Texte intégral
LORRAIN SENECHAL
Bonjour Franck RIESTER…
FRANCK RIESTER
Bonjour.
LORRAIN SENECHAL
Les débats sur la réforme des retraites s'achèvent ce soir à minuit à l'Assemblée nationale. C'est automatique, c'est une question de procédure. Est-ce qu'il y a encore la moindre chance à l'heure qu'il est que le texte soit soumis à un vote ?
FRANCK RIESTER
Ce n’est pas très compliqué sachant qu'il y a encore presque 3000 amendements…
LORRAIN SENECHAL
Avant l'article 7…
FRANCK RIESTER
Exactement. On n’a même pas commencé l'article 3 encore, sur 20 articles. Et qu’il reste 9000 amendements en tout. Bon, cette stratégie-là progressivement retirée. Hélas ces dernières heures, ces derniers jours, les amendements d'obstruction les uns après les autres, phase étonnante, reflètent bien cette stratégie de La France Insoumise et plus largement de la NUPES de bloquer le débat démocratique.
LORRAIN SENECHAL
Pour vous, il n’y aura pas de vote ni sur le texte ni même sur l'article 7 c'est-à-dire…
FRANCK RIESTER
Il y a eu des votes. On a par exemple pris la décision de supprimer les régimes spéciaux pour l'avenir avec la fameuse clause de grand-père, comme vous le savez. D'ailleurs c'était assez surprenant de voir que Rassemblement national et NUPES se rejoignaient dans le maintien de quelque chose qui est perçu par les Français comme quelque chose d'inéquitable. Et donc, aujourd'hui, il y a très peu de chances que nous allions évidemment jusqu'au bout du texte. On ne sait même pas si on va pouvoir aller jusqu'à l'article 7.
NEILA LATROUS
Quand vous dites très peu de chance, ça veut dire que même si tous les groupes suppriment leurs amendements, c'est trop tard ?
FRANCK RIESTER
Objectivement, ce n'est pas au dernier jour après 2 semaines de débats qu'on retire tous ses amendements d'obstruction pour faire bonne figure.
NEILA LATROUS
Mais ils ont affirmé : on a déjà retiré 90 % de nos amendements. Est-ce que les autres doivent le faire aussi ?
FRANCK RIESTER
La NUPES a déposé 15 000 amendements sur ce texte en première lecture…
NEILA LATROUS
Il en reste beaucoup, vous rappeliez les chiffres…
FRANCK RIESTER
Il y a 16 500 amendements au total. Et on sait bien que ce sont des amendements pour la plupart d'obstruction. Si on bouge une virgule, on bouge un point, vous avez vu le fameux amendement pour modifier le nom par exemple de l'index senior en « index salade verte », madame ROUSSEAU, le fameux amendement. Il y a des amendements, là, qui arrivent sur l'article 7 ou ces amendements de modifier l'âge de la retraite à 99 ans, eh bien, le ridicule et la caractérisation d'amendements d'obstruction. Donc, on demande obstruction. Donc, ça fait depuis le début de l'examen du texte que la majorité, que le Gouvernement appelle à la raison les oppositions de gauche, de la NUPES de ne pas faire d'obstruction et de permettre un débat en première lecture à l'Assemblée nationale. Force est de constater que ça n’a pas été le cas.
NEILA LATROUS
Et ce matin, Franck RIESTER vous dites c'est trop tard, c'est le dernier jour. Voilà, le débat ne peut pas se faire dans une journée…
FRANCK RIESTER
Il faut être sérieux. On ne peut pas discuter de tous les sujets importants qui sont à discuter comme ça sous prétexte. A un moment donné Jean-Luc MELENCHON change d'avis entre hier soir et ce matin.
LORRAIN SENECHAL
Et pourquoi ils n’ont pas continué ce week-end ? Comme le disait hier soir sur France Info, Éric COQUEREL. Il dit vous avez tout à fait le droit de décider de continuer sur le week-end…
FRANCK RIESTER
A quoi ça sert ? II reste des milliers d'amendements d'obstruction. Jean-Luc MELENCHON, hier d'ailleurs, par un tweet complètement hallucinant, lui qui n'est même pas député, qui a infantilisé d'une certaine façon le parti communiste en pointant son incompréhension de leur volonté de débattre en retirant un certain nombre d'amendements et en faisant preuve d'autoritarisme. C'est une espèce de reprise en main d'une partie de son groupe. On voit bien qu’ils sont très divisés à La France Insoumise, ils sont très divisés à la NUPES. Ils sont d'ailleurs très divisés sur la stratégie du débat parlementaire et très divisés sur le fond.
LORRAIN SENECHAL
Vous pourriez leur dire vous retirez vos amendements, vos 3000 amendements et en échange on s'engage à discuter.
FRANCK RIESTER
Ecoutez, ça fait 2 semaines qu'on leur demande de retirer leurs amendements d'obstruction. Donc à un moment il faut être sérieux. Le Sénat attend le texte pour pouvoir aussi en débattre, l'examiner en première lecture et on continue le parcours parlementaire du texte.
NEILA LATROUS
Franck RIESTER, les blocages ne sont que le fait de la gauche pour vous ?
FRANCK RIESTER
Ecoutez, en l'occurrence, ceux qui ont fait de l'obstruction en déposant des amendements c'est la gauche.
NEILA LATROUS
Je vous dis ça parce que vous évoquiez le tweet de Jean-Luc MELENCHON. Il a provoqué hier un incident de séance, une suspension. La semaine dernière, la prise de parole d'Adrien QUATENNENS a aussi provoqué des heures de débat perdues parce que votre groupe, le groupe Renaissance, a considéré qu'il n'avait pas à prendre la parole et a fait des rappels au règlement…
FRANCK RIESTER
Bon, ça a duré 10 minutes…
NEILA LATROUS
Ça a duré un peu plus de temps, ça a duré une bonne partie de l'après-midi et de la soirée plus précisément. Autre incident de séance quand l'insoumis Thomas PORTES a pris la parole après un tweet où il posait avec la tête du ministre Olivier DUSSOPT posé sur un ballon. Tous ces incidents de séance pris les uns après les autres contribuent aussi à ralentir le débat…
FRANCK RIESTER
Oui mais ils sont à la source de qui ? C’est La France Insoumise. Vous savez, ce n'est pas simplement de l'obstruction en déposant beaucoup d'amendements ridicules. C’est aussi de la pression. C'est aussi des invectives, c'est aussi des insultes, c'est aussi des provocations, c'est aussi des versements de haine, et c'est clairement la manipulation aussi d’informations, racontant tout et n’importe quoi en mentant régulièrement sur la réalité des chiffres. C'est ça la stratégie de la France insoumise, c'est une multitude de leviers, pour faire quoi ? Pour créer du désordre, pour créer de la tension, pour essayer d'enflammer les débats, et puis surtout pour cacher ce qu'est le projet alternatif qui n'existe pas, de la NUPES, puisqu'ils sont divisés sur le projet, avec un seul point commun qui les rassemble, c'est taxer, imposer, augmenter les cotisations. Ça a été le festival pendant 2 semaines de propositions de taxes et d'impôts en tout genre, pour pénaliser le pouvoir d'achat de nos compatriotes, pénaliser la compétitivité des entreprises, et pour pénaliser finalement le pouvoir d'achat aussi des retraités.
LORRAIN SENECHAL
Alors, les débats vont sans doute quand même être prolongés de quelques heures, puisque le RN a déposé une motion de censure, il sera décidé d'ailleurs ce matin si elle sera examinée à l'issue de la séance c'est-à-dire après minuit ou demain matin. Est-ce qu'il y a des craintes particulières du côté du gouvernement ?
FRANCK RIESTER
Non…
LORRAIN SENECHAL
Qu’il y ait une coalition des oppositions ?
FRANCK RIESTER
Non, parce qu'il n’y a pas de projet alternatif. Vous savez, le Rassemblement national c'est le vide sidéral de leur projet alternatif et de leurs propositions. Ils n’ont rien à dire, rien à proposer, ils critiquent, ils s’opposent, mais ils ne proposent rien. C'est facile de critiquer quand on n'a rien à proposer. Nous on assume nos responsabilités.
LORRAIN SENECHAL
Mais c'est juste une question de proposer quelque chose. Il n’y a pas une majorité de rejet qui pourrait se créer ce soir ou demain ?
FRANCK RIESTER
Ecoutez, je ne le crois pas, je crois que d’ailleurs la NUPES a plus ou moins déjà annoncé qu'ils ne voteraient pas cette motion de censure et les LR aussi. Donc clairement il n’y a aucun risque que cette motion de censure soit votée. Mais c'est quelque part le dernier outil qu'utilise le Front national pour essayer d'exister dans un débat où il en a été totalement absent, parce que sans proposition alternative. Encore une fois, nous, nous avons dit très clairement avec beaucoup de sens, de la responsabilité, qu'il y avait un problème d'équilibre financier pour ceux, pour notre système de retraite par répartition, qu'il fallait donc prendre des décisions pour garantir l'avenir de ce système qui est le coeur de notre modèle social, au coeur de notre solidarité intergénérationnelle. Et donc nous demandons effectivement un effort aux Français, de travailler progressivement plus longtemps, pendant que les autres sont dans la démagogie ou les propositions irréalistes.
LORRAIN SENECHAL
Franck RIESTER, ministre délégué chargé des Relations avec le Parlement, invité du 8 :30. Vous restez avec nous. 08h40, c’est le Fil Info, Mathilde ROMAGNAN.
NEÏLA LATROUS
Toujours avec Franck RIESTER, ministre délégué chargé des Relations avec le Parlement. On va s'intéresser au fond de votre projet : une retraite minimale à 85 % du Smic, presque 1 200 €, pour les personnes qui ont une carrière complète, rémunérée autour du Smic. Ça veut dire quoi une carrière complète autour du Smic ?
FRANCK RIESTER
Eh bien une rémunération au Smic tout le temps de la carrière.
NEÏLA LATROUS
Mais c'est quoi le bornage ? C'est-à-dire qu'aujourd'hui on est sur un Smic à 1 709 € brut, 1 353 net, est-ce qu'il faut être à 1 300, est-ce qu'il faut être entre 1 200, 1 500, est-ce que si… Il y a des mois où j'ai travaillé, où j'ai gagné beaucoup plus, je ne rentre pas dans le dispositif ?
FRANCK RIESTER
Vous savez, cette réforme elle a comme objectif de permettre, de garantir à celles et ceux qui partent en retraite, et qui partiront en retraite, de pouvoir avoir une retraite minimum s'ils ont travaillé tout le long de leur vie à temps plein, avec une carrière complète, c'est-à-dire qu'ils ont cotisé le nombre d'années nécessaires et au niveau du Smic. Et donc…
LORRAIN SENECHAL
Mais si on est passé un petit peu en temps partiel, ça marche comment ?
FRANCK RIESTER
… évidemment les choses vont évoluer au fur et à mesure du temps, c'est pour ça qu'on on s'engage sur les 85 % du Smic net et pas sur un chiffre sur le temps long. Les 1 200 € sont pour l'été, la mise en oeuvre de la réforme à l’été, mais sur le temps long les choses évolueront, puisque le Smic évoluera. C'est ça qui est intéressant.
NEÏLA LATROUS
Mais, qui définira « autour du Smic » ? C'est cette notion de « autour du Smic », qui est quand même un peu floue aujourd'hui dans la présentation qui est faite. Est-ce que ça sera défini par décret après ?
FRANCK RIESTER
Non, alors, c'est le principe même de la réforme, qui vise à ce que tout le long de la vie on regardera quel est le niveau de rémunération, et ça c'est des calculs justement très compliqués qui seront faits, et qui permettra de s'assurer que nos compatriotes qui partent en retraite et qui auront une carrière complète à taux plein, enfin à temps complet, pourront avoir 85 % du Smic net, du moment où ils partiront en retraite.
NEÏLA LATROUS
Donc, si je vous comprends, on saura plus tard quel est le bornage en termes de salaires. Vous dites, la réforme entrera…
FRANCK RIESTER
Non, c’est maintenant, c'est au niveau du Smic.
NEÏLA LATROUS
Mais au niveau, juridiquement, c'est une base un peu floue, c'est-à-dire que, voilà, si quelqu'un fait des mois 1 500 net, d’autres à 1 200…
FRANCK RIESTER
Mais, je vous ai répondu, Neïla LATROUS, je veux bien qu'on passe toute l'émission à redire la même question, je vous apporte la même réponse, mais…
NEÏLA LATROUS
Non, moi de ce que je comprends, c'est que le bornage exact n’est pas défini aujourd’hui.
FRANCK RIESTER
Ce n’est pas un bornage, c’est un niveau.
NEÏLA LATROUS
Mais un niveau de combien, autour du Smic ?
FRANCK RIESTER
Mais le Smic évolue, donc c’est le niveau du Smic, il a évolué dans le passé…
LORRAIN SENECHAL
Il y a des carrières…
NEÏLA LATROUS
Il faut gagner pile le Smic, il faut gagner un peu moins, un peu plus ? C’est ça que l’on ne comprend pas.
FRANCK RIESTER
C’est le niveau du Smic, tout au long de sa carrière.
NEÏLA LATROUS
Donc le niveau du Smic. Et vous dites : donc, entrée en vigueur dès cet été, est-ce que ça veut dire que dès cet été, si je fais partie des 250 000 retraités actuels éligibles à cette retraite minimale ou si je suis un futur retraité avec une carrière complète, donc autour du Smic, dès le mois de septembre j'ai 1 200 € de retraite minimale, ou est-ce que c’est en 2030 ?
FRANCK RIESTER
Non non non, c'est à partir de la mise en oeuvre de la réforme, donc en 2023, où ceux qui auront, qui partiront en retraite, qui auront une carrière complète, à plein temps au niveau dit Smic…
NEÏLA LATROUS
Dès le mois de septembre, pour leur retraite.
FRANCK RIESTER
… pourront avoir 85 % du Smic, net, au moment de la mise en oeuvre de la réforme.
LORRAIN SENECHAL
On vous parlait de 2030, parce que c'est un chiffre qui a été évoqué par Olivier DUSSOPT lui-même, il a dit qu'à partir de 2030 ce serait 40 000 personnes chaque année qui passeront ce cap des 85 % du Smic. Il a dit ça mardi, Olivier DUSSOPT, et la veille sur France Info on lui avait posé la même question, voici sa réponse.
OLIVIER DUSSOPT, MINISTRE DU TRAVAIL
Vous dire aujourd'hui, mois par mois, je sais exactement combien de personnes vont être concernées par un départ à la retraite, avec 168 trimestres aujourd'hui, 172 demain, une moyenne au Smic à temps plein, c’est un exercice de voyance. Ce que nous avons faire…
LORRAIN SENECHAL
Je vous pose la question différemment, Olivier DUSSOPT…
OLIVIER DUSSOPT
Ce que nous savons calculer, c’est le fait que 200 000 retraités par ans, sur 800 000, vont avoir une pension meilleure, grâce à cette réforme, que sans réforme.
LORRAIN SENECHAL
Il parlait de voyance. Il est devenu voyant depuis donc ? Parce que maintenant on a le chiffre.
FRANCK RIESTER
Non … calculs prévisionnels qui font que par exemple sur la génération 72, 40 000 pourront bénéficier de…
LORRAIN SENECHAL
Mais il n’avait pas regardé ces chiffres avant ?
FRANCK RIESTER
Mais si, mais…
LORRAIN SENECHAL
Ils viennent d’où ? Ça vient d’où ce chiffre de 40 000 personnes ?
FRANCK RIESTER
Mais, de ses services. Mais d’ailleurs, c’est intéressant, puisqu’il y a cette question des 85 % du Smic pour carrière complète, à temps plein au niveau du Smic, mais il y a aussi des revalorisations pour les autres. Par exemple…
LORRAIN SENECHAL
Au prorata.
FRANCK RIESTER
Sur les retraités actuels, c'est 1,8 million retraités actuels, à l'été 2023, la mise en oeuvre de la réforme, qui pourront bénéficier d'une revalorisation.
LORRAIN SENECHAL
Mais entre un 1 et 100 €, et plutôt autour de 30 €.
FRANCK RIESTER
Alors, par exemple, je vais donner un chiffre très clair, c'est qu'il y en a 900 000 qui auront entre 70 et 100 € de revalorisation, à partir donc de l'été 2023.
LORRAIN SENECHAL
Donc la moitié.
FRANCK RIESTER
Comme on estime, c’est ce qu’a rappelé Olivier DUSSOPT, qu’en gros un quart de ceux qui partent en retraite pourront avoir une revalorisation du fait de cette réforme.
NEÏLA LATROUS
La question de la source de ce chiffre là, des 40 000 bénéficiaires par an, de ces 85 % du Smic, donc pour une carrière complète, donc on le rappelle, quelqu’un qui aurait gagné toute sa carrière autour du Smic, la question « d'où vient ce chiffre », elle a été posée hier à l'Assemblée nationale par le socialiste Jérôme GUEDJ, sa question et la réponse d'Olivier DUSSOPT.
JEROME GUEDJ, DEPUTE PS DE L’ESSONNE
Quand avez-vous eu communication et par qui, d'informations à l'appui desquelles vous indiquez 40 000 personnes qui bénéficieront ?
OLIVIER DUSSOPT, MINISTRE DU TRAVAIL
Je travaille dans mon cabinet, je travaille avec une multitude de services, je n'ai pas à rendre de comptes, ni sur les canaux, ni sur la manière dont je fais les prévisions, et par ailleurs, si vous souhaitiez avoir ces renseignements, vous aviez, comme vous l’avez dit qu'à ouvrir l’étude d'impact.
NEÏLA LATROUS
Bon, sauf que le chiffre n'est pas exactement dans l'étude d'impact, mais sur la phrase « je n’ai pas à rendre de comptes », vous êtes ministre des Relations avec le Parlement, un ministre qui dit à la représentation nationale « je n'ai pas à vous rendre de comptes », est-ce que ça vous choque, est-ce que c'est malhabile ?
FRANCK RIESTER
Olivier DUSSOPT répond à toutes les questions, très disponible, avec beaucoup de précisions, et malgré les attaques et les invectives, parfois scandaleuses dont il est la victime. Mais vous voyez, ce qui s'est passé là avec Jérôme GUEDJ est très révélateur. C'est, ils sont incapables d'avoir un projet alternatif crédible, ils voient bien que leur stratégie d'obstruction choque les Français, et donc ils essayent tous les subterfuges. Alors, il a fait son coup Jérôme GUEDJ hier, qui a fait d'ailleurs pschitt, et il essaie…
LORRAIN SENECHAL
Ça hurle trop…
FRANCK RIESTER
… de donné le sentiment qu'il y aurait des choses cachées, que les choses ne seraient pas claires etc. C’est leur stratégie depuis le départ.
NEÏLA LATROUS
Pour bien comprendre, pour nos auditeurs, vous évoquez le fait que Jérôme GUEDJ se soit rendu au ministère et ait demandé à pouvoir consulter les pièces et sources sur lesquelles se basait cette réforme des retraites et cette évaluation, pour que tout le monde ait le même niveau d'information. Pour vous, c’était un coup que vous faire Jérôme GUEDJ ? La question n'était pas forcément légitime ?
FRANCK RIESTER
On voit bien que. Je vous dis, encore une fois ils n'arrivent pas à débattre du fond en détail, puisqu'il y a cette stratégie d'obstruction qui fait qu'aujourd'hui après 2 semaines de débats on n’est même pas encore à l'article 3. Et donc ils essaient de faire des coups comme ceux-là. Franchement, ça crée en plus une espèce d'atmosphère de délation, de suspicion, c'est un assez désagréable.
NEÏLA LATROUS
Mais vous nous redites ce matin, qu'un ministre rend des comptes au Parlement.
FRANCK RIESTER
Le ministre répond évidemment aux questions du Parlement, et c'est ce que fait Olivier DUSSOPT depuis le début, avec beaucoup de calme, malgré pour autant les invectives, les cris, les hues, caractéristiques, qui sont la caractéristique de ce débat aujourd'hui.
LORRAIN SENECHAL
Franck RIESTER, vous le disiez, il y a eu quand même quelques votes sur ce texte depuis le début, et notamment un vote contre l'une de vos mesures, l'index seniors qui a été supprimée à l'Assemblée, avec les voix d'ailleurs de la droite. Est-ce qu’il va revenir, vous l'espérez, au Sénat, cet index seniors, puisque le texte va aller au Sénat ?
FRANCK RIESTER
Oui, Olivier DUSSOPT l’a rappelé, on verra avec le Sénat comment les choses se mettent en place. Mais c'est assez paradoxal, que beaucoup disaient au gouvernement « vous ne faites pas assez sur les seniors », et au moment où on propose quelque chose en lien avec la majorité, en lien avec les organisations syndicales, quelque chose qui permet d'abord de la transparence sur ce qui se passe dans les entreprises, et qui permet d'inciter les entreprises à mieux prendre en compte cette question essentielle qui est la place des seniors dans l'entreprise, avec cette coalition des oppositions contre cet index seniors.
LORRAIN SENECHAL
Mais y compris la droite…
FRANCK RIESTER
Oui, je le regrette, mais enfin ce qui était frappant c'était Rassemblement national et à nouveau NUPES…
LORRAIN SENECHAL
Mais je dis la droite, parce que c'est elle qui a la majorité au Sénat. Vous craignez-vous que l'index seniors soit définitivement enterré ?
FRANCK RIESTER
Ça fera partie des débats, mais je sais que les sénateurs sont aussi attachés à la façon dont on prend mieux en compte dans l'entreprise les seniors.
LORRAIN SENECHAL
Oui, et il y a d'autres outils possibles peut-être.
FRANCK RIESTER
Vous savez, depuis le début de ce débat sur la réforme des retraites, nous sommes à l'écoute et nous enrichissons, complétons, modifions le texte, en écoutant ce qui est dit. Rappelons-nous quand même que l'engagement du président de la République et des députés de la majorité dans leur campagne, c'était de faire, de repousser l'âge de départ en retraite à 65 ans…
LORRAIN SENECHAL
Mais ce n’était pas dans les projets du Sénat…
FRANCK RIESTER
… Nous avons écouté les organisations syndicales, nous avons écouté les sénateurs, nous avons écouté les organisations syndicales, nous avons écouté les députés de la majorité. Et nous avons pris la décision de faire une réforme avec un report de l'âge à 64 ans, une accélération de la réforme de madame TOURAINE. C'est la preuve de notre volonté d'écouter. Nous avons élargi, on en parlait tout à l'heure, la revalorisation d'un certain nombre de pensions de retraite, pas aux retraités nouveaux, mais aussi aux retraités existants. Nous avons élargi et assoupli le dispositif de carrières longues. On est à l'écoute. Eh bien on sera à l'écoute aussi de ce qui est dit au Sénat, en gardant le cap de la réforme qui est l'équilibre du système de retraite par répartition, pour garantir les retraites de nos compatriotes et pérenniser un système important.
NEÏLA LATROUS
Que je comprenne bien, vous dites : il reste des choses à discuter ou à amender au Sénat. Tout n'a pas été mis sur la table ?
FRANCK RIESTER
Ecoutez, il y a, il y aura un débat au Sénat. Les sénateurs vont faire des propositions, ils vont voter des choses, on aura un dialogue avec eux. C'est ça la démocratie et c'est ça le parcours parlementaire. Vous savez, depuis le début du quinquennat, c'est toujours ce qui a été fait. Nous avons veillé de discuter avec l'Assemblée nationale et Sénat, avec la majorité qui suit le président de la République et les oppositions constructives, pour bâtir des majorités et des textes les plus pertinents possibles. Et d'ailleurs, hors le projet de loi de finances et le projet de loi de finances de la Sécurité sociale, qui sont des marqueurs de l'appartenance à l'opposition, tous les autres textes ont trouvé des majorités, plus larges que la majorité présidentielle, avec cette méthode-là.
LORRAIN SENECHAL
Franck RIESTER, ministre délégué chargé des Relations avec le Parlement, invité de 8 :30. Vous restez avec nous, 08h52, c'est le Fil info, Mathilde ROMAGNAN.
Pause
NEÏLA LATROUS
Toujours avec Franck RIESTER, ministre délégué chargé des Relations avec le Parlement ; il y a quelques instants, vous évoquiez ce texte qui arrive début mars au Sénat, cette réforme des retraites, dernier jour de débat aujourd'hui à l'Assemblée nationale et début mars donc le Sénat qui s'en saisit. Le président du groupe Les Républicains au Sénat Bruno RETAILLEAU estime que la réforme en fait est déjà un peu vidée de sa substance que toutes les concessions qui ont été faites et au niveau de l'Assemblée nationale rognent l'équilibre budgétaire ou en tout cas le sérieux budgétaire de de cette réforme-là. Est-ce qu'il va falloir revenir au Sénat sur les concessions faites à l'Assemblée ?
FRANCK RIESTER
Non mais il y aura un débat au Sénat ; nous avons, je crois dix jours de prévus de débats au Sénat. A priori, les choses sont plus faciles qu'à l'Assemblée nationale pour débattre sereinement ; on verra comment les choses se mettent en place. En tout cas bien évidemment le texte va pouvoir être débattu. Il y aura des propositions du Sénat, il y aura des votes. On donnera notre regard sur les propositions qui seront faites et c’est ça encore une fois, le passage légitime, démocratique au Parlement et j'espère que les choses seront positives.
NEÏLA LATROUS
Les sénateurs ont pris l'habitude de voter chaque année dans le budget, d'ailleurs, leur propre réforme des retraites ; il n’est pas question pour vous de reprendre la réforme des retraites telle que présentée par le Sénat chaque année ?
FRANCK RIESTER
On a regardé dans la définition de cette réforme les choses qui avaient été proposées par les uns les autres et notamment les sénateurs et par rapport à ce que vous disiez tout à l'heure, que les choses soient claires : nous le cap il est clair, financier. Ça sera l'équilibre et donc bien évidemment que les décisions qui ont des impacts sur l'équilibre global du texte sont bien sûr à prendre en compte et donc il faut trouver aussi les financements et bien évidemment les financements seront trouvés pour qu’en 2030 nous puissions avoir l'équilibre du système ; c'est la raison première de cette réforme.
NEÏLA LATROUS
Vous dites à la droite sénatoriale « notre projet est sérieux budgétairement ».
FRANCK RIESTER
Oui bien sûr, oui bien sûr, il a pour vocation à trouver, il permet de générer 18 milliards en gros en 2030 et sur ces 18 milliards, on en utilise 5 pour les mesures de justice et de progrès et 13 milliards pour le déficit parce que ce sont les prévisions, c’est 13 milliards …
LORRAIN SENECHAL
C’est toujours le cas y compris après les concessions qui ont été faites, il y a toujours 13 milliards en tout d’économies ?
FRANCK RIESTER
Et c'est l'objectif en 2030 et nous y parvenons.
LORRAIN SENECHAL
Est-ce que vous craignez Franck RIESTER la journée d'action du 7 mars ? Est-ce que vous craignez une France bloquée puisque c'est le mot d'ordre des syndicats « la France à l'arrêt » ?
FRANCK RIESTER
Vous savez, une France bloquée, ce n’est jamais une bonne nouvelle pour la France et pour les Français et donc évidemment on souhaite que la mobilisation sociale qui existe et qui est normale - regardez dans l'histoire des réformes des retraites - , il y a toujours une mobilisation sociale, se fasse, continue de se faire en bon ordre et c'est le cas depuis le début et sans bloquer le pays parce que c'est des conséquences pour celles et ceux qui veulent travailler, pour celles et ceux qui vont à l'école pour celles et ceux qui ont une vie et qui doivent continuer malgré la mobilisation.
LORRAIN SENECHAL
Et qui soutiennent le mouvement d'opposition à la réforme des retraites, c'est ce que montrent toutes les enquêtes d'opinion.
FRANCK RIESTER
Bien sûr et c'est tout à fait légitime. Nous sommes une grande démocratie ; la mobilisation sociale s'exprime dans les manifestations, s'exprime aussi parfois dans des grèves mais surtout le blocage ce n’est jamais une bonne nouvelle. Vous savez les gens qui ont besoin d'aller travailler s’ils ne peuvent pas y aller parce que la France est bloquée, ce n'est pas une bonne chose.
LORRAIN SENECHAL
Hier, c’était un essoufflement, un peu moins de monde ou c'était juste les vacances.
FRANCK RIESTER
Ecoutez, je ne sais pas moi, je ne fais pas l'analyse du niveau de mobilisation.
LORRAIN SENECHAL
Elle reste forte, la mobilisation.
FRANCK RIESTER
On voit bien qu'il y a une mobilisation, on voit bien qu'il y a une opposition pour un certain nombre de nos compatriotes à cette réforme, eh bien, on continue d'expliquer et de répondre et d'améliorer le texte et c'est ce que fait à l'Assemblée nationale, quand on peut entre deux invectives et des dizaines, voire centaines voire milliers d'amendements, d'obstructions et ce qu'on continuera de faire au Sénat.
NEÏLA LATROUS
Franck RIESTER, ces débats à l'Assemblée, le spectacle donné depuis 10 jours ça laissera quelle trace dans l'opinion publique, ça va nourrir par exemple l'antiparlementarisme ?
FRANCK RIESTER
Je n’espère pas ; en tout cas c'est sûr que l'image que certains ont donnée du travail à l'Assemblée nationale est catastrophique, très mauvaise.
NEÏLA LATROUS
Qu’est-ce qu'il faut changer ?
FRANCK RIESTER
En tout cas rien ne serait pire que de prendre des décisions à chaud ; il faut prendre du temps. Le président de la République, vous le savez, veut avoir une grande réflexion sur l'organisation de nos institutions c'est bien mais attention à ne pas regarder simplement ce débat, ce qui s'est passé, l'attitude de quelques-uns pour vouloir revoir complètement le fonctionnement de nos institutions.
NEÏLA LATROUS
Pour vous, c’est quelques-uns, ce n’est pas un problème d'institutions plus globalement ? Ce n’est pas un problème de fonctionnement du Parlement ?
FRANCK RIESTER
Mais le comportement des député Insoumis et d'un certain nombre de députés NUPES est un comportement qui peut évoluer avec soit d'autres députés soit avec ceux-là qui changeraient de comportement. Donc il ne faut pas tout mélanger.
NEÏLA LATROUS
Ce n’est pas le grand soir !
FRANCK RIESTER
Il ne faut pas mélanger les institutions et le comportement de certains qui essaient de créer du désordre dans la rue et à l'Assemblée nationale.
LORRAIN SENECHAL
Et vous le disiez tout à l'heure, aucun risque selon vous que la motion de censure soit votée, qu'il y ait une majorité pour cette motion de censure Rassemblement national. On apprend à l'instant qu'elle sera débattue ce soir à partir de minuit, c'est donc le choix qui a finalement été fait ; vous maintenez votre position, aucun risque qu'elle soit adoptée ?
FRANCK RIESTER
Les députés se prononceront mais d'après les déclarations des uns et des autres, il semble effectivement que cette motion ne puisse pas être votée.
LORRAIN SENECHAL
Franck RIESTER, merci beaucoup, invité du « 8 :30 » !
FRANCK RIESTER
Merci à vous.
LORRAIN SENECHAL
Ministre délégué chargé des Relations avec le Parlement. Bonne journée
source : Service d’information du Gouvernement, le 22 février 2023