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ALEXANDRE LE MER
Comment offrir à nos tout petits un accueil de meilleure qualité dans les crèches ? Les crèches où il est par ailleurs toujours difficile d'obtenir une place. Les métiers de la petite enfance ne sont pas assez attractifs. Une partie de la réponse se trouve sans doute dans les augmentations de salaires. Et c'est précisément là que le gouvernement veut inciter les crèches à augmenter leur personnel. On en parle ce matin avec Sarah EL HAÏRY.
OMBLINE ROCHE
La ministre déléguée chargée de l'Enfance, de la Jeunesse et des Familles est votre invitée sur Europe 1, Alexandre LE MER.
ALEXANDRE LE MER
Bonjour Sarah EL HAÏRY.
SARAH EL HAÏRY
Bonjour.
ALEXANDRE LE MER
On sait que les personnels de la petite enfance sont mal payés, c'est un métier qui n'attire pas, où il y a beaucoup de turn-over. On manque chroniquement de personnel et de personnel qualifié. Vous incitez donc les crèches à augmenter leur personnel de 150 € net par mois. Elle va fonctionner comment cette incitation ?
SARAH EL HAÏRY
Via la CNAF, via les CAF. Eh bien il y a une prise en charge de plus de 68 % de cette augmentation, par l'Etat. C'est un budget, environ, de 150 millions d'euros.
ALEXANDRE LE MER
Voilà. Donc la branche famille de la Sécu, clairement, va financer aux deux tiers les augmentations. On parle d'incitation. Donc maintenant il faut qu'il y ait des négociations de branches, mais c'est un coup de pouce significatif. Après le scandale des maisons de retraite, Sarah EL HAÏRY, on a vu des cas de négligence, de maltraitance, parfois, révélés dans des crèches privées, au point qu'on a pu dire que c'était l'ORPEA des touts petits. Est-ce que vous pouvez nous dire, ce matin sur Europe 1, dire à tous les jeunes parents, que vous êtes pleinement mobilisée pour que tout cela change ?
SARAH EL HAÏRY
Je suis totalement mobilisée, parce que vous savez, ce qui est important pour moi, c'est que l'on puisse déposer son fils ou sa fille en sécurité, en ayant confiance bien sûr dans les structures. Il y a une enquête qui est en cours, qui est portée par une inspection, la mienne, et ils vont me remettre un rapport dans les prochains jours, et je rendrai ce rapport public et je tirerai toutes les conséquences de ce rapport. Mais la priorité et la majorité des personnes qui accompagnent les enfants dans les crèches ou même en assistante maternelle à la maison ou en maison d'assistantes maternelles dans des collectifs, font le maximum pour le bien-être des enfants. Parce que c'est d'abord des engagements qui sont des engagements très forts, parce qu'ils aiment les enfants, parce que ce sont des professionnels formés.
ALEXANDRE LE MER
Ils font le maximum sur le plan individuel. Mais effectivement, il y a certaines logiques, malheureusement, auxquelles n'échappent pas les très jeunes enfants. C'est une logique qui existe, de rentabilité, de course au profit, qui se traduit parfois, je ne sais pas, sur, on tire sur les portions de repas, on tire sur les couches qui ne sont pas toujours changées, pour faire des économies. Ça, c'est une réalité, Sarah EL HAÏRY, aujourd'hui.
SARAH EL HAÏRY
Je serai intraitable, pour être claire, sur les dérives qui ressortiraient du rapport et sur les conséquences et les moyens à mettre en oeuvre.
ALEXANDRE LE MER
C'est toujours aussi difficile, lorsqu'on est jeune parent, de décrocher une place en crèche. Alors quand c'est le cas, on a presque l'impression parfois qu'on gagne au loto. Est-ce que vous êtes en train de créer justement de nouvelles places de crèches ?
SARAH EL HAÏRY
Oui. Une des missions principales qui est la mienne, c'est de faire le service public de la petite enfance. Concrètement, ça veut dire quoi ? Le président de la République m'a donné comme mission, avec des moyens hyper importants, plus de 6 milliards d'euros supplémentaires, pour que chaque parent qui le souhaite, puisse avoir une réponse de mode de garde collectif ou individuel, parce que c'est le seul choix des parents qui doit être respecté, avec des prix raisonnables. Pour ça, il faut créer plus de 200 000 places supplémentaires. Mais il faut aussi accompagner, vous savez, le départ à la retraite de beaucoup d'assistantes maternelles. Il y a plus de 40 % des assistantes maternelles qui vont être à la retraite d'ici 2030, eh bien moi j'ai besoin de recréer de l'envie, redécouvrir ces métiers, faire de l'information pour donner envie aux plus jeunes de venir dans ces métiers de la petite enfance.
ALEXANDRE LE MER
Vous allez créer 200 000 places, dites-vous ?
SARAH EL HAÏRY
Non. Mon objectif aujourd'hui, c'est de répondre à tous ces besoins. 200 000 places, c'est des places différentes dans des collectifs, dans des formats crèches, en accompagnant les assistantes maternelles, en ouvrant des maisons d'assistantes maternelles, parce que pour un certain nombre d'entre elles, elles ont besoin d'être en groupe. Tout ça pour 2030, ça c'est l'objectif. Et ça, c'est la priorité du service public de la petite enfance.
ALEXANDRE LE MER
Alors, puisqu'on parle des enfants et de leurs parents, Sarah EL HAÏRY, il se trouve que le Premier ministre Gabriel ATTAL annonce également dans le magazine Elle un plan pour les familles monoparentales, qui sont le plus souvent, entre guillemets, des mamans, des mamans solos. Le nombre de familles monoparentales, il a simplement doublé en 30 ans, 1,7 million aujourd'hui, 3 millions d'enfants sont élevés par des mamans solos. Là, il y a urgence effectivement à agir. Est-ce que vous avez une idée, est-ce qu'il y a déjà des pistes qui sont sur la table, est-ce qu'on les connaît déjà ?
SARAH EL HAÏRY
Il y a pas mal de choses qui ont déjà été faites, c'est vrai, pour les familles monoparentales, mais on va continuer. Moi je suis une enfant, d'un couple, comme beaucoup, qui a divorcé. Ma mère nous a élevés, en tout cas en partie, toute seule. Ça veut dire quoi concrètement ? Ça veut dire être tout seul pour la sortie du collège, ça veut dire avoir un seul salaire. Ça veut dire aussi se retrouver tout seul quand un enfant est malade alors qu'on travaille. C'est parfois beaucoup de difficultés, mais aussi beaucoup de joie, parce qu'on aime nos enfants et on a envie de les accompagner. Par contre, pour répondre à ces besoins, on a réuni deux parlementaires, une députée Fanta BERETE, et un sénateur Xavier IACOVELLI, pour trouver des moyens supplémentaires et venir compléter, ce qui a déjà été fait, par exemple, un complément de mode de garde jusqu'aux 12 ans de l'enfant, dès l'année 2025, donc dès l'année prochaine. Parce que quand on est tout seul, on est toute seule, eh bien on ne peut pas compter sur le deuxième parent pour aider ou pour soulager. Il y a aussi eu des aides financières, qui sont portées par la CAF, parce que pareil, un salaire ce n'est pas la même chose que d'en avoir deux dans une famille.
ALEXANDRE LE MER
Alors des aides financières, il y aurait des mesures effectivement pour améliorer, accélérer également le versement des pensions alimentaires ?
SARAH EL HAÏRY
Bien sûr, il faut les protéger. Il faut protéger le versement de la pension alimentaire, et parfois il se trouve que c'est difficile, ou la pension n'est pas versée, et ça met en grande vulnérabilité, en tout cas, la maman ou le papa qui garde les enfants ou qui a la garde en grande partie. C'est pour ça qu'aujourd'hui c'est la CAF qui se substitue, qui verse la pension alimentaire pour ne pas mettre en difficulté la famille, et ensuite qui se retourne contre le parent qui ne l'a pas versée pour pouvoir la récupérer. Ce sont des…
ALEXANDRE LE MER
Faciliter le logement également, dans les premiers mois qui suivent la séparation. On rappelle qu'une famille monoparentale sur trois est en situation de pauvreté, Sarah EL HAÏRY.
SARAH EL HAÏRY
Faciliter le logement, faciliter aussi la reprise du travail, avec par exemple des tâches prioritaires en AVIP, c'est-à-dire, à vocation d'insertion professionnelle. Vous savez, quand on devient parent et quand on est parent en plus dans une famille monoparentale, il y a des conséquences à long terme sur son salaire, il y a des inégalités d'accès au travail aussi. Et donc nous, notre volonté, c'est de continuer ce qui a été fait, en soutien aux familles monoparentales, mais aussi s'appuyer sur les travaux que vont mener ces deux parlementaires, pour voir de nouveaux outils supplémentaires. Moi, ce que je souhaite, c'est une société beaucoup plus accueillante pour les familles, beaucoup plus douce aussi, qui apporte des réponses pour les familles monoparentales, pour toutes les familles. Parce qu'on peut être aujourd'hui deux dans une famille, on peut se retrouver seul, pour plein de raisons, et on peut parfois avoir à nouveau une famille qui se retrouve recomposée avec de nouvelles joies et de nouvelles questions.
ALEXANDRE LE MER
Merci. Sarah EL HAÏRY, ministre déléguée chargée de l'Enfance, de la Jeunesse et des Familles, ce matin sur Europe 1. Merci à vous.
SARAH EL HAÏRY
Merci beaucoup.
Source : Service d'information du Gouvernement, le 8 mars 2024