afin d'assurer des capacités de production des produits essentiels pour atteindre les objectifs de neutralité climatique de l'UE, en tenant compte de l'ensemble de la chaîne d'approvisionnement et de valeur par-delà les frontières. L'accès aux matières premières critiques concernées devrait être garanti, notamment en diversifiant les sources d'approvisionnement et en recyclant les matières premières afin de promouvoir les principes de l'économie circulaire. La réforme à venir de l'organisation du marché de l'électricité devrait favoriser la transition vers un système énergétique décarboné et efficace au coût le plus bas possible, garantir la sécurité de l'approvisionnement à tout moment et renforcer la compétitivité de l'UE. Il convient de moderniser les règles en matière de marchés publics pour contribuer à encourager une industrie plus verte et de promouvoir les normes européennes pour faciliter un déploiement rapide des technologies clés ;

d) compétences : il convient de mener une action plus audacieuse et plus ambitieuse pour continuer à développer les compétences nécessaires aux transitions écologique et numérique grâce à l'éducation, à la formation ainsi qu'au perfectionnement et à la reconversion professionnels, afin de relever les défis liés aux pénuries de main-d'oeuvre et à la transformation des emplois, y compris dans le contexte des défis démographiques ;

e) investissement : des investissements tant privés que publics sont nécessaires pour combler les déficits d'investissement qui nuisent à la croissance. Le Conseil européen prend acte de l'intention de la Commission de proposer avant l'été 2023 un Fonds de souveraineté européen destiné à soutenir l'investissement dans des secteurs stratégiques.

16. L'union des marchés des capitaux est déterminante pour que l'Europe reste un continent de production et d'innovation. Le Conseil européen invite les colégislateurs à accélérer la mise en oeuvre du plan d'action pour l'union des marchés des capitaux en faisant avancer et en menant à bien les travaux sur les propositions législatives dans ce domaine.

17. La poursuite d'un programme commercial ambitieux, solide, ouvert et durable ainsi que le soutien à l'OMC et à un ordre international fondé sur des règles seront essentiels pour renforcer la souveraineté et la prospérité de l'Europe. À cette fin, des accords de libre-échange et d'investissement équitables et transparents devraient garantir des conditions de concurrence véritablement équitables, rendre possible le développement de chaînes d'approvisionnement résilientes et fiables et permettre à l'Union européenne d'accéder à de nouveaux marchés. Les efforts visant à diversifier les chaînes d'approvisionnement devraient être intensifiés, notamment pour ce qui est des matières premières critiques. L'Union européenne doit également préserver ses intérêts lorsqu'elle est confrontée à des pratiques déloyales, en recourant aux instruments de défense commerciale.

18. Eu égard aux présentes conclusions, le Conseil européen invite le Conseil et la Commission à faire rapidement avancer les travaux sur le réexamen de la gouvernance économique.

III. MIGRATIONS

19. Le Conseil européen a débattu de la situation migratoire, qui est un défi européen exigeant une réponse européenne. Le Conseil européen a évalué la mise en oeuvre de ses conclusions antérieures visant à mettre en place une approche globale en matière de migrations qui associe une action extérieure accrue, un contrôle plus efficace des frontières extérieures de l'UE et des aspects intérieurs, dans le respect du droit international, des principes et valeurs de l'UE et de la protection des droits fondamentaux. S'appuyant sur la récente lettre de la Commission, le Conseil européen appelle au renforcement et à l'accélération des mesures opérationnelles immédiates. Le Conseil européen demande au Conseil et à la Commission de suivre de près et d'assurer la mise en oeuvre de ses conclusions et reviendra sur cette question régulièrement.

* Renforcement de l'action extérieure

20. L'Union européenne renforcera son action afin de prévenir les départs irréguliers et d'éviter les pertes de vies humaines, de réduire la pression sur les frontières de l'UE et sur les capacités d'accueil, de lutter contre les passeurs et d'augmenter le nombre de retours. Cela se fera en intensifiant la coopération avec les pays d'origine et de transit au moyen de partenariats mutuellement bénéfiques. Toutes les routes migratoires devraient être couvertes, notamment avec des ressources adéquates. Les plans d'action existants pour les routes des Balkans occidentaux et de la Méditerranée centrale devraient être mis en oeuvre. Des plans d'action pour les routes de l'Atlantique, de la Méditerranée occidentale et de la Méditerranée orientale devraient être présentés par la Commission à titre de priorité, afin d'atténuer rapidement la pression exercée sur les Etats membres les plus touchés et de prévenir efficacement les arrivées irrégulières. Le dialogue de l'UE et des Etats membres avec les pays d'origine et de transit sera intensifié de manière coordonnée, y compris dans le cadre de contacts à haut niveau, dans le but de renforcer leurs capacités de gestion des frontières, de prévenir les flux irréguliers, de casser le modèle économique des passeurs, y compris par des campagnes d'information stratégiques, et d'augmenter les retours. À cette fin, il convient de faire le meilleur usage possible des consultations menées dans les enceintes de coopération avec les pays tiers, ainsi que des financements au titre de l'IVCDCI-Europe dans le monde et d'autres instruments pertinents. L'Union européenne continuera de soutenir ses partenaires pour s'attaquer aux causes profondes de la migration irrégulière, ainsi qu'en ce qui concerne la migration sûre, régulière et ordonnée. La coopération avec les organisations internationales, notamment l'OIM et le HCR, doit être encore renforcée.

21. L'alignement des pays voisins en matière de politique des visas revêt une importance urgente et cruciale pour la gestion des migrations ainsi que, le cas échéant, pour le bon fonctionnement général et la viabilité des régimes d'exemption de visa. À cet égard, le Conseil européen souligne qu'il convient de renforcer le suivi des politiques des pays voisins en matière de visas. Le Conseil européen salue les progrès accomplis par les partenaires des Balkans occidentaux en ce qui concerne l'alignement par rapport à la politique de l'UE en matière de visas et les invite à prendre rapidement de nouvelles mesures. L'Union européenne est prête à approfondir la coopération avec la région en matière de migrations, d'asile, de gestion des frontières et de retours, en utilisant au maximum les cadres existants et les canaux disponibles.

* Renforcement de la coopération en matière de retour et de réadmission

22. Le Conseil européen rappelle l'importance que revêtent une politique de l'UE unifiée, globale et efficace en matière de retour et de réadmission ainsi qu'une approche intégrée de la réintégration. Il convient de prendre rapidement des mesures pour assurer des retours effectifs, depuis l'Union européenne et depuis des pays tiers situés le long des routes migratoires, vers les pays d'origine et de transit, en utilisant comme levier l'ensemble des politiques, instruments et outils dont l'UE dispose à cet effet, y compris la diplomatie, le développement, le commerce et les visas, ainsi que les possibilités de migration légale. À cet égard, une approche "pangouvernementale" s'impose, au sein des Etats membres comme des institutions de l'UE. Le Conseil européen invite la Commission et le Conseil à faire pleinement usage du mécanisme instauré par l'article 25 bis du code des visas, y compris de la possibilité d'introduire des mesures restrictives en matière de visas à l'égard des pays tiers qui ne coopèrent pas dans le domaine des retours. Afin d'accélérer les procédures de retour, le Conseil européen invite également les Etats membres à reconnaître mutuellement leurs décisions de retour. Il appelle l'Agence pour l'asile à fournir des orientations pour accroître le recours aux concepts de pays tiers sûrs et de pays d'origine sûrs. Les Etats membres sont invités à utiliser ces orientations afin de parvenir à une approche plus coordonnée, ouvrant ainsi la voie à l'élaboration d'une liste commune de l'UE.

* Contrôle des frontières extérieures de l'UE

23. L'Union européenne reste déterminée à assurer un contrôle efficace de ses frontières extérieures terrestres et maritimes. Le Conseil européen salue les efforts déployés par les Etats membres à cet égard et :

a) affirme son plein soutien à l'Agence européenne de garde-frontières et de garde- côtes (Frontex) dans l'accomplissement de sa mission essentielle, qui est de soutenir les Etats membres dans leur action de protection des frontières extérieures, de lutte contre la criminalité transfrontière et d'intensification des retours ;

b) rappelle qu'il est important que le système d'entrée/de sortie et le système européen d'information et d'autorisation concernant les voyages deviennent opérationnels dès que possible ;

c) appelle de ses voeux la conclusion rapide des négociations concernant des accords sur le statut nouveaux et révisés entre l'Union européenne et les pays tiers concernant le déploiement de Frontex, dans le cadre des efforts visant à renforcer la coopération en matière de gestion des frontières et de migration ;

d) demande à la Commission de financer les mesures qui seront prises par les Etats membres et qui contribuent directement au contrôle des frontières extérieures de l'UE, telles que les projets pilotes en matière de gestion des frontières, ainsi qu'au renforcement du contrôle des frontières dans des pays clés situés sur les routes de transit vers l'Union européenne ;

e) demande à la Commission de mobiliser immédiatement des fonds et des moyens substantiels de l'UE pour aider les Etats membres à renforcer les capacités et les infrastructures de protection des frontières, les moyens de surveillance, y compris aérienne, et les équipements. Dans ce contexte, le Conseil européen invite la Commission à parachever rapidement la stratégie pour la gestion européenne intégrée des frontières ;

f) est conscient des particularités des frontières maritimes, y compris pour ce qui est de sauver des vies humaines, et souligne la nécessité d'une coopération renforcée concernant les activités de recherche et de sauvetage et, dans ce contexte, prend note de la relance du groupe européen de contact en matière de recherche et de sauvetage.

* Lutte contre l'instrumentalisation, la traite des êtres humains et le trafic de migrants

24. Le Conseil européen condamne les tentatives visant à instrumentaliser les migrants à des fins politiques, en particulier lorsque ceux-ci sont utilisés comme moyen de pression ou dans le cadre d'actions hybrides de déstabilisation. Il demande à la Commission et au Conseil de faire avancer les travaux sur les outils pertinents, y compris d'éventuelles mesures contre les opérateurs de transport qui se livrent à la traite des êtres humains ou au trafic de migrants, ou qui facilitent ces pratiques.

25. Grâce à une coopération étroite entre les Etats membres et avec Europol, Frontex et Eurojust, ainsi qu'avec des partenaires clés, la lutte contre la traite des êtres humains et le trafic de migrants sera encore renforcée.

* Données sur les flux migratoires et appréciation de la situation

26. Le Conseil européen demande au Conseil et à la Commission, avec le soutien des agences de l'UE compétentes, de développer une appréciation commune de la situation, d'améliorer le suivi des données sur les capacités d'accueil et sur les flux migratoires et de détecter plus rapidement les nouvelles tendances migratoires, tant vers l'Union européenne qu'à l'intérieur de celle-ci. Il encourage les autorités des Etats membres à demander l'appui des agences de l'UE, y compris l'Agence pour l'asile et Frontex, pour faire en sorte que tous les migrants qui entrent dans l'Union européenne soient dûment enregistrés.

* Pacte sur la migration et l'asile et dossiers connexes

27. Le Conseil européen, compte tenu des progrès accomplis en 2022, invite les colégislateurs à poursuivre les travaux concernant le pacte sur la migration et l'asile, conformément à la feuille de route commune, ainsi que les travaux sur le code frontières Schengen révisé et la directive retour. Le Conseil européen prend acte de l'intention de la présidence de débattre de la mise en oeuvre de la feuille de route de Dublin ainsi que de l'action efficace de l'UE aux frontières extérieures, y compris sur la question des opérations menées par des entités privées, lors de la prochaine session du Conseil JAI.

IV. DIVERS

* Dialogue entre Belgrade et Pristina

28. À la lumière des tensions récentes dans le nord du Kosovo [1], le Conseil européen souligne que des progrès doivent intervenir d'urgence dans la normalisation des relations entre le Kosovo et la Serbie dans le cadre du dialogue mené grâce à la médiation de l'UE, sous l'égide du haut représentant.

29. Le Conseil européen se félicite de la récente proposition européenne visant à asseoir les relations entre les deux parties sur une base nouvelle et durable et considère qu'elle représente une chance historique qui devrait être saisie par les deux parties, notamment en vue de concrétiser leur perspective européenne.

30. Le Conseil européen demande instamment aux deux parties de mettre en oeuvre, pleinement et sans conditions, les obligations qu'elles se sont engagées à respecter dans le cadre du dialogue, y compris les accords des années 2013 et 2015 visant à créer une association/communauté des municipalités à majorité serbe.

* Tremblement de terre en Turquie et en Syrie

31. À la suite du tremblement de terre tragique survenu le 6 février 2023, le Conseil européen exprime ses plus sincères condoléances pour les victimes et affirme sa solidarité avec les populations de Turquie et de Syrie.

32. Au lendemain de cette tragédie et en signe de la solidarité sans faille de l'Union, plus de 1 600 sauveteurs ont été déployés en Turquie. Le Conseil européen réaffirme que l'Union est prête à fournir une aide supplémentaire afin d'atténuer les souffrances dans toutes les régions touchées. Le Conseil européen se félicite de l'initiative de la présidence suédoise et de la Commission d'accueillir à Bruxelles, en mars, une conférence des donateurs afin de mobiliser des fonds de la communauté internationale en faveur des populations de Turquie et de Syrie.

33. Le Conseil européen demande à tous de garantir l'accès de l'aide humanitaire aux victimes du tremblement de terre en Syrie, où qu'elles se trouvent. L'Union européenne et ses Etats membres ont mobilisé des ressources supplémentaires pour soutenir les efforts humanitaires. Le Conseil européen invite la communauté humanitaire, sous les auspices des Nations unies, à veiller à l'acheminement rapide de l'aide.


[1] Cette désignation est sans préjudice des positions sur le statut et est conforme à la résolution 1244/1999 du Conseil de sécurité des Nations unies ainsi qu'à l'avis de la CIJ sur la déclaration d'indépendance du Kosovo.


Source https://www.diplomatie.gouv.fr, le 14 février 2023