Interview de Mme Sylvie Retailleau, ministre de l'enseignement supérieur et de la recherche, à Radio J le 19 avril 2023, sur la plateforme "Mon Master", la revalorisation des bourses et l'augmentation du flux d'étudiants en médecine.

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Média : Radio J

Texte intégral

LEA MOSCONA
Merci David, à demain. Et tout de suite, c'est le BARBIER du matin. Christophe BARBIER reçoit Sylvie RETAILLEAU, la ministre de l'Enseignement supérieur et de la Recherche. Christophe BARBIER, madame le Ministre, bonjour.

SYLVIE RETAILLEAU
Bonjour.

CHRISTOPHE BARBIER
Bonjour Léa. Sylvie RETAILLEAU, bonjour.

SYLVIE RETAILLEAU
Bonjour.

CHRISTOPHE BARBIER
Et bienvenue. L'actualité, pour vous, c'est la plateforme Mon Master. Elle devait s'arrêter hier. Elle est prolongée jusqu'à jeudi, minuit, à 23h59. Alors, que s'est-il passé ? On parle de bug ?

SYLVIE RETAILLEAU
Alors, cette plateforme Mon Master, c'est installé, vous le savez, on l'a mise en place cette année. On l'a mise en place parce qu'elle correspondait à un besoin pour nos étudiants aussi d'avoir cette visibilité des formations, d'avoir finalement aussi un calendrier national. Aujourd'hui, tout étudiant sait quand est-ce qu'il doit déposer, sur quelle période il dépose les dossiers, sur quelle période il aura les résultats, sur l'ensemble de ces demandes et avec un dossier unique. Donc, c'est vrai qu'avant, il devait aller sur chaque université, chaque plateforme quand elles existaient, parce que parfois, il n'y avait même pas de plateforme et donc, on était encore à l'enveloppe à envoyer par courrier. Et puis, on avait le résultat, quand on avait le résultat. Et de l'autre côté, les établissements avaient la réponse du candidat, désistement ou pas, quand il avait une réponse, on se retrouve en début d'année avec des filières dites "en tension" et qui étaient pour autant avec des amphis à moitié vide ou à moitié plein comme vous le voulez.

CHRISTOPHE BARBIER
Donc, on a centralisé pour simplifier et clarifier, mais centraliser, ça engorge parfois.

SYLVIE RETAILLEAU
Alors, on a… ça n'a pas engorgé, c'est la première année, donc, on a eu quelques problématiques de rentrée, en fait, des paramètres sur certaines filières. Il y a eu environ 7% des formations qui ont été impactés par le fait qu'il a fallu recorriger des paramètres entrés au niveau des filières.

CHRISTOPHE BARBIER
Ou des dossiers qui avaient disparus ou des vœux qui n'avaient pas été pris en compte.

SYLVIE RETAILLEAU
Ou des vœux qui avaient été mal pris en compte. Et donc, en général, on a eu un arrêt de la plateforme avec mail envoyé à l'étudiant, avant et après, pour le tenir au courant et comme c'est cette première année, comme on veut que ça marche, comme on veut accompagner les étudiants, on a pris la décision, j'ai pris la décision de rallonger ces deux jours pour que les étudiants puissent pouvoir avoir, je dirais, un peu de souffle pour permettre à cette plateforme. Ça ne change pas le reste du calendrier.

CHRISTOPHE BARBIER
Ça suffira, deux jours, pour bien vérifier que son dossier a été enregistré, ça doit suffire ?

SYLVIE RETAILLEAU
Alors, ce qu'il faut savoir, c'est que ça permet aux étudiants de redéposer, de corriger et de revoir. Mais ensuite, il y aura une période d'une dizaine de jours, en fait, où les dossiers seront regardés et on pourra contacter les étudiants s'il manque une pièce ou s'il y a eu un problème de dépôts. Ils auront encore une seconde chance et on les contactera pour pouvoir compléter le dossier. Donc, je pense que l'idée, c'est justement d'envoyer un message à nos étudiants. Cette plateforme, elle est faite pour leur faciliter la vie, pour leur montrer l'offre et certainement pas pour rajouter du stress au niveau de ces candidatures. Donc, ils auront aussi, ils seront en contact, comme ils le sont déjà, avec cette plateforme pour corriger leurs dossiers.

CHRISTOPHE BARBIER
Et ils auront leur réponse définitive dans les temps pour choisir le master qu'ils prennent ?

SYLVIE RETAILLEAU
Le calendrier est fixé et ils auront leur réponse d'ici le 16 juin. Donc, normalement, la plateforme est faite pour qu'avant l'été, les étudiants soient fixés sur leur intégration en master l'année prochaine.

CHRISTOPHE BARBIER
Avec ce système, ils ont pu déposer plus de vœux dans plus établissements. Donc, il y a eu un peu inflation des désirs ?

SYLVIE RETAILEAU
Alors, ça dépend, en fait, ce système permet de déposer quinze vœux au niveau de ce qu'on appelle "mention de master" et aussi, quinze vœux en apprentissage pour des formations en alternance. Donc, ce qui fait au niveau des formations, des parcours, parce qu'un étudiant par exemple, en master de droit, peut déposer au parcours de droit pénal, de droit public etc., plusieurs dossiers dans plusieurs formations, ce qui peut effectivement, pour les étudiants, faire beaucoup de vœux et pour les enseignants qui regardent les dossiers, beaucoup. Mais il faut savoir qu'auparavant, déjà, il y avait des étudiants qui déposaient quarante dossiers dans des masters de droit aussi. Donc, savoir si c'est plus, si c'est moins sur des filières en tension, on peut avoir, et de toute façon, on fera un retour d'expérience pour tout le monde.

CHRISTOPHE BARBIER
Il y aura plus de sélection du coup, il faudra quand même prendre peu de candidats et donc on éliminera plus de dossiers.

SYLVIE RETAILLEAU
Alors ça je ne crois pas. Ça, je pense qu'au contraire on va mieux gérer la répartition des places, comme je vous le disais il y avait des filières en tension comme la psycho, comme le droit où parfois on refusait des étudiants et à la rentrée on se retrouvait avec la filière non remplie. Et donc je pense que cette plateforme va permettre une meilleure affectation des places et qu'on va avoir à la fin une cartographie nationale des besoins pour faire correspondre la demande aux besoins que l'on n'avait pas avant.

CHRISTOPHE BARBIER
Est-ce que vous envisagez de garder ce système l'an prochain ou de revenir à un système, au système antérieur ?

SYLVIE RETAILLEAU
À votre avis ?

CHRISTOPHE BARBIER
Vous gardez.

SYLVIE RETAILLEAU
On garde. On l'améliore, on continue, on est toujours en phase d'amélioration continue. Je pense qu'on aura un retour d'expérience aussi côté étudiants et puis aussi côté établissement et enseignants et on va passer à une 2e phase avec voilà en améliorant encore cette plateforme mais on va garder cette plateforme qui globalement nous avons des bons retours au global malgré les problèmes que l'on a eu cette 1ère année et on a accompagné les étudiants et les établissements, mais on va garder cette plateforme.

CHRISTOPHE BARBIER
Avoir un master c'est bien, avoir un emploi qui correspond à son master c'est mieux, est-ce que cette pléthore de masters ne nous crée pas une frustration à la sortie ?

SYLVIE RETAILLEAU
Alors merci, merci de la question parce que, un des gros [travaux] que nous menons, c'est justement cette insertion professionnelle et adapter les formations, on travaille avec les établissements pour encore plus même si ce travail est fait depuis longtemps au niveau des établissements, encore plus adapter l'offre, l'offre de formation et la demande métier. Donc on regarde l'évolution de notre offre de formation par rapport aux métiers d'avenir qui n'existent pas encore, aux métiers en tension, aux métiers en évolution et puis avec en particulier les instituts universitaires de technologie qui forment les techniciens, on souhaite encourager des sorties aussi à bac plus 3, les sorties à bac plus 5 et en même temps ou un parallèle du droit à la poursuite d'études intégrer le droit à la reprise d'études. On croit beaucoup à la notion de formation tout au long de la vie. On croit beaucoup à cette notion de reconnaissance des compétences de validation d'acquis d'expérience, d'accompagnement de nos étudiants, on ne sort pas avec un diplôme que l'on a toute sa vie et puis c'est fini, on sort avec un diplôme, on acquiert des expériences, des compétences et on va participer à cette évolution des carrières et aussi à ces reconversions dont on a besoin aujourd'hui et à cette formation continue tout au moment de la vie avec les entreprises.

CHRISTOPHE BARBIER
Alors l'autre actualité dans votre domaine, ce sont les bourses, alors j'ai noté 4 % de revalorisation à la rentrée dernière et puis là je vois que pour 2023 l'échelon 0 bis fait un saut de 34 %, alors de quoi parle-t-on ?

SYLVIE RETAILLEAU
Alors on parle en fait d'une annonce que l'on a fait il y a 10 jours où nous avons mis le président et la Première ministre à un projet que l'on avait annoncé depuis octobre 2022 suite à des concertations avec l'ensemble des étudiants, un demi-milliard d'euros sur la table pour la rentrée, à partir de la rentrée 2023 pour les étudiants et en grande partie pour les bourses étudiantes pour améliorer. C'est effectivement une avancée que l'on n'a pas connue depuis 10 ans, une augmentation de ce type au niveau des bourses étudiantes est assez historique, n'a pas été connue depuis 10 ans, ce qu'on a voulu faire sur les bourses, c'est élargir, c'est-à-dire avoir, recouvrir mieux, aider mieux les étudiants puisqu'on va rentrer 35 000 nouveaux boursiers au niveau des bourses. On veut aussi et vous l'avez dit aider plus les étudiants avec une augmentation de tous les échelons de bourse, au minimum tous les échelons vont monter de 37 euros, ce qui va correspondre à ces 34 % pour l'échelon 0, le plus petit échelon, mais ce qu'il faut savoir c'est qu'on va avoir aussi des changements d'échelons pour 140 000 étudiants et ces 140 000, eux, vont avoir une augmentation de leurs bourses entre 66 euros et 127 euros par mois.

CHRISTOPHE BARBIER
Alors on vous reproche quand même de moins augmenter les bourses pour les étudiants les plus précaires comme si vous tassiez l'échelle, que répondez-vous ?

SYLVIE RETAILLEAU
Alors c'est un choix puisqu'on a voulu augmenter l'échelon 7, ce sont les étudiants aux revenus les plus faibles, les augmenter du taux de l'inflation.

CHRISTOPHE BARBIER
6,2.

SYLVIE RETAILLEAU
Exactement de 6,2 %. Ce qu'il faut savoir c'est que cet échelon 7 est pratiquement au niveau du RSA, donc philosophiquement un étudiant [sic], l'idée c'est de suivre l'inflation mais de dépasser le RSA, on a eu une politique, on a des choix assumés et du coup ce qu'il faut bien voir c'est qu'il y a cet échelon qui est augmenté, mais aussi on a par exemple pérennisé le repas un euro pour les étudiants boursiers et pour les étudiants précaires. Je voudrais rappeler que ce repas à un euro, c'est ce Gouvernement qui l'a mis en œuvre pendant la crise, c'était à l'origine une mesure d'urgence pour aider les étudiants, il n'a jamais été enlevé ce repas à un euro, on l'a toujours maintenu. J'avais annoncé en juin la continuité de ce repas à un euro pour cette année et aujourd'hui on a annoncé cette pérennisation du repas un euro.

CHRISTOPHE BARBIER
Alors que son prix de revient augmente lui avec l'inflation.

SYLVIE RETAILLEAU
Alors que son prix de revient augmente et en même temps on gèle le repas à 3,30 euros parce que je rappelle qu'il y a un tarif social pour tous les étudiants qui est 3,30 euros. Le prix du repas avant était de 8, 9 euros et comme vous le dites avec l'inflation il a augmenté. Donc on gèle les tarifs des repas, on gèle aussi [le tarif] du CROUS pour tous les étudiants, ça aussi c'est une annonce comme les gels des frais d'inscription encore une fois à la rentrée parce qu'on tient compte effectivement de cette crise économique et l'on veut accompagner fortement nos étudiants.

CHRISTOPHE BARBIER
Il n'y aura pas d'inflation pour se loger, pour s'inscrire à la rentrée 2023.

SYLVIE RETAILLEAU
Il n'y aura pas d'inflation, il n'y aura pas d'augmentation des loyers des CROUS, les Ticket Restaurant, que ce soit le ticket à un euro ou bien 3,30 euros et aussi au niveau des tarifs d'inscription pour la rentrée prochaine.

CHRISTOPHE BARBIER
L'étape suivante, est-ce que ce n'est pas de penser à un véritable salaire étudiant ? Un étudiant c'est de la richesse à venir pour le pays, ne faut-il pas rémunérer les étudiants, quitte à les sélectionner plus ?

SYLVIE RETAILLEAU
Alors là où je vous rejoins c'est que l'étape suivante, nous continuons puisque cette première étape comme je le disais était issue de concertations que l'on a menées avec les étudiants depuis octobre 2022 et nous avions annoncé en octobre 2022 cet agenda et cette méthode. Et donc je vous rejoins, on va continuer à travailler avec les étudiants pour faire évoluer ce modèle de bourse qui n'a pas évolué depuis 30 ans et qui doit évoluer. Maintenant sur le revenu universel, je pense que là on a affaire à des adultes, des étudiants et la France a une caractéristique c'est qu'elle est basée sur un modèle sociale solidaire et ça, ça s'apprend aussi. Qu'est-ce que c'est qu'un modèle social solidaire ? C'est un modèle qui est ceux qui en ont le plus besoin et c'est ce fil rouge qui nous guide, c'est-à-dire on veut que tous les étudiants puissent étudier dans les meilleures conditions possibles. Et donc quelque part suivant les revenus de la famille, ceux qui peuvent être aidés, eh bien doivent être idée parce que ça fait partie de cette solidarité, ça fait partie du modèle social, en France le modèle social pour les étudiants, c'est les bourses sur critères sociaux, c'est la restauration, c'est le logement, c'est beaucoup de facettes et je pense qu'on est le, enfin je ne pense pas, j'en suis sûre, le seul pays en Europe à pouvoir avoir ce paquet d'aides sociales pour les étudiants.

CHRISTOPHE BARBIER
Parmi ces engagements annoncés lundi le président de la République a dit qu'il voulait désengorger l'hôpital d'ici 2024, est-ce que les étudiants en médecine seront au rendez-vous, est-ce que vous pourrez fournir la main d'œuvre ?

SYLVIE RETAILLEAU
Alors on y travaille, vous savez qu'il y a une réforme des études en santé qui date de quelques années, deux ans au niveau des premières années, donc on a enlevé le numerus clausus pour pouvoir augmenter le flux d'étudiants en médecine. Il y a eu 18 % d'augmentation des places la première année, il y a ces réformes pour pouvoir justement augmenter le flux d'étudiants et puis on réfléchit actuellement avec François BRAUN et avec les étudiants en médecine pour cette quatrième année au niveau de la médecine générale, justement pour couvrir non seulement ce qu'on appelle les zones blanches mais aussi globalement ce manque de médecin et c'est un gros travail qu'on mène avec le ministère de la Santé et de la Prévention aussi bien au niveau des études de santé qu'au niveau de l'internat ensuite pour pouvoir augmenter le flux mais aussi l'accès à l'hôpital et l'hôpital public en particulier.

CHRISTOPHE BARBIER
L'aile gauche de la macronie, apprend t-on, un peu de politique, s'est réunie le 6 avril pour un dîner autour de Clément BEAUNE, avec Laurence BOONE, Olivier DUSSOPT, Pap NDIAYE, Isabelle ROME et vous-même, ce n'est pas le premier dîner de cette petite équipe, que préparez-vous, un présidentiable pour 2027 ?

SYLVIE RETAILLEAU
Alors ce que je voudrais, donc vous parler de ce dîner, d'abord c'est toujours agréable d'avoir des dîners entre collègues et c'est toujours important et d'autant plus que je voudrais rappeler quand même qu'Emmanuel MACRON, sa signature au départ, c'est de réunir des gens quelle que soit leur étiquette politique et au-delà des clivages politiques, c'est vraiment la signature et aujourd'hui ce gouvernement, il est à cette image qu'a porté notre président, on est d'abord une équipe au-delà de ses clivages politiques autour du projet porté par la Première ministre.

CHRISTOPHE BARBIER
Mais après ?

SYLVIE RETAILLEAU
Mais pour autant et je vais vous répondre, pour autant ce n'est pas parce qu'être une ministre d'abord de la société civile n'empêche pas d'avoir une sensibilité politique et quand on est citoyen, quand on est ministre de la société civile et je voudrais y revenir, eh bien on porte aussi des messages, une vision, qu'elle soit politique, qu'elle soit sociale.

CHRISTOPHE BARBIER
Et la vôtre est à gauche.

SYLVIE RETAILLEAU
Et donc la mienne, elle est aussi finalement d'une ministre de la société civile qui va participer avec sa sensibilité, avec sa vision finalement de la société pour pouvoir la transformer, et je crois que quand on est dans l'enseignement supérieur et la recherche, auprès des jeunes, cette vision, je ne la vois pas seulement au niveau d'un dîner, mais tous les jours au niveau des actions que l'on mène dans le ministère.

CHRISTOPHE BARBIER
Sylvie RETAILLEAU, merci et bonne journée.

SYLVIE RETAILLEAU
Merci.


Source : Service d'information du Gouvernement, le 21 avril 2023