Interview de M. Clément Beaune, ministre délégué, chargé des transports, à Europe 1/ CNews le 5 décembre 2023, sur une attaque terroriste islamiste à Paris, les périmètres de sécurité pour les Jeux Olympiques de 2024 et la hausse annuelle des prix des péages des autoroutes.

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Média : Europe 1

Texte intégral

SONIA MABROUK
Et place donc à " La Grande interview " sur CNews et Europe 1. Bonjour Clément BEAUNE.

CLEMENT BEAUNE
Bonjour Sonia MABROUK.

SONIA MABROUK
Et bienvenue à vous. Vous êtes le ministre en charge des Transports. Je précise également que vous avez été en charge des Affaires européennes. Je vous interrogerai tout à l'heure eu égard à ce qui se passe sur le front de la guerre à Gaza. Mais tout d'abord, Clément BEAUNE, l'assaillant de l'attaque islamiste à Paris a revendiqué son acte en garde à vue, il apparaît comme étant froid, clinique, et déterminé, est-ce que vous croyez encore en la déradicalisation de ce genre d'individu ?

CLEMENT BEAUNE
Je ne sais pas, mais en tout cas, il est clair que c'est une attaque terroriste islamiste, il n'y a pas de débat là-dessus. Et donc le parcours, on peut le retracer, il a été fait depuis samedi, et l'intervention rapide de nos forces de l'ordre, mais il est clair que c'est une attaque islamiste, et donc c'est une menace islamiste que nous devons combattre par tous les moyens. Il y a des débats législatifs en ce moment s'agissant des personnes étrangères, il y a des situations différentes pour les citoyens qui sont Français, parce que la personne qui a commis cette attaque islamiste ce week-end est un citoyen français…

SONIA MABROUK
Franco-iranien, oui…

CLEMENT BEAUNE
Et puis, il y a les questions, mais qui ne sont pas une excuse, qui ne sont pas un dérivatif de la psychiatrie et des troubles, qui font parfois que certains individus, je n'ai pas le parcours exact de ce monsieur, mais sont des cibles par leur fragilité pour les idéologues islamistes encore davantage.

SONIA MABROUK
Vous dites : ce n'est pas une excuse, la psychiatrie, mais est-ce que justement, la psychiatrisation du débat n'est pas en train de faire passer au second plan la radicalisation, et vous le dites, je le note, Monsieur le Ministre, assez clairement ce matin, c'est un attentat islamiste, quand le président de la République, le soir-même ou quelques heures après l'attentat, ne l'a pas qualifié d'islamiste.

CLEMENT BEAUNE
Oui, mais parce qu'on n'avait pas toutes les informations tout de suite, moi-même…

SONIA MABROUK
Y avait-il un doute sur le mode opératoire ?

CLEMENT BEAUNE
Mais moi, je préfère qu'on ait des informations fiables et sûres, moi-même, j'ai fait un tweet, vous auriez pu le citer, vous voyez, je prêche contre ma paroisse, si je puis dire, où j'ai parlé d'attaque dans les minutes qui ont suivi pour soutenir les policiers qui sont intervenus. Et quelques minutes après ou quelques heures après, nous avons su exactement ce qui s'est passé. Donc il n'y a pas à tourner autour du pot. C'est une attaque islamique, je crois que personne ne le conteste. Ne faisons pas de mauvais débats. Ensuite…

SONIA MABROUK
L'extrême gauche le conteste…

CLEMENT BEAUNE
Oui, pardon, l'extrême gauche, elle n'est pas tout à fait au gouvernement, et il ne vous a pas échappé qu'on n'était pas tout à fait sur la même ligne que Jean-Luc MELENCHON, ni le président de la République, ni le gouvernement. Donc, qu'il y ait des ambiguïtés chez Jean-Luc MELENCHON et pire que ça, c'est un autre sujet. Et c'est très clair, mais c'est une attaque qui a un caractère islamiste, c'est sûr. Et la question ensuite, c'est non pas pour trouver des excuses, c'est pour trouver de l'action et de la réponse. C'est que fait-on face aux différents cas ? Parce que, malheureusement, les cas de terroristes islamistes que nous avons vus, ce sont parfois des situations individuelles qui sont différentes, à chaque fois, il faut du renseignement…

SONIA MABROUK
Ce sont les mêmes questions, Monsieur le Ministre, à chaque fois, ce sont les mêmes indignations, les mêmes condamnations et les mêmes questions, ce matin dans Le Parisien, que lui répondez-vous, Bruno RETAILLEAU affirme que l'Etat ne parvient plus à protéger les Français. Un Etat, dit-il, incapable d'empêcher que nos rues se transforment en coupe-gorges. En quoi c'est faux de votre point de vue ?

CLEMENT BEAUNE
Mais, je ne dis pas que c'est faux, je dis que c'est une mauvaise polémique, parce que la question est la même pour tous, évidemment, l'Etat veut et doit protéger. Et je veux aussi quand même qu'on soit sérieux sur ce sujet, nos policiers, nos services de renseignements, nos services d'intervention, ils déjouent des attentats tous les mois, par leur mobilisation, nous avons renforcé les moyens de nos services de renseignements. Nous avons renforcé sur ce sujet précisément, c'est une loi qui a deux ans, le suivi obligatoire pour les cas qui sont fragiles sur le plan psychiatrique, c'est une loi qui n'a pas été votée par ceux qui aujourd'hui donnent des leçons, et notamment au Rassemblement national. Donc qu'il faille protéger, bien sûr, qu'il faille protéger plus, bien sûr. Il y a des débats législatifs en ce moment sur le volet migratoire…

SONIA MABROUK
Alors, allons-y, comment protéger plus…

CLEMENT BEAUNE
Et puis, il y a d'autres sujets que la question migratoire, puisque, là, on a un citoyen qui est Français, donc ça veut dire qu'il faut…

SONIA MABROUK
Franco-iranien…

CLEMENT BEAUNE
Oui, bien sûr, franco-iranien…

SONIA MABROUK
Qui est Français, vous avez raison...

CLEMENT BEAUNE
Et donc ça veut dire que ce n'est pas la même réponse qu'un étranger en situation de délinquance, qui est sur notre territoire.

SONIA MABROUK
Alors, que fait-on dans ce cas-là, profil français, Clément BEAUNE ?

CLEMENT BEAUNE
Et je le dis aussi parce que je ne veux pas qu'on laisse penser, c'est un peu facile de faire, j'entends les propositions, ou plutôt les constats, parce que ce ne sont pas les propositions, de Bruno RETAILLEAU, qui dit : protégeons davantage, très bien, la question, c'est comment…

SONIA MABROUK
Mais allons-y ! Est-ce que vous pensez que terroriste un jour, c'est terroriste toujours ? Il a été condamné quand même, il a fait de la prison…

CLEMENT BEAUNE
Bien sûr. Mais, Sonia MABROUK, on a un Etat de droit, il a été condamné, il a purgé sa peine, le ressortissant franco-iranien, dont on parle, il a purgé sa peine. Ensuite, il y a eu une injonction pour un suivi, y compris psychiatrique, pendant quatre ans, à l'issue de ce suivi, il y a eu un diagnostic médical, ce n'est pas à moi de le juger, qui a constaté que sur le plan psychiatrique, il n'y avait plus de nécessité d'un suivi contraignant. Est-ce qu'il faut renforcer ces mesures ? Est-ce qu'il faut, comme l'a évoqué le gouvernement, dès dimanche soir, que, dans certains cas, quand il y a une alerte, puisqu'il y a eu une alerte, par exemple, de la maman de ce jeune homme, il puisse y avoir par le préfet des injonctions complémentaires ? Oui, on peut avoir ces débats et on doit les avoir, pour protéger plus…

SONIA MABROUK
En fait, la question, elle est, j'allais dire, plus simple et plus complexe, à la fois…

CLEMENT BEAUNE
Non…

SONIA MABROUK
C'est-à-dire, aujourd'hui, quand il sort de prison, qu'il a encore ce profil radicalisé, est-ce qu'il faut le maintenir quand même, eh bien, en prison pour protéger la société ?

CLEMENT BEAUNE
Mais Sonia MABROUK, il faut le maintenir. Qui décide et comment ?

SONIA MABROUK
Un juge…

CLEMENT BEAUNE
Oui, très bien, eh bien, pour ça, il faut qu'il y ait un certain nombre d'éléments. Et quand la peine a été décidée, elle n'est pas toujours une peine à perpétuité. Ça peut être la question du renforcement de notre arsenal pénal, ça peut être la question d'une alerte qui est donnée par un préfet ou par un juge. Ça, on peut y travailler, mais on voit bien ceux qui ont la baguette magique et qui disent : il suffisait de le garder pour toujours en prison…

SONIA MABROUK
Mais vous aussi, vous avez... pardonnez-moi, vous avez la même réponse pavlovienne…

CLEMENT BEAUNE
Non...

SONIA MABROUK
Vous me dites l'Etat de droit, mais, Monsieur le Ministre, est-ce que l'Etat de droit n'est pas un bouclier percé aujourd'hui pour la sécurité des Français ?

CLEMENT BEAUNE
Non, d'abord, moi, je fais partie de ceux qui pensent que nous avons besoin de l'Etat de droit. C'est quoi ? C'est des règles et des gens qui décident de manière indépendante. Si on basculait dans autre chose que l'Etat de droit, nous ne serions plus une démocratie qui protège ses citoyens. Je pense que personne n'a envie de ça, mais qu'on renforce notre arsenal, oui…

SONIA MABROUK
Pourquoi, pourquoi est-ce que, adapter ou trouver des mesures d'exception pour ces profils très dangereux, ce serait aujourd'hui porter atteinte à l'Etat de droit ? Je pense que beaucoup de français ne le comprennent pas…

CLEMENT BEAUNE
Très bien, c'est le débat qu'il y a par exemple sur les fichés S en général. Est-ce que le fait d'être fiché S, qui est un outil de nos services de renseignements, un outil administratif, doit donner lieu en soi, par exemple, certains le disent, à une forme de condamnation ou même d'enfermement éternel. Moi, je pense que, ce n'est pas moi, personnellement, ce n'est pas pour ne pas protéger les gens, tout le monde veut protéger, il faut qu'il y ait une décision de justice. Il faut qu'il y ait une vérification. Le fichier S, c'est un outil administratif qui est le plus large possible…

SONIA MABROUK
Dont beaucoup se demandent à quoi il sert aujourd'hui…

CLEMENT BEAUNE
Mais il sert, pardon, disons-le…

SONIA MABROUK
A part ficher, il n'y a pas de suivi…

CLEMENT BEAUNE
A nos milliers de policiers qui font du renseignement pour déjouer un certain nombre de projets, il y en a tous les mois qui sont déjoués, pour suivre un certain nombre de personnes, les empêcher de passer à l'acte. Un drame ne doit pas non plus remettre en cause tous les efforts qui sont déjà faits et les cacher, parce que nos policiers empêchent et arrêtent des gens tous les jours. Et est-ce qu'on doit aller plus loin sur certaines mesures ? Certainement. Mais faire croire qu'un fichier administratif peut être une décision de justice, je le dis, parce que ce n'est pas un sujet de technique, c'est un sujet très lourd, ça serait grave. Ça veut dire que vous avez quelqu'un qui fait du renseignement sur vous, pour une raison ou pour une autre, qui parfois peut se tromper, ça arrive aussi dans l'autre sens, et on prend les mesures d'enfermement, de prison pour toute la vie…

SONIA MABROUK
On parle de profils extrêmement dangereux, radicalisés…

CLEMENT BEAUNE
Bien sûr…

SONIA MABROUK
On ne parle pas de monsieur tout le monde…

CLEMENT BEAUNE
Mais, je suis d'accord, c'est pour ça qu'il faisait l'objet d'un suivi par les services de renseignements, d'un suivi psychiatrique aussi. Est-ce que ce cas-là nous appelle à faire plus et mieux ? Evidemment. Parce qu'à chaque fois qu'il y a un drame, c'est un échec, on ne peut pas dire autre chose.

SONIA MABROUK
C'est un échec pour vous ?

CLEMENT BEAUNE
C'est un échec collectif.

SONIA MABROUK
Politique.

CLEMENT BEAUNE
Non, collectif.

SONIA MABROUK
Oh ben, collectif, écoutez, tous les Français ne sont pas responsables de ce qui se passe dans les rues de Paris ou de Navarre.

CLEMENT BEAUNE
Bien sûr, mais être responsable, ce n'est pas dire « on a trouvé la solution tout de suite à tout, par l'enfermement généralisé ».

SONIA MABROUK
Mais vous admettez une responsabilité.

CLEMENT BEAUNE
Mais, on doit faire mieux. Tous, bien sûr.

SONIA MABROUK
Est-ce que vous admettez une responsabilité ?

CLEMENT BEAUNE
Mais, quand on est responsable politique, je suis un responsable politique, j'admets que c'est notre boulot de faire plus et mieux. Mais ensuite, il faut se mettre autour de la table. On a une loi, par exemple sur le sujet migratoire aujourd'hui, le ministre de l'Intérieur l'a encore dit ce matin, si on peut expulser des gens qui sont dangereux, des étrangers en l'occurrence, plus facilement et plus vite, ça libère aussi du temps de nos services de renseignement, pour faire davantage de boulot.

SONIA MABROUK
Bruno RETAILLEAU dénonce votre « en même temps » sur cela. Effectivement, Gérald DARMANIN dit que cela permet d'expulser ces délinquants étrangers radicalisés…

CLEMENT BEAUNE
C'est majeur. Ça veut dire que le service politique doit faire plus de renseignements et de suivis.

SONIA MABROUK
... mais en même temps, en même temps, Clément BEAUNE, c'est vraiment le en même temps la bonne expression, si je puis dire, eh bien cela ne permet pas de maîtriser les flux migratoires avec la régularisation des sans-papiers.

CLEMENT BEAUNE
Mais alors, ne mélangeons pas tout.

SONIA MABROUK
C'est ce que vous reproche l'opposition.

CLEMENT BEAUNE
Oui, très bien. Moi, j'assume…

SONIA MABROUK
C'est faux ?

CLEMENT BEAUNE
J'assume de ne pas mettre les gens, parce qu'ils seraient étrangers ou parce qu'ils seraient immigrés, dans une seule case et une seule catégorie. Parce que, s'il n'y a pas de " en même temps ", ça veut dire que tout étranger, tout immigré est un terroriste ou un islamiste potentiel.

SONIA MABROUK
Qui le dit ?

CLEMENT BEAUNE
Ce n'est pas le cas.

SONIA MABROUK
Ou qui le laisse penser ?

CLEMENT BEAUNE
Qu'est-ce que ça veut dire…

SONIA MABROUK
C'est important, qui le laisse penser ?

CLEMENT BEAUNE
Cela pourrait laisser penser que si on parle de régularisation et qu'on considère que c'est une atteinte à la fermeté, on mélange les situations. Qu'est-ce que c'est que cette histoire de régularisation ? C'est quelque chose de très ciblé pour des métiers en tension, des gens qui sont déjà sur le territoire national, depuis plusieurs années, qui travaillent, qui sont intégrés et à qui on veut faciliter le passage à une situation régulière. Ça s'est déjà fait dans le passé et tout a montré d'ailleurs, parce qu'il faut dire les choses en se basant sur des faits, que ces régularisations ciblées ne sont pas des appels d'air migratoire. Ce sont des gens…

SONIA MABROUK
Ça reste à prouver Clément BEAUNE.

CLEMENT BEAUNE
Oui. Et prouvons le contraire.

SONIA MABROUK
Eh bien ça, on pourra le prouver à l'épreuve des faits, si je puis dire, si la loi passe…

CLEMENT BEAUNE
Pardon, mais…

SONIA MABROUK
Mais vous ne faites aucun lien entre la situation dont on vient de parler et l'immigration ?

CLEMENT BEAUNE
Alors, d'abord, la personne qui est l'auteur des faits, semble-t-il, ce n'est pas quelqu'un qui est un étranger, ce n'est pas quelqu'un qui est un immigré. Il est né en France. Cela veut dire que…

SONIA MABROUK
Il a une double nationalité. Mais ma question est simple…

CLEMENT BEAUNE
D'accord. Mais ça veut dire que, non mais parlons-en…

SONIA MABROUK
Est-ce qu'il y a un lien. Est-ce que vous, vous le rejetez, vous dites que c'est grave ou est-ce que vous faites un lien entre, soit parfois des actes de terrorisme et des actes, je mets à part, de délinquance et d'immigration, ou est-ce que vous dites : attention, il n'y a aucun lien ?

CLEMENT BEAUNE
Mais il y a bien sûr des actes terroristes qui ont été commis par des étrangers, bien sûr, mais regardons aussi la situation en face, pas pour se payer de mots, pas pour être naïf, pour apporter les bonnes réponses. L'immense majorité des actes terroristes qui ont été commis sur notre sol ces dernières années, l'ont été par les citoyens français, on ne va pas retracer leur vie sur plusieurs générations, mais par les citoyens français, cela veut dire que…

SONIA MABROUK
Quand vous dites « sur plusieurs générations », c'est dire qu'ils ont parfois des origines qui sont étrangères, c'est ce que vous voulez dire Clément BEAUNE.

CLEMENT BEAUNE
D'accord, mais cela veut dire qu'il faut surtout prendre les mesures qui sont les bonnes, ça veut dire que tout ne se règle pas par les expulsions. En revanche, pour être très clair, les gens qui sont les étrangers délinquants, qui sont sur notre sol, aucun scrupule à les expulser. Et puis, parce que je ne veux pas qu'on mélange justement les régularisations dont on parle, ce serait faux de mélanger ces situations, ce sont les gens qui bossent, ce sont les gens qui sont dans les cuisines des restaurants où vous allez. Ce sont les gens qui sont des travailleurs agricoles…

SONIA MABROUK
Mais alors quoi, il y a un double langage de la part de l'opposition, du RN et de la droite sur ce…

CLEMENT BEAUNE
Mais bien sûr. Mais regardez monsieur BARDELLA, qui a été pris en flagrant délit de mensonge hier…

SONIA MABROUK
Chez nos confrères de Sud Radio…

CLEMENT BEAUNE
... il était lui-même inconscient des amendements qu'il dépose. Ses propres députés, et on peut avoir un débat, demandent que pour les agriculteurs, moi je viens d'une famille où, dans les Bouches du Rhône, on a beaucoup d'agriculteurs qui font appel à des saisonniers, que les agriculteurs puissent embaucher plus facilement, y compris des étrangers, sans trop vérifier, s'ils sont réguliers ou pas réguliers. C'est l'hypocrisie. Quand on donne des leçons de fermeté pour lutter contre l'immigration.

SONIA MABROUK
Tout le monde assure au gouvernement, Clément BEAUNE, que lors des JO, la sécurité sera au rendez-vous. Est-ce que vous pouvez nous dire ce matin au micro d'Europe 1 et de CNews, qu'est ce qui garantit que cela se passera bien ?

CLEMENT BEAUNE
Une mobilisation qui est totale et qui doit encore se renforcer. Mais la sécurité avant le drame terroriste de samedi, était déjà une préoccupation majeure pour la cérémonie d'ouverture et pour tous les Jeux olympiques et paralympiques…

SONIA MABROUK
Elle le devient encore plus.

CLEMENT BEAUNE
Bien sûr, mais heureusement qu'on n'a pas découvert qu'il y avait un enjeu sécuritaire ce samedi…

SONIA MABROUK
Alors, qu'est-ce que vous allez changer ?

CLEMENT BEAUNE
Mais on va...

SONIA MABROUK
Depuis samedi.

CLEMENT BEAUNE
La cérémonie n'a pas encore eu lieu, ça ne vous a pas échappé.

SONIA MABROUK
Non, non, mais qu'est-ce que vous allez changer depuis l'attentat ?

CLEMENT BEAUNE
La menace islamiste, la menace terroriste était déjà très forte. Donc il y a une mesure, un dispositif qui est extrêmement strict, qu'il mobilisera plus de 35 000 policiers et agents de sécurité pour la cérémonie d'ouverture. Et puis, il faut aussi qu'on soit un peu cohérent puisque la semaine dernière, on entendait beaucoup de gens qui nous disaient : c'est terrible ces périmètres de sécurité, où il va y avoir des fouilles pour entrer dans les lieux…

SONIA MABROUK
En même temps, on pensait que les Jeux olympiques étaient une fête populaire, on se rend compte qu'il faut des QR Code, que le ticket de métro va doubler et que…

CLEMENT BEAUNE
Pardon, enfin, ne mélangeons pas tout. On est tous en train de se dire qu'il ne faut pas de naïveté. Il faut vivre comme on l'entend, mais qu'il ne faut pas de naïveté de la sécurité. Ce serait un peu inconséquent de considérer qu'il n'y a aucune mesure qui soit pris pour les JO.

SONIA MABROUK
Monsieur le Ministre, ce n'est pas trop facile de faire peser quand même tous ces sujets sécuritaires sur les Français et les touristes qui vont venir participer à une fête.

CLEMENT BEAUNE
Ce n'est pas du tout... Oui, d'accord, mais dans les touristes qui vont participer à une fête, moi je préfère qu'on vérifie qu'il n'y ait pas justement des gens qui ont des idées ou des projets terroristes. Je pense qu'on est tous d'accord là-dessus.

SONIA MABROUK
Donc la seule solution c'est le QR code.

CLEMENT BEAUNE
Attendez, ne mélangeons pas tout. Il y a des périmètres de sécurité. Dans les périmètres de sécurité les plus proches des sites de compétition, on l'assume, faire le contraire serait irresponsable, qu'il y ait des fouilles, qu'il y ait des vérifications, qu'on ne rentre pas évidemment avec une arme ou avec de quoi faire un projet terroriste. Ça peut évidemment arriver. On le voit, malheureusement. La zone de l'attentat de samedi à Paris est une zone qui sera un périmètre de sécurité autour de la Tour Eiffel pour les Jeux olympiques et paralympiques, évidemment. Et puis les QR codes, il ne faut pas tout mélanger, c'est pour la circulation en voiture, pour que certains endroits soient moins saturés et que là aussi, on n'ait pas des gens qui convergent de manière non organisée, au moment des compétitions.

SONIA MABROUK
Il y a un sujet de sécurité aussi quand même, avec les QR codes…

CLEMENT BEAUNE
Bien sûr.

SONIA MABROUK
Oui, voilà, d'où la question.

CLEMENT BEAUNE
Est-ce qu'on veut qu'il y ait zéro restriction ? Est-ce qu'on veut qu'il y ait zéro vérification ? Je ne crois pas. Donc, le préfet de police, nous tous, nous mettons en place, c'est notre responsabilité, puisqu'on en parlait, des mesures de sécurité très strictes pour les JO.

SONIA MABROUK
Mais j'entends que vous n'avez pas la main qui tremble quand il s'agit de QR codes et de mesures de restriction de libertés pour les citoyens, et quand on parle…

CLEMENT BEAUNE
Pas pour embêter les…

SONIA MABROUK
Monsieur le Ministre, je suis obligée de vous poser la question : n'y-a-t-il pas des choses à géométrie variable ? Un, deux poids, deux mesures ?

CLEMENT BEAUNE
Pardon, mais justement, il se trouve que dans un certain nombre de cas, on l'a vu dans le passé, les terroristes ils choisissent les gens, où il y a des citoyens ordinaires. Quand vous prenez les transports, c'est malheureusement arrivé qu'il y ait des attentats dans nos transports. Quand il y avait, on l'a vécu dramatiquement et douloureusement, c'est la circonscription où je suis élu, l'attentat du Bataclan, c'est des gens ordinaires et festifs qui allaient à un concert, les terroristes se sont glissés et ont tué dans 7 endroits. Donc, qu'on ait des mesures de vérification, de suivi qui sont proportionnées. Par exemple, dans les transports publics, on renforce les effectifs de sécurité. Est-ce qu'on va mettre tous les jours, tous les matins, des portiques à l'entrée de chaque gare de France ? Je ne le souhaite pas, précisément pour ce que je vous dis, c'est-à-dire ne pas embêter les Français qui vivent leur vie, mais on doit assurer leur sécurité et c'est cet équilibre, c'est de cela dont je parlais en parlant de l'Etat de droit qu'on doit assurer dans notre société, continuer à vivre et protéger davantage.

SONIA MABROUK
Sur la circulation, vous avez dénoncé, Clément BEAUNE, une trahison, des mots forts après qu'Anne HIDALGO ait affirmé que sur les transports, pour les Jeux olympiques, vous n'étiez pas prêts. Mais vous-même, j'ai noté une autre phrase quelques semaines avant. Vous avez dit que la circulation allait être entre « hardcore ». Alors, quel Clément BEAUNE dit vrai ?

CLEMENT BEAUNE
Moi, j'ai toujours dit la même chose, Sonia MABROUK, considérer que les Jeux olympiques et paralympiques ça nécessite des mesures de sécurité, ça nécessite des mesures d'organisation, on accueille le monde une fois tous les 100 ans, évidemment. Et d'ailleurs, ces mesures de restriction de la circulation, elles sont vues et travaillées avec la Ville de Paris. En revanche…

SONIA MABROUK
Mais alors, que dit Anne HIDALGO, elle ne travaille pas avec vous ?

CLEMENT BEAUNE
Anne HIDALGO, elle a dit tout à fait autre chose. Alors non, je vous confirme qu'elle ne vient à aucune des réunions que je fais sur la sécurité et les transports, sur ce sujet-là. Et ce qu'elle a dit, Anne HIDALGO, c'est très différent. Elle est allée sur un plateau de télévision, regardé par la France et le monde, pour dire, non pas il y a encore du boulot, pourquoi pas, elle a dit : " On ne va pas être prêt ". Ça veut dire on ne va pas être prêt en juillet prochain.

SONIA MABROUK
C'est pour ça que vous parlez de trahison, c'est-à-dire que ça va à l'encontre de l'image de notre pays, parce que le mot est très fort, quand on le prend dans son sens.

CLEMENT BEAUNE
Oui, bien sûr. J'ai parlé de trahison politique, parce que quand on est un responsable politique, et on va essayer de travailler ensemble, moi je fais tout pour cela au quotidien, eh bien on ne peut pas aller sur un plateau de télévision, on peut régler ses comptes entre nous, pour dire : la France, Paris, notre capitale, notre pays ne va pas être prêt à tenir ses engagements et accueillir le monde. Ça, c'est grave. Vous imaginez si le maire de Londres trois mois ou six mois avant les Jeux était aller dire, on se serait bien moqué, sur un plateau, " Nous ne serons pas prêts ". Nous serons prêts, et notre responsabilité, c'est de bosser ensemble pour l'être sur la sécurité, sur les transports, sur toute l'organisation.

SONIA MABROUK
J'ai deux questions rapides, mais, comment dire, d'actualité, et qui nous concernent tous. Routes et autoroutes, vous avez promis que la hausse annuelle des prix des péages resterait inférieure à 3% en 2024. Les Sociétés d'autoroutes menacent quant à elles d'augmenter leurs prix depuis l'annonce d'une taxe sur les concessions autoroutières et aéroportuaires. Plusieurs sociétés, on va la citer, comme VINCI, assurent qu'il y aura une hausse de 5 % des prix du péage afin de compenser cette taxe. Qui dit vrai ?

CLEMENT BEAUNE
Ça s'appelle un mensonge, et vous pourrez le vérifier, puisque c'est fixé par l'Etat à la fin, les péages. Donc quand je dis en 2024, la hausse moyenne des péages sera limitée à moins de 3%. C'est la réalité juridique et pratique.

SONIA MABROUK
Donc ce n'est pas un bras de fer qui va s'engager avec ces sociétés ?

CLEMENT BEAUNE
Non, il y a plusieurs choses, les Sociétés d'autoroutes, il y a certains qui ont dit : il faut les nationaliser, etc. Moi, je ne pense pas. En revanche, elles ont une situation financière qui est bonne. Soyons francs. Est-ce qu'elles doivent financer plus de trains, plus de transports publics en contribuant avec d'autres ? Oui, et j'assume cette taxation. Ça ne leur fait pas plaisir, personne n'aime payer un impôt supplémentaire, moi, je préfère qu'il aille financer les transports des Français…

SONIA MABROUK
Et nous, on n'aimerait pas que ça se répercute sur nous…

CLEMENT BEAUNE
Oui, mais là aussi, il faut qu'on soit cohérent. Les Français, ils nous disent : les trains, c'est la galère, il n'y a pas assez de transports publics, il faut plus de bornes électriques, eh bien, on investit et on finance cet investissement, non pas en vous taxant vous, mais en taxant quelques sociétés qui peuvent payer. Et ensuite, ça ne justifie pas, on peut ne pas être content, c'est la vie, ça ne justifie pas – ce n'est pas le rôle d'une entreprise – d'aller raconter des mensonges et des balivernes qui font peur aux automobilistes et qui ne sont pas justes. Donc moi, je suis très clair. La décision est actée cette semaine. La hausse des péages est limitée à moins de 3%, c'est la validité pour le 1er février 2024. Et je crois que quand on a des clients automobilistes par millions, on doit les respecter, ne pas leur faire peur à tort.

SONIA MABROUK
A bon entendeur. Merci Clément BEAUNE. C'était votre " Grande interview " ce matin...

CLEMENT BEAUNE
Merci à vous.

SONIA MABROUK
Sur Europe 1 et Cnews.


Source : Service d'information du Gouvernement, le 6 décembre 2023