Texte intégral
Le ministre de l'Intérieur et des Outre-mer a présenté une communication relative aux feux de forêts de l'été 2023.
1) Des feux d'une extrême intensité dans le monde
L'été 2023 se caractérise par un nombre particulièrement significatif d'incendies et d'une ampleur rarement égalée à l'échelle de la planète.
En Europe, au 19 août, ce sont ainsi 351 757 hectares qui ont brûlé contre 238 168 en moyenne annuelle sur les 16 dernières années, soit une hausse de 47 %.
En Grèce, en Italie ou en Espagne, les feux ont ravagé des milliers d'hectares de forêts, engendrant de très nombreuses évacuations de population, des dégâts conséquents sur le patrimoine et le bâti, mais aussi et surtout de nombreuses victimes. La solidarité française s'est exprimée à trois reprises avec la mise à disposition de 2 canadairs, en Grèce, du 18 au 24 puis du 27 au 29 juillet. La France a également proposé ses avions pour participer à la lutte contre les feux en Sicile.
Les incendies sur l'île d'Hawaï ont conduit à la destruction de 80 % de la ville de Lahaina et à un nombre de morts vraisemblablement très important (115 déjà recensés et 1100 personnes portées disparues). L'Algérie a, quant à elle, été confrontée à près de 140 incendies, faisant au moins 34 morts. Au Canada, 15,3 millions d'hectares de forêts ont déjà été consumés, soit une superficie équivalente à 28 % du territoire français métropolitain. À ce jour, près de 200 000 habitants ont dû être évacués et quatre personnes ont perdu la vie. A la demande du gouvernement canadien, la France a engagé 330 sapeurs-pompiers et sapeurs-sauveteurs pendant 2 mois pour les épauler dans ces terribles épreuves.
2) En France, un niveau de préparation jamais égalé
Conformément aux engagements du Président de la République exprimées le 28 octobre 2022, le Gouvernement a renforcer substantiellement les outils et moyens pour la préparation de cette saison 2023.
Ainsi, l'information des Français a été considérablement renforcée. Outre l'accent mis sur le respect des obligations légales de débroussaillement, la communication à destination des résidents et des vacanciers en matière de gestes et de comportements à suivre a été fortement relayée. Ces actions ont été renforcées par la mise en place de la météo des forêts, largement retransmise grâce aux médias audiovisuels et à la presse, notamment régionale. Elles ont permis de favoriser la prise en compte du risque par tous, de limiter les comportements dangereux et, ainsi, de faciliter l'action des services de secours.
L'action de prévention menée par l'Office national des forêts a également été renforcée en termes de surveillance, d'information de contrôle et d'extinction de feux naissants avec la mobilisation des nouvelles patrouilles de première intervention (véhicule porteur d'eau) en zone historique et la mise en place des nouvelles patrouilles de première intervention sur la zone sud-ouest.
Sur le plan opérationnel, le dispositif a été coordonné par un centre d'opération installé sur la base de sécurité civile de l'aéroport Nîmes-Garons, en lien avec le centre opérationnel de gestion interministériel des crises, situé au ministère de l'intérieur et des outre-mer, place Beauvau.
S'appuyant sur une analyse quotidienne des risques, le dispositif a ainsi pu ainsi être adapté en permanence aux besoins.
Le dispositif aérien s'est articulé autour de la base de sécurité civile de Nîmes-Garons, mais également du déploiement permanent de deux détachements, avec deux canadairs en Corse ainsi qu'un Dash et 4 Air-Tractor en Gironde. La France a également fait appel, au plus fort des événements, à 8 des 10 hélicoptères bombardiers d'eau loués. En fonction de la situation, des renforcements de ces bases, comme des pélicandromes ont été effectués, afin de pouvoir agir au plus près des situations. La stratégie d'attaque des feux naissants a ainsi pu être pleinement appliqué.
Par ailleurs, le dispositif de renforcement des secours locaux a été fortement augmenté. Ainsi, 51 colonnes de renfort étaient en permanence prêtes à être engagées, avec des matériels et des personnels formés. Ces moyens ont été mis en œuvre de manière préventive et curative, en fonction de l'analyse des risques. Au plus fort des feux, 9 de ces colonnes ont été déployés dans la journée précédant les phases les plus intenses.
9 feux sur 10 étant d'origine humaine, la formation et l'équipement des forces de gendarmerie ont été renforcés afin qu'ils puissent se déployer et mener des actions de protection de la population, de surveillance et d'investigation. Cette collaboration a été mise en œuvre, au niveau national avec la sécurité civile, et à l'échelon local avec les services d'incendie et de secours. Enfin, des initiatives telles que la montée en puissance des pelotons vigilance forêt en Nouvelle-Aquitaine ou les dispositifs expérimentaux de participation citoyenne, ont été encouragées.
3) Une saison 2023 sous le double signe de l'intensité et de la maitrise
La saison 2022 s'était caractérisée par des feux sur l'ensemble du territoire métropolitain, durant une période plus longue avec une simultanéité et une intensité rarement égalée.
La saison 2023 dénote par rapport aux 20 dernières années. En effet, le phénomène des feux de forêt s'est installé sur une période plus longue. Le premier feu important a débuté le 16 avril sur la commune de Cerbère, dans les Pyrénées-Orientales, et a ravagé près de 870 hectares, faisant de cet incendie le plus important de l'année. L'épisode de canicule que nous venons de traverser, à une période inédite de l'été, associé à une sécheresse qui perdure, peut faire craindre que la saison pourrait durer a minima jusqu'à la fin du mois de septembre.
Les conditions climatiques plus clémentes sur le Nord de l'hexagone ont permis de limiter l'extension des feux, qui se sont essentiellement concentrés à la zone Sud, traditionnellement plus touchée. Le massif landais a également subi un certain nombre d'incendies, demeurés toutefois circonscrits.
Cette saison a été à fort risque : au 26 août, on dénombrait 12 200 départs de feu. Certains jours, les sapeurs-pompiers ont dû lutter contre plus de 250 départs de feu. Si ces chiffres sont moins importants qu'en 2022, ils sont du même ordre de grandeur qu'en 2021 (respectivement 12 528 et 8 821 interventions). Sur les 10 dernières années, on ne dénombre, en moyenne, qu'un peu plus de 10 000 incendies par an.
En terme de surface, 2023 sera sans commune mesure avec 2022, puisque qu'au 26 août 13 450 hectares ont brulés contre 65 422 l'an passé.
Face à un nombre conséquent d'incendies, la surface brûlée reste contenue, signe que le dispositif mis en place grâce au guet aérien armé, aux moyens prépositionnés, et au renforcement des moyens aériens et terrestres, a porté ses fruits. La très grande majorité des feux n'a pas dépassé la surface d'un hectare.
La lutte contre les incendiaires, traduite par une présence sur le terrain et une capacité affirmée d'enquête a permis l'interpellation, durant la saison 2023, de 60 personnes pour des faits d'incendie volontaire ou de tentatives d'incendie volontaire.
4) Une évolution attendue du risque climatique qui va nécessiter de maintenir nos efforts
L'ensemble des travaux scientifiques montrent que, dans les années à venir, le risque de feux de forêt va s'accroître, dans le temps, dans l'espace, dans la simultanéité et dans l'intensité. Cette saison, par l'implication de l'ensemble des acteurs, par le niveau de préparation atteint, par les outils mis à disposition des acteurs opérationnels afin qu'ils mènent à bien les actions de lutte, démontre que la méthode consistant à axer les efforts sur la prévention, le quadrillage du terrain, au sol, comme dans les airs, les attaques de feux dès leur naissance, est efficace. Elle permet d'agir au plus vite et de limiter l'extension des sinistres avec, en corollaire, moins de destruction de végétation, moins de destruction d'habitats et, surtout, une sauvegarde des vies humaines.
Au-delà du retour d'expérience qui sera effectué pour cette saison, la France doit continuer à renforcer son dispositif et mener à bien les politiques d'adaptation au changement climatique.