Texte intégral
SOPHIE PEYRIDIEU
Bonjour Isabelle ROME.
ISABELLE ROME
Bonjour.
SOPHIE PEYRIDIEU
Vous êtes à Pau depuis hier, vous serez à Tarbes aujourd'hui, pour voir sur le terrain ce qui se fait en matière de lutte contre les violences faites aux femmes, ce que vous avez pu voir. Qu'est-ce qu'il en ressort globalement à Pau, est-ce qu'on est plutôt en avance, en retard par rapport à d'autres villes, ou dans la moyenne finalement ?
ISABELLE ROME
Alors j'ai trouvé que Pau était une ville très mobilisée, j'ai pu notamment faire une déambulation avec des élus, des associations, pour découvrir le dispositif "Angela", donc dans lequel peuvent s'impliquer des commerçants, aujourd'hui 39 commerçants de cette ville sont impliqués, et en fait ils sont des lieux refuges pour des personnes qui peuvent se sentir harcelées, menacées, insultées, lorsqu'elles déambulent en ville, et ce que j'ai trouvé très intéressant c'est que la ville s'était bien approprié ce dispositif puisqu'en fait les commerçants sont formés et donc on leur apprend bien sûr à accueillir, à orienter, à réagir, justement face à de telles victimes.
SOPHIE PEYRIDIEU
C'est important que tout le monde se sente impliqué justement dans ce problème du harcèlement ?
ISABELLE ROME
Oui, je pense que c'est extrêmement important que la société tout entière se mobilise, donc l'État évidemment, les collectivités territoriales évidemment, les associations, et là, voyez, ce sont les commerçants, je trouve que cette prise en charge, par la communauté, des violences, est extrêmement intéressant, parce que, oui, ces violences nous concernent toutes et tous, et il heureux, aujourd'hui, de voir que la société entière se mobilise.
SOPHIE PEYRIDIEU
Mais il faut quand même, encore et toujours, informer, expliquer, c'est le but aussi de cette campagne qui a été lancée avec des flyers qui sont distribués partout en France, qui vont l'être pendant les mois qui viennent ?
ISABELLE ROME
Oui, tout à fait, je pense que cette campagne de sensibilisation, donc lancée par le ministre de l'Intérieur, va dans ce sens-là, de grande sensibilisation, et puis aussi il faut que les personnes se sentent de plus en plus en sécurité, alors je pense que c'est l'objectif, la liberté d'aller et de venir est une liberté fondamentale, il faut que chacune et chacun puisse l'exercer dans notre démocratie. Il y a quelques jours aussi j'étais avec le ministre des Transports, Clément BEAUNE, dans une station de métro pour une marche exploratoire, c'est important, ce sont des femmes qui réalisent ces marches, et qui justement regardent, vérifient à quels endroits elles peuvent se sentir en insécurité, pour que toutes les mesures soient prises pour améliorer leur quotidien, parce que c'est vraiment le quotidien aussi qu'on doit améliorer pour que toutes et tous se sentent en sécurité.
SOPHIE PEYRIDIEU
Oui, ça veut dire qu'aujourd'hui on n'en fait pas encore suffisamment assez pour protéger les femmes.
ISABELLE ROME
Je pense qu'on en fait de plus en plus, et notamment depuis 2017, depuis que le président de la République a déclaré l'égalité femmes-hommes grande cause du quinquennat, beaucoup a été fait, mais on voit que sans cesse on doit aller plus loin, s'améliorer, renforcer, c'est ce que nous ne cessons de faire.
SOPHIE PEYRIDIEU
Alors, effectivement, si on s'intéresse au volet le plus dramatique de ces violences faites aux femmes, il y a des féminicides, les chiffres ne baissent pas, pourtant c'est votre priorité ?
ISABELLE ROME
Oui, c'est pour moi toujours effarant le voir ces féminicides et pourtant, voilà, je crois que nous avons beaucoup fait, nous avons multiplié les places d'hébergement d'urgence, renforcé énormément les formations des forces de l'ordre, des magistrats, renforcé les dispositifs de protection, comme les téléphones grave danger, on en avait 300 en 2019, on en a 4 000 aujourd'hui, les bracelets anti-rapprochement, la présence aussi d'intervenants sociaux dans les commissariats, voilà, je pourrais vraiment multiplier, mais là nous allons…
SOPHIE PEYRIDIEU
Alors, ça veut dire quoi, qu'il y a un blocage, qu'est-ce qu'on peut faire ?
ISABELLE ROME
Alors je pense qu'il y a deux choses, je pense qu'il faut aller plus loin, c'est ce que nous faisons notamment en créant des pôles spécialisés dans les tribunaux, en mettant aussi en place une mesure de protection d'urgence dans les 24 heures, c'est aussi ce que je souhaite faire avec le déploiement d'un dispositif "pack nouveau départ" pour aider les femmes à retrouver une autonomie, j'allais dire, sur le plan matériel…
SOPHIE PEYRIDIEU
Parce que c'est très compliqué effectivement de s'en aller quand on est dans une situation très difficile et qu'en plus on est dépendante économiquement.
ISABELLE ROME
Quand on est déjà très dépendant psychologiquement il faut pouvoir avoir une aide matérielle, c'est l'objectif du "pack nouveau départ" que de pouvoir accompagner justement ces femmes sur tous les aspects de la vie matérielle et quotidienne, et puis aussi, ne l'oublions pas, c'est aussi agir en amont dans le champ de l'éducation, de la prévention, c'est-à-dire que bien sûr qu'il faut protéger, et c'est ce que nous ne cessons de faire et de renforcer, avec les outils que j'ai pu vous citer, mais aussi prévenir la récidive, mais aussi éviter que les violences ne se commettent, et donc c'est tout ce que nous devons faire, mais vraiment toutes et tous, en termes d'éducation, prévention, sensibilisation…
SOPHIE PEYRIDIEU
Vous parlez d'éducation, effectivement on pense au dernier fait divers, enfin un des derniers faits divers là, puisque les parents de la jeune Lindsay, là dans le Pas-de-Calais, qui s'est suicidée parce qu'elle était harcelée il y a 15 jours, ont porté plainte hier, notamment contre l'État, le collège, et le ministre de l'Education lui-même a dit "on n'a pas réussi, c'est un échec collectif", donc ça veut dire que là aussi on sait ce qui se passe, mais on ne fait rien ?
ISABELLE ROME
Je pense qu'on ne peut pas dire qu'on ne fait rien, c'est un échec collectif et c'est très douloureux, et bien sûr aussi j'ai pensé pour Lindsay et bien sûr ses parents, sa famille…
SOPHIE PEYRIDIEU
Mais ça continue ce harcèlement, c'est ce qu'elle nous expliquait ce matin, on l'a entendu.
ISABELLE ROME
Mais quand même, enfin le ministre fait aussi beaucoup avec la mise en place d'un programme spécifique contre le harcèlement, le programme pHARe, la mise en place d'ambassadeurs contre le harcèlement, moi-même j'ai pu rencontrer un certain nombre, des jeunes élèves qui sont identifiés, pour à la fois sensibiliser aussi les autres, parce qu'on sait aussi que l'entourage par les pairs est important…
SOPHIE PEYRIDIEU
Mais visiblement ce n'est pas toujours suffisant.
ISABELLE ROME
Ce n'est pas toujours suffisant, il faut toujours aller plus loin.
SOPHIE PEYRIDIEU
Merci beaucoup Isabelle ROME, je rappelle que vous êtes ministre déléguée chargée de l'Egalité entre les femmes et les hommes, vous étiez à Pau hier, vous serez à Tarbes aujourd'hui justement pour voir un petit peu sur le terrain ce qui se passe en matière de lutte contre les violences faites aux femmes et la discrimination en général.
ISABELLE ROME
Merci.
Source : Service d'information du Gouvernement, le 5 juin 2023