Déclaration de Mme Agnès Pannier-Runacher, ministre de la transition énergétique, sur l'accélération des procédures liées à la construction de nouvelles installations nucléaires et le fonctionnement des installations existantes, à l'Assemblée nationale le 16 mai 2023.

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Circonstance : Commission mixte paritaire

Texte intégral

Mme la présidente
L’ordre du jour appelle la discussion, sur le rapport de la commission mixte paritaire, du projet de loi relatif à l’accélération des procédures liées à la construction de nouvelles installations nucléaires à proximité de sites nucléaires existants et au fonctionnement des installations existantes

(...)

Mme la présidente
La parole est à Mme la ministre de la transition énergétique.

Mme Agnès Pannier-Runacher, ministre de la transition énergétique
Mesdames et messieurs les députés, vous avez une nouvelle fois la responsabilité de vous prononcer sur un texte majeur pour bâtir l’indépendance énergétique de notre pays ; la responsabilité de vous prononcer sur un texte qui contribuera au défi du siècle, à libérer notre pays de sa dépendance aux énergies fossiles ; la responsabilité, enfin, de vous prononcer sur un texte qui permettra à notre pays de produire une énergie abondante, compétitive et décarbonée. L’objectif du Gouvernement est clair : atteindre la neutralité carbone d’ici à 2050. Cela suppose de réduire drastiquement notre consommation de pétrole et de gaz fossile, lesquels représentent encore deux tiers de notre consommation d’énergie finale.

Pour relever l’immense défi de long terme qui consiste à nous libérer des énergies fossiles, nous devrons bâtir un consensus politique qui transcende les étiquettes partisanes. C’est l’un des principaux apprentissages du rapport de la commission d’enquête rendu par vos deux collègues, Raphaël Schellenberger et Antoine Armand :…

M. Raphaël Schellenberger
Merci ! J’espère que vous avez tout écouté.

Mme Agnès Pannier-Runacher, ministre
…notre politique énergétique ne peut pas se permettre de subir à nouveau des atermoiements et des décisions erratiques qui ne se fondent ni sur la science ni sur la raison, mais sur des accords électoralistes de circonstance.

M. Stéphane Travert
Bravo !

Mme Agnès Pannier-Runacher, ministre
Je suis convaincue que nous posons, depuis quelques mois, les fondations d’un pacte du renouveau énergétique, un pacte pour faire face à l’urgence climatique et à l’urgence énergétique, un pacte qui repose sur des discussions nourries et approfondies entre le Gouvernement et le Parlement, mais également avec les élus locaux, les associations environnementales, les entreprises et, plus largement, l’ensemble des Français. Je salue d’ailleurs les milliers de nos concitoyens qui ont contribué à la grande concertation sur le futur mix énergétique de notre pays. Je me réjouis qu’ils s’emparent de ces sujets complexes, certes, mais déterminants pour notre avenir. L’énergie est aujourd’hui au cœur du débat public et de nombreux travaux parlementaires ; il est donc essentiel que nous y travaillions ensemble. Comme j’ai souvent eu l’occasion de le dire, il n’y aura pas d’indépendance politique sans maîtrise énergétique.

Après l’adoption des textes sur la sécurisation de nos approvisionnements énergétiques et sur l’accélération de la production d’énergies renouvelables, je souhaite, avec le projet de loi d’accélération des procédures administratives nucléaires, poursuivre la relance de notre filière nucléaire. Je me réjouis de l’accord trouvé en commission mixte paritaire, au terme d’un dialogue dense. Je tiens à remercier le président Guillaume Kasbarian, la rapporteure Maud Bregeon, les députés Louise Morel et Antoine Armand ainsi que les autres membres de la commission pour leur investissement, qui a permis ce succès. Je sais que les rapporteurs ont nourri un dialogue intense lors des travaux préparatoires à la commission mixte paritaire.

Le texte envoie un signal fort de mobilisation à notre filière en vue du lancement du programme de construction de six EPR 2 – réacteurs pressurisés européens – et de la mise à l’étude de huit autres supplémentaires. Nous ne nous interdirons pas d’aller plus loin, en fonction de la réalité de nos capacités industrielles.

Vous le savez, l’enjeu des compétences est au cœur de la transition énergétique. C’est particulièrement vrai pour la filière nucléaire. C’est la raison pour laquelle je lui ai demandé de dresser un état des lieux précis des besoins en compétences pour réussir la relance. Les résultats de l’étude réalisée sont limpides : 100 000. Tel est le nombre d’emplois que la filière estime nécessaire de créer au cours de la prochaine décennie. Des soudeurs, des chaudronniers, des tuyauteurs ou encore des ingénieurs ; autant d’occasions, pour les jeunes ou les travailleurs en reconversion, de prendre part au plus grand projet industriel de notre pays depuis les années 1970, au cœur des territoires. Ils seront les visages de la génération France Nation verte. Dans le prolongement de ce travail, je ferai également le point avec l’université des métiers du nucléaire, début juin, sur la stratégie de formation à mettre en œuvre pour répondre à ces besoins de compétences.

Ce projet de loi sur le nucléaire matérialise plus profondément le soutien du Gouvernement et du Parlement à une politique énergétique ambitieuse et crédible. À ce titre, je me félicite de notre refus, tout au long de l’examen du texte, d’opposer nucléaire et énergies renouvelables. Je le répète : notre urgence est de sortir des énergies fossiles ; pour y parvenir, nous aurons besoin autant du nucléaire que des énergies renouvelables.

M. Ian Boucard
La majorité a bien changé !

Mme Agnès Pannier-Runacher, ministre
Je vous le dis avec conviction : oui, accélérer le déploiement des énergies renouvelables, c’est être écologiste. Oui, relancer notre filière nucléaire, c’est être écologiste. Comment se dire écologiste en préférant les énergies fossiles aux énergies décarbonées ? (Mme Anne-Laurence Petel applaudit.)

Avec ce projet de loi, nous accélérons également le renforcement de l’ensemble de la filière, notamment par la montée au capital d’EDF, par des investissements pour moderniser notre outil de production, comme à Framatome, au Creusot, dans la continuité du plan France Relance, et avec le plan France 2030 pour investir et inventer les nouvelles technologies nucléaires.

Cette ambition, je la défends au-delà de nos frontières, puisque je m’emploie, depuis plusieurs mois, à réunir nos partenaires européens au sein d’une Alliance du nucléaire civil : nous sommes désormais quatorze États membres, auxquels il faut ajouter le Royaume-Uni, à travailler aux côtés de la Commission européenne pour que l’énergie nucléaire trouve sa place dans le mix énergétique européen. Ce matin même, j’ai réuni mes homologues au ministère de la transition énergétique pour faire le point sur les projets de nouveaux investissements dans le nucléaire. Mon déplacement sur le chantier britannique de l’EPR d’Hinkley Point, il y a trois semaines, aux côtés du président-directeur général d’EDF, Luc Rémont, visait, lui aussi, à défendre notre savoir-faire d’excellence à l’export.

Voter définitivement ce texte, c’est permettre à notre pays de réaliser une grande avancée écologique en mobilisant tous les leviers de décarbonation pour lutter contre le réchauffement climatique. C’est conjuguer réindustrialisation et maîtrise énergétique. C’est lancer le chantier du siècle en matière d’industrie et d’emplois.

La prochaine loi de programmation sur l’énergie et le climat, dont je vous détaillerai prochainement la préparation, devra être ambitieuse et réaliste, compte tenu de nos capacités. J’en serai la garante.

M. Ian Boucard
On est rassuré…

Mme Agnès Pannier-Runacher, ministre
Je nous invite donc à poursuivre collectivement le travail lancé pour bâtir la souveraineté énergétique de notre pays. (Applaudissements sur les bancs des groupes RE et Dem.)


source https://www.assemblee-nationale.fr, le 24 mai 2023