Déclaration MM. Bruno Le Maire, ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, et Roland Lescure, ministre délégué chargé de l'industrie, sur le projet de loi relatif à l'industrie verte, au Sénat le 31 mai 2023.

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Intervenant(s) : 
  • Bruno Le Maire - Ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique ;
  • Roland Lescure - Ministre délégué chargé de l'industrie

Circonstance : Audition devant la Commision des affaires économiques du Sénat

Texte intégral

Mme Sophie Primas, présidente. - Dans le cadre de nos travaux sur le projet de loi relatif à l'industrie verte, qui sera examiné en séance publique à partir du 20 juin prochain, nous recevons M. Bruno Le Maire, ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, et M. Roland Lescure, ministre délégué chargé de l'industrie.

L'examen de ce projet de loi a été renvoyé à la commission des affaires économiques, mais 12 articles, sur les 19 que compte le texte, ont été délégués au fond respectivement à la commission du développement durable, des lois et des finances. C'est pourquoi nous avons le plaisir d'accueillir ce soir nos collègues des quatre commissions.

Monsieur Le Maire, vous vous êtes donné comme objectif de remonter la part de l'industrie dans le PIB français de 10 à 15 %. Il s'agit bien entendu de recréer de l'emploi ; mais il s'agit aussi et surtout, de s'assurer que la France conservera, dans les années à venir, des capacités de production autonome, en particulier dans les secteurs critiques qui soutiendront la transition verte et, bien entendu, dans les secteurs stratégiques pour la souveraineté française.

Nous partageons ces objectifs, confer le rapport que nous avons publié avec Amel Gacquerre. Il me semble aussi que la philosophie générale du projet de loi, qui vise à concilier de manière dynamique développement industriel et transition verte, doit être saluée : c'est pour nous une évidence, mais il est indispensable de répéter que la transition écologique ne se fera pas contre nos industriels, mais avec eux et grâce à eux.

Nous partageons donc votre ambition. Mais je dois vous dire que le détail des mesures proposées dans le texte nous laisse, au mieux, sur notre faim. Vous nous promettiez, le 16 mai, "des instruments révolutionnaires" ; nous n'avons trouvé que des mesures techniques et ultra-ciblées, qui ne nous semblent pas cibler particulièrement la décarbonation de l'industrie ni la création d'industries vertes en France. Vous nous expliquerez en quoi il y aurait "rupture" avec des décennies d'industrie carbonée, nous sommes sceptiques.

Avant que mes collègues rapporteurs ne vous interrogent sur les articles qui relèvent de leur périmètre, je vous poserai quelques questions d'ordre général.

Premièrement, vous avez annoncé des mesures fiscales, notamment un crédit d'impôt "investissements industries vertes", mais sa création est renvoyée à la prochaine loi de finances. Or, tous les industriels avec lesquels nous échangeons insistent sur le fait que ce sont ces dispositions fiscales, ainsi que le volet "aides publiques", qui seront le plus incitatives pour eux. Face aux financements massifs consentis par le gouvernement américain dans le cadre de l'Inflation Reduction Act (IRA) et alors qu'il y a urgence à attirer de nouveaux investissements, vous le dites vous-même, pourquoi perdre les six prochains mois ?

Deuxièmement, nous avons besoin de clarifications sur le périmètre des industries qui seront éligibles aux dispositions prévues par le projet de loi. Je pense aux procédures dérogatoires en matière d'urbanisme, pour lesquelles on parle tantôt de "secteurs des technologies favorables au développement durable", tantôt de projets concourant à la "transition écologique"… Quels seront ces secteurs ? Comment seront-ils définis et sur quels critères ?

Il y a une question d'articulation avec le droit européen, puisque le futur règlement "Net zero industry", en cours de négociation, vise, comme votre projet de loi, à faciliter l'implantation d'industries vertes en Europe et à flécher des financements. La place du nucléaire dans ce règlement fait débat. Ce n'est pas une question anodine pour la France, et nous souhaiterions des clarifications sur le traitement de la filière nucléaire dans le projet de loi.

Enfin, au Sénat, chambre des territoires, vous ne pouviez pas ne pas être interrogé sur le fameux article 9, qui réussit l'exploit à faire l'unanimité contre lui, alors que tout le monde s'accorde sur sa finalité, qui est d'accélérer les délais administratifs d'implantations industrielles. Cet article crée une nouvelle procédure d'autorisation d'urbanisme qui permettrait au préfet, pour des projets qualifiés par décret "d'intérêt national majeur pour la souveraineté nationale ou la transition écologique", de mettre en compatibilité d'office l'ensemble des documents de planification et d'urbanisme concernés, pour permettre la réalisation du projet. À ce stade, aucune concertation avec les élus locaux n'est prévue.

Vous justifiez cette disposition par la nécessité d'aller vite. C'est faire porter aux collectivités et aux élus locaux la responsabilité de longueurs procédurales qui ne sont pas de leur fait mais, nous le savons tous, qui découlent surtout de la surabondance des règles, et de l'incapacité de services déconcentrés de l'État devenus faméliques à traiter et accompagner correctement les projets qui émanent des territoires.

Personnellement, je ne connais pas un seul maire ou un seul président de région qui s'opposerait au développement économique de son territoire. Mais peut-être en connaissez-vous, Monsieur le Ministre, et peut-être pourrez-vous nous expliquer pourquoi, selon vous, seul l'État serait capable de faire vite et bien.

Cette procédure "hyper-dérogatoire" de l'article 9 est d'autant plus inacceptable qu'aucune disposition n'est prévue, parallèlement, pour exempter les collectivités et les régions où seraient implantés ces grands projets industriels du décompte du "zéro artificialisation nette" (ZAN), et ceci contrairement à l'engagement qui avait été pris par votre collègue Christophe Béchu lors de l'examen de la proposition de loi sénatoriale "ZAN" dans notre hémicycle, en mars dernier. Qu'en sera-t-il ? Comment envisagez-vous de traiter ces grands projets, et les projets industriels de manière générale, au regard du "ZAN" ? Les représentants de la commission spéciale "ZAN" ne manqueront pas de vous interroger plus précisément à sujet.

M. Bruno Le Maire, ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique. - Je suis très heureux de vous présenter pour la première fois ce projet de loi sur l'industrie verte. Il est décisif pour accélérer la réindustrialisation de notre pays et réussir la transition écologique.

Nous avons une dette et nous avons un défi.

Nous avons une dette vis-à-vis de la Nation en matière industrielle, après quatre décennies de délocalisations industrielles au nom du concept fumeux de "l'industrie sans usine" porté par les élites politiques et économiques, à l'unanimité ou presque, pendant des années. Ce concept fumeux s'est traduit par 2,5 millions emplois détruits, 600 usines fermées, et une industrie qui passe de 20 à 10 % du PNB, alors qu'elle est restée à 23 % en Allemagne et à 18 % en Italie. Cette dette industrielle, c'est un drame économique pour notre nation qui a perdu de ses capacités de production, c'est un drame social en particulier pour les ouvriers et leurs familles ; et c'est un drame écologique, parce que tout ce qui n'est plus produit en France dans des conditions environnementales satisfaisantes est importé de pays qui ne respectent pas les mêmes conditions environnementales. Dans le fond, tous les efforts que nous faisons pour réduire nos émissions de CO2 sur le territoire national sont plus qu'effacés par l'importation de CO2 de pays extérieurs à l'Union européenne.

Depuis six ans, avec le Président de la République, nous avons engagé cette reconquête industrielle et nous l'avons fait en prenant toutes les décisions courageuses que d'autres ont refusé de prendre, je pense en particulier aux décisions fiscales qui ne sont pas les plus populaires mais qui sont les plus nécessaires à l'industrie.

L'industrie, c'est du capital, et garder une imposition très lourde sur le capital, c'était ruiner notre industrie. L'industrie, c'est de la compétitivité, et garder des impôts de production sept fois plus élevés que nos voisins allemands, c'était ruiner notre industrie. L'industrie, c'est un ensemble de compétences, et dévaloriser des métiers industriels alors que nous avons besoin de chaudronniers, de soudeurs, de techniciens de maintenance, d'ingénieurs, c'était tuer notre industrie.

En six ans, nous sommes parvenus à renverser la tendance : 300 usines se sont ouvertes, nous avons quasiment rattrapé la moitié du nombre de fermetures, et pour la première fois depuis trente ans, des emplois industriels ont été créés, 90 000 au total. Nous avons même réussi l'exploit de recréer de nouvelles filières industrielles, c'est une première depuis Airbus.

L'usine "gigafactory" de batteries électriques que j'ai inaugurée hier à Douvrin, après quatre années de scepticisme généralisé, va nous permettre de rattraper notre retard par rapport à la Chine en matière de production de batteries électriques - et si l'un d'entre vous doutait de la capacité de la France à gagner cette bataille industrielle, je l'invite à visiter cette usine qui montre que nous avons les technologies, le savoir-faire, l'envie, le financement, les entreprises privées et la vision de long terme qui nous ferons remonter à 15 % la part de l'industrie dans le PNB, ces prochaines années.

Nous avons également un défi, c'est la transition écologique, elle change radicalement la donne de l'économie mondiale.

D'abord parce qu'elle demande une électricité décarbonée massive. C'est la raison pour laquelle le président de la République a présenté un plan en trois axes : sobriété, énergies renouvelables, développement de nouvelles énergies nucléaires. En deuxième lieu, parce que, comme l'a parfaitement indiqué le rapport Pisani-Ferry, nous allons avoir des besoins de financement de l'ordre de 60 à 70 milliards d'euros pour cette décarbonation. Et en troisième lieu, parce que cette transition écologique nous place face à un choix politique, au sens le plus noble du terme. Car pour réduire les émissions de CO2, il y a deux grandes options : la première, c'est la décroissance, c'est-à-dire produire moins et importer plus - cette solution, nous la refusons ; la seconde option, c'est la croissance verte, qui consiste à produire plus, mais à produire mieux, en investissant massivement dans les technologies vertes et dans l'industrie verte. C'est la voie que nous vous proposons avec ce projet de loi sur l'industrie verte.

Qu'est-ce que l'industrie verte ? C'est à la fois la décarbonation des industries existantes, et la production de nouvelles technologies et de nouveaux produits verts - les deux axes sont complémentaires.

Je le dis avec beaucoup de force à tous les ouvriers qui s'inquiètent, à tous les ingénieurs, à toutes les petites et moyennes entreprises (PME) industrielles qui maillent notre territoire, dont vous êtes les représentants : nous ne laisserons pas tomber l'industrie traditionnelle. Notre objectif n'est pas de remplacer une industrie par une autre, mais de décarboner l'industrie existante.

Dans le même temps, nous voulons produire de nouvelles technologies vertes, de nouveaux produits verts. C'est ce que j'appelle les "Big Five", les cinq grandes technologies essentielles à la transition écologique que sont les pompes à chaleur, les panneaux photovoltaïques, les batteries électriques, l'hydrogène vert et les produits éoliens.

Comment y parvenir et comment ce projet de loi va y aider, en réalisant une révolution industrielle verte ? Car je vous répondrai sans attendre, Madame la Présidente, ce texte représente bien une révolution dans la conception des projets, dans leur financement et dans leurs ambitions.

Le premier défi auquel nous sommes confrontés, quand on se place avec pragmatisme du côté de l'investisseur qui cherche à s'agrandir ou à s'implanter en France, c'est de disposer de terrain disponible rapidement pour l'industrie. Une fois qu'un terrain a été identifié, il faut que les procédures aillent plus vite.

Premier élément de révolution : nous proposons de diviser par deux le délai d'instruction des ouvertures ou des agrandissements de sites industriels, pour le faire passer d'un peu plus de dix-huit mois, à neuf mois. Nous assumons cette méthode qui va faire débat, et qui consiste à passer d'une procédure successive à une procédure parallèle. Actuellement, la procédure comprend plusieurs étapes successives, avec des transitions parfois longues qui expliquent qu'on en arrive à dix-huit mois d'instruction. Le dossier est d'abord examiné par la direction régionale de l'environnement, de l'aménagement et du logement (Dreal), puis par l'Autorité environnementale, puis vient l'enquête publique, puis le rapport du commissaire enquêteur, puis encore la rédaction de l'arrêté d''autorisation : nous proposons que ces procédures soient menées conjointement. Cela fera gagner un temps considérable, sans rien perdre en consultation publique : cette nouvelle procédure ne doit pas se faire au détriment des exigences environnementales, ni au détriment des exigences de consultation du public, il s'agit seulement de les concentrer en un même temps pour assurer que les délais soient comparables à ceux pratiqués dans tous les autres pays européens, sans quoi nous n'avons aucune chance de gagner la bataille industrielle.

Ensuite, même si les procédures vont vite, il faut que le foncier soit disponible et pour cela, nous proposons de mettre à disposition des sites clés en main qui seront financés par la Banque des territoires. Nous proposons aussi, en cas de liquidation judiciaire, de rehausser la créance environnementale au rang de créance privilégiée, pour que les industriels soient effectivement responsables de la dépollution des sites, au lieu que la tâche incombe, chacun le sait ici, aux collectivités locales et à l'État.

Enfin, nous proposons d'accélérer les projets d'intérêt national majeur - et je vais répondre tout de suite à votre interrogation tout à fait légitime sur cette procédure d'exception, Madame la Présidente. Elle concernera seulement les sites majeurs - comme les gigafactories -, des projets à plusieurs milliards d'euros représentant des milliers d'emplois. L'idée est que l'État puisse prendre la main pour accélérer les procédures, mais je suis ouvert et je m'en remets à la sagesse de la Haute Assemblée pour prévoir, par exemple, un avis conforme des élus locaux sur l'accélération des procédures. Nous avons largement consulté les élus à Dunkerque par exemple. Il est tout à fait possible d'amender le texte sur ce point pour s'assurer que rien ne se fera contre les élus locaux, car on ne fait rien dans un territoire contre les élus locaux, c'est une question de démocratie.

Une fois le terrain disponible et les procédures revenues à des délais raisonnables, il faut encore financer le projet - nous allons avoir besoin de capitaux pour des montants extraordinairement élevés. Nous proposons, d'abord, de mobiliser l'épargne privée, via l'assurance-vie, les plans d'épargne retraite, le livret de développement durable et solidaire, mais aussi le plan épargne climat, qui pourrait être ouvert dès la naissance pour tous les jeunes de moins de 18 ans, avec un taux de rémunération supérieur à celui du Livret A et aucune charge sociale ni fiscale, ce qui devrait le rendre très attractif. Au total, avec un plan épargne climat à un milliard d'euros, nous comptons mobiliser 5 milliards d'euros d'épargne privée pour le financement de l'industrie verte. Je remarque au passage que c'est le montant de "l'ISF vert" tel qu'imaginé par Jean Pisani-Ferry. Je préfère pour ma part mobiliser l'épargne plutôt que créer un nouvel impôt.

Pour financer les projets, nous proposons également de mettre en place un crédit d'impôt. Actuellement, il n'y a que des subventions, qui sont déjà elles-mêmes une véritable révolution : il y a six ans encore, il était hors de question d'apporter des aides d'État à un projet industriel. Avec le Président de la République, nous avons obtenu de la Commission européenne une véritable révolution idéologique avec la mise en place des projets importants d'intérêt européen commun (PIIEC), où pour la première fois, chaque État européen a la liberté de subventionner un projet industriel pour qu'il s'implante en Europe. On peut le regretter mais c'était nécessaire pour que des projets industriels continuent à s'implanter en Europe - que ce soit dans le secteur des batteries, des semi-conducteurs, des véhicules électriques, ou de l'industrie automobile, tous ces projets auraient été délocalisés en Chine ou aux États-Unis qui proposent, eux, des aides d'État massives aux industriels pour s'implanter sur leur sol.

Mais la Chine et les États-Unis proposent également des crédits d'impôts, ce que nous ne faisons pas - et ce que nous proposons donc de faire, pour quatre des "Big Five" que j'ai cités (tous sauf l'hydrogène vert, car nous y avons déjà consacré 9,2 milliards d'euros du plan France 2030, et aller plus loin aurait un coût trop élevé pour les finances publiques). Nous prévoyons de financer ce crédit d'impôt par la réduction des niches fiscales sur les énergies fossiles, nous proposons par exemple d'alourdir la fiscalité sur les véhicules les plus lourds et nous proposons de mettre fin au plafonnement du malus automobile à 50 % de la valeur du véhicule automobile. Je crois que nous pouvons attendre le projet de loi de finances pour adopter ces mesures, mais que leur discussion dès ce texte sur l'industrie verte sera un signal aux investisseurs de notre capacité à mettre en place un crédit d'impôt l'an prochain.

Enfin, une fois le site trouvé et le projet financé, il faut encore protéger mieux nos investissements industriels. Or, en France comme en Europe, on a trop longtemps hésité à le faire. Nous allons désormais utiliser toutes les normes environnementales pour valoriser, protéger, défendre notre industrie nationale. Nous mettrons ainsi en place le label "triple E" -  pour excellence environnementale européenne - qui donnera un bonus à toute entreprise dans l'accès à la commande publique, laquelle représente 150 milliards d'euros. Nous voulons changer la culture des acheteurs, publics et privés, pour que les critères écologiques soient appréciés au même niveau que les critères économiques. C'est une véritable révolution culturelle pour protéger nos entreprises, qui sont les plus vertueuses au monde - la production d'un véhicule électrique en Chine émet 46 % de CO2 que la production d'un même véhicule produit en Europe. Nous avons donc intérêt à utiliser ces normes environnementales pour protéger notre production.

Nous le ferons également pour le bonus électrique : il représente 1,2 milliard d'euros, sous formes d'aides à l'achat de véhicules électriques, dont 40 % bénéficient in fine aux usines chinoises. Les Français n'ont pas vocation à financer le développement des usines chinoises. La mise en place de normes environnementales plus strictes permettra de réserver ce bonus électrique aux seuls véhicules produits sur le sol européen dans les conditions environnementales les plus exigeantes.

Voilà les grands éléments de ce projet de loi. C'est un texte stratégique pour la nation française, il marque un double tournant vers l'industrie et vers la transition écologique. Je souhaite que, quelle que soit notre appartenance politique, nous puissions dégager une majorité sur ce texte au Sénat, et je suis heureux que son examen commence dans votre assemblée.

M. Roland Lescure, ministre délégué chargé de l'industrie. - Il ne s'est passé que deux ans depuis la demande d'autorisation de l'usine d'ACC que nous avons inaugurée hier à Douvrin, nous sommes allés très vite : cette vitesse exceptionnelle doit devenir la règle. Nous y sommes parvenus parce qu'il y avait une volonté très forte des élus locaux et nationaux, et parce que nous avons réuni l'ensemble des services administratifs. Le moyen le plus sûr pour parvenir à accélérer l'ensemble des projets reste cependant de modifier les règles en parallélisant les procédures.

On peut aussi citer l'exemple de Solvay à Dombasle-sur-Meurthe, où nous nous sommes rendus le 9 novembre dernier, où l'enjeu était de remplacer une chaudière très émettrice de CO2, pour décarboner le site tout en le préservant : nous avons abouti en dix mois.

Nous voulons aussi plus de circularité industrielle, donc faciliter le recyclage industriel. Il nous faut actuellement au moins un an, dans le cadre de la procédure européenne de déchet, pour pouvoir réutiliser un déchet industriel. En effet, la France a choisi la voie la plus contraignante en la matière, celle de la procédure explicite, avec une déclaration préalable, alors que la plupart des pays européens ont choisi la procédure implicite, dans laquelle un déchet peut être directement réutilisé dès lors qu'un certain nombre de critères sont remplis. Par exemple, l'entreprise L'Étoile, - que le rapporteur Laurent Somon connaît probablement puisqu'elle est une filiale du Relais de son département -, recycle des textiles usagés pour en faire du chiffon : il a fallu un an à cette entreprise pour obtenir l'autorisation d'utiliser des textiles usagés pour en faire du chiffon... Avec ce projet de loi, ce sera implicite et donc automatique, il suffira d'une déclaration de l'entreprise.

En ce qui concerne le financement : j'ai travaillé au Canada dans un grand groupe public qui investissait 300 à 400 milliards de dollars canadiens dans la décarbonation. En France, la Banque publique d'investissement (BPI) ne dispose que de 44 milliards d'euros au total, nous avons donc vraiment besoin de mobiliser l'épargne privée.

M. Laurent Somon, rapporteur - Ce texte propose d'accélérer la réindustrialisation de notre pays en favorisant l'implantation de nouvelles industries, en insérant la planification industrielle dans les schémas régionaux d'aménagement et de développement durable du territoire (Sraddet), et en réduisant les délais d'implantation, avec une procédure de consultation du public dès la recevabilité de la demande d'autorisation environnementale. Il entend faciliter la réhabilitation des friches industrielles - estimées à 87 000 hectares - en améliorant la procédure du tiers demandeur et par la "séniorisation" des dépenses de mise en sécurité environnementale, notamment en vue de la mise à disposition de sites clés en main, où pourront être implantés, en priorité, des projets d'intérêt national. Cette réindustrialisation et la décarbonation nécessitent de la cohérence avec le mix énergétique, mais aussi du foncier disponible, et vous avez souligné que, dans un pays qui n'est guère extensible, c'était un défi considérable. Vous estimez les besoins de l'industrie verte entre 10 000 et 20 000 hectares, le Président de la République a évoqué le chiffre de 20 000 à 30 000 hectares : c'est beaucoup, et il serait intéressant de savoir plus précisément ce qu'il en est. Les délais d'instruction étant particulièrement longs pour les projets industriels, vous répondez par une nouvelle procédure raccourcissant les délais de l'autorisation environnementale : quelle est votre analyse de la responsabilité des collectivités locales dans les délais actuels ?

Les articles 8 et 9 du projet de loi, prévoient d'accélérer les procédures pour les implantations d'installations industrielles "dans les secteurs des technologies favorables au développement durable" et les projets industriels "d'intérêt national majeur pour la souveraineté nationale ou la transition écologique". Tout cela est bien sibyllin : quels secteurs visez-vous, plus précisément ? Quelle articulation avec le futur règlement européen "industrie zéro net" ? La présence du nucléaire au sein de ce règlement ne fait pas consensus : est-ce que vous inclurez ce secteur dans l'industrie verte ?

L'article 9 prévoit une procédure "super-accélérée" de modification des documents de planification et d'urbanisme pour les "projets d'intérêt national majeur pour la souveraineté nationale ou la transition écologique", dont la liste serait fixée par décret. L'ensemble de la procédure serait à la main de l'État, la participation des élus étant réduite à la portion congrue. Comment ces "projets d'intérêt national majeur" seront-ils définis ? Par qui, sur quels critères, avec quelle périodicité ? L'article 1er renforce les compétences économiques de la région en matière de planification industrielle : est-ce cohérent de ne pas consulter les régions sur la liste des projets industriels d'intérêt national majeur ? Avez-vous des exemples concrets de grands projets ? Quelle superficie représentent-ils ? Combien se feraient sur des friches ? Combien en artificialisation nouvelle ?

Nous voulons tous réduire les délais d'implantation des industries, mais faut-il pour autant déposséder les collectivités de leurs compétences ? L'État est-il le seul à savoir aller vite ? Avec la nouvelle procédure, l'État pourrait imposer unilatéralement aux collectivités de modifier les Sraddet et les documents d'urbanisme.

Cela pourrait-il aller jusqu'à modifier la répartition territoriale du "ZAN", jusqu'à mettre les collectivités en contradiction avec les objectifs de réduction de l'artificialisation que la loi leur a fixés ? Nous sommes d'accord pour dire qu'il est urgent de réindustrialiser mais nous voyons, dans nos territoires, des projets industriels retardés ou annulés au motif du "ZAN", parce que les collectivités sont mises en situation de choisir entre le développement économique et le logement. Nous avons été surpris de ne trouver dans votre texte aucun dispositif d'exemption des projets industriels du décompte du "ZAN", ce que votre collègue Christophe Béchu nous avait pourtant annoncé. Qu'en est-il ? Soutenez-vous l'exemption des projets industriels verts du décompte du "ZAN", au moins à titre transitoire ?

La valorisation des friches est l'une des clés pour détendre la contrainte sur le foncier et éviter les conflits d'usage que le "ZAN" crée dans les territoires. C'est donc une des clés de la réindustrialisation. Selon le préfet Rollon Mouchel-Blaisot, que vous avez chargé d'une mission interministérielle de mobilisation pour le foncier industriel, ce sont environ 8 000 hectares de friches (à ajouter aux implantations en artificialisation nouvelle) qu'il faudrait requalifier pour les seuls besoins industriels, dans les prochaines années. Au-delà des timides mesures de libération du foncier industriel figurant dans le projet de loi, quelles mesures prévoyez-vous pour accompagner les collectivités dans la valorisation de ce foncier souvent pollué, dont la réhabilitation est particulièrement coûteuse ?

M. Didier Mandelli, en remplacement de M. Fabien Genet, rapporteur pour avis pour la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable. - Fabien Genet, qui n'a pu se libérer pour cette audition, m'a chargé de vous poser trois séries de questions.

La première concerne l'évolution des procédures de consultation dans le cadre de l'autorisation environnementale, que vous proposez à l'article 2. Le point saillant de cette réforme est la conduite conjointe des procédures, qui permet de mener de front la phase d'examen et la phase d'instruction et ainsi d'accélérer la procédure d'autorisation environnementale. Cette conduite conjointe accélérerait la procédure, mais à condition que le projet change peu pendant la phase d'examen. Cependant, qu'en est-il si l'exploitant apporte des modifications qui remettent en cause l'équilibre général du projet ? La conduite conjointe des procédures n'est-elle pas, alors, un facteur d'allongement des délais ? Par ailleurs, au lieu de créer une nouvelle procédure de participation du public, pourquoi ne pas réformer la procédure d'enquête publique actuelle ? Le droit de la participation du public n'est-il pas déjà assez complexe ?

La deuxième série de questions concerne le fait que l'article 2 supprime une disposition introduite par le Sénat, à mon initiative, dans la loi du 10 mars 2023 relative à l'accélération de la production d'énergies renouvelables, dite loi "ENR". Le droit actuel prévoit que, pour les projets d'énergies renouvelables situés dans une zone d'accélération des énergies renouvelables, la phase d'examen du projet est limitée à quatre mois. Cette limite est supprimée alors que la réforme de la phase d'examen et de consultation que vous proposez n'offre pas de garanties équivalentes. Pourquoi avoir supprimé cette disposition ? Votre texte n'est-il pas l'occasion de transposer le délai maximum de 12 mois pour les procédures d'instruction des projets d'énergies renouvelables situés dans les zones d'accélération, prévu par la directive RED III en cours d'adoption au niveau européen ?

Enfin, je souhaite évoquer la problématique de la mise en sécurité et de la réhabilitation des friches industrielles et plus spécialement l'article 6. Vous restreignez le périmètre de la garantie financière que doivent effectuer les exploitants d'installations classées au titre de la protection de l'environnement (ICPE), en raison de l'inefficacité avérée de ce dispositif. Pour assurer, malgré la suppression de cette garantie, la mise en sécurité du site puis sa réhabilitation en cas de défaillance de l'exploitant, vous instaurez une procédure de consignation des sommes nécessaires à la mise en sécurité du site et une nouvelle amende, qui peuvent être ordonnées par le préfet en cas d'exploitation illégale, ainsi qu'une "séniorisation" des créances environnementales en cas de liquidation judiciaire. Dans le cas où l'exploitant n'est pas installé illégalement et n'est pas non plus en liquidation judiciaire, de quels outils disposent les autorités pour contraindre une entreprise à respecter ses obligations de remise en l'état du site ? En supprimant la garantie financière, ne risquez-vous pas de ralentir la réhabilitation des friches industrielles ?

M. Jean-Yves Roux, rapporteur pour avis de la commission des lois. - La commission des lois est saisie des articles 12 et 13 du projet de loi, relatifs au verdissement de la commande publique et je ne vous poserai qu'une question, mais que je vais développer car elle pose une vraie difficulté de terrain, que nous devons prendre en compte.

Au fil des auditions, j'ai été très étonné de voir à quel point les motifs d'exclusion des procédures de passation des marchés publics et des contrats de concession étaient délaissés dans la pratique. Les motifs d'exclusion dits "de plein droit" ne font l'objet que d'une déclaration sur l'honneur, visiblement pas contrôlée. Les motifs d'exclusion dits "à l'appréciation de l'acheteur" ne sont quant à eux jamais utilisés, vraisemblablement par crainte de contentieux. J'en veux pour preuve l'incapacité de la direction des affaires juridiques de votre ministère à fournir la moindre estimation, même très approximative, du nombre d'entreprises concernées par des exclusions de plein droit des procédures de passation des marchés publics. J'en conclus qu'il n'existe aucun suivi, même à l'échelon central, de cet outil qui nous est pourtant présenté comme un puissant moyen de verdissement de la commande publique.

De façon plus problématique encore, l'Union des groupements d'achats publics (UGAP) nous a affirmé n'avoir jamais fait usage des cas d'exclusion des procédures de passation des marchés publics.

Ce texte nous propose cependant d'ajouter au code de la commande publique deux nouveaux motifs d'exclusion des procédures de passation des marchés publics. Je veux m'assurer que nous ne le ferons pas en vain. Comptez-vous donner des directives afin que les acheteurs publics s'approprient davantage les possibilités qu'offre le code de la commande publique en matière d'exclusion des procédures de passation des marchés publics, notamment celles qui sont "à l'appréciation de l'acheteur" ?

Mme Christine Lavarde, rapporteur pour avis de la commission des finances. - J'avoue savourer vos propos sur le bonus écologique, Monsieur le ministre Le Maire, mais c'est toujours un peu dommage d'avoir raison trop tôt - et je vois qu'après m'avoir dit non par trois fois, vous vous apprêtez enfin à me dire oui, on verra ce qu'il en est en séance plénière...

Ce texte est l'occasion pour vous, on le voit aux articles 17 et 18, de reprendre sans le dire des dispositions que le Sénat a adoptées dans sa proposition de loi relative à la protection des épargnants...

J'aurai quelques questions précises sur le plan d'épargne climat : quel montant maximum pourra-t-on verser sur ce livret ? Quelle sera la forme de ce véhicule : un encours géré par la Caisse des dépôts et consignations, un produit assurantiel, ou bien encore un compte titre ? Ce n'est pas le même objet dans les trois cas...

Enfin, vous demandez à légiférer par ordonnance, à l'article 19 : quelles sont vos orientations ? Le texte viserait à renforcer la capacité des gestionnaires de fonds collectifs à proposer et à gérer des fonds d'investissement alternatifs ayant reçu l'autorisation d'utiliser la dénomination "ELTIF" - ou "fonds européen d'investissement à long terme" - en application du règlement du Parlement européen et du Conseil du 29 avril 2015 relatif aux fonds européens d'investissement à long terme : nous avons besoin de précisions.

M. Bruno Le Maire, ministre. - De combien d'hectares a-t-on besoin pour l'industrie verte ? C'est difficile à évaluer, certains parlent de 20 000 hectares, d'autres de 10 000 hectares, je crois raisonnable de tabler sur 15 000 hectares.

Le nucléaire, lui, a été traité dans le projet de loi relatif à l'accélération des procédures liées à la construction de nouvelles installations nucléaires qui lui a été récemment consacré, les normes en la matière sont très spécifiques.

S'agissant des projets d'intérêt national majeur, notre objectif est de concentrer la procédure autour du préfet, pour que les élus aient un interlocuteur unique sur le plan local, auprès de qui chacun peut faire valoir ses droits.

Le "ZAN" est un sujet central, je connais les travaux conduits par Valérie Létard et Jean-Baptiste Blanc, nous avons beaucoup discuté à cette occasion. Je souhaite que les projets d'industrie verte soient exemptés du "ZAN", sans quoi les collectivités locales auront le plus grand mal à faire valoir leurs droits en matière de foncier. L'Assemblée nationale, le 19 juin prochain, va examiner la proposition de loi sur le "ZAN". Je laisse à la sagesse des parlementaires le soin de savoir si l'on exempte uniquement les projets relevant du champ de l'industrie verte, au sens des "Big five" ou bien s'il faut aller plus loin, en incluant tout projet industriel qui favorise la transition écologique. Je ne veux pas préempter le débat, mais l'exonération des cinq secteurs que j'ai énoncés me paraît le minium, sans quoi nous aurons le plus grand mal à développer une industrie verte. La disponibilité du foncier est la base. Je le dis en connaissance de cause, nous avons dû renoncer à des implantations faute de foncier disponible.

Sur la commande publique, je suis tout à fait disposé à plus de transparence sur les nouveaux motifs d'exclusion. Il y aura une commission pour inciter les acheteurs à y avoir recours, il y aura une communication sur le sujet et je souhaite que cet outil soit efficace, merci de me signaler s'il ne l'est pas suffisamment.

Je rends hommage à vos positions sur le bonus écologique, Madame Lavarde. Il y a deux visions politiques différentes, il faut les confronter pour faire des choix politiques dans le sens noble du terme. L'une d'elle ne regarde que la baisse des émissions de CO2 au plan national, avec en ligne de mire le zéro émission nette en 2050 ; si c'est le seul objectif, je reconnais qu'il est plus rapide d'importer des véhicules de Chine, mais alors le bilan climatique est mauvais au plan international, et le bilan économique et social est catastrophique au plan national, car cela ferme la porte à toute réindustrialisation de la France. Ce n'est pas la vision que Roland Lescure et moi avons. Je reconnais que nous en avons débattu au sein même du Gouvernement, nous n'étions d'abord pas majoritaires, puis la sagesse l'a emporté : notre position a rejoint celle de Christine Lavarde, c'est-à-dire la vision qui est la nôtre, de décarboner notre économie tout en la renforçant. Pour cela, il faut que les aides aillent à la production la plus vertueuse sur le plan environnemental, celle qui a lieu en Europe et en France. Une fois ce choix politique énoncé, il y a des obstacles techniques, en particulier dans le droit européen, qui interdit de privilégier les productions industrielles européennes. Je le regrette, puisque les États-Unis et la Chine privilégient, eux, leurs propres productions, via des crédits d'impôts ciblés. Nous avons donc choisi la voie normative, en posant des exigences environnementales suffisamment fortes pour que les aides soient de facto réservées aux véhicules produits en Europe et en France.

Le produit d'épargne verte sera ouvert à tout enfant de moins de 18 ans, sur autorisation parentale. Nous proposons que le montant soit plafonné à 22 950 euros. Il pourra prendre la forme de fonds ou de titres, avec une gestion pilotée, pour permettre un rendement plus élevé que celui du livret A, tout en ayant une sécurité (mais non une garantie) sur le capital versé. Nous proposons que l'épargne soit bloquée jusqu'à la majorité de l'enfant, avec néanmoins des possibilités de sortie en cas d'événements imprévus (notamment en cas de maladie ou de décès). Et nous proposons que cette épargne verte ne fasse l'objet d'aucun prélèvement fiscal ni social. Aucun autre outil ne dispose d'avantages comparables, à l'exception du Livret A.

M. Roland Lescure, ministre délégué. - Le risque existe effectivement que l'industriel doive faire évoluer son projet en cours d'instruction, mais c'est déjà le cas aujourd'hui et cela occasionne des délais. Je crois que la conduite conjointe des procédures améliorera les choses, puisqu'il sera possible de s'adapter plus rapidement. Mais l'essentiel, pour prévenir le risque, est de travailler en amont avec les industriels, en particulier avec les investisseurs étrangers, pour les prévenir au mieux de nos règles et de leur fonctionnement.

Pourquoi ne pas réformer la procédure d'enquête publique dans son ensemble ? Parce que ce serait une réforme bien plus large : elle concernerait aussi l'urbanisme, le logement, ... Nous avons privilégié un ciblage sur le développement de l'industrie, nous espérons être efficace.

Quel sera l'impact de ce texte sur les mesures que vous venez de prendre pour développer les énergies renouvelables ? Il faudra regarder la coordination dans son détail, en tout cas l'objectif n'est certainement pas de contrarier, mais plutôt d'élargir ce que vous avez déjà fait. Nous regarderons les choses dans leur détail lors de l'examen de ce texte.

Mme Sophie Primas, présidente. - Place aux questions de nos collègues, j'invite chacun à la concision : deux minutes maximum pour chacun, c'est la règle dans notre commission des affaires économiques.

M. Olivier Rietmann. - Votre texte prétend vouloir accélérer les délais d'implantation des sites industriels. C'est un peu court. Depuis 2017, certaines entreprises, surtout de taille intermédiaire (ETI) ont eu la chance de bénéficier d'un accompagnement privilégié des services de l'État, en particulier celles qui exportent - cela fait du bien à notre balance commerciale - et des secteurs ont bénéficié de mesures ciblées de simplification des normes et procédures, par exemple le numérique, les énergies renouvelables et le nucléaire. Et les autres, Monsieur le Ministre ? Je pense à l'immense majorité des entreprises dans nos territoires, c'est-à-dire les PME qui n'ont ni les moyens de gérer la complexité, ni la chance de bénéficier d'un accompagnement individuel : votre projet de loi manque sa cible, parce qu'il ne suffit pas de simplifier la construction des usines, il faut viser toute la chaîne de valeur, simplifier la vie de toutes les entreprises, et pas seulement des entreprises industrielles.

Le 15 juin prochain, je présenterai un rapport sur le sujet à la Délégation aux entreprises du Sénat ; le fardeau normatif et réglementaire qui pèse sur les entreprises représenterait 60 milliards d'euros par an, soit 3 % du PIB...

Pour l'heure, savez-vous combien d'entreprises vont bénéficier des articles 2 et 3 de votre projet de loi, et à combien l'administration évalue-t-elle les économies pour ces entreprises ?

M. Hervé Gillé. - La planification territoriale est essentielle. Vous prévoyez une inscription de la planification industrielle dans les Sraddet, mais comment les schémas de cohérence territoriale (SCOT) vont-ils prendre en compte ces nouvelles orientations ? Est-ce que ce sera via le préfet, ou bien y aura-t-il une approche territorialisée ? Les SCOT seront-ils associés à la planification industrielle en région ?

L'implication des régions prévue dans le projet de loi relèvera-t-elle d'un simple exercice de planification, ou recherchez-vous un levier, au niveau régional, pour le développement industriel ? Souhaitez-vous que cette stratégie industrielle soit clairement inscrite dans les contrats de plan interrégionaux État-Régions (CPIER) ?

Ne faut-il pas avancer la modification des Sraddet, prévue dans le projet de loi pour 2025 - et le calendrier du "ZAN" n'offre-t-il pas une occasion de gagner du temps ?

M. Franck Montaugé. - Je ne vois pas clair dans l'articulation entre les cinq secteurs que vous avez identifiés et le champ du règlement européen "industrie zéro net", qui cible huit domaines stratégiques et inclut par exemple les piles à combustibles, le biogaz, le méthane, les électrolyseurs, les technologies de réseau. Nous avons débattu de la place de l'hydrogène dans le mix énergétique, nous savons que nous avons besoin d'un effort particulier pour créer de l'électricité à partir d'hydrogène : il faut créer des sites, mais vous ne l'incluez pas dans ce texte, c'est un manque. Enfin, on peut saluer la mobilisation de l'épargne privée, mais les besoins de financement vont bien au-delà de ce que vous en espérez avec ces nouveaux outils. Et, soit dit en passant, nous sommes toujours en attente d'une stratégie claire et partagée sur l'énergie et le climat.

M. Jean-Claude Tissot. - L'article 5 propose d'accélérer la réhabilitation des friches industrielles, mais je n'ai pas bien compris en quoi. Vous savez que dans un département comme la Loire, cette question est importante, les collectivités se trouvent avec de très grandes surfaces à réhabiliter. Or votre texte paraît se centrer sur les procédures ; quelles sont vos intentions pour accompagner concrètement les collectivités territoriales ?

Comment ce texte prend-t-il en compte la révision de la directive sur les émissions industrielles - dite "directive IED" -, récemment examinée par le Parlement européen, qui élargit son champ aux grandes fermes d'élevage porcin et avicole de plus de 200 unités de gros bétail (UGB) et d'élevages bovins de plus de 300 UGB ? Quelle sera la position française dans la révision de ces directives ? Votre projet de loi n'est-il pas l'occasion de nouvelles mesures sur l'encadrement des émissions industrielles ?

M. Bernard Buis. - Quelle place auront les acteurs territoriaux dans la réindustrialisation ? Le couple maire-préfet en sera-t-il la cheville ouvrière, ou bien le Gouvernement imposera-t-il sa vision, dans une logique de déconcentration, plutôt que de décentralisation ?

Quelle place le projet de loi accorde-t-il à l'économie circulaire, en particulier à la réutilisation des matériaux de production au sein d'une même plateforme industrielle ? La création des 56 sites de France 2030 et la dépollution des friches industrielles font partie de vos objectifs : quels seront les critères de sélection de ces sites et les actions envisagées pour garantir leur succès et leur attractivité pour les investisseurs ?

Mme Cécile Cukierman. - Le calendrier législatif fait que l'Assemblée nationale examinera le texte "ZAN" la semaine même où nous examinerons ce texte sur l'industrie verte. Nous allons donc pouvoir résoudre cette difficulté de tenir ensemble la réindustrialisation de la France, tout en répondant à la crise du logement et en préservant le foncier agricole, tout cela dans une démarche qualifiée d'environnementale...

Vous dites à raison que la requalification des friches industrielles est un défi immense, et que cela prendra du temps. Or les investisseurs n'attendent pas. Cependant, si à un horizon de dix ou vingt ans, la requalification effective de ces friches libèrerait du foncier et assouplirait la pression qu'exerce aujourd'hui le "ZAN", ce qui faciliterait l'implantation d'industries. Cela éviterait aussi de creuser les fractures entre territoires où s'installeraient de nouvelles industries et ceux qui garderaient leurs friches. Votre texte ne relève pas le défi des friches anciennes, alors qu'elles représentent des dizaines de milliers d'hectares : pourquoi ?

M. Bruno Le Maire, ministre. - Notre démarche visant à rendre les procédures conjointes concerne toute l'industrie, et pas seulement l'industrie verte ; nous avons tranché dans ce sens, parce que c'est la compétitivité du site France qui est en jeu, cela concerne environ un millier d'entreprises par an.

L'industrie verte participe au développement des territoires, nous avons l'objectif de faire travailler ensemble l'État et les collectivités territoriales, et en particulier dans le cadre des Sraddet.

Ce texte couvre intégralement le périmètre du règlement "industrie zéro net", mais nous en avons écarté l'hydrogène vert parce qu'il bénéficie déjà de 9,2 milliards d'euros en investissement et qu'il serait excessif, pour les finances publiques, d'y ajouter un crédit d'impôt. Je vous rejoins sur le besoin d'une stratégie d'énergie verte, Monsieur Montaugé : ce texte ne trouvera pas son équilibre - quoiqu'il apporte une révolution pour l'industrie verte - si notre pays ne dispose pas d'une énergie décarbonée en quantité suffisante pour "faire tourner" les usines. Ce qui fait que la voiture électrique produite en France émet moins de CO2 que celle produite en Chine, c'est le fait que notre énergie est moins carbonée, parce que nous ne produisons plus d'électricité à partir du charbon. Encore faut-il que le marché européen nous permette d'accéder, d'ici 2025, à un coût moyen de cette énergie équivalent au coût de production : c'est le combat que nous menons avec Agnès Pannier-Runacher. Nous avançons mais c'est un combat difficile. Je rappelle qu'il nous faudra disposer à terme de 750 térawattheures (TWh) d'énergie pour faire fonctionner une France réindustrialisée, alors que nous avons besoin aujourd'hui de 450 TWh.

Nous voulons accompagner plus efficacement les collectivités territoriales dans la réhabilitation des friches industrielles, en nous appuyant sur la Caisse des dépôts, qui mobilise 1 milliard d'euros. Nous nous appuierons aussi sur le fonds vert, qui a englobé l'ancien fonds friches. Cependant, il faut être lucide, la plupart de ces friches ne seront pas réindustrialisées, parce qu'elles se situent à proximité des centres villes, où les habitants ne veulent pas d'industries.

Je ne connais pas la position française qui a été prise sur la place de l'élevage dans la révision de la directive IED.

L'objectif dans la mise en œuvre de l'industrie verte, c'est bien de passer par le couple maire-préfet, mais pour les projets d'intérêt national majeur, l'interlocuteur est le ministre de l'économie, voire le Président de la République. Lorsqu'on parle de l'agrandissement du site de STMicroelectronics à Grenoble pour des investissements qui atteignent le milliard d'euros, ou lorsque ProLogium envisage un investissement de 6 milliards d'euros, le maire et le préfet sont impliqués, mais il faut tout le poids du Président de la République pour peser dans la compétition, ouverte à l'échelle mondiale. Cette intervention est complémentaire de celle du maire et du préfet. Je m'implique aussi personnellement dans les décisions les plus importantes, nos résultats sont positifs - 10 000 emplois industriels pour les quatre "gigafactories", cela ne s'était pas vu depuis quatre décennies sur une seule filière.

Sur le "ZAN", je redis qu'il est essentiel que soient exclus les sites industriels verts, mais je m'en remets à la sagesse du Parlement sur le point de savoir s'il faut aller plus loin.

M. Roland Lescure, ministre délégué. - La Commission européenne a proposé d'élargir la directive IED assez largement aux activités agricoles, la présidence suédoise propose d'inclure les exploitations bovines, porcines et avicoles de plus de 150 UGB. La France a réservé sa position et essaie de parvenir à un compromis moins contraignant pour nos éleveurs. L'accord doit être trouvé avant la fin de l'année.

M. Henri Cabanel. - L'entreprise Genvia, dans l'Hérault, que le Président de la République a visitée, est fer de lance dans la filière de l'hydrogène vert. Vous nous dites que ce type d'installation sera écarté du "ZAN", cela évitera un casse-tête pour les élus locaux. C'est une bonne chose.

Mme Amel Gacquerre. - Élue du Pas-de-Calais, je ne peux que saluer l'inauguration, hier, de l'usine d'ACC, dans un territoire de tradition industrielle qui connait un vrai tournant vers l'économie de demain, ceci grâce à la mobilisation de tous, élus, fonctionnaires et entreprises. Cette usine représente 2 000 emplois et 500 000 voitures équipées de batteries électriques d'ici 2030, répondant au double objectif de ce texte : la création d'emplois et la décarbonation de notre industrie, mais également la défense de notre souveraineté industrielle dans un secteur stratégique, celui de la batterie électrique.

Cette ambition est à saluer, mais des questions demeurent sur l'écosystème industriel et sur la chaîne de valeur. La décarbonation de notre industrie sera fortement consommatrice de métaux critiques dont nous sommes dépendants, ce qui pourrait compromettre l'objectif d'une véritable réindustrialisation verte - chaque voiture électrique nécessitera 10 kilos de lithium en moyenne, par exemple. Le Gouvernement a-t-il pris la mesure de nos besoins en métaux critiques ? Quelle est sa position sur l'extraction du lithium, métal stratégique pour la décarbonation de notre industrie, sachant que notre pays, selon le Bureau de recherches géologiques et minières, compte une quarantaine de sources de ce minerai ?

M. Serge Babary. - La logistique est indispensable au développement industriel, elle l'accompagne nécessairement et il faut donc la prendre en compte pour limiter les transports à longue distance. Vous annoncez que la simplification sera générale, j'espère qu'elle concernera aussi la logistique. Il y a également des problèmes en aval, en particulier les recours contre les implantations logistiques, qui sont parfois abusifs et portés par des associations qui n'ont aucun lien avec le territoire : peut-on envisager de limiter l'intérêt à agir, qui est au fondement de la capacité à recourir ?

Ensuite, pour le financement, en particulier des PME et TPE, que pensez-vous de la mobilisation des fonds régionaux : n'est-ce pas une ressource à mobiliser ?

Mme Sylviane Noël. - Le label triple E utilisera-t-il des critères de labels existants dans les standards européens, ce qui serait plus facile à intégrer ? Ensuite, des inquiétudes sont apparues sur le crédit d'impôt recherche (CIR), dès lors que le Gouvernement a prévenu qu'il fallait faire des économies. Un coup de rabot sur les dépenses de veille technologique ou l'embauche de jeunes docteurs, en particulier, serait contre-productif, parce qu'il n'y aura pas de réindustrialisation sans innovation. Pouvez-vous nous rassurer sur le CIR ?

Mme Valérie Létard. - Merci au ministre d'avoir porté son attention à l'articulation entre la réindustrialisation et le "ZAN", donc au décompte des espaces concernés dans les SCOT, les PLU, etc. Cependant, ce "non décompte" prend différents noms : on parle parfois de surfaces "exemptées", ou "exclues", ou "comptées à part". Ce n'est pas tout à fait la même chose ; Christophe Béchu, le ministre de l'écologie, parle pour sa part de "mutualisation", donc d'une répartition entre régions, ce qui reviendrait à dire qu'en plus des 5 % décomptés dans les documents de planification et d'urbanisme, on additionnerait les projets d'intérêt national : quelle est votre position ?

Vous parlez de la coopération avec des régions et intercommunalités pour identifier les sites concernés, c'est une bonne chose, et nous avons la possibilité d'y faire écho dans le texte sur le "ZAN", pour organiser les choses dans la souplesse : il faut s'en servir. Ensuite, quand on parle d'industrie, il ne faut pas oublier le logement des salariés. Je vous invite à évoquer le cas d'Action Logement : que pensez-vous du fait que l'INSEE a classé l'une de ses filiales en administration publique, lui interdisant d'emprunter à plus d'un an ? Quel avenir pour Action logement ?

Mme Anne-Catherine Loisier. - Tout ne sera pas décarboné, il y aura donc de la compensation : que pensez-vous de flécher la compensation en valorisant en priorité les puits de carbone, pour stimuler la transition écologique et l'adaptation des territoires ? Ensuite, quel serait le contour précis du crédit d'impôt sur les investissements étrangers, et son articulation avec la fiscalité dans les autres secteurs ?

Mme Vanina Paoli-Gagin. - Vous avez omis de signaler, parmi les maux de la désindustrialisation, le fait qu'elle a aussi pesé sur notre capacité à atteindre nos objectifs de Lisbonne sur la recherche, sachant que l'industrie compte pour deux tiers dans l'effort de R&D. Ensuite, si nous saluons les efforts pour drainer de l'épargne vers l'industrie verte, je m'interroge sur les supports et leurs actifs sous-jacents, il faut assurer qu'il y aura aussi des actifs non cotés.

Pensez-vous utile, ensuite, de créer des outils d'investissement dédiés à la consolidation stratégique d'entreprises plus petites, des PME et des ETI, pour créer de nouveaux champions industriels français ?

M. Michel Canévet. - Je salue l'engagement pour la réindustrialisation de notre pays, nous en parlons alors que le groupe Le Duff vient d'annoncer qu'il renonce à implanter une nouvelle usine pour sa marque Bridor, du côté de Rennes, et ses 500 emplois, en raison des recours contre ce projet. Les investissements prévus pour la réindustrialisation iront-ils à l'ensemble du territoire, ou bien viseront-ils en priorité les territoires qui comptent le plus de chômage ? Je m'inquiète, ensuite, de notre dépendance aux matières premières, en particulier aux métaux rares : peut-on aller plus loin sur leur recyclage ?

Mme Sophie Primas, présidente. - Les crédits d'impôts et les autres avantages fiscaux seront-ils conditionnés par des obligations de rester sur le territoire français ? Nous savons que le fonds vert a compensé la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises (CVAE) aux départements, pour un milliard d'euros ; dans ces conditions, les montants alloués à ce fonds sont-ils vraiment à la hauteur ?

Je me félicite, enfin, que vous parliez du bilan carbone, une notion qui a été introduite au Sénat par notre collègue Daniel Gremillet, avec beaucoup de difficultés. C'est le bon outil pour mesurer ce que nous devons faire en matière écologique.

M. Bruno Le Maire, ministre. - Je redis que nous soutenons les projets sur l'hydrogène vert, aussi bien les start-up que les PME.

L'accès aux matériaux rares est un point essentiel. Notre stratégie s'appuie sur trois piliers, avec l'objectif stratégique de maîtriser l'intégralité de la filière, et pas uniquement de produire des batteries électriques - vous comprendrez, en visitant l'usine ACC, qu'un tel investissement justifie qu'on maîtrise l'amont et l'aval. Nous recherchons, d'abord, un accès sécurisé aux métaux rares, en particulier au lithium. Le délégué interministériel Philippe Varin a travaillé sur le sujet, son rapport appelle à une diversification des sources d'approvisionnement. Nous en achetons déjà au Canada et à l'Indonésie, nous disposons de mines dans l'Allier, d'autres sont à l'étude en Alsace, il y en a aussi en Suède, au Portugal, exploitées dans des conditions environnementales satisfaisantes. Deuxième pilier : notre stratégie circulaire de recyclage et de réutilisation des matériaux. Orano a un projet avec une entreprise chinoise pour récupérer les matériaux critiques sur les batteries usagées, quelques pays seulement maîtrisent ces technologies, la France en fera partie et nous pourrons mieux recycler. Enfin, troisième pilier, l'innovation vers d'autres batteries, comme celles au lithium solide, qui utilisent moins de matériaux critiques.

Les fonds régionaux, effectivement, peuvent être utilement mobilisés pour l'industrie verte, c'est un axe à développer.

Le label triple E utilisera des critères qui ont cours dans le cadre européen, c'est effectivement plus efficace.

Nous avons écarté toute modification du CIR, car même si nous faisions quelques économies, les désavantages seraient supérieurs aux inconvénients liés à l'instabilité sur cet outil, qui est l'un de nos grands avantages comparatifs pour attirer des investisseurs.

Je suis favorable à ce que les projets d'industrie verte, grands ou petits, soient exclus du calcul du "ZAN", je pense qu'il ne faut même pas les compter à part, ou bien, à force de tout compter à part, on en arrivera à des situations ingérables. Je sais que d'autres prônent un compté à part, la question n'est pas encore arbitrée. Il faut bien voir que la course internationale est très difficile, qu'elle fera quelques gagnants et beaucoup de perdants : je veux que la France fasse partie des gagnants, et je peux vous dire que chaque projet d'investissement sur notre territoire fait l'objet de milliers d'heures de travail de mes équipes techniques.

Sur les puits de carbone, nous sommes tout à fait disposés à voir ce qui peut être fait avec le crédit d'impôt, lequel peut servir, bien entendu, aux investissements français et étrangers.

Sur les actifs sous-jacents au nouveau plan d'épargne climat, le plan d'épargne retraite (PER) montre qu'on peut intervenir avec des actifs non cotés, mais nous regarderons le détail dans l'examen du texte, il faudra en débattre.

La répartition des investissements se décide, en réalité, en fonction de disponibilité du foncier. Le premier bénéficiaire, actuellement, est la région Hauts-de-France, parce qu'elle dispose de foncier, d'un port de premier plan, Dunkerque, ainsi que de la centrale nucléaire de Gravelines, capable de fournir une électricité décarbonée à coût compétitif. Et voir de nouvelles industries s'installer sur ce territoire, ce n'est que justice après tant de désindustrialisation subie.

Oui, il y aura une conditionnalité au crédit d'impôt : les entreprises devront avoir rempli leurs obligations environnementales, notamment en matière de bilan des émissions de gaz à effet de serre - obligation légale que respectent seulement 53 % des entreprises aujourd'hui.

M. Roland Lescure, ministre délégué. - Pour sécuriser l'accès aux matériaux rares, nous avons sélectionné le fonds d'investissement Infravia, qui lance un fonds dédié aux métaux critiques d'un montant cible de 2 milliards d'euros et où l'État investira 500 millions d'euros. Le recyclage, ensuite, est important pour accroître la compétitivité française et faire de l'extraction responsable.

Les recours abusifs sont un sujet délicat, puisque le droit au recours est constitutionnellement protégé, mais nous sommes ouverts aux propositions d'amendements. Nous avons supprimé un degré de juridiction pour les projets d'intérêt national majeur, un peu comme cela a été fait pour les projets d'énergie renouvelable, avec un délai de jugement limité à dix mois : nous sommes ouverts au débat.

M. Bruno Le Maire, ministre. - Nous trouverons un accord avec Action Logement pour tenir compte de ses réserves et ne pas mettre l'établissement en difficulté, après son classement en administration publique, il y a un recours en justice et il faut tenir compte des délais de justice, mais j'ai rencontré son président deux fois.

J'ai oublié de mentionner que, sur l'ensemble de ce texte, nous avons besoin de dispositions spécifiques pour les outre-mer, qui ont des projets très intéressants et qui doivent faire face à des contraintes bien spécifiques.

Mme Micheline Jacques. - Effectivement, nous avons besoin d'équivalences normatives, pour éviter que du bois du Brésil doive passer par l'Europe... pour parvenir en Guyane !

M. Bruno Le Maire, ministre. - Effectivement, j'ai été saisi de bien des difficultés lors du déplacement que je viens de faire en Guadeloupe et en Martinique.

Mme Sophie Primas, présidente. - Merci de votre participation.


Source https://www.senat.fr, le 19 juin 2023