Texte intégral
JEROME CADET
Bonjour François BRAUN.
FRANÇOIS BRAUN
Bonjour.
JEROME CADET
Ministre de la Santé et de la Prévention. Merci d'être avec nous ce matin. J’attends les questions des auditeurs et des auditrices de France Ier pour vous, 01 45 24 7000, ou via l’application France Inter.
François BRAUN, vous dévoilez aujourd’hui les conclusions du CNR Santé, CNR pour Conseil National de la Refondation. Vous avez organisé 250 réunions dans tout le pays, 10 000 personnes y ont participé, dites-vous. On va venir dans une minute à ce que vous, vous voulez changer. D’abord un mot du moment, de la période, est-ce que vous voulez montrer avec ces annonces, que malgré les casserolades, malgré l’opposition des Français à la réforme des retraites, le gouvernement peut encore agir ?
FRANÇOIS BRAUN
Bien sûr. Le gouvernement peut et le gouvernement agit, il continue à agir, tout en comprenant bien entendu qu’il y a une partie de la population qui se plaint de la situation, qui souffre, et en ce qui concerne le domaine de la santé, de l’accès aux soins, j’en prends toute ma part, je comprends ces difficultés de nos concitoyens, mais c'est justement parce qu’il y a des difficultés, que nous ne devons pas nous arrêter, et que je continuer à tracer mon chemin de réformes, de refondation de notre système de santé.
JEROME CADET
Votre prédécesseurs, Olivier VERAN, avait réuni, on s’en souvient, ça n’est pas si vieux, c’était en 2020, le Ségur de la Santé. Consultation des acteurs du système de santé pour prendre des décisions, il faut croire que ça n'a pas marché ou pas suffi. Il fallait à nouveau revoir, consulter tout le monde ?
FRANÇOIS BRAUN
Vous savez, ce CNR santé voulu par le président de la République, c'est quoi ? C'est une nouvelle méthode en fait de travail, avec un objectif : simplifier la vie de nos concitoyens, simplifier la vie des Français. Le Ségur de la Santé était quelque chose très centré sur l'hôpital, si on s'en souvient, avec des moyens historiques qui ont été mis, que ce soit sur les rémunérations des soignants, que ce soit aussi sur la reconstruction, la rénovation des hôpitaux. Mais là, cette nouvelle méthode elle fait partager les difficultés et partager les solutions, par les élus, les soignants, nos concitoyens, à l'échelle de chaque territoire. C'est ça qui est nouveau, c'est cette nouvelle technique. Mais cette technique elle fonctionne, elle marche. Il y a plein d'innovations, plus de 100 projets qui sont en train d'être finalisés, on avance, on avance pour mieux répondre, pour lutter contre les inégalités d'accès à la santé.
ALEXANDRA BENSAÏD
Alors, François BRAUN, on avance, on rentre dans le concret. Au coeur des préoccupations des Français, il y a les déserts médicaux, 30 % de la population vit dans un désert médical, ça c'est un rapport sénatorial de mars 2022. Vous voulez alléger la charge de travail des médecins, pour qu’ils puissent prendre plus de patients. Quelles sont les taches qu’ils pourraient ne plus avoir à effectuer à l’avenir ?
FRANÇOIS BRAUN
Vous savez, je crois qu'il y a une chose qui est importante à dire tout de suite aux Français, c'est déjà de dire la vérité et la vérité c'est qu'on n’aura pas plus de médecins avant 10 ans. Nous en formons plus, certes, mais toujours pas suffisamment, même si nous accélérons d'année en année. Donc il faut bien que les médecins qui sont sur le terrain, déjà continuent à travailler pour les jeunes retraités, et j'ai facilité le travail de ces jeunes retraités, et ensuite aient plus de temps disponible pour soigner.
JEROME CADET
Donc, passé cette période de 10 ans là.
FRANÇOIS BRAUN
Oui, passée cette période de 10 ans, et même changer la façon de travailler, c'est ça qui est important. Je ne demande pas aux médecins de travailler plus, je leur demande de travailler autrement. Travailler autrement c'est quoi ? C'est déjà ne plus faire toutes ces tâches bureaucratiques inutiles, des certificats qui ne servent à rien, des échanges…
ALEXANDRA BENSAÏD
Lesquels ?
FRANÇOIS BRAUN
Par exemple…
ALEXANDRA BENSAÏD
On a beaucoup parlé des certificats médicaux.
FRANÇOIS BRAUN
Très bon exemple. Quand vous avez un enfant à la crèche, il est malade, vous demandez à votre médecin un certificat médical pour ne pas payer les jours de crèche, c'est tout à fait normal. Mais beaucoup trop de crèches redemandent un certificat pour dire que l'enfant est guéri, pour qu'il puisse revenir à la crèche. C'est totalement absurde.
JEROME CADET
Donc ça, c'est terminé.
FRANÇOIS BRAUN
Ça, c'est terminé.
JEROME CADET
Les crèches ne pourront plus demander ou n'auront plus l'obligation de demander un certificat médical aux parents.
FRANÇOIS BRAUN
Elles ne l'ont jamais eu, simplement ce que je dis suite à une mission que j'ai demandée à un médecin un généraliste, c'est, je dis : ces certificats ne doivent plus être faits, les médecins pourront dire non, les médecins diront non, et voilà.
JEROME CADET
Et les crèches seront tenues d'accueillir les enfants qui reviendront sans certificat.
FRANÇOIS BRAUN
Elles le sont déjà. Il y a une dérive sur des certificats, on demande un certificat à un médecin pour tout et n'importe quoi maintenant.
ALEXANDRA BENSAÏD
Autre sujet, les certificats de décès. Est-ce que les infirmières vont pouvoir les signer ? On sait que dans certains territoires c'est compliqué d'avoir un certificat de décès. Et quand, si ça se passe, quand ?
FRANÇOIS BRAUN
Vous voyez les… Typiquement, c'est un des résultats des réunions du CNR santé. Ça a été demandé la première fois sur l'île de la Réunion. C'est eux qui ont soulevé le problème. Et puis on s'est rendu compte que dans plein de territoires il y avait cette difficulté, cette difficulté qui est dramatique pour les familles, quand vous avez une personne décédée à domicile et que vous n'arrivez pas à avoir un certificat de décès, parfois au bout de plusieurs heures, voire dizaines d'heures, eh bien nous lançons, je démarre une expérimentation dans les prochaines semaines, sur 4 régions françaises, dont bien sûr l'île de la Réunion, qui va permettre, après une formation, puisqu'il faut une formation complémentaire pour ces infirmières, de signer des certificats de décès. On va gagner du temps, les familles vont être là aussi libérées de cette charge. On simplifie.
ALEXANDRA BENSAÏD
Les médecins n'ont pas l'air, tous les médecins n'ont pas l'air très convaincus par le fait que les infirmières soient habilitées. Qu'est-ce que c'est cette formation ? C’est pour les rassurer les médecins ?
FRANÇOIS BRAUN
Non, c'est une formation aussi pour bien expliquer aux infirmières comment on fait un diagnostic de décès. Vous savez, ça a l'air tout bête de dire que quelqu'un est mort, que quelqu'un est décédé. De par mon métier d'avant, oserais-je dire…
ALEXANDRA BENSAÏD
Aux urgences.
FRANÇOIS BRAUN
Ce n’est pas toujours si simple.
ALEXANDRA BENSAÏD
Anesthésiste réanimateur.
FRANÇOIS BRAUN
Voilà, donc il faut bien préciser les éléments de diagnostic d'une mort. Quand c'est un patient qu'un infirmier suit de façon chronique, qui a une maladie très grave, bon, on comprend bien qu’il va facilement pouvoir dire que cette personne est décédée. Quand c'est une personne qu’il ne connaît pas, c'est un petit peu plus délicat.
JEROME CADET
Appel aux infirmiers et infirmières, qui en ce moment montent des collectifs un peu partout en France, qui demandent une meilleure rémunération des actes médicaux et des frais kilométriques qui n'ont pas été réévalués depuis plus de 10 ans. Est-ce que ça va changer ?
FRANÇOIS BRAUN
Ça change. Ça change déjà. Les infirmiers, les infirmières, sont un des éléments clés de notre système de santé, bien entendu, et tous les Français ont leur infirmier ou leur infirmière quasiment. Alors, ça change dans trois axes principaux par rapport à ces infirmiers et ces infirmières. Le premier, c'est leur formation. Je rénove à partir de septembre, les 3 ans de formation des infirmiers, pour que ça réponde plus aux besoins, qu'on n'ait pas ce décalage entre la formation et des besoins, et le métier réel. Nous modifions aussi le décret d'actes des infirmiers. Ça peut sembler anodin, mais aujourd'hui les infirmiers ont une liste d'actes qu'ils ont le droit de faire, moi je veux qu'ils aient des missions. On leur confie des missions et au sein de ses missions eh bien ils feront les actes nécessaires. Ça c'est la formation. Leur exercice professionnel, il est complètement modifié, un exercice pluriprofessionnel, en coordination avec les médecins, des accès directs possibles pour la prise en charge des plaies chroniques, on modifie leur exercice professionnel pour le rendre plus attractif, plus responsabilisant, et enfin la rémunération, on a changé le mode de rémunération, avec ce bilan de soins infirmiers, je double le financement, plus de 200 millions d'euros sont mis sur la table entre 2020 et 2024, et des frais kilométriques dont vous parlez, pour être tout à fait précis, eh bien il y a la possibilité de les aménager, territoire par territoire, en fonction des difficultés.
JEROME CADET
Un dernier mot sur les certificats, est-ce que vous allez changer l'arrêt concernant les certificats sportifs ?
FRANÇOIS BRAUN
Alors, les certificats sportifs, là aussi et je travaille avec Amélie OUDEA-CASTERA, la ministre des Sports, pour arrêter de demander des certificats pour tout. Lorsqu'on fait de la compétition, c'est tout à fait logique, lorsqu'on fait du sport plaisir, qu'on a 15 ans, qu'on n'a pas de problèmes de santé, je crois qu'il faut être là raisonnable. Je donne un exemple : il faut un certificat…
JEROME CADET
Donc, ça continue pour la compétition, ça s'arrête quand il n’y a pas de compétition.
FRANÇOIS BRAUN
Oui, je pense que c'est beaucoup plus raisonnable. Il faut un certificat médical aujourd'hui pour faire de la pétanque. Voilà. Alors ça peut sembler absurde, donc j'ai cherché pourquoi. Pourquoi, c'est parce que dans la pétanque il y a la boule lyonnaise, et la boule lyonnaise il faut prendre quelques pas d'élan. Donc voilà. Revenons un peu dans quelque chose de raisonnable, de simple, simplifions la vie des médecins et…
JEROME CADET
Ça, ce sera pour la rentrée de septembre, François BRAUN.
ALEXANDRA BENSAÏD
François BRAUN, une autre piste, puisque vous voulez libérer le temps des médecins, elle vient de votre confrère Gabriel ATTAL, le ministre des Comptes publics, il dit : il y a trop de consultations perdues, les gens ne viennent pas. Alors, on estime qu'il y en aurait 27 millions de consultations perdues chaque année. Le ministre des Comptes publics dit : on pourrait faire une taxe à ceux qui posent des lapins. Si vous ne vous présentez pas, le remboursement du rendez-vous suivant serait minoré d'une somme qui pourrait être de 10 €, il y aurait 5 € qui iraient au professionnel de santé et 5 € à l'Assurance maladie. Est-ce que la taxe lapin, François BRAUN, ça vous paraît, vous y êtes favorable ?
FRANÇOIS BRAUN
Je dis, sur ce sujet : attention. Attention de ne pas entraîner un renoncement aux soins. Ça peut sembler rien 5 €, mais pour bon nombre de nos concitoyens c'est important. Alors de quoi parle-t-on ? Je crois que c'est ça qu'il faut remettre un petit peu sur la table. On parle de 27 millions, 27 millions est un chiffre ancien, qui part sur une évaluation, sur quelques départements d'Alsace…
ALEXANDRA BENSAÏD
Vous pensez que c’est combien vous ?
FRANÇOIS BRAUN
C'est 3,5 % des consultations, et ce n’est pas moi qui le dis…
ALEXANDRA BENSAÏD
Ça ne nous aide pas. En chiffres ?
FRANÇOIS BRAUN
9 millions. Ce n'est pas moi qui le dis, ce sont les plateformes de prise de rendez-vous, vous savez c'est Maiia, KelDoc, Doctolib. Eux ont des chiffres très précis. Les chiffres qu'ils me donnent, c'est un, c'est 7 % donc c'est beaucoup, chez les médecins qui n'ont pas ce type de plateforme, c'est 3,5 % chez ceux qui ont cette plateforme. Pourquoi ? Parce que la plupart du temps on ne fait pas exprès de ne pas venir à un rendez-vous médical, on peut oublier, ça existe, c'est pour ça que ces plateformes vous renvoient un SMS un jour avant, quelques heures avant…
JEROME CADET
Donc il faut passer davantage par les plateformes à l'avenir ?
FRANÇOIS BRAUN
Je dis simplement que, avec les plateformes c'est 3,5 %, 9 millions de rendez-vous, c’est encore trop, c'est encore trop, c'est pour ça que je travaille avec elles pour qu'on arrive à diminuer encore ce chiffre.
JEROME CADET
Mais vous ne vous étiez pas parlé avec Gabriel ATTAL avant qu'il ne fasse cette proposition-là ? Vous ne semblez pas d'accord.
FRANÇOIS BRAUN
Non, mais c'est une proposition qui est sur la table depuis pas mal de temps. Moi, mon rôle de médecin, mon rôle d’ancien médecin, mon rôle de ministre de la Santé et de la Prévention, c'est de dire : attention à ce que le remède ne soit pas pire que le mal, c'est-à-dire qu'on n'entraîne pas du renoncement aux soins qui serait dramatique.
JEROME CADET
La question des malades chroniques, François BRAUN, 700 000 dans notre pays n’ont pas de médecin traitant. Il y a un mois, le gouvernement a promis à ces malades qu'on leur proposerait une solution avant la fin de l'année. Les caisses d'Assurance maladie devaient contacter avant l'été chaque patient en affection longue durée, sans médecin traitant, où en est-on ?
FRANÇOIS BRAUN
Alors, c'est un engagement du président de la République, j'ai confié cette mission effectivement à la Sécurité sociale. Tous les patients qui sont, les patients chroniques, on parle d'affections longue durée, mais aussi des patients qui peuvent être en situation de handicap, ont été contactés par courrier, par courriel, par SMS, par les Caisses d'assurance maladie, pour leur dire déjà : est-ce que vous êtes d'accord pour qu'on cherche un médecin traitant ? C'est la première étape.
ALEXANDRA BENSAÏD
Et ils vous répondent ?
FRANÇOIS BRAUN
S’ils ne répondent pas, c'est qu'ils sont d'accord. C'est un peu le principe, si vous voulez, c'est la même chose qu'on a fait pour ce carnet de santé numérique, mon espace santé, il y a très peu de refus et ensuite les gens sont contactés un par un, on leur demande déjà s'ils voient un médecin régulièrement, on leur demande s'ils ont un médecin spécialiste qui les suit régulièrement ou pas…
JEROME CADET
Donc ça, ça sera la deuxième étape.
FRANÇOIS BRAUN
C'est déjà en route. C'est déjà en route, je peux vous dire par exemple que, en Seine-Saint-Denis où j'étais la semaine dernière, 25 % des patients concernés on leur a déjà trouvé un médecin traitant. Donc c'est en route, ça avance, ça fonctionne, ça c'est l'esprit du CNR Santé.
ALEXANDRA BENSAÏD
François BRAUN, en vous écoutant, on se dit que vous n'êtes décidément pas pour réguler l'installation des médecins sur les territoires, pourtant plusieurs députés, certains de la majorité vous l'ont demandé en décembre dernier. Il y a toujours des médecins qui vont s’installer en Côte d'Azur où il y a déjà beaucoup trop de médecins. Donc ça, finalement, pas de régulation, on ne les contraindra pas. Pourquoi est-ce que vous êtes contre ?
FRANÇOIS BRAUN
Je ne suis pas contre, pour des raisons de protection d'une profession ou d'un autre, je suis contre parce que ça ne marche pas, et ça a même un effet contre-productif. Alors, je vous donne un exemple. Moi ce qui m'importe, c'est que les gens soient en bonne santé. Ça semble logique, c'est mon devoir. Pour qu'ils soient en bonne santé, il faut qu'ils puissent avoir accès à un médecin en fonction bien sûr de leur état de santé, d'où ils sont etc. Vous dites : on a trop de médecins sur la Côte d'Azur. Je ne sais pas ce que ça veut dire trop de médecins. On fait une moyenne nationale, on dit : ceux qui sont au-dessus c'est trop, ceux qui sont en dessous ce n'est pas assez. Je ne sais pas, je pense que globalement nous manquons de médecins partout. Ce qui m'intéresse par exemple c'est de voir la durée de vie, quel est l'âge de durée de vie. Par exemple dans un département qui est identifié comme un désert médical, et par exemple sur la Côte d'Azur, eh bien on vit moins longtemps sur la Côte d'Azur que dans des départements du Centre de la France, pourtant on a moins de médecins. Alors, je fais ce raccourci et ce n’est pas dire moins on voit le médecin mieux on se porte comme dit la sagesse populaire, mais c'est simplement pour vous dire que l'indicateur, c'est-à-dire l'élément qu'on va prendre, il est déterminant, et nous n'avons pas d'éléments précis. En plus, vouloir imposer l'installation des médecins dans un désert médical, il y en a partout des déserts médicaux, donc on va choisir comment, qui va choisir, selon quels critères ? La première chose qu'on va faire avec ça, c'est réussir à dégoûter les jeunes de vouloir faire de la médecine générale, de la médecine libérale. C'est ça l’effet contre-productif.
JEROME CADET
Alors, les jeunes justement, parlons-en de François BRAUN. Les internes, ces médecins qui sont en cours de formation, ils sont 30 000 en France, qui soignent, diagnostiquent, opèrent dans nos hôpitaux, ils n'en peuvent plus, une partie d'entre était en grève vendredi dernier, les nuits blanches qui s'enchaînent, les semaines à rallonge jusqu'à 100 heures, les burn-out, beaucoup tiennent disent-ils à coups d'antidépresseurs. Vous avez dit François BRAUN que leurs revendications étaient justes. Qu'allez-vous faire ?
FRANÇOIS BRAUN
Alors, j'ai dit effectivement qu’il n'est pas normal qu'on ne respecte pas le cycle de travail, le temps de travail, pour ces médecins qui sont des médecins en formation. C'est essentiel. C'est essentiel parce qu'ils doivent être bien sûr dans de bonnes conditions pour apprendre et pour prendre en charge les patients. C'est déjà quelque chose qui est demandé, qui est imposé, c’est les règles du travail, aux établissements de santé. Et j'ai dit très clairement que je ferai de la chasse à ces établissements qui ne respectent pas les règles.
ALEXANDRA BENSAÏD
Vous avez commencé ?
FRANÇOIS BRAUN
Oui, j'ai commencé, j'ai demandé qu'on me fasse remonter les informations. Vous savez, ce n'est pas des informations, quand je demande à un établissement : vous faites travailler les internes correctement ? Ils me disent tous oui bien entendu. Donc c'est pour ça que j'ai demandé aux internes, j’ai dit : faites-moi remonter les situations, les cas, ça concerne principalement les internes de chirurgie, par exemple, il faut être précis, qui peuvent opérer que tard le soir, à qui on demande d'être de nouveau dans le service le lendemain matin, de nouveau tenir les…
JEROME CADET
Mais vous voulez dire qu’ils ont d'autres solutions que celle-là, c’est-à-dire que la charge de travail est mal répartie en fait, c'est ça ?
FRANÇOIS BRAUN
La charge de travail est mal répartie, bien entendu…
JEROME CADET
Certains médecins ne travaillent pas à assez, et ils font travailler les internes à leur place ?
FRANÇOIS BRAUN
Non, il ne faut pas dire les choses comme ça. Je veux dire que certains médecins s'appuient beaucoup, beaucoup trop, sur des internes qui je le rappelle sont des médecins en formation, à qui on doit donner des responsabilités bien entendu, mais des responsabilités qui sont raisonnables par rapport à leur niveau de formation.
JEROME CADET
Donc ce n'est pas un problème de manque de médecins global, c'est un problème de répartition de la charge de travail, si je vous comprends bien.
FRANÇOIS BRAUN
C'est un problème malheureusement ancien, de fonctionnement de nos hôpitaux, de formation, où les internes étaient il y a plusieurs dizaines d'années souvent identifiés comme taillables et corvéables à merci, parce que, « ils étaient là pour apprendre leur métier ». Ce n'est plus vrai, ce n'est plus le cas, on n’apprend pas son métier en travaillant 80, 100 heures par semaine.
ALEXANDRA BENSAÏD
Concernant les services d'urgences, Emmanuel MACRON a redit dans son allocution il y a 2 semaines qu'il fallait désengorger les services d'urgences, et il a même fixé une date limite, c’est d'ici la fin de l'année prochaine. Il faut des résultats concrets à court terme. Vous qui êtes un ancien urgentiste, un ancien président du syndicat SAMU urgences de France, est-ce que vous croyez que c'est possible ?
FRANÇOIS BRAUN
Ah mais non seulement je le crois, mais j'en suis absolument certain. Vous savez, quand je suis arrivé dans ce ministère, alors c'est peut-être parce que je suis issu comme on dit de la société civile, on a commencé à me dire : ah non, ça ce n’est pas possible, ça on n'y arrivera pas. Je parle de de la crise de l'été, par exemple, la crise du MonkeyPox, qu'on a un petit peu oubliée, notre triple épidémie…
ALEXANDRA BENSAÏD
La variole.
FRANÇOIS BRAUN
Voilà, donc moi plus on me dit que c'est impossible, plus je suis certain qu'on va y arriver.
ALEXANDRA BENSAÏD
Oui mais désengorger des urgences, François BRAUN, vous comprenez bien que pour les gens qui ont passé des nuits là sur des fauteuils ou dans les couloirs, ça fait des années qu'on en parle.
FRANÇOIS BRAUN
Oui, le diagnostic est connu, le traitement aussi. Alors le traitement c'est quoi, pour désengorger les urgences ? D'abord c'est travailler en amont des urgences, avant que les gens aillent aux urgences, et ça c'est le service d'accès aux soins. Ce service d'accès aux soins, je le généralise sur tout le territoire avant la fin de l'année.
ALEXANDRA BENSAÏD
Ça veut dire, on appelle le 15, avant la fin de l'année tout le monde appelle le 15 et qu'est-ce qu'il se passe ?
FRANÇOIS BRAUN
Ça veut dire : votre médecin traitant n'est pas disponible, vous avez un problème que vous considérez urgent, vous appelez le 15. Au 15 vous avez ce que l'on appelle la personne qui va décrocher en premier, c’est un assistant de régulation médicale. C'est un métier extraordinaire et je vous annonce qu'on va lancer une grande campagne de recrutement pour ces assistants de régulation médicale, là à partir de de ce mois.
ALEXANDRA BENSAÏD
Parce qu'il n’y en a pas assez.
FRANÇOIS BRAUN
Il n’y en a pas assez. Donc ils évaluent en 30 secondes la situation et ils vous passent un médecin. C'est grave, ils vous passent un médecin urgentiste, c'est moins grave, ils vous passent un médecin généraliste, voire même maintenant certains ont mis la possibilité d'avoir accès un gériatre, à un pédiatre, à un psychiatre.
ALEXANDRA BENSAÏD
Mais est-ce que, alors là ce sont des médecins de ville, dont on parle, est-ce que les médecins de ville ils adhèrent, est-ce que, parce que vous avez tenté déjà des expérimentations de ce sas, est-ce qu’ils sont assez nombreux à participer au système ?
FRANÇOIS BRAUN
Les médecins de ville adhèrent, parce qu'ils ont bien compris que c'était une solution aussi pour faciliter leur travail au quotidien. Et puis le fameux règlement arbitral, c'est-à-dire ces décisions qui ont été prises après l'échec de la première partie de discussions de la convention avec la Sécurité sociale et les médecins, réintègre des mesures que j'avais prises cet été en arrivant, qui est de rémunérer mieux les médecins qui acceptent de faire cette régulation médicale, et les médecins qui acceptent de réaliser les actes sur la demande de cette régulation médicale. Cela fonctionne, cela diminue la fréquentation des services d'urgences, cela entraîne une meilleure prise en charge des patients. Vous parlez de la médecine de ville, François BRAUN, beaucoup d'appels de médecins au 01 45 24 7000. C'est le cas notamment de Yannick qui nous appelle d'Alsace.
Source : Service d’information du Gouvernement, le 4 mai 2023