Interview de M. Thomas Cazenave, ministre délégué, chargé des comptes publics, à France Info le 22 décembre 2023, sur la loi immigration et la politique économique du gouvernement.

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Média : France Info

Texte intégral

JEAN-REMI BAUDOT
Bonjour Thomas CAZENAVE.

THOMAS CAZENAVE
Bonjour.

JEAN-REMI BAUDOT
Votre collègue du gouvernement, la ministre Agnès FIRMIN LE BODO qui est actuellement ministre de la Santé par intérim en remplacement d'Aurélien ROUSSEAU, a confirmé il y a quelques instants sur France Bleu qu'elle était bien visée par une enquête dans le cadre de sa fonction de pharmacienne, puisqu'elle est pharmacienne à la base. C'est ce que Mediapart révélait. Qu'elle était visée par une enquête sur des cadeaux d'une multinationale de produits de santé, URGO, qu'elle aurait reçus en tant que pharmacienne et qu'elle n'aurait pas déclarés. C'est sur ce point précisément qu'elle est mise en cause. Est-ce qu'on peut être ministre de la Santé et avoir caché des cadeaux de l'industrie pharmaceutique ?

THOMAS CAZENAVE
Vous avez employé le conditionnel, je pense avec prudence. Il y a une enquête en cours et je crois sur ce sujet-là comme sur tous les autres sujets, il faut laisser la justice faire son travail et dire sa vérité.

JEAN-REMI BAUDOT
Elle est évidemment présumée innocente.

THOMAS CAZENAVE
Absolument.

JEAN-REMI BAUDOT
Si c'était vrai néanmoins, c'est un peu cette petite musique autour des ministres qui ont été régulièrement mis en cause. En fait, c'est la question de l'exemplarité en politique qui joue toujours.

THOMAS CAZENAVE
Mais l'exemplarité, elle est absolument indispensable, non négociable. Mais vous l'avez dit, il y a une enquête en cours, attendons le résultat de l'enquête et la décision de juges qui sont saisis et qui diront la vérité.

AGATHE LAMBRET
Thomas CAZENAVE, après le vote de la loi immigration, on parlait à l'instant, Aurélien ROUSSEAU, le ministre de la Santé, a démissionné. Hier, on a appris que votre collègue, la ministre de L'enseignement supérieur Sylvie RETAILLEAU, a aussi présenté sa démission qui a été refusée. Vous, ça va ? Vous êtes toujours à l'aise dans ce gouvernement ?

THOMAS CAZENAVE
Je suis à l'aise et je vais vous dire, alors que je terminais mon budget, j'ai pris du temps pour regarder ce texte - qui n'est pas le projet du gouvernement, qui est le fruit d'un accord entre la majorité et les LR - pour le comprendre et pour voir si j'étais véritablement à l'aise. J'ai entendu dire : vous avez repris un texte du Rassemblement National, donc j'ai regardé dans le détail. Je rappelle quelques principes de base sur le projet du Rassemblement national. Le projet du Rassemblement national, c'est la préférence nationale sur l'accès à l'emploi, au logement, aux écoles. Il n'en est nullement question dans ce texte.

JEAN-REMI BAUDOT
La préférence nationale sur les allocations…

THOMAS CAZENAVE
Je vais y revenir. Le Rassemblement national, c'est la fin du droit d'asile. Nous ne touchons absolument pas à la question du statut des réfugiés.

AGATHE LAMBRET
Pourquoi Aurélien ROUSSEAU a démissionné alors, Thomas CAZENAVE ?

THOMAS CAZENAVE
J'y viens. Le Rassemblement national, c'est la fin de l'aide médicale d'État, il n'en est absolument pas question. Et le Rassemblement national, c'est plus de régularisations : on va multiplier par deux les régularisations.

AGATHE LAMBRET
Alors on va revenir sur ces points-là. Mais est-ce que vous comprenez la démission d'Aurélien ROUSSEAU dans ce contexte ?

THOMAS CAZENAVE
Je respecte Aurélien ROUSSEAU, je ne prends pas cette décision-là parce que je considère que ce texte, qui est le résultat d'un compromis, qui a des défauts par ailleurs, n'est pas du tout le texte du Rassemblement national. Donc je rappelle, tout ça est en fait le fait d'une volte-face et d'un énorme mensonge du Rassemblement national qui, le matin même disait : on ne votera pas ce texte qui permet la régularisation de travailleurs étrangers, et qui le soir, tente un coup politique pour déstabiliser la majorité en voulant faire croire à tout le monde que c'est son texte. C'est aux antipodes de son texte ! Multiplier par deux les régularisations, ce n'est pas le projet du Rassemblement national.

AGATHE LAMBRET
Mais Thomas CAZENAVE, ce n'est pas le seul sujet et vous le savez. Si Sylvie RETAILLEAU reste d'ailleurs, c'est que le président lui a donné des garanties contre la caution étudiante qui figure dans la loi. C'est une somme qui serait demandée aux étudiants étrangers voulant obtenir leur titre de séjour. Cette caution, Emmanuel MACRON lui-même a jugé que c'était une mauvaise idée. Donc c'est-à-dire que vous vous êtes battus pendant plusieurs jours pour faire voter une loi qui contient, de l'aveu même du président, de mauvaises idées.

THOMAS CAZENAVE
Cette loi, je l'ai dit, c'est un compromis. Vous savez, vous le dites souvent ici et je le constate moi aussi comme ministre, on est en majorité relative, il y a un compromis qui a été trouvé avec les LR. Moi, ce n'est pas des mesures que j'aurais portées dans un texte. Ce n'était d'ailleurs pas des mesures qui étaient dans le projet du gouvernement. Parmi les mesures qui me posent des difficultés, je vous le dis, moi je partage l'avis de Sylvie RETAILLEAU sur la question des cautions pour les étudiants étrangers. Je crois à notre université, à notre recherche française qui doit être ouverte sur le monde, qui doit accueillir des étudiants, des chercheurs étrangers, nos étudiants doivent partir à l'étranger. Je trouve que ce n'est pas une bonne mesure. Il y a des dispositifs réglementaires qui devront préciser comment ça s'applique mais je le redis, je ne suis pas à l'aise avec tout le texte. Mais de là à entendre ce qui est un énorme mensonge - je le redis – que ce serait le texte du Rassemblement national, non, je ne le partage pas.

JEAN-REMI BAUDOT
Ce qui est un tout petit peu baroque, c'est qu'on a l'impression que vous comptez sur le Conseil constitutionnel pour venir gommer les lignes rouges qui ont été franchies dans ce texte. Ce n'est pas tout à fait comme ça que ça doit se passer notamment. Et d'ailleurs en embuscade, vous avez les LR, notamment Eric CIOTTI ce matin dans Le Parisien, qui continue à mettre la pression en disant que ce serait un déni de démocratie si ces points-là n'étaient pas respectés dans le texte qui a été voté.

THOMAS CAZENAVE
Mais non, il n'y a pas de déni de démocratie quand le Conseil constitutionnel contrôle les lois qui sont votées. Vous savez, on vient d'adopter définitivement le budget de l'État, le projet de loi de finances. Il va être contrôlé par le Conseil constitutionnel, il n'y a rien de plus classique et de plus protecteur pour nous tous.

JEAN-REMI BAUDOT
Non mais là, vous n'attendez pas du Conseil constitutionnel…

THOMAS CAZENAVE
Non, non, non ! Mais laissez-moi terminer. Que le Conseil constitutionnel valide les lois, il lui arrive de censurer des dispositions y compris dans les budgets. Chaque année, il y a des dispositions qui sont censurées. Il va donc contrôler le résultat issu de la CMP qui a été voté. Dont je dis par ailleurs que quand vous travaillez sur des compromis, à la différence d'un projet du gouvernement où vous saisissez le Conseil d'Etat, vous vérifiez la solidité juridique de vos dispositions, ce n'est pas le cas dans le cas d'un compromis, je trouve que c'est une sécurité indispensable prévue dans nos textes. Et donc le contrôle du Conseil constitutionnel, comme sur les autres textes, est attendu, est indispensable.

AGATHE LAMBRET
Thomas CAZENAVE, vous disiez qu'il n'y a pas de préférence nationale. Seulement, les prestations familiales seront désormais conditionnées à une présence en France d'au moins cinq ans pour les étrangers en situation régulière sans emploi, et deux ans et demi pour ceux qui travaillent. On va prendre un exemple très concret. Une femme étrangère en situation régulière qui a un enfant n'aura pas l'allocation de rentrée scolaire si elle ne remplit pas ces nouvelles conditions. Elle n'aura pas non plus les allocations familiales alors qu'une Française ou une ressortissante européenne aura, elle, ces avantages. Vous trouvez que c'est juste ? Et si ce n'est pas la préférence nationale, c'est quoi ?

THOMAS CAZENAVE
Mais là encore, alors non, ce n'est pas la préférence nationale, je vais vous dire pourquoi. La préférence nationale, c'est interdire l'accès aux étrangers dans un certain nombre de dispositions. C'est ce que veut le Rassemblement national.

AGATHE LAMBRET
Les allocations n'en font pas partie pour vous ?

THOMAS CAZENAVE
Non mais, on ne dit pas… Le texte ne dit pas qu'ils n'y ont pas droit. Il dit qu'il y a un délai pour y avoir droit. Je rappelle qu'il y a des dispositions comme le RSA, le revenu social d'activité, il permet à ceux qui n'ont aucune activité d'avoir un revenu. Aujourd'hui même, il est conditionné à cinq ans de résidence en France.

AGATHE LAMBRET
Mais François HOLLANDE vous rétorque que ce n'est pas le même type de revenu, le RSA. Ce n'est pas une prestation presque vitale. Là, vous voulez que les étrangers s'intègrent mieux et vous allez leur supprimer l'allocation de rentrée scolaire, les allocations familiales.

THOMAS CAZENAVE
Le revenu social d'activité, c'est le filet de sécurité universel qui permet à ceux qui ne travaillent pas, qui n'ont pas d'allocations… Il existe déjà dans notre droit. La prime d'activité est conditionnée aussi à cinq ans de résidence. Le minimum vieillesse, on n'en parle pas le minimum vieillesse, dix ans sur le territoire national. Ce que je veux dire, c'est qu'ils ont modifié les curseurs, modifié les délais. Ce n'est pas le projet initial du gouvernement mais ça n'a rien à voir. La préférence nationale, je le redis, c'est interdire aux étrangers l'accès à ce type de dispositif. Il y a des délais. C'est interdire l'accès ou bien privilégier les Français pour inscrire dans les écoles, accéder à des logements, accéder à l'emploi. Donc ils ont choisi dans leur compromis de décaler des curseurs. Nous avons, la majorité, permis d'enlever des éléments absolument indispensables dans l'accord. Je pense notamment à la question du fait que, pour ceux qui travaillent, l'accès aux APL a été ramené de cinq ans à 30 mois par exemple. La suppression de l'AME que souhaitait le Sénat a été supprimée du compromis. Donc il y a eu un travail de compromis.

AGATHE LAMBRET
Mais Elisabeth BORNE s'est engagée à la réformer.

THOMAS CAZENAVE
Non mais Elisabeth BORNE, je vais vous dire, elle a dit quelque chose de très clair auquel je suis très attaché comme toute la majorité : il n'y aura pas de suppression de l'AME. En revanche, il y a eu un rapport remis par Patrick STEFANINI de droite, Claude EVIN de gauche, en disant 1/ il n'y a pas d'appel d'air avec l'AME, que c'est un dispositif utile, mais qu'on peut revoir les conditions de coordination de soins. Il y a des dispositifs peut-être à retoucher mais il est hors de question que nous remettions en cause l'AME.

JEAN-REMI BAUDOT
Thomas CAZENAVE, ministre délégué aux Comptes publics, on se retrouve dans un instant juste après le fil info de Maxime GLORIEUX. (…)

- Le fil info

AGATHE LAMBRET
On parlait à l'instant des nouvelles règles qui pénalisent les étrangers en situation régulière pour recevoir des prestations familiales notamment. Quel est le message envoyé aux talents étrangers dont la France a besoin ? Parce que cette loi, elle vise à diminuer l'immigration avec des régularisations au compte-goutte. Est-ce que c'est vraiment compatible avec la réalité, avec le vieillissement de la population, avec les pénuries de main d'oeuvre, ce projet ?

THOMAS CAZENAVE
Alors oui, je vais vous dire pourquoi ; au-delà des dispositions qui font le plus de débat, il y a deux éléments importants qui étaient déjà dans le projet du Gouvernement qui se retrouvent dans ce texte. D'abord, il faut qu'on soit plus rapide, plus efficace pour reconduire à la frontière des étrangers délinquants qui menacent notre sécurité. On le sait, les procédures sont trop longues, trop difficiles. Et le deuxième pilier qui a été conservé, c'est, et vous l'avez dit, la possibilité de régulariser des travailleurs qui sont sur notre sol depuis plusieurs années, parfaitement intégrés, qui travaillent dans des secteurs dans lesquels il y a des besoins de recrutement. D'ailleurs, le président du Medef vient de dire il y a quelques jours qu'il y avait des besoins …

JEAN-REMI BAUDOT
Lui parle de 3,9 millions de travailleurs d'ici à 2050.

AGATHE LAMBRET
Il dit que les régularisations, c'est mineur, pardon Thomas CAZENAVE mais il dit que ce n'est pas le sujet …

THOMAS CAZENAVE
Ce n'est pas le sujet … !

AGATHE LAMBRET
Il fallait réinventer notre modèle ou alors avoir 3,9 millions de salariés étrangers. Ce n'est pas les quelques régularisations par an qui vont permettre …

THOMAS CAZENAVE
C'est déjà un pas important quand on dit qu'on va multiplier par deux les régularisations pour permettre, dans les secteurs en tension, dans les entreprises comme dans nos services publics, je pense à notre système de santé, je pense au secteur du bâtiment par exemple, on a besoin de régulariser des travailleurs, et ça, c'est une réponse aux difficultés de recrutement et au fait que la France reste un pays ouvert. Elle a besoin dans certains secteurs d'une immigration de travail qui permet de garantir la bonne intégration dans le pays. Et ça, c'est permis par l'accord qui a été trouvé entre la majorité et les LR. Et c'est là où je dis complètement à rebours de toutes les thèses défendues depuis des années par d'abord le Front national et le Rassemblement national, qui ont toujours dit « on veut fermer les frontières, arrêter les régularisations » et on ne fera jamais avec leurs mesures une France ouverte qui attire les talents, qui se développe, qui rayonne.

AGATHE LAMBRET
C'est le contraire quand on voit votre projet de loi, ce n'est pas le message …

THOMAS CAZENAVE
Ce n'est pas ce n'est pas vrai sur les régularisations…

AGATHE LAMBRET
Le président du MEDEF dit que …L'exemple de l'Allemagne …

THOMAS CAZENAVE
Je vous renvoie aux déclarations du ministre de l'Intérieur, par exemple, il a annoncé qu'on allait doubler le nombre de régularisations, doubler le nombre de régularisations grâce à ce dispositif, Gérald DARMANIN …

JEAN-REMI BAUDOT
Qu'est-ce qui fait que l'opinion ne retienne pas particulièrement ce point-là, donc, la main tendue, la porte ouverte au travail en tension et plutôt garde en tête les dispositifs plus répressifs et la question des allocations et de ce que le Rassemblement national a revendiqué comme préférence nationale ?

THOMAS CAZENAVE
Mais parce que tout ça repose depuis quelques jours sur un énorme mensonge du Rassemblement National.

JEAN-REMI BAUDOT
Donc c'est la faute des autres, c'est ça, votre …

THOMAS CAZENAVE
Excusez-moi de le dire, moi, j'ai porté mon budget. J'ai pris le temps de regarder dans le détail ce texte, mais c'est un énorme mensonge, de l'aveu même du Rassemblement National. Je le rappelle, le jour du vote, le matin, Jordan BARDELLA, président du Rassemblement national : " Nous voterons contre ce texte " et ils ont senti l'opportunité d'un coup politique. Ils mentent aux Français. Ils nous ont fait le coup sur les retraites en disant tout et son contraire. Ils ont fait le coup sur l'immigration. Ils ne sont pas fiables, ils mentent aux Français et ils ont récidivé.

AGATHE LAMBRET
On vous a entendu là-dessus. Néanmoins, vous avez commencé l'année avec les retraites sur la base du projet de la droite et vous l'avez terminé sur l'immigration en corédaction avec Les Républicains. Donc, est-ce que maintenant vous, vous assumez de dire que vous gouvernez avec la droite ?

THOMAS CAZENAVE
Nous sommes une majorité relative : sur tous les textes, nous devons trouver des accords. Par exemple, avant de faire valider le budget. Hier à l'Assemblée nationale, moi je portais un budget rectificatif avec lequel j'ai trouvé des accords avec les LR, le PS, les écologistes, le groupe LIOT sur un budget rectificatif. Sur les énergies vertes, sur les énergies, l'énergie nucléaire, sur l'industrie verte, sur la sécurité, on cherche des accords, on cherche des accords. Pardon mais pour un accord, il faut être deux, il faut être deux. Et donc on voit bien que c'est parfois plus difficile avec la gauche de trouver des accords. Ce n'est pas pour autant qu'il faut y renoncer. Nous sommes en majorité relative.

AGATHE LAMBRET
Est ce qu'il faut changer de Premier ministre pour sortir de cette crise? François BAYROU, président du MoDem, appelle à un nouveau départ pour le Gouvernement.

THOMAS CAZENAVE
Moi, j'entends régulièrement l'appel à un nouveau départ. On n'a pas changé de cap. On a un cap auquel je suis très attaché, celui du plein emploi. Pourquoi le plein emploi? Quand même, on oublie trop, trop, trop facilement qu'on a réussi depuis 2017 à vaincre le chômage de masse dans notre pays et qu'il y a encore du travail à faire. Pourquoi c'est important? Parce que c'est bon pour le pouvoir d'achat de faire baisser le chômage. C'est bon pour la lutte contre les inégalités, c'est bon pour l'intégration et c'est bon parce que ça, c'est ma responsabilité pour le redressement des finances, des finances publiques.

JEAN-REMI BAUDOT
Alors, finances publiques. 111,7% du PIB. Voilà la dette publique. C'est ce que vient de publier l'INSEE. Dans le même temps, on a aussi une inflation. Alors, elle commence à baisser doucement. Qu'est-ce que vous dites aux Français qui sont inquiets ? Ils font leurs courses de Noël, ils veulent faire un bon dîner, ils se rendent compte que le panier coûte de plus en plus cher. Vous dites que là, c'est un peu dur, mais ça ira mieux demain.

THOMAS CAZENAVE
L'inflation est en train de reculer dans le pays. L'INSEE le dit, c'est les prévisions que nous nous formulons avec Bruno LE MAIRE avec l'INSEE notamment, elle va progressivement baisser. Je sais qu'elle frappe durement les Français, que le pouvoir d'achat est rudement frappé, notamment pour celles et ceux qui ont les revenus les plus faibles. Mais grâce à l'action, notamment avec les industriels, avec le secteur de la grande distribution mené par Olivia GREGOIRE et Bruno LE MAIRE, nous avons une baisse de l'inflation et ça, on sera à 2,5% d'inflation. Mais on a aussi des mesures d'accompagnement. Je veux parler du budget rectificatif par exemple, on a voté une amélioration de la prime de Noël ; la prime de Noël qui vise notamment les famille les plus en difficulté bénéficiaires des minima sociaux pour les familles monoparentales par exemple. Je pense aux femmes seules qui élèvent leurs enfants, dans un accord d'ailleurs avec la gauche de notre Hémicycle, permis d'augmenter la prime de Noël pour les familles monoparentales.

AGATHE LAMBRET
Cette année.

THOMAS CAZENAVE
Cette année.

AGATHE LAMBRET
Et en parallèle, le paradoxe, Thomas CAZENAVE, c'est qu'il y a aussi des prix qui augmentent l'électricité, par exemple avec le retour d'une taxe qui va entraîner 10 % de hausse sur les factures. Cela va encore augmenter ?

THOMAS CAZENAVE
Il faut aussi … Moi, ma responsabilité, c'est de dire la vérité aux Français sur les finances publiques. Nous avions 5% de déficit public ; l'Etat a protégé tout le monde pendant la crise depuis la crise du Covid jusqu'à la crise ukrainienne, la crise de l'énergie ; est-ce qu'on peut rester avec 5% de déficit, 3 000 milliards de dettes ? Non. On a mis en place des dispositifs pendant la crise. On a supprimé la taxe sur l'électricité par exemple pendant la crise, on l'a divisée par 32. Est-ce qu'on peut rester comme ça ? Non. On prend encore en charge 40% de la facture d'électricité des Français, mais ce n'est pas durable.

AGATHE LAMBRET
Ça veut dire que ça va encore augmenter ? Les taxes vont encore augmenter sur l'électricité en 2025 ?

THOMAS CAZENAVE
Comme le prix de l'électricité baisse dans notre pays, ce qui nous permet de remettre progressivement des taxes tout en tenant l'engagement qui a été pris par le Gouvernement de ne pas augmenter les prix d'électricité en février de plus de 10%. Mais il faut qu'on puisse dire la vérité aux Français.

JEAN-REMI BAUDOT
Donc vous assumez d'augmenter par exemple les taxes typiquement sur l'électricité puisque le prix l'électricité baisse en gros, vous partez du principe que pour le consommateur, ce sera d'une certaine manière un peu indolore sauf qu'en réalité, ce sera une hausse de taxes ?

THOMAS CAZENAVE
Absolument. Je pars du principe qu'on ne peut pas garder des dispositifs qui ont été mis pendant la crise alors que la crise des prix de l'énergie est désormais derrière nous. C'est ma responsabilité de le dire. Nous devons mieux maîtriser nos finances publiques. Nous ne pouvons pas laisser à nos enfants un déficit public qui ne serait pas réduit, une dette qui serait en croissance. Ce ne serait pas responsable. Et je pense que les Français attendent de notre part que l'on gère de manière sérieuse nos finances publiques.

JEAN-REMI BAUDOT
Et on va continuer à parler des finances publiques dans un instant, Thomas CAZENAVE Juste après le fil info de Maxime GLORIEUX à 8h50.

- Le fil info

AGATHE LAMBRET
Toujours avec Thomas CAZENAVE, ministre délégué aux Comptes publics. On parlait à l'instant des prix de l'électricité qui augmentent, avant-hier le président, en parlant des Français aussi, qui consomment trop de médicaments, a dit travailler sur les franchises, elle en est où cette piste du doublement de la franchise médicale, c'est-à-dire de la part que payent les Français quand ils achètent des médicaments ou vont chez le médecin ?

THOMAS CAZENAVE
Aujourd'hui quelle est la situation ? les dépenses de médicaments, elles augmentent entre 4, 5, 6% par an, ce n'est pas soutenable, moi je pense que la Sécurité sociale, à laquelle on est tous attachés, elle est soutenable si elle est financée, donc la question c'est comment on fait pour maîtriser l'évolution des dépenses de médicaments ? D'abord, on fait baisser les prix des médicaments, et ça on a obtenu 1 milliard d'euros d'économies de la part des industriels. Deuxième axe, il faut que les professionnels, les médecins eux-mêmes qui prescrivent les médicaments, il faut qu'on prescrive mieux, il faut qu'on prescrive moins de médicaments, et je l'assume. Il faut qu'on travaille sur des sujets très concrets, il y a trop de gaspillage en matière de médicaments…

AGATHE LAMBRET
Ça sera pour quand cette franchise alors ?

THOMAS CAZENAVE
J'y arrive, je n'évite pas la question ; sur la question, par exemple, de la prescription à l'unité, moi je crois qu'il faut une prescription plus à l'unité pour éviter le gaspillage. Et enfin la question des franchises, c'est une forme de participation à l'effort collectif, à l'effort partagé, moi je souhaite qu'elle puisse être mise en oeuvre, la loi de finances sur la Sécurité sociale a été définitivement adoptée, nous allons pouvoir maintenant lancer le travail, parce qu'il s'agit de textes réglementaires, pour revoir un dispositif qui existe depuis 2008, 50 centimes, qui n'a jamais été revu, ni par la droite, ni par la gauche, ni remis en question, pour l'augmenter de 50 centimes, en protégeant les malades, les plus vulnérables.

JEAN-REMI BAUDOT
Ça fait combien de différence, à la fin, pour les finances publiques ?

THOMAS CAZENAVE
Ça fait 600 à 700 millions d'euros d'économies, mais qui ne se feront pas sur celles et ceux qui sont les malades, les chroniques, les malades chroniques, ceux qui sont en ALD, en affections de longue durée, pourquoi ? parce qu'on garde pour chacun le fait que personne ne paiera plus de 50 euros par an, plus de 50 euros par an, pour les franchises.

AGATHE LAMBRET
Néanmoins il y a les prix, pardon, des mutuelles qui augmentent en ce moment, dans ce contexte vous n'estimez pas que les Français sont suffisamment mis à contribution, vous voulez encore les taxer davantage ?

THOMAS CAZENAVE
Nous avons un débat avec les mutuelles, nous considérons que l'augmentation des prix des mutuelles, qui sont annoncées aujourd'hui, ne sont pas justifiées. Le ministre de la Santé, qui était jusqu'à il y a quelques jours Aurélien ROUSSEAU, a pu le dénoncer publiquement, convoquant les mutuelles, ce travail de continuer avec les mutuelles, donc moi j'appelle tout le monde à la modération sur l'évolution des prix des mutuelles.

JEAN-REMI BAUDOT
Vous assumez, on l'a vu il y a quelques instants, d'augmenter le prix des taxes sur l'électricité pour effectivement que ça ne pèse pas sur l'Etat, mais elle est devenue quoi la promesse du président de 2 milliards d'euros de baisses d'impôts pour les classes moyennes, ce sera quand, ce sera combien, enfin vraiment ?

THOMAS CAZENAVE
On travaille sur une question, pour moi fondamentale, c'est que pour les rémunérations les plus faibles il faut que le travail paye mieux, il faut que notamment…

JEAN-REMI BAUDOT
Ça, ça fait 30 ans qu'on l'entend !

THOMAS CAZENAVE
Non, mais sauf que ça fait 30 ans, mais nous on a agi, on a agi. On a agi pour le pouvoir d'achat, on a baissé le chômage, donc, non, non, on a agi, mais aujourd'hui qu'est-ce qu'on constate ? il reste, au niveau du SMIC, il reste des charges par exemple, il y a une mission qui a été confiée à Antoine BOZIO et Etienne WASMER en disant, est-ce qu'on peut avoir une autre politique d'allégement de charges ? On y travaille, on attend leur rapport au mois d'avril. Moi je suis convaincu qu'il faut encore, pour ces niveaux de rémunération, baisser le coût du travail pour redonner du pouvoir d'achat et permettre de créer plus d'emplois dans notre pays. Notre enjeu c'est de baisser, continuer à baisser le chômage, c'est ce qui permet de garantir l'évolution du pouvoir d'achat. On l'a vu, quand il y a des tensions de recrutement, qu'est-ce qui se passe ? les salaires remontent. Par ailleurs, c'est bon pour nos finances publiques, c'est bon pour la lutte contre les inégalités. Donc, la question, la promesse du Président de la République… elle est dans cette réflexion globale autour de, au fond, comment est-ce qu'on peut accompagner mieux, notamment les classes moyennes…

JEAN-REMI BAUDOT
Mais vous vous donnez un calendrier ?

THOMAS CAZENAVE
On a dit qu'on y travaillerait pour le prochain budget, en attendant notamment les rapports qui nous sont adressés sur la politique d'allègement de charges, c'est cette politique globale qu'il faut revoir, et l'engagement du président de la République se situe dans ce cadre-là.

AGATHE LAMBRET
« Gérard DEPARDIEU rend fier la France », a insisté le président mercredi à propos du comédien accusé de viol et d'agressions sexuelles, vous aussi il vous rend fier, Thomas CAZENAVE ?

THOMAS CAZENAVE
Ecoutez, moi je suis comme beaucoup de Français, j'ai vu ces images qui m'ont beaucoup choqué, voilà, je ne vais pas vous faire circonvolution…

AGATHE LAMBRET
Les images de « Complément d'enquête » dans lesquelles on voit Gérard DEPARDIEU tenir des propos insultants…

THOMAS CAZENAVE
Les propos tenus m'ont beaucoup choqué, voilà, je le dis.

AGATHE LAMBRET
Donc ce n'était pas peut-être pas nécessaire pour le président d'aller aussi loin dans le soutien, il aurait pu rester un peu plus sobre ?

THOMAS CAZENAVE
Non, mais moi je ne suis pas là pour donner des bons points ou des mauvais points, ce que dit le président de la République, et il a raison de rappeler tout le monde a une forme de prudence, c'est que, moi je suis un peu terrifié, au-delà de l'affaire de Gérard DEPARDIEU, du fait qu'il y ait une forme de tribunal populaire sur les réseaux sociaux, s'agissant de Gérard DEPARDIEU il y a des enquêtes judiciaires, là encore, en cours, moi je souhaite…

JEAN-REMI BAUDOT
Mais le président ne parle pas des victimes présumées par exemple, il aurait pu être dans un « en même temps » qu'on aurait pu entendre, peut-être.

THOMAS CAZENAVE
Il y a des enquêtes qui sont conduites, moi je souhaite qu'elles aillent jusqu'au bout pour les plaignantes, celles qui se sont manifestées, ça me semble absolument indispensable, et je ne suis ni procureur, ni juge.

JEAN-REMI BAUDOT
Allez, il nous reste quelques secondes. La mairie écologiste de Bordeaux a finalement décidé de ne plus servir de foie gras lors de ses événements officiels au nom du bien-être animal après avoir résisté, vous qui êtes élu de Bordeaux, ça vous inspire quoi ?

THOMAS CAZENAVE
C'est une mesure, de plus, qui enfonce progressivement Bordeaux dans une forme de repli sur soi, pas de 5G, pas de ligne à grande vitesse vers Toulouse, éclairage public éteint à partir d'1h du matin, pas de foie gras à la mairie de Bordeaux, donc je considère effectivement qu'il y a une forme de dérive dans la vision qui doit être notre ville, c'est-à-dire une ville ouverte, une ville intégrée dans son territoire, fière de ses racines du Sud-Ouest, et donc aux antipodes de la vision que moi-même je porte pour notre ville.

AGATHE LAMBRET
Vous êtes déjà en campagne pour les prochaines municipales ?

THOMAS CAZENAVE
Non, je ne suis pas en campagne, mais je suis bordelais, conseiller municipal, engagé dans ma ville et pleinement à ma tâche avec notamment l'adoption du budget pour l'année 2024.

JEAN-REMI BAUDOT
Mais on a compris que si vous étiez à la mairie de Bordeaux ce serait différent.

THOMAS CAZENAVE
Ah oui !

AGATHE LAMBRET
Avec du foie gras.

JEAN-REMI BAUDOT
Merci beaucoup Thomas CAZENAVE, ministre délégué aux Comptes publics, merci d'avoir été l'invité du 8.30.

THOMAS CAZENAVE
Merci.

JEAN-REMI BAUDOT
Merci Agathe de m'avoir accompagné.


Source : Service d'information du Gouvernement, le 4 janvier 2024