Texte intégral
Monsieur le Président,
Excellences,
Mesdames et Messieurs les Ministres,
Je suis heureuse de prendre la parole, ici, au nom de la France, de ces femmes et de ces hommes qui se battent au quotidien pour la garantie de nos droits fondamentaux et universels.
Au lendemain d'un 8 mars historique pour mon pays, je veux partager avec vous, dans cette enceinte unique qu'est la Commission de la condition féminine, un message d'espoir mais aussi un cri d'indignation. Je veux vous parler du corps des femmes, ce corps qui fait encore l'objet de toutes les dominations, de toutes les violences. Ce corps qui doit être libre, libéré de tout asservissement.
Mon message d'espoir est simple : en inscrivant l'avortement dans notre Constitution, la France est la première Nation au monde, et pour l'instant la seule, à avoir consacré notre liberté la plus fondamentale, celle de pouvoir disposer de nos corps.
Je veux rendre hommage, ici, à une femme sans laquelle cette avancée n'aurait pas été possible. C'était une femme politique et magistrate d'exception. Son nom est peut-être connu de certains d'entre vous. C'était Simone Veil. Ministre de la santé, elle a dépénalisé l'avortement en France en 1974. Elle a alors été la cible d'attaques violentes, de menaces, mais elle n'a jamais faibli. Son plaidoyer n'était ni idéologique, ni politique. À l'époque, en France, du fait d'un cadre légal inadapté à la réalité de notre société, il y avait plus de 300 000 avortements clandestins qui, chaque année, mutilaient les femmes françaises, les traumatisaient, les humiliaient. Simone Veil a réussi à convaincre, par la puissance de ses mots, une Assemblée pourtant majoritairement alors composée d'hommes.
Je lance alors ce message d'espoir. À toutes celles qui se battent dans le monde pour que leurs droits soient reconnus, nous leur disons : votre cause est juste, votre action est vitale, votre engagement politique est essentiel.
À toutes celles qui, aujourd'hui, sont entravées dans leurs efforts de réforme, dénigrées parce que ce sont des femmes, je veux vous dire : tenez bon, nous sommes à vos côtés.
La diplomatie féministe que porte la France à l'international, c'est d'abord un principe, celui de la sororité, et une valeur : l'égalité, entre nous, femmes politiques de divers continents.
Je veux inviter ici toutes les femmes politiques engagées à rejoindre une grande Coalition politique des femmes ministres de l'égalité, engagées pour la défense de nos libertés et droits les plus fondamentaux.
Car face aux autoritarismes, face aux régressions de nos droits, la mobilisation citoyenne et féministe est nécessaire. C'est elle qui sera le principal facteur de ce changement.
Comme le disait la grande femme de Lettres et prix Nobel de littérature, Svetlana Alexievitch, nous devons tous adopter un regard féministe car c'est celui-ci qui vaincra sur les extrémismes et sur le populisme.
Car sans les femmes, nos sociétés ne sont rien. C'est ici que je veux lancer un grand cri d'indignation. Trop souvent encore, les femmes restent les premières victimes d'injustice, de discrimination et de violence.
Nous l'avons vu avec les attaques terroristes du 7 octobre commises par le Hamas. Ces faits barbares d'un autre âge, ces viols, ces mutilations, ont été établis clairement par tous, y compris ici par les Nations unies.
Comment se fait-il qu'au XXIe siècle le viol ait encore été utilisé comme une tactique de guerre ou terroriste ? En Ukraine, au Soudan, au Yémen, en Somalie, en République démocratique du Congo, en République centrafricaine ou en Irak où les femmes yézidies ont été la cible d'exactions commises par Daech.
Comment accepter que les corps des femmes soient encore vendus, utilisés comme des objets sexuels ? La réponse est claire. Si le corps des femmes reste la cible de ces attaques systématiques et délibérées, c'est parce que leurs bourreaux savent que lorsque vous détruisez une femme, vous détruisez toute une communauté.
Alors face à l'ampleur de ces violences, adaptons l'ampleur de la réponse. Dénonçons le silence, toujours complice, et donc toujours coupable. Renforçons notre soutien aux droits sexuels et reproductifs des femmes dans le monde, prévoyons des budgets genrés pour nos actions multilatérales afin d'autonomiser davantage les femmes.
Et enfin, mobilisons-nous pour qu'en 2026, ce soit une femme qui occupe le poste de Secrétaire général des Nations unies pour la première fois dans notre Histoire.
Je vous remercie.
Source https://onu.delegfrance.org, le 15 mars 2024