Interview de Mme Marie Lebec, ministre déléguée, chargée des relations avec le Parlement, à LCI le 18 mars 2024, sur la sécurisation d'établissements scolaires, l'annulation de 10 milliards d'euros de dépenses publiques, la présentation prochaine d'un projet de loi sur l'aide à mourir et l'accord bilatéral de sécurité franco-ukrainien.

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Média : LCI

Texte intégral

JEAN-BAPTISTE BOURSIER
Bonjour Marie LEBEC. Bienvenue.

MARIE LEBEC
Bonjour.

JEAN-BAPTISTE BOURSIER
Vous êtes ministre en charge des Relations avec le Parlement. Un mot déjà sur ce que l'on vient de voir à La Courneuve ; situation extrêmement tendue dans le sillage de ce refus d'obtempérer. Est-ce que vous êtes inquiète que les choses dégénèrent ?

MARIE LEBEC
J'ai toute confiance dans le préfet de police de Paris, Laurent NUÑEZ, pour effectivement trouver les bons leviers pour apaiser et calmer la situation, sécuriser les forces de l'ordre qui sont sur place. En tout cas, il y aura une… toutes les actions seront prises pour que la tension retombe.

JEAN-BAPTISTE BOURSIER
Alors, il y a un autre sujet qui doit remonter. J'imagine que vous devez entendre auprès des parlementaires, c'est la tension dans les établissements scolaires. C'est le cas notamment en Seine, Seine-Saint-Denis. Il y a une principale, pardonnez-moi, qui a été agressée au couteau. Alors là, ça se passe à Dijon, tout à côté de Dijon. Elle a déclenché l'alerte anti-intrusion, ce qui a permis l'appréhension du jeune de 15 ans qui a dormi, hier soir, en prison. La situation dégénère dans les établissements scolaires.

MARIE LEBEC
On voit bien que dans certains établissements scolaires, effectivement, il y a des situations de tension. Peut-être saluer, effectivement la réaction et le sang froid de la principale de l'établissement et de nos forces de l'ordre qui sont intervenus très rapidement et qui ont pu tout de suite éviter un drame avec cet adolescent. C'est ce qui a été fait et notamment depuis cinq mois, depuis les événements dramatiques qui ont eu lieu à Arras, c'est la sécurisation d'établissements scolaires. C'est une sécurisation qui va continuer. Et également pour les lycées ou les collèges qui sont dans les points les plus chauds, une action transversale qui est menée avec la ministre de l'Education nationale, qui d'ailleurs se rendra tout à l'heure, je crois, dans l'établissement, le ministre de l'Intérieur, le ministre de la Justice, pour apporter l'ensemble des éléments de réponse. Comme l'a dit…

JEAN-BAPTISTE BOURSIER
Les chiffres qui augmentent, madame la ministre ; les chiffres des agressions, les chiffres signalés des débordements ne cessent d'augmenter.

MARIE LEBEC
Mais c'est pour ça que le Premier ministre, quand il était à l'Éducation, quand il est aujourd'hui Premier ministre, il a rappelé qu'il faut à tout prix lutter contre la peur que peuvent avoir les enseignants d'aller enseigner, d'aller transmettre les savoirs aux enfants, aux collégiens, aux lycéens. Et c'est pour cela que nous prenons des actions fermes pour lutter contre ces contre ces agressions. Ça passe d'abord par la sécurisation physique des établissements. Ça passe par un accompagnement renforcé des enseignants quand ils pensent qu'une thématique peut faire l'objet de polémiques ou de tensions. Et ce qu'a dit le Premier ministre – et je crois que l'ensemble du Gouvernement est sur cette ligne également – c'est que nous nous tenons aux côtés des enseignants, justement pour lutter contre cette violence qui vient à l'école.

JEAN-BAPTISTE BOURSIER
Les cellules d'accompagnement auxquelles vous faites allusion, j'imagine, et qui ont été annoncées par le ministre… le Premier ministre, elles seront actives prochainement pour accompagner les enseignants en difficulté ?

MARIE LEBEC
Ce que nous, en matière d'éducation nationale, nous souhaitons aller vite parce que c'est une préoccupation majeure de nos concitoyens et donc nous cherchons à agir dans les plus brefs délais. C'est pour cela que nous avons pu, dès les événements, nous avons mis en place ces mesures de sécurisation des établissements. Dès la rentrée, par exemple, le Premier ministre a rappelé : nous aurons cette question des classes de niveau du choc des savoirs, la question de la formation des enseignants. Donc, on voit bien qu'on peut aller très vite en matière d'éducation. C'est un des domaines dans lequel le Gouvernement peut agir beaucoup par voie réglementaire et donc, nous pouvons avancer dans les délais les plus courts.

JEAN-BAPTISTE BOURSIER
Qui a dit qu'il faut mettre fin à la gratuité de tout pour tous ?

MARIE LEBEC
Bruno LE MAIRE.

JEAN-BAPTISTE BOURSIER
Est-ce que cette phrase, vous pensez qu'elle est dans le contexte d'inflation ? Les Français qui ont du mal à remplir leur caddie, qui pour beaucoup sont en difficulté. Est-ce que cette phrase, elle fait sens ?

MARIE LEBEC
Je crois que la phrase de Bruno LE MAIRE, il faut la remettre dans le contexte global, à la fois de son interview, du livre qu'il a écrit et qui, je crois, sera présenté dans les quelques semaines qui viennent.

JEAN-BAPTISTE BOURSIER
Mercredi.

MARIE LEBEC
Dans les quelques jours qui viennent même. Et surtout, ce qu'il faut rappeler, c'est que le combat que mène Bruno LE MAIRE aux côtés du Président de la République depuis sept ans, c'est notamment le rétablissement de nos comptes publics, d'avoir un État qui est à la fois protecteur, qui protège nos compatriotes quand c'est nécessaire. On l'a vu dans le cadre des mesures pour le Covid, mais en même temps d'avoir un État qui optimise la façon dont est dépensé l'argent de nos compatriotes. Et donc effectivement, ce qui est donné dans l'interview, dans le JDD de ce week-end, c'est de dire "au fond, ce que nous souhaitons, c'est pouvoir protéger, de la manière la plus efficace possible, nos compatriotes là où c'est nécessaire et au fond, que l'action de l'État soit la plus pertinente possible".

JEAN-BAPTISTE BOURSIER
10 milliards cette année, 20 milliards l'année suivante. Sauf que la Cour des comptes dit par exemple "Ce n'est pas suffisant. Il va falloir beaucoup plus, ce n'est pas du tout la bonne trajectoire." Et par ailleurs, il y a un autre reproche qui est fait à votre Gouvernement, c'est celui de s'être trompé, d'avoir été trop optimiste sur la croissance et de ne pas avoir été suffisamment objectif sur les économies qu'il fallait faire.

MARIE LEBEC
Non, mais je crois que, en matière d'économie, le Gouvernement, le ministre de l'Économie en particulier, ont plus que largement démontré que nous étions capables d'apporter des résultats clairs. Depuis 2017, nous avons engagé une politique extrêmement claire en matière économique, à la fois pour réencourager le travail, pour soutenir l'investissement, pour que les entreprises fassent le choix de s'installer sur notre sol. Nous avons su, quand c'est nécessaire, protéger nos compatriotes – c'était le cas du Covid – actionner les leviers de la relance lorsque le Covid s'est terminé, protéger nos compatriotes lorsque nous avons connu des pics d'inflation. Et aujourd'hui, effectivement, le contexte international a changé. La situation économique également a changé et nous travaillons à des économies qui sont des économies importantes mais qui aussi, je crois, démontrent la réalité du sérieux de la politique économique que nous menons.

JEAN-BAPTISTE BOURSIER
Tout le monde est dans la majorité au Parlement, sur ces économies-là ? Puisqu'il y aura un texte rectificatif du budget, sans doute cet été. C'était annoncé. Il n'y aura pas de vote. En tout cas, s'il y a un vote, il sera dangereux.

MARIE LEBEC
Non, mais il y a 10 milliards d'euros d'économies qui sont effectivement à la main du Gouvernement, par lequel nous n'avons pas besoin de passer de vote. À date, il n'y a pas de projet de loi de finances rectificative qui est prévu.

JEAN-BAPTISTE BOURSIER
Ah bon ?

MARIE LEBEC
Ce n'est ni prévu ni exclu. On verra en fonction des évolutions de la situation économique de notre pays. Mais quand vous me posez la question de "est-ce que tout le monde est aligné en matière de gestion budgétaire ?" ; bien sûr que la majorité est alignée. Et la question ne se pose pas puisque nous voulons faire preuve de sérieux, de crédibilité pour rassurer nos compatriotes. Cette question de l'endettement public est absolument fondamentale. Le ministre de l'Economie et des Finances l'a rappelé, le Premier ministre l'a rappelé également : si nous voulons des marges de manœuvre, si nous voulons pouvoir agir pendant la crise, nous devons être en capacité de faire ces économies. Ce n'est jamais une politique facile, ce n'est jamais une politique agréable mais c'est une politique de sérieux. Et je crois que depuis sept ans, nous avons su démontrer qu'en matière économique, nous étions sérieux.

JEAN-BAPTISTE BOURSIER
Est-ce que vous allez augmenter les impôts ?

MARIE LEBEC
Non, mais la question, elle ne se pose même pas en ces termes-là.

JEAN-BAPTISTE BOURSIER
Si. En tout cas, ce sont les termes que je choisis pour vous la poser. Est-ce que le Gouvernement augmentera les impôts avant la fin du quinquennat ?

MARIE LEBEC
Ecoutez, depuis sept ans, pas une seule fois nous n'avons augmenté les impôts quand c'était plus difficile, quand ça aurait été la solution et la tentation. Nous avons toujours eu une trajectoire qui était extrêmement claire : de baisser à la fois les impôts pour les entreprises et pour les Français. Et je crois que nous devons garder cette trajectoire. C'est notre crédibilité aussi pour les Français, pour les investisseurs internationaux, pour les entreprises qui ont fait le choix de s'installer dans notre territoire. Donc pour l'instant, la question, elle ne se pose pas et il n'y a pas de souhait d'augmenter…

JEAN-BAPTISTE BOURSIER
Donc si les impôts augmentaient (pour reprendre vos termes), ce serait un manque de crédit de votre part ?

MARIE LEBEC
Mais non, mais encore une fois, vous laissez planer le doute que nous pourrions le faire, alors que durant sept ans…

JEAN-BAPTISTE BOURSIER
Non, je vous pose la question de savoir si vous allez le faire.

MARIE LEBEC
Nous ne l'avons jamais fait et nous avons toujours su trouver les leviers pour pouvoir agir. Et nous allons effectivement, et je crois que c'est le sens de l'interview de Bruno LE MAIRE, faire des dépenses en responsabilité, c'est-à-dire protéger ce qui a besoin d'être protégé, mais pouvoir aussi réduire la dépense sur ce qui peut être fait.

JEAN-BAPTISTE BOURSIER
Madame la ministre, encore un mot sur un sujet qui sera important au Parlement, c'est le texte sur la fin de vie et l'aide à mourir. Est-ce que là aussi, il y aura une unanimité dans la majorité ? Je recevais monsieur MARLEIX, qui est le patron des députés et des républicains. Il disait "Chez nous, tout le monde votera en son âme et conscience." Il n'y aura pas de directive qui sera donnée, c'est un sujet qui est beaucoup trop sensible et personnel ?

MARIE LEBEC
Oui, sur les sujets de bioéthique, il y a toujours une liberté de vote et je crois qu'elle est très importante. Aujourd'hui, les parlementaires s'apprêtent à débattre de ce texte. Je voudrais dire qu'il y a eu un vrai travail au Parlement aussi, de préparation de ce texte. Il y a notamment un groupe d'études à l'Assemblée nationale par exemple, qui est animé par Olivier FALORNI, qui regroupe 120 membres de toutes tendances politiques confondues. On voit bien que c'est un sujet dont les parlementaires ont envie de s'emparer. De là à dire que le vote sera unanime. Encore une fois, je crois qu'il faut respecter la liberté de conscience de chacun. Il y a aujourd'hui des questionnements, des interrogations sur les bons équilibres des dispositifs. Et c'est pour cela que dans l'élaboration du calendrier parlementaire, en accord avec le Président de la République et le Premier ministre, nous avons souhaité laisser le temps au débat et ne pas aller dans une logique, par exemple de procédure accélérée, qui aurait pu être un levier justement pour que les parlementaires puissent s'interroger, interroger dans leur circonscription sur ce qu'ils souhaitent faire de ce texte qui est présenté et qui est un texte qui est fondamental puisque c'est à la fois un engagement du président de la République. C'est un travail de concertation de près d'un an et demi qui a été fait.

JEAN-BAPTISTE BOURSIER
Comment est-ce que le Gouvernement qualifie la victoire de Vladimir POUTINE hier ? Il n'y a toujours pas eu de communication officielle à l'Elysée.

MARIE LEBEC
On peut commenter des résultats qui étaient au fond des résultats évidents et très attendus dans un pays où il y a un peu une parodie de démocratie, où on a fait la chasse à toute forme d'opposition, où les électeurs russes ont parfois été menacés ou sous pression, ont mis sous pression en allant voter. Donc on prend acte du résultat. Mais en même temps, peut-on considérer encore une fois que c'est fait dans les meilleures conditions possibles pour une élection juste et sincère ?

JEAN-BAPTISTE BOURSIER
Comment vous qualifieriez les échanges qui ont eu lieu au Parlement sur cet accord bilatéral France Ukraine ?

MARIE LEBEC
Je crois que c'était des échanges importants, attendus de la part des parlementaires parce que, au fond, le soutien de la France à l'Ukraine est un soutien qui est très regardé par nos partenaires européens, bien sûr, et aussi les partenaires internationaux de l'Ukraine. Des échanges de bonne qualité et qui ont surtout souligné le très large soutien que les partis politiques souhaitaient apporter à la stratégie du Gouvernement d'appuyer l'Ukraine dans la durée parfois différemment, mais en tout cas en réaffirmant que nous soutiendrons l'Ukraine jusqu'à la fin de ce conflit.

JEAN-BAPTISTE BOURSIER
Un dernier mot, s'il vous plaît, alors, sur un sujet qui aurait pu sembler plus anecdotique, mais qui est devenu un sujet de société avec une immense polémique, c'est le choix d'Aya NAKAMURA potentiel pour la cérémonie des Jeux olympiques du PIAF. Elle a été attaquée de toute part. On a vu votre collègue madame OUDEA-CASTERA qui est en charge des Jeux olympiques et paralympiques chanter de l'Aya NAKAMURA pour la soutenir, est ce que vous allez chanter pour nous ce matin madame LEBEC ?

MARIE LEBEC
Non, je chante des gens très faux, donc je ne vais pas chanter. Mais non je trouve que, encore une fois, c'est l'intérêt de cette cérémonie, c'est de montrer au monde la diversité et la pluralité de la France et de ses représentations artistiques. Et au fond, le fait d'avoir une artiste contemporaine qui chante et qui met à l'honneur une icône française, c'est au fond la continuité, la transmission malgré des styles différents, un attachement à notre pays.

JEAN-BAPTISTE BOURSIER
Vous êtes "ja, ja" vous, ça vous plaît ?

MARIE LEBEC
J'avoue, je n'écoute pas tellement Aya NAKAMURA mais je trouve que c'est très bien, encore une fois, ça parle à tout le monde, ça parle à tout un tas de publics et au fond, ce que l'on veut avant ces JO, c'est de créer et pendant ces JO, c'est de créer une forme de grande concorde nationale. Et Aya NAKAMURA, c'est une star reconnue de la chanson française et donc c'est très bien qu'elle fasse partie de cette cérémonie.

JEAN-BAPTISTE BOURSIER
Merci beaucoup Madame LEBEC d'avoir été avec nous ce matin.

MARIE LEBEC
Merci à vous.

JEAN-BAPTISTE BOURSIER
Ce matin en direct sur LCI.


Source : Service d'information du Gouvernement, le 19 mars 2024