Interview de M. Christophe Béchu, ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, à Public Sénat le 3 mai 2023, sur les violences dans les manifestations du 1er mai, la lutte contre les blacks blocs, la réforme des retraites, la transition écologique, le vélo, la sécheresse et le débat concernant l'autoroute A 69.

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Média : Public Sénat

Texte intégral

ORIANE MANCINI
Bonjour Christophe BECHU.

CHRISTOPHE BECHU
Bonjour.

ORIANE MANCINI
Merci beaucoup d’être notre invité politique ce matin. Ministre de la Transition écologique et de la Cohésion des territoires. On est ensemble pendant un peu plus de vingt minutes. On va commencer en parlant du climat social. Et ces manifestations du 1er mai qui ont donc été émaillées de violence ; Elisabeth BORNE les a dénoncées dans l’hémicycle de l’Assemblée. Un nouveau palier a été franchi, a-t-elle dit ? Est-ce que vous redoutiez une radicalisation du mouvement et que de nouveaux paliers soient encore franchis lors des prochaines journées ?

CHRISTOPHE BECHU
Je ne redoute pas d’abord, je constate. Je constate qu’on a effectivement franchi un cap. Je constate qu’avec plus de 400 policiers blessés à l’occasion d’une journée du 1er mai, on est sur des chiffres qui sont tristes et qui ne devraient, à vrai dire, réjouir personne. Et je refuse à la fois l’amalgame qui consisterait à dire que c’est la suite logique ou c’est l’accompagnement de la manifestation ou de la contestation sociale. Et je déplore qu'il n’y ait pas une bien plus grande unanimité pour dénoncer ces violences qui discréditent les manifestations en marge décalée se passent, mais qui surtout entretiennent une espèce de petite musique dangereux qui fait qu’en gros, elles seraient excusables, compréhensibles, minimisables comme si on pouvait tolérer qu'il y ait la moindre parcelle de violence dans la République et dans la démocratie.

ORIANE MANCINI
Mais qui entretient cette musique, pour vous ?

CHRISTOPHE BECHU
Tous ceux qui justifient, qui expliquent que c'est parce que le Gouvernement n'écoute pas, ou que ce serait lié aux violences policières ou aux consignes qui ont été données. Commencer à mettre un « mais » dans une phrase qui consiste à condamner les violences, c'est déjà s'écarter de ce qui devrait être une colonne vertébrale républicaine pour chacun.

ORIANE MANCINI
Et qui le fait précisément ?

CHRISTOPHE BECHU
Evidemment, d'abord, Jean-Luc MELENCHON qui souffle sur les braises, qui a tenu des propos sur la police qui sont juste inacceptables en donnant le sentiment que c’est elle qui est à l'origine de ces violences. Mais ce que je regrette au-delà de sa position à lui, c'est la petite musique d'ambiance qui tend à s'accoutumer, à s'habituer à ces violences et à leur donner à la fois une sorte - comment dirais-je - de gage. On en a connu par le passé, il y en a déjà eu au cours de ces dernières semaines. C'est parce qu’il n’y a pas eu de concessions. Enfin, si on ne commence pas par une dénonciation absolue de ce sujet ; où on va ? Un jour, on expliquera que le manque de respect de son voisin ou le fait de ne pas avoir été entendu sur tel ou tel texte, ça justifie d'aller casser sa fenêtre ou de crever ses pneus.

ORIANE MANCINI
Donc, il entretient la violence, Jean-Luc MELENCHON, pour vous ?

CHRISTOPHE BECHU
Mais bien entendu. Par son silence, par la manière dont il dit les choses et même par la petite musique qui laisserait entendre que c’est faute d'obtenir des avancées dans un cadre démocratique que les choses se passent de cette manière. Ce n’est juste pas possible.

ORIANE MANCINI
Votre ville, Angers, a été touchée. Elle fait partie des villes qui ont été assez fortement touchées par les violences lundi, avec des dégradations, des affrontements en centre-ville. Comment vous réagissez face à ces violences dans votre ville ?

CHRISTOPHE BECHU
Je suis écœuré, comme l'écrasante majorité des Angevins et comme une large partie de ceux qui ont manifesté en marge du 1er mai. Quand vous avez des individus qui prennent des barres à mine pour faire en sorte de fissurer l'égide de l'Hôtel de ville ; quel est le sens de ça ? Quel est le prétexte pour lesquels on fait des choses… A quoi sert de casser des abribus alors que ça rend un service à la population ? Et comment, dans la tête, on se retrouve à va venir à une manifestation, quel que soit le sujet, avec un mortier d'artifice ou un cocktail molotov en se disant que c'est un mode d'expression qui est entendable ? Donc, il y a à renforcer et à durcir à la fois les sanctions contre ceux qui sont pris et il y a au-delà de ça à être dans une posture globale dans lesquelles on les sort totalement du jeu : d'abord des manifs, mais ensuite potentiellement, de nos rues avec les règles qui vont bien. Comment le jour d'une fête du Travail, qui que ce soit peut trouver normal, que 405 hommes et femmes qui faisaient leur travail de policier et de forces de l'ordre et qui protégeaient la manifestation se retrouvent blessés à un moment ou à un autre ?

ORIANE MANCINI
Mais il y a des interrogations sur le fait que le Gouvernement sait que des blacks blocs vont venir, anticipe la venue de ces blacks blocs, mais ne les empêche pas d'agir. Est-ce qu’il faut durcir le droit ?

CHRISTOPHE BECHU
Oui.

ORIANE MANCINI
Il faut changer la loi pour lutter contre ces blacks blocs ?

CHRISTOPHE BECHU
J’ai un principe qui est très simple : est-ce qu’en l'état actuel du droit, on a les moyens de l'empêcher ? Non. Quand bien même, on a les renseignements qui nous laissent penser que des individus viendraient ; il n'y a pas aujourd'hui d’arsenal juridique qui avait une disposition dans la loi anticasseur qui a été cassée par le Conseil constitutionnel. Remettre sur le métier le texte en se demandant quelle est la formule qui permettrait - comme il y a des interdictions de stade - de trouver un dispositif qui permette d'empêcher la venue à la manifestation ou à défaut que ce soit une circonstance aggravante pour une condamnation après la manifestation. Ça me semble être le moins dégressif.

ORIANE MANCINI
Donc, c’est-à-dire comme pour le stade, les fichiers, leur demander de pointer au commissariat au moment des manifestations ?

CHRISTOPHE BECHU
Il y a certainement plusieurs chemins juridiques. La seule chose que je sais, c'est que notre responsabilité aujourd'hui, c'est de protéger ceux qui nous protègent. Et on ne peut pas continuer à se retrouver dans une situation où on laisse des policiers et des policières être en première ligne face à des expressions de violence comme celles qu'on a pu constater.

ORIANE MANCINI
Mais le Gouvernement va préparer une nouvelle loi anticasseur, anti-blacks blocs ?

CHRISTOPHE BECHU
On est à quelques jours. Juste après, ça n'est pas mon périmètre ministériel direct, mais il ne vous a pas échappé qu’il y avait d'abord des voix plus largement dans le pays qui s’étaient exprimées y compris ici au Sénat et que le ministre de l'Intérieur avait été très clair sur le sujet et qu'il le souhaitait.

ORIANE MANCINI
Vous êtes ministre de la Cohésion des territoires. Le maire de Lyon - Grégory DOUCET - lui aussi, dont la ville a été touchée par les violences, demande à l'Etat un fonds pour les commerçants touchés par ces violences. Vous y êtes favorable ?

CHRISTOPHE BECHU
Des fonds, le Gouvernement en a mis beaucoup en place, y compris le Fonds vert. Je suis d'ailleurs très heureux d'être sur votre plateau pour annoncer que nous avons, cette nuit, officiellement, franchi le millième lauréat du Fonds vert. On va faire partir un communiqué de presse dans les minutes qui viennent. Il s'agit de l'école des hirondeaux et des hirondelles dans une commune de 1 700 habitants des Yvelines qui va bénéficier de fonds pour rénovation. Ensuite, l'accompagnement de ceux qui sont victimes - parce que je vais quand même répondre à votre question - l'accompagnement de ceux qui sont victimes de ces violences et les processus d'indemnisations y correspondent, dans chaque ville, à la possibilité qu'on a pour agir. Le Gouvernement, aujourd'hui, n’est pas dans une logique qui consiste à aller mettre en place des fonds d'indemnisation nationaux par rapport à des débordements qui peuvent être locaux et qui sont suivis localement par les préfectures et par les mairies.

ORIANE MANCINI
Donc, plutôt non à la demande de Grégory DOUCET ?

CHRISTOPHE BECHU
Tout à fait.

ORIANE MANCINI
Le Conseil constitutionnel va se prononcer, tout à l'heure, sur la validité du RIP, du référendum demandé par la gauche. Vous redoutez une décision qui pourrait relancer la contestation ?

CHRISTOPHE BECHU
D'abord, redouter ne change rien à la décision du Conseil constitutionnel et ensuite, je pense que les raisons pour lesquelles le premier référendum d'initiative populaire a été écarté, conduiront sans doute au rejet du deuxième. Ce serait présomptueux d'aller expliquer qu’il y aurait en quelque sorte un âge limite de départ en retraite qu'on ne pourrait pas dépasser quelles que soient les circonstances que nous rencontrerons. Une génération ne doit pas se dire qu'elle va fixer une sorte de bornes ou de limites indépassables. Si on a augmenté la durée de cotisations et reculer l'âge de départ à la retraite, c'est parce que l'espérance de vie augmente et beaucoup de pays autour de nous, pour ne pas dire tous, l'ont déjà fait dans des proportions plus importantes. Que ce ne soit pas populaire, c'est certain ; aucune réforme des retraites ne l'a été. Que ce soit nécessaire, c'est tout aussi certain.

ORIANE MANCINI
Il y a un texte qui suscite beaucoup d'espoir chez les opposants et chez les syndicats, c'est la proposition de loi du groupe LIOT qui s'est examiné le 8 juin à l'Assemblée, qui vise à l'abrogation de la réforme des retraites. Est-ce que vous pensez qu'elle sera votée et que vos anciens amis des républicains apporteront suffisamment de voix pour qu’elle le soit ?

CHRISTOPHE BECHU
Le 8 juin c'est encore dans longtemps ; beaucoup de choses vont se passer d'ici là. Mais c'est quand même pour moi une vraie déception de penser que des gens qui ont fait campagne pour défendre la candidature de madame PECRESSE qui aient proclamé haut et fort qu’avec elle, ce serait les 65 ans comme âge de départ de la retraite ; ont dans un premier temps expliqué que 65 ans, ce serait trop. Puis que 64, pour une partie d'entre eux c'était trop, et que 63, ce serait à peine acceptable, qui aujourd'hui prennent des positions qui sont exactement inverse à celle qu'ils ont défendu devant les électeurs, il y a un peu plus d'un an. Et je considère qu’on ne gagne pas en crédibilité, en cohérence et même en respect de la part des électeurs quand on change de position selon qu'on soit dans la majorité ou dans l'opposition. La constance et la cohérence, on en a besoin. Et ce ne sont pas les qualités qu’une partie des députés LR, pas tous, mais qu'une partie des députés LR ont démontré pendant l'examen du dossier des retraites.

ORIANE MANCINI
Un manque de crédibilité chez les républicains, pour vous ?

CHRISTOPHE BECHU
Bien sûr. Quand vous changez d'avis en fonction de l'endroit où vous siéger dans l'hémicycle, je pense que ça ne rassure pas les Français sur la fiabilité et sur la force des convictions que vous pouvez avoir.

ORIANE MANCINI
Et un manque d'autorité d’Eric CIOTTI, le président du parti qui, lui, soutient la réforme.

CHRISTOPHE BECHU
Il a été élu jusqu'avant, je ne veux pas ni le blâmer ni accabler qui que ce soit. J'ai préféré son attitude. Et là, le fait qu'il est 1 800 votes en cohérence avec ce qu'il a dit plutôt que ceux qui ont tenté de se faire un nom sur cette réforme des retraites.

ORIANE MANCINI
Notamment Aurélien PRADIE ?

CHRISTOPHE BECHU
Oui, au détriment de l'intérêt général. Et courir après une aventure personnelle, ça n'a évidemment rien d'illégitime en démocratie ; mais le faire dans un contexte comme celui que nous connaissons et avec un système de répartition qui est en déséquilibre puisque nous avons moins de deux actifs aujourd'hui par retraité ; ça n'est ni digne ni très glorieux.

ORIANE MANCINI
On voit le Président de la République, les ministres, qui sont chahutées lorsqu'ils se déplacent sur le terrain avec notamment des concerts de casseroles. Est-ce que, vous-même, vous avez dû renoncer à des déplacements ? Les déporter, les différer ou modifier les parcours ?

CHRISTOPHE BECHU
Renoncer, non. Ce n'est ni de mon tempérament ni à la manière dont je vois les choses. En revanche, j’ai eu à des droits des comités d'accueil. A Vesoul, la semaine dernière, où je me suis rendu pour aller à la rencontre de l'Association des Maires. La veille, dans les Pyrénées Orientales où je suis venu parler sécheresses avec les acteurs de ce département qui sont particulièrement touchés y compris dans une forêt au Mans pour venir repérer des dispositifs de prévention des incendies ; bref. Mais très bien que certains continuent de manifester qu'ils le fassent avec des ustensiles de cuisine.

ORIANE MANCINI
Ça n’a pas de conséquences pour vous ?

CHRISTOPHE BECHU
Ce que je veux dire, c'est qu’il y a eu, à chaque réforme des retraites, des contestations, des manifestations, des votes des expressions populaires ; et à aucune occasion d'alternance, ceux qui avaient combattu ces réformes ne sont ensuite revenus dessus. Tout simplement parce que la démographie ne ment pas et que la situation dans laquelle on se trouve aujourd'hui, elle nous emmène dans une impasse si on ne modifie pas les règles parce qu'on vit plus longtemps. C'est que, encore une fois, tous les pays européens ont fait avant nous. Il n’y a rien d'original dans ce que fait la France ; elle le fait même avec un peu de retard sur ses voisins.

ORIANE MANCINI
Et pour vous, la gauche, le Rassemblement national, qui disent qu'elles reviendront sur cette réforme s’ils arrivent au pouvoir, ne le feront pas ?

CHRISTOPHE BECHU
Ecoutez, quand, encore une fois, je le redis, tous ceux qui se sont opposés à des textes par le passé, ne sont jamais revenus dessus quand ils se sont trouvés en responsabilité.

ORIANE MANCINI
On va parler de transition écologique. Elisabeth BORNE a présenté la feuille des 100 jours la semaine dernière, avec une partie sur l'écologie, notamment une loi sur l'industrie verte. Est-ce que vous pouvez nous en dire plus sur ce que contient cette loi ? Vous avez plus de détails ?

CHRISTOPHE BECHU
Bien sûr. Quatre grands chapitres : d'abord, un premier qui consiste à faciliter les implantations industrielles à partir d'une idée simple. C'est que ce qu'on produit en Europe a un meilleur bilan carbone que ce qu'on produit au bout du monde ; il n’y a pas besoin de l'amener jusqu'ici. Et puis, nos usines ne sont pas alimentées par des centrales à charbon mais par du nucléaire qui est une énergie autrement plus propre. Donc comment est-ce qu'on facilite avec du foncier clairement, avec des procédures qui aillent plus vite ? Non pas qui soient moins exigeantes d'un point de vue environnemental mais qu'on puisse conduire en parallèle à un certain nombre de processus. Le deuxième volet, c'est la question du financement. On a aujourd'hui une offensive américaine avec l'Inflation Reduction Act qui permet d’aller subventionner massivement une partie de ces technologies vertes pour aller vers l'électrification, vers les énergies renouvelables. Il faut qu'il y ait une réponse qui soit européenne sur ces sujets. Comment est-ce qu'on est capable d'aller mettre en place des financements en mobilisant l’épargne privé, en faisant en sorte de permettre des crédits ou des remises d'impôts. Troisième volet, c'est celui qui consiste à favoriser, ça n'est pas un gros mot, par la commande publique l'industrie française ou européenne. Et on pense en particulier aux voitures électriques en disant ça. Comment est-ce qu'on fait en sorte d'utiliser les leviers qui sont les nôtres plutôt que d’aller subventionner de manière indirecte l'industrie chinoise pour aider la réindustrialisation ?

ORIANE MANCINI
Donc changer les règles ?

CHRISTOPHE BECHU
Bien sûr.

ORIANE MANCINI
Et changer les règles notamment européennes. Il y a trop de naïveté de la part de l'Union européenne ?

CHRISTOPHE BECHU
Evidemment, trop de naïveté. Pendant longtemps, on a considéré que le fait d'être ouvert au monde et de faire en sorte de jouer librement, j'allais dire, le commerce était un système viable. Bilan, on se retrouve aujourd'hui à une échelle européenne avec une naïveté qui consiste à verser des subventions à des pays qui, eux, en retour, ne nous en versent pas. Ça a, pendant des années, accéléré une forme de désindustrialisation. Sortir de cette naïveté, c'est assumer le fait qu'il y a une préférence européenne ou française dans la commande publique et dans les soutiens qui peuvent être apportés. Et c'est une nécessité parce qu'on est dans un temps où ce sujet de transition écologique, il est partout. Il y a une forme de Yalta industriel qui est en train de s'implanter dans les grandes filières. Par exemple, des voitures électriques, des énergies renouvelables, de toutes les technologies bas carbone. Et il est crucial que dans cette phase, on puisse le faire. C'est ce qui se passera en facilitant des implantations, en finançant mieux la transition écologique, en faisant en sorte de favoriser les commandes et enfin en permettant, dans le cadre de ce PJL, d'accélérer la formation de celles et ceux dont on a besoin pour travailler dans le champ du nucléaire où il y a des milliers d'emplois qui vont être rendus nécessaires par ce qui est en train de se passer. Mais pas seulement ; beaucoup d'emplois d'ingénieurs, en particulier et avec un enjeu de féminisation aussi sur tout ça qui est extrêmement fort.

ORIANE MANCINI
Parmi les autres annonces d’Elisabeth BORNE, un comité interministériel sur le vélo, ce sera quand et ça pourrait déboucher sur quoi ?

CHRISTOPHE BECHU
Ce sera vendredi. En tout début d'après-midi, j'aurai l'occasion avec Clément BEAUNE d'accueillir l'ensemble des partenaires du vélo. Il faut se souvenir que le premier plan vélo qui n’ait jamais été présenté à l'échelle de notre pays, il date de 2018. Elisabeth BORNE était la ministre des Transports qui l'a présenté. En 2018, on avait annoncé (je m'en souviens parce que les annonces avaient été faites à Angers par Edouard PHILIPPE) 50 millions d'euros par an pendant sept ans pour le vélo. Et non seulement, cet argent a été dépensé, mais il l’a été beaucoup plus vite que ce qui était prévu. Tant et si bien que dans le cadre du plan de relance, il y a des crédits supplémentaires qui ont été annoncés. Et au début de cette année, la Première ministre a indiqué que pour l'année 2023, c'était 250 000 millions d'euros pour la seule année qui allait être mis en place, en particulier pour accompagner la réalisation d'infrastructures, des soutiens divers etc.. L'enjeu, là, c'est de regarder au-delà de l'année 2023 et c'est ce que nous allons faire dans ce comité interministériel vélo, vendredi en début d’après-midi.

ORIANE MANCINI
Donc, de nouveaux moyens ?

CHRISTOPHE BECHU
Quelle politique cyclable pour les années qui arrivent et jusqu'à la fin du quinquennat et, sans rien vous dévoiler…

ORIANE MANCINI
Un peu quand même.

CHRISTOPHE BECHU
Nous avons évidemment une ambition qui continue à se tourner vers le vélo pour plein de raisons. D'abord, c'est évidemment un mode de transport totalement décarboné qui ensuite est bon pour la santé. Et on a des enjeux industriels. Il y a un député qui a fait un rapport le député GOUFFIER-CHA sur l'intérêt qu'il y aurait à imiter le Portugal en particulier qui fait en sorte de produire des vélos européens de façon plus importante. Je pense qu'il y a, là aussi, à la frontière entre le PJL industrie verte dont on parlait et les enjeux de transition écologique, des enjeux autour du développement d'usine qui puissent nous permettre d'améliorer cette filière vélo. Le ministre délégué à l'industrie qui est un grand cycliste - Roland LESCURE – y est attentif, comme Clément BEAUNE, comme moi-même ; on est convaincu que ça fait partie des choses à faire avec la Fédération des usagers de la bicyclette en particulier.

ORIANE MANCINI
Il y a quelques jours dans le journal Le Parisien, Emmanuel MACRON annonçait un grand projet de restauration écologique des écoles. Là aussi, quand sera-t-il lancé et comment allez-vous accompagner les élus et les communes, puisqu'il a parlé de les accompagner ?

CHRISTOPHE BECHU
Il sera lancé le 9 mai. C'est précis, c'est dans une semaine, un peu moins même maintenant, avec une présentation de ce que sont les trois leviers, les trois outils qui vont être mis en place dans le cadre de cette rénovation. Le premier, j'en ai indirectement parlé en vantant les mérites de ce fonds vert qui est un immense succès puisqu'on a dépassé les 10 000 dossiers déposés. 2 milliards d'euros d'aide pour tout ce qui est bon pour le climat ou la biodiversité. Ça correspond à un doublement des enveloppes de soutien aux collectivités. C'était 2 milliards d'euros en année normale ; on est passé à 4 milliards en 2023 et ce fonds sera pérennisé. Donc, on va d’abord repréciser ce qui est une partie de l’Irak.
Deuxième levier, le tiers financement. J'ai évoqué le fait qu'il y avait une forme de chantier du siècle qui était possible. On a 400 millions de mètres carrés de bâtiments publics. L'enjeu, c'est qu'on a modifié le code de la commande publique. Ça s'est passé il y a quelques jours au mois d'avril de manière définitive, avec un texte voté à l'unanimité à l'Assemblée et au Sénat et qui permet de lisser les investissements en n'étant pas obligé de commencer par payer les travaux mais de le faire au fur et à mesure des années grâce aux économies d'énergie qu'on réalise. Et enfin, la banque des territoires qui est de la Banque des territoires qui est donc le nom de mon commercial de la Caisse des dépôts et consignations, présentera un dispositif que je lui ai demandé de concevoir et de mettre en place d'appui à l'ingénierie pour que les collectivités puissent à la fois avoir les leviers de financement mais les conseils pour lancer cette rénovation. Et l'ambition, c'est 10 000 écoles d'ici la fin du quinquennat dont nous pourrons lancer la rénovation.

ORIANE MANCINI
Parmi les inquiétudes, il y a évidemment la question de la sécheresse. Début mars, vous appeliez les préfets à signer sans trembler des arrêtés sécheresse. Quelle est la situation aujourd'hui ? Et notamment peut-être sur le front des pénuries d'eau puisqu'il y a des communes qui connaissent des pénuries d'eau. Combien de communes sont en tension actuellement ?

CHRISTOPHE BECHU
On a terminé l'été 2022 avec des nappes au plus bas. Nous n'avons pas eu un automne qui a permis de les recharger et on a même eu une sécheresse hivernale avec 32 jours sans pluie. On a eu un mois de mars qui, globalement, a été bénéfique pour le nord et l'ouest de la France, mais sans pluie sur le pourtour méditerranéen et le couloir rhodanien. A la minute où on se parle, on a donc 75% du pays dans lequel les nappes phréatiques sont en-dessous des normales de saison mais on a des inquiétudes très concentrées sur le pourtour méditerranéen, la Corse et le couloir rhodanien, où on a à la fois les niveaux les plus bas, les recharges les plus basses et les perspectives qui ne sont pas les plus réjouissantes. Et dans ces territoires, on a déjà atteint les niveaux crise sur une partie du Var, des Bouches-du-Rhône et sur le département des Pyrénées orientales où il n'a pas plu depuis un an, pas de pluies significatives. On est dans cette anticipation, j'ai eu l'occasion il y a quelques jours seulement de tenir un nouveau comité d'anticipation sécheresse. Après l'été qu'on a vécu, on a lancé 500 travaux d'interconnexion dans divers endroits de France parce que vous l'avez dit : on a eu près de 1 000 communes qui ont connu des difficultés d'eau potable, près de 400 qui ont été alimentés par citernage, 200 par des bouteilles en plastique et à la minute où on se parle, on a à nouveau des communes qui sont dans cette situation.

ORIANE MANCINI
Combien ?

CHRISTOPHE BECHU
Certaines depuis plusieurs semaines, on est en train de consolider ce chiffre, on aura un dispositif qui nous permettra de le connaître en temps réel quand l'été va commencer, mais on est un peu en avance de phase, à ce stade, c'est encore très faible, c’est 4 par exemple pour le département des Pyrénées-Orientales, ce chiffre était le plus élevé pendant l'été dernier. Mais on est évidemment à la fois inquiet et concentré pour faire en sorte d'avoir les remontées d'infos et de pouvoir accompagner les territoires. Ça permet de bien mesurer en creux qu'on doit faire davantage de travaux pour interconnecter les collectivités entre elles, il faut qu'on arrive à trouver un chemin entre la mutualisation des services d'eau, parce que, continuer à gérer en communes isolées, ça n'est pas possible, il faut dire que les trois quarts des communes qui ont plus de 50% de taux de fuite, ce sont des communes qui gèrent toutes seules leur eau potable, et qui ne le font pas dans un cadre intercommunal, il faut rappeler que l'écrasante majorité des communes qui ont des problèmes d'eau potable, c'est parce qu'elles gèrent seules ou avec des toutes petites unités leur système d'eau. Donc il faut qu'on arrive à trouver, à pousser à l'intercommunalité ou à défaut, puisque le président de la République a dit qu’il pourrait y avoir des formes plus souples qui sont à travailler en particulier avec le Sénat, qu'on ait des regroupements de communes pour arrêter d'avoir des communes isolées, c'est une condition absolue pour être capable de faire face à ces sécheresses qui malheureusement s‘annoncent…

ORIANE MANCINI
Ce sera sur la base du volontariat ou ça sera sur…

CHRISTOPHE BECHU
Non, ça ne sera pas sur la base du volontariat, nous allons clairement… il y a aujourd'hui une obligation d'intercommunalités, la réflexion, c'est de légèrement l'assouplir pour rendre possibles d'autres formes d'associations, en revanche, l'interdiction de la gestion en communes isolées de l'eau potable, elle est extrêmement claire, elle était déjà dans les textes, et elle le restera.

ORIANE MANCINI
Dans quelques instants, on va avoir un débat sur l'autoroute A 69, dont les travaux ont commencé, Clément BEAUNE l’a appelé hier, qui doit relier Castres à Toulouse, est-ce que vous défendez ce projet, et Clément BEAUNE hier a dit qu'il voulait discuter avec le concessionnaire pour des améliorations sur les aspects environnementaux, vous les souhaitez, lesquels ?

CHRISTOPHE BECHU
Le ministre délégué des Transports a dit que l'autoroute se ferait, que les travaux avaient commencé et qu'on ne pouvait pas comparer des projets pour lesquels il pouvait y avoir une nouvelle analyse à ce stade, y compris parce que certains peuvent être très vieux, et que, il est toujours souhaitable, y compris dans un temps d'accélération de la transition écologique, de se demander si les bilan coûts/avantages sont à la hauteur. En ce qui concerne Toulouse-Castres, on a, à la fois, une déclaration d'utilité publique, des décisions de justice, une agglomération d'un peu plus de 100.000 habitants qui est la seule à ne pas être raccordée par une deux fois deux voies à sa capitale régionale. Et donc, il peut y avoir des améliorations, mais elles seront à la marge par rapport aux besoins de réaliser le projet, d'autant que, pour avoir regardé le dossier, l'idée qui consisterait à doubler la nationale plutôt que l'autoroute, elle entraînerait presque le double en termes de coupures d'arbres qui serait rendue nécessaire, et c'est un des points qui provoque des réactions de la part d'associations ou de collectifs. Donc, il faut être très clair, les années qui viennent ne sont pas des années dans lesquelles on va accentuer les investissements routiers, au contraire, la priorité, c'est le ferroviaire, c’est d'insister sur la régénération, c'est les modes de mobilité douce, c’est l’électrification du pays, mais pour autant, ça ne veut pas dire qu’il faut mettre tout le pays sous cloche et qu'il n'y a pas des endroits où on a des besoins de projets routiers qui permettent d'aller faire du désenclavement, et la France n'est pas un pays isolé, et les écologistes sont en responsabilité en Allemagne, le gouvernement vient de rendre publics les 100 ou 140 dossiers sur lesquels il apporte en Allemagne un soutien à des projets routiers, on est dans la même optique, priorité au ferroviaire, mais nécessité d'aller accompagner des voies qui sont parfois nécessaires en terme de désenclavement.

ORIANE MANCINI
Merci Christophe BECHU, merci beaucoup d'avoir été notre invité.

CHRISTOPHE BECHU
Merci à vous.

ORIANE MANCINI
Et on va justement débattre de ce projet d’A69…

CHRISTOPHE BECHU
Bon débat, bonne journée.

ORIANE MANCINI
Merci. Bonne journée à vous.


Source : Service d’information du Gouvernement, le 4 mai 2023