Texte intégral
SALHIA BRAKHLIA
Bonjour Aurélien ROUSSEAU.
AURÉLIEN ROUSSEAU
Bonjour.
SALHIA BRAKHLIA
Hier vous avez présenté le budget consacré à la santé pour les prochaines années, toutes les dépenses augmentent, est-ce que ça veut dire qu'on va davantage creuser le déficit de la Sécurité sociale, on n'a pas le choix ?
AURÉLIEN ROUSSEAU
Non, le déficit de la Sécurité sociale il était d'un peu plus de 20 milliards en 2022, il va être un peu en dessous de 9 milliards en 2023, on est sorti de cette période exceptionnelle du Covid, et on va essayer de tenir autour de 9, 10 milliards, donc le déficit ne se creuse pas, et notre objectif il est évidemment d'avoir des mesures pour progressivement revenir à l'équilibre, mais on ne va pas revenir à l'équilibre, qu'on n'a pas connu depuis de très nombreuses années, d'un coup de baguette magique.
JÉRÔME CHAPUIS
L'équilibre il est impossible avec cette inflation ?
AURÉLIEN ROUSSEAU
L'inflation elle bouscule tout, il y a eu le Covid, il y a l'inflation, donc évidemment ça bouscule tout, ça bouscule nos repères, en termes de progression, en termes d'impact sur les salaires qu'on verse, sur les achats qu'on fait, donc c'est pour ça qu'on réajuste en permanence et dans quelques semaines, d'ailleurs, on va réajuster le budget de la Sécurité sociale pour 2023 parce que l'inflation l'aura frappé…
SALHIA BRAKHLIA
Plus de dépenses.
JÉRÔME CHAPUIS
On navigue à vue.
AURÉLIEN ROUSSEAU
On navigue à vue en partie, mais j'allais dire pour moi ce n'est pas forcément un défaut, quand on a une navigation stratégique mais qui a des impacts quotidiens, il vaut mieux aussi apprendre parfois à naviguer à vue.
SALHIA BRAKHLIA
Élisabeth BORNE qui a décidé de dégainer le 49.3 pour la 12e fois depuis son arrivée à Matignon, pour faire passer le projet de loi de programmation des finances publiques, ça y est c'est devenu une formalité en fait, on ne donne plus la parole à l'opposition à l'Assemblée ?
AURÉLIEN ROUSSEAU
Non, ce n'est pas du tout une formalité, d'abord ce projet loi de programmation des finances publiques il a été déjà discuté l'été dernier, avec le Parlement, celui qui a été présenté hier, enfin qui a été discuté, et sur lequel la Première ministre a engagé hier la responsabilité de son gouvernement, il avait fait l'objet de pas mal d'amendements demandés par les oppositions, mais après, la France elle a besoin de budget, elle a besoin d'une trajectoire de finances publiques, elle en a besoin pour donner de la visibilité à tout le monde, pour moins naviguer à vue, si je reprends votre expression, aussi pour obtenir des financements européens qui sont liés à cet engagement-là, donc il n'y a jamais de fermeture de porte au dialogue, mais à partir du moment où le dialogue il bascule dans l'obstruction, eh bien on engage la responsabilité du gouvernement.
JÉRÔME CHAPUIS
Aurélien ROUSSEAU, le doublement de la franchise médicale, c'est-à-dire le reste à charge pour un patient quand il achète une boîte de médicaments, il ne figure pas dans le texte présenté hier, ça veut dire que vous l'abandonnez ?
AURÉLIEN ROUSSEAU
Non, il n'est pas abandonné, on a dans le texte, plus exactement dans les tableaux de chiffres qui sont liés au PLFSS, un certain nombre de mesures d'économies, ces mesures d'économies on va aller les chercher sur tous les acteurs, quand on dit responsabilisation des acteurs ça ne veut pas dire que les patients, ou que les médecins, ou que les entreprises, donc le sujet franchise médicale il est toujours à l'expertise, sur la table, parce que, on touche là à des choses extrêmement sensibles. Moi, je l'ai dit, ma ligne absolument rouge c'est que les personnes qui ont le plus besoin de soins, notamment les personnes en affection de longue durée, donc les personnes qui sont déjà au plafond de ces franchises médicales, ne soient pas touchées, ne renoncent pas aux soins, donc pas de renoncement aux soins…
SALHIA BRAKHLIA
Mais pour tous les autres on va devoir payer plus cher nos médicaments, plus cher nos consultations chez le médecin ?
AURÉLIEN ROUSSEAU
Alors aujourd'hui cette décision, sur les médicaments, elle n'est pas prise, on a un quantum d'économies qu'on va documenter progressivement…
JÉRÔME CHAPUIS
Ça ne se fera pas par la loi, ça se fera par décrets ?
AURÉLIEN ROUSSEAU
Ce n'est pas effectivement une mesure qui passe par la loi, mais on aura dans la loi les tableaux, donc évidemment le débat il aura lieu au Parlement…
JÉRÔME CHAPUIS
Il aura lieu au Parlement…
AURÉLIEN ROUSSEAU
Bien sûr.
JÉRÔME CHAPUIS
Parce que les parlementaires disent on ne peut pas laisser passer une mesure aussi importante sans débat.
SALHIA BRAKHLIA
Mais du coup le gouvernement est pour qu'on paye plus ?
AURÉLIEN ROUSSEAU
Évidemment qu'on aura le débat au Parlement, je vous dis, il est dans quelques semaines encore, donc ce point n'est pas tranché, et sur les médecins, c'est une autre question puisque, moi je souhaite le plus rapidement possible réouvrir les discussions avec les médecins, parce que je considère qu'il faut qu'on ait un accord conventionnel avec les médecins, notamment parce qu'il y a un besoin de médecins traitants, il y a un besoin d'engagement collectif, et si…
SALHIA BRAKHLIA
Et vous savez ce que demandent les médecins, les médecins qui appellent à la mobilisation le 13 octobre prochain, ils disent c'est super, vous nous avez donné une petite augmentation pour la consultation à 1,50 euro, mais nous ce qu'on veut - donc ce qui porte la consultation à 26,50 euros - mais nous ce qu'on veut c'est 30 euros.
AURÉLIEN ROUSSEAU
Oui, je n'ignore pas cette revendication…
SALHIA BRAKHLIA
Vous allez leur dire Ok ?
AURÉLIEN ROUSSEAU
Le premier point que je dis c'est que les Français, s'il y a une augmentation, ils seront remboursés par la Sécurité sociale sur cette augmentation, c'est d'ailleurs pour ça que dans le budget il y a une provision pour prévoir une augmentation à venir…
JÉRÔME CHAPUIS
Mais de quel niveau ?
AURÉLIEN ROUSSEAU
Le budget, aujourd'hui, prévoit une provision de 200 millions d'euros, pour dire les choses…
JÉRÔME CHAPUIS
Mais qui va représenter combien, du coup, pour les médecins ?
AURÉLIEN ROUSSEAU
Aujourd'hui, encore une fois, c'est une provision, la négociation elle n'a pas commencé donc, parce qu'une négociation ce n'est pas juste dire on accorde à 26,50 euros, 28, 30, enfin un montant, voilà, c'est aussi dire en face de ça quels sont les engagements des médecins…
SALHIA BRAKHLIA
Oui, mais il faut que vous puissiez anticiper dans le budget, donc vous êtes prêt à bouger sur combien ?
AURÉLIEN ROUSSEAU
Aujourd'hui, il y a plusieurs facteurs, d'une part une convention médicale, c'est un peu technique mais, ça ne rentre en vigueur que six mois après qu'on l'eut signée, donc du coup ce n'est pas en année pleine, on peut avoir des étapes progressives, c'est une provision, on peut aussi la réviser, donc ce que je veux dire en mettant cette provision dans le projet de loi de financement de la Sécurité sociale c'est que mon intention elle est bien, très rapidement, de rouvrir des négociations, parce que ce 26,50 euros, qui a été décidé par un arbitre après l'échec de la première négociation, il ne peut être qu'une étape, mais en même temps les médecins ont aussi une responsabilité, des responsabilités à prendre, on va négocier avec eux, mais quand effectivement la dépense de médicaments, la dépense d'indemnités journalières, elle progresse de plus de 7 % d'euros par an, les médecins ont aussi une partie à prendre à leur charge, si je puis dire, pour nous aider à ralentir la progression de ces dépenses.
JÉRÔME CHAPUIS
Et notamment sur les arrêts maladie, par exemple, vous allez leur demander de faire des efforts ?
AURÉLIEN ROUSSEAU
Sur les arrêts maladie, le sujet il est évidemment très large, encore une fois il n'y a pas que les médecins, on voit bien autour de nous, il y a… des problèmes somatiques, de la santé mentale, qui est là partout…
JÉRÔME CHAPUIS
Mais le nombre d'arrêts a explosé de plus de 30 % en 10 ans, il y a des abus ?
AURÉLIEN ROUSSEAU
Il y a forcément des abus, mais je pense qu'ils sont minoritaires. Je pense qu'il y a, on le voit, des médecins qui peuvent prescrire 3 fois, 4 fois plus que leurs confrères…
JÉRÔME CHAPUIS
Notamment en téléconsultations, vous allez limiter les arrêts maladie.
AURÉLIEN ROUSSEAU
Oui, ça on va aller regarder, et sur la téléconsultation, vous avez raison, on considère que donner un arrêt maladie de plus de trois jours par téléconsultation ce n'est pas raisonnable, il faut voir un médecin en physique, donc il n'y a pas de stigmatisation des médecins, ils font face, les médecins, à la situation de la société telle qu''elle est, donc on doit aussi se poser des questions sur le rapport au monde du travail, sur la pénibilité, sur tout ça.
SALHIA BRAKHLIA
Mais vous dites quand même qu'il y a des médecins qui donnent 3, 4 fois plus d'arrêts maladie que d'autres…
AURÉLIEN ROUSSEAU
On le sait, mais ça c'est…
SALHIA BRAKHLIA
Ceux-là doivent être sanctionnés ?
AURÉLIEN ROUSSEAU
Ce n'est pas une sanction, il y a un dialogue avec l'Assurance maladie, alors c'est quelquefois pris comme une sanction, mais il n'y a pas de sanction financière, simplement ils sont suivis de plus près par l'Assurance maladie, y compris parce que, souvent, et je le dis très simplement, c'est en toute bonne foi que les médecins font ça. Quand vous avez en face de vous quelqu'un qui vous dit qu'il a mal au dos, que le matin il se réveille en pleurant, vous êtes médecin, vous voulez soigner, eh bien vous pouvez donner un arrêt maladie, évidemment.
SALHIA BRAKHLIA
Juste, très rapidement, sur les jours de carence, est-ce qu'il est question de moins les indemniser, c'est-à-dire qu'aujourd'hui on a trois premiers jours de carence qui ne sont pas payés, est-ce que cette durée pourrait être rallongée ?
AURÉLIEN ROUSSEAU
Non, il n'y aura rien de tel dans le projet de loi de financement de la Sécurité sociale, et par ailleurs la plupart des conventions collectives prennent en charge ces trois premiers jours de carence…
SALHIA BRAKHLIA
Les employeurs, oui.
AURÉLIEN ROUSSEAU
Après ce sujet on l'a devant nous, on sait qu'on va devoir y travailler, mais il n'y a rien dans le PLFSS sur ça.
JÉRÔME CHAPUIS
Aurélien ROUSSEAU, ministre de la Santé, est l'invité de 8.30 France Info, on vous retrouve juste après le Fil info.
(…)
JÉRÔME CHAPUIS
Toujours avec Aurélien ROUSSEAU, le ministre de la Santé. La France fait face depuis plusieurs mois à des pénuries de médicaments. Pour quels produits la situation est-elle encore critique ?
AURÉLIEN ROUSSEAU
La situation, elle n'est à ce jour pas critique sur de très nombreux produits. Vous avez tous autour de vous des personnes qui vous disent qu'ils ont eu du mal à trouver de l'Amoxicilline, quelquefois…
SALHIA BRAKHLIA
Doliprane.
AURÉLIEN ROUSSEAU
Quelquefois du paracétamol parce que je n'ai pas le droit de dire Doliprane, mais vous avez l'air bien informée. Donc moi, j'ai rencontré avec Roland LESCURE, le ministre de l'Industrie, tous les industriels. J'étais encore hier avec la PDG France de SANOFI. On a mis 450 médicaments essentiels sous surveillance.
JÉRÔME CHAPUIS
Il faut changer les règles ? La distribution à l'unité par exemple ?
AURÉLIEN ROUSSEAU
Il y a des règles. On a eu un remarquable rapport parlementaire de deux sénatrices, Sonia de LA PROVOTE et Laurence COHEN - aucune n'est dans la majorité donc je le dis d'autant plus tranquillement - qui pointe toute une série de propositions. On les a reprises quasiment toutes pour qu'on soit en veille active. L'enjeu majeur c'est la réindustrialisation sur le territoire national, c'est notre souveraineté, c'est ce que le président a annoncé. C'est pour ça hier, j'ai évoqué avec la présidente de SANOFI tous leurs investissements industriels en France. Mais le cœur du cœur pour éviter ce qui s'est passé l'an dernier, c'est qu'on a eu trois épidémies simultanées : la grippe, la bronchiolite, des gastros. Et donc nous notre bataille, c'est pour ça que je suis ministre de la Santé et je m'en réjouis mais aussi de la prévention, c'est de convaincre les Français d'utiliser tous les outils de prévention. Et le point commun entre la grippe, la bronchiolite, les gastros ou toute autre forme d'épidémie, c'est - ça peut paraître ridicule - ce sont les gestes barrières. Si on ne transmet pas les épidémies, on pourra les écraser.
SALHIA BRAKHLIA
Reste qu'en France en 2023, on a des pénuries de médicaments Monsieur le Ministre. Est-ce que vous allez rendre obligatoire dans toutes les pharmacies la distribution à l'unité ?
AURÉLIEN ROUSSEAU
Il y a deux choses. D'abord ce n'est pas qu'en France, enfin ça ne compense rien, mais toute l'Europe est touchée par des pénuries de médicaments, y compris des pays dans lesquels l'industrie pharmaceutique est encore plus forte que chez nous. Deuxièmement, la vente à l'unité de médicaments, notamment sur les antibiotiques, ça n'est pas qu'une mesure pour gérer la pénurie. C'est aussi un sujet majeur d'antibiorésistance parce que vous vous savez qu'aujourd'hui, malgré la baisse, on est toujours le quatrième pays en Europe consommateur d'antibiotiques. On en consomme plus que beaucoup d'autres.
SALHIA BRAKHLIA
Mais là cette mesure, on a l'impression que c'est du rationnement.
AURÉLIEN ROUSSEAU
En fait, ça dépend. Votre médecin vous dit qu'il vous faut douze gélules d'antibiotiques, si les boîtes en contiennent vingt ça n'est pas du rationnement de vous en donner douze.
JÉRÔME CHAPUIS
Les pharmaciens disent que c'est très compliqué en termes logistiques.
AURÉLIEN ROUSSEAU
Je n'ai pas de doutes. Je n'ai pas de doutes sur le fait que la logistique est potentiellement compliquée mais si on est dans une période compliquée, on va faire des choses un peu inédites. Par exemple, on va permettre aux établissements pharmaceutiques des hôpitaux d'eux-mêmes fabriquer certains médicaments si on est sur des situations critiques, un peu comme on l'avait fait pendant le Covid là aussi. La situation est tendue, mais on a eu des discussions je crois fructueuses avec les professionnels de l'industrie pharmaceutique pour qu'ils soient plus au rendez-vous et réactifs sur tous ces sujets.
JÉRÔME CHAPUIS
Sur l'endométriose, on a le mois prochain le Rassemblement national qui propose à l'Assemblée de soutenir les femmes qui souffrent de cette maladie en prévoyant l'exonération des frais de Sécurité sociale, la reconnaissance du statut de travailleuse handicapée pour ces femmes. Est-ce que le gouvernement est pour ?
AURÉLIEN ROUSSEAU
Alors moi, pardon d'être trivial, ça me rend dingue. Ça me rend dingue…
SALHIA BRAKHLIA
Pourquoi ça vous rend dingue ?
AURÉLIEN ROUSSEAU
Que le Rassemblement national arrive sur ce sujet. Ce sujet aujourd'hui, les femmes qui sont victimes et qui se sont touchées par l'endométriose, elles ont déjà accès à une affection de longue durée. Elles y ont déjà accès. L'endométriose, c'est une maladie évolutive, c'est une maladie qui peut prendre des formes extrêmement différentes. Vous savez, il y a des femmes qui souffrent peu, il y a des femmes qui souffrent régulièrement, il y a des femmes pour qui la douleur est permanente. C'est pour ça qu'elles sont classées - pardon de rentrer un peu dans les détails mais c'est un sujet, c'est pour ça que ça me rend un peu…
SALHIA BRAKHLIA
Mais là, il y a le statut de travailleuse handicapée que propose le Rassemblement national.
AURÉLIEN ROUSSEAU
Oui mais en fait, est-ce que vous êtes sûre que toutes les femmes qui ont une endométriose souhaiteraient être reconnues travailleuse handicapée ? Je n'en suis pas sûr du tout. Aujourd'hui l'ALD 31, donc cette ALD qui permet de prendre en charge avec 0 reste à charge pour les personnes qui en souffrent, les personnes qui ont une endométriose qui les conduit à aller voir souvent le médecin, à avoir des arrêts maladie etc., c'est pour moi la bonne réponse. Le Rassemblement national va foncer sur ce sujet sur lequel il ne s'est jamais investi. Moi je reconnais par exemple Clémentine AUTAIN, députée La France insoumise, elle avait présenté une résolution sur ce sujet, la majorité elle est engagée, le gouvernement il a lancé un plan endométriose depuis deux ans, et aujourd'hui on a déjà 15 000 femmes qui sont victimes d'endométriose qui ont une affection de longue durée.
JÉRÔME CHAPUIS
Donc si le gouvernement ne soutient pas cette mesure, ce n'est pas pour des raisons politiques.
AURÉLIEN ROUSSEAU
Ce n'est pas pour des raisons… Enfin, c'est d'abord pour des raisons… Oui il y a des raisons politiques, moi je le nie pas parce qu'encore cette semaine on a vu chez certains députés RN leur vision des femmes, qu'il fallait qu'elles restent au foyer. Donc oui il y a ça, mais deuxièmement parce que si l'idée était bonne et qu'on n'y avait jamais pensé, voilà. Mais là c'est de la fausse monnaie, parce que cette mesure elle est en place et la majorité l'a portée avec d'autres groupes depuis maintenant plusieurs années et on est mobilisé dessus. J'ai signé hier une circulaire à l'Assurance maladie, aux directeurs généraux d'ARS pour renforcer encore la filière endométriose. C'est un combat que je menais et je n'ai pas attendu. Je l'ai mené quand j'étais directeur général de l'ARS Ile-de-France, je n'ai pas attendu que le Rassemblement national me sorte une proposition opportuniste pour me mobiliser sur ce sujet. Excusez-moi, je suis un peu vif mais la santé des femmes c'est un sujet majeur sur lequel on ne lâchera rien.
SALHIA BRAKHLIA
Oui. Aurélien ROUSSEAU, juste après cette interview vous devez vous rendre à Créteil à la rencontre d'assistants de régulation médicale. En clair, ce sont ceux qui décrochent le téléphone quand on appelle le 15. Depuis plusieurs semaines, ils réclament des augmentations de salaires et un meilleur statut. Qu'allez-vous leur dire tout à l'heure ?
AURÉLIEN ROUSSEAU
D'abord les assistants de régulation médicale ce sont effectivement ceux que vous avez au bout du fil quand vous appelez le 15, donc ils ont un métier central dans notre dispositif de santé. Ils sont depuis deux ans beaucoup mieux formés, on a ouvert 19 écoles de formation des ARM. Ils ont un rôle dans la régulation globale qui est essentiel. Donc ils sont en conflit social, j'avais dit - je les ai vus à plusieurs reprises cet été. On a discuté avec eux. Je vais tout à l'heure annoncer une augmentation de 100 euros par mois de leur prime spécifique liée à leur fonction de régulation médicale, et par ailleurs ils avaient une revendication qui est légitime aussi sur une grille particulière. Aujourd'hui, je rentre un peu pardon dans la technique, ils ont la grille qui est la même que celle des secrétaires médicales ou des secrétaires médicaux pour ne pas forcément féminiser, qui sont aussi des fonctions essentielles hôpital. On ne va pas créer une nouvelle grille mais on va donner aux ARM une vitesse de progression et des capacités de reconnaissance des sujétions qu'ils connaissent qui leur permettront de progresser plus rapidement.
SALHIA BRAKHLIA
Donc une reconnaissance du statut et aussi vous allez recruter davantage. Parce que là ils ne sont pas assez nombreux, ils sont 2 500, ce n'est pas assez disent-ils.
AURÉLIEN ROUSSEAU
Moi, les directeurs d'établissement et les patrons de SAMU, s'ils ont besoin de recruter des ARM, ils recrutent des ARM. Moi, ce n'est pas le sujet mais ça peut être vrai dans certains endroits. Ça n'est pas le sujet que j'ai entendu le plus depuis quelques mois mais s'il faut recruter plus, ils recruteront plus.
SALHIA BRAKHLIA
Donc 100 euros de plus en prime.
AURÉLIEN ROUSSEAU
Voilà, absolument.
JÉRÔME CHAPUIS
Le ministre de la Santé Aurélien ROUSSEAU, 100 euros de plus en prime pour les assistants de régulation médicale. Vous restez avec nous, dans un instant on va parler notamment du Covid. Ce sera juste après le Fil info.
(…)
SALHIA BRAKHLIA
Toujours avec Aurélien ROUSSEAU, le ministre de la Santé. Le Beyfortus, le traitement préventif contre la bronchiolite, est victime de son succès, puisque les pharmacies n'arrivent pas aujourd'hui à répondre à la demande des parents, on rappelle que la bronchiolite, vous l'avez dit tout à l'heure, a causé le passage aux urgences de près de 100.000 nourrissons l'hiver dernier, est-ce que les pharmacies vont être livrées au plus vite dans les prochains jours ?
AURÉLIEN ROUSSEAU
D'abord, pardon de commencer par-là, mais c'est vous avez… victime du succès, d'abord c'est un immense succès, en maternité on a des taux d'adhésion à cette immunisation qui sont entre 60 et 80 %, personne, les sociétés savantes, ou le ministère, je nous mets dans le lot, personne n'avait anticipé ça, et quand vous entendez votre reportage tout à l'heure sur la vaccination Covid, les Français ils disent toujours que la vaccination ils ne sont pas pour, mais en fait quand on a des progrès thérapeutiques on les saisit, donc c'est d'abord une excellente nouvelle, et notre priorité c'est effectivement l'immunisation des plus petits, parce que l'an dernier les cas les plus graves, ceux qui vont en réanimation pédiatrique, ce sont les nourrissons de vraiment de quelques jours, quelques semaines, ou quelques mois, donc ce sont des doses de 50 milligrammes qui sont administrées en maternité, c'est ça notre priorité des priorités parce que c'est eux qui risquent le plus…
SALHIA BRAKHLIA
Donc les maternités sont priorisées, mais pour les autres ?
AURÉLIEN ROUSSEAU
Et pour les autres on attend, et on va avoir des livraisons de doses de 100 milligrammes qui sont pour les bébés de plus de 5 kilos, on est en lien permanent - c'est le laboratoire SANOFI qui produit ça - je suis en lien permanent avec eux, même la Première ministre ce week-end…
SALHIA BRAKHLIA
On aura combien de doses dans les prochains jours ?
AURÉLIEN ROUSSEAU
On a 200.000 doses, en France, sur le Beyfortus, il n'y a que quatre pays au monde qui ont fait ce choix, les États-Unis, l'Espagne, la France et l'Allemagne, on est dans le trio de tête, moi j'espère que dans les jours qui viennent on verra qu'on a réussi à percuter la courbe d'infection à la bronchiolite, et nous nous battons, et je crois que tout le monde se bat, pour essayer d'avoir encore plus de doses, mais on aura assez de doses pour les nourrissons, et dès qu'on en a on les bascule en pharmacies. On avait prévu 30 % d'adhésion, c'est déjà beaucoup, notamment quand vous voyez l'adhésion sur les autres types de vaccin, mais même si ce n'est pas un vaccin, on est entre 60 et 80, moi je retiens d'abord le succès et j'espère, et je me dis, que ça doit nous permettre de fracturer la courbe qui a été si violente l'an dernier, pour les bébés, pour les parents, pour le système de santé.
JÉRÔME CHAPUIS
Aurélien ROUSSEAU, vous comprenez que la campagne contre l'alcool soit critiquée, elle vient d'être lancée, on y voit des slogans du type "Boire aussi de l'eau, si on consomme de l'alcool c'est la base", mais certains disent en fait on n'incite pas suffisamment à arrêter l'alcool.
SALHIA BRAKHLIA
…Une campagne pour les jeunes !
AURÉLIEN ROUSSEAU
Oui, oui, je vois bien. 81 % des jeunes boivent de l'alcool régulièrement, 15 % des jeunes fument des cigarettes régulièrement, dire, quand on est à 15 %, dire on doit arrêter, et sinon évidemment on a un risque, on a 71.000 cancers par an, 71.000 morts du tabac, l'alcool c'est une campagne de prévention des risques. Les analyses…
SALHIA BRAKHLIA
Oui, mais le message il n'est pas un peu léger ?
AURÉLIEN ROUSSEAU
Non, les analyses…
SALHIA BRAKHLIA
Quand vous dites "quand vous buvez de l'alcool buvez aussi de l'eau", ce n'est pas un peu léger comme message ?
AURÉLIEN ROUSSEAU
Non, enfin vous pouvez considérer que c'est léger, et toutes les campagnes de santé publique elles se discutent, là le choix qui a été fait par Santé Publique France, et par les épidémiologistes, c'est de dire on essaye que les épisodes les plus violents - parce qu'en fait si vous ne buvez pas d'eau, ça peut paraître ridicule, mais vous avez beaucoup plus de coma éthylique, eh bien le coma éthylique ce n'est pas rien, voilà - donc c'est une campagne de prévention des risques, moi j'admets tout à fait la discussion, ce qui me fait plus réagir c'est quand on dit c'est le lobby de l'alcool qui a qui a conduit à ça. On a une situation chez les jeunes où on a 80 % de consommateurs, je pense qu'une campagne qui dirait "c'est mal, vous êtes coupable", etc.
JÉRÔME CHAPUIS
"Ne laissez pas d'alcool vous mettre Ko" par exemple, cette fameuse campagne dont on a parlé parce que la cellule d'investigation de Radio France a révélé qu'elle avait été finalement caviardée, elle n'était pas plus efficace ?
AURÉLIEN ROUSSEAU
Elle n'est pas caviardée - je ne sais si elle aurait été plus efficace - il y a comme toujours, et c'est pareil quand vous réfléchissez au changement de logo ou de truc, il y a plusieurs propositions qui sont faites, on a choisi, notamment en cette période, de cibler sur les jeunes, et le choix qui a été fait, quand je dis "on" ce n'est pas moi, c'est des spécialistes, il y a eu des tests, y compris sur des panels, qui ont considéré que cette campagne-là, avec "c'est la base", c'est des éléments… enfin, était la mieux à même de parler aux jeunes.
SALHIA BRAKHLIA
Aurélien ROUSSEAU, votre prédécesseur François BRAUN était venu sur ce plateau, il y a quelques mois, pour annoncer des bilans de santé complets et gratuits aux différents âges clés, 25, 45 et 65 ans, il était prévu que ça commence dans quelques jours, dès le 1er octobre, avec les 45-50 ans, vous le confirmez, ça va commencer ?
AURÉLIEN ROUSSEAU
Alors, ça va commencer dans quelques jours, le 1er octobre pour les 45-50 ans, mais c'est vrai qu'on a dû réviser un peu notre champ, on va le faire dans une dizaine de départements pilotes, et au 1er janvier ce sera généralisé. Pourquoi ? parce que, y compris on avait voulu, comme souvent en France, au fur et à mesure on avait fait ces bilans de prévention sur absolument tous les sujets et ça perdait un peu…
SALHIA BRAKHLIA
C'était une promesse du candidat MACRON les bilans de… !
AURÉLIEN ROUSSEAU
Oui, oui, mais ce seront des bilans de prévention, mais centrés sur les principaux risques, et pas un bilan de prévention où on dit qu'en trois quarts d'heure on fait la totalité de la vie d'une personne et de ses risques, on les centres sur les principaux risques, on les ajuste, on commence dans quelques jours dans les Hauts-de-France sur les 45-50 ans, et au 1er janvier, je vous assure, ce sera en effet généralisé, tout le monde est mobilisé pour ça, l'Assurance maladie, la Direction générale de la santé, on ne tiendra cet engagement.
JÉRÔME CHAPUIS
Aurélien ROUSSEAU, ministre de la Santé, qui nous a notamment annoncé une augmentation de 100 euros de prime spécifique pour les régulateurs médicaux, merci d'avoir été l'invité du 8.30 France Info.
AURÉLIEN ROUSSEAU
Merci.
Source : Service d'information du Gouvernement, le 29 septembre 2023