Texte intégral
M. Laurent Lafon, président. - Nous sommes heureux de vous accueillir, madame la ministre, pour votre première audition devant notre commission. Au nom de l'ensemble de mes collègues, je vous souhaite la bienvenue.
Vous avez devant vous une commission exigeante, mais constructive ! Nous avons su nouer des relations partenariales avec l'ensemble de vos prédécesseurs et je suis persuadé qu'il en sera de même avec vous.
Permettez-moi de vous présenter en guise d'introduction quelques-unes de nos préoccupations sur les secteurs que nous avons en partage et dont vous avez la responsabilité.
Notre première préoccupation, vous ne serez pas surprise, est d'ordre budgétaire. Alors qu'à l'automne dernier nous nous étions félicités de la poursuite de l'effort consenti par le Gouvernement en direction de votre ministère, nous avons été surpris d'apprendre qu'il subirait une coupe de plus de 200 millions d'euros, hors audiovisuel public.
Cette décision est bien entendu susceptible de fragiliser certaines de vos politiques, en particulier celles qui sont consacrées à la création et au patrimoine, déjà fortement ébranlées, malgré le soutien massif de l'État, par les effets des crises sanitaire et énergétique. Elle pourrait surtout entraîner une crise de l'activité et de l'emploi dans ces deux secteurs, dont les conséquences pourraient être redoutables pour nos territoires.
Comment comptez-vous, madame la ministre, gérer les conséquences de ces annonces, qui suscitent l'inquiétude de l'ensemble des professionnels et des élus concernés ?
S'agissant des industries culturelles, les chantiers qui vous attendent sont également nombreux, mais la véritable révolution est bien entendu l'irruption de l'intelligence artificielle.
La commission a consacré au mois de décembre une table ronde à ce sujet. Je dois malheureusement dire que l'essentiel des propos ont porté sur la position de notre pays dans les négociations sur le règlement européen, position contraire à la tradition du pays qui a inventé les droits d'auteur. Cette incompréhension, que vous aurez certainement à coeur de lever, se trouve renforcée par la composition pour le moins univoque du Comité de l'intelligence artificielle générative. Notre commission sera extrêmement attentive au respect des droits des auteurs, en dépassant l'opposition que je trouve personnellement stérile entre la défense d'hypothétiques intérêts économiques et la prise en compte des intérêts de la création.
En ce qui concerne le patrimoine, je m'en tiendrai à l'appréciation que vous portez sur l'épineuse question des restitutions d'oeuvres d'art. Comme vous le savez, notre commission travaille sur ce sujet depuis de nombreuses années et a rendu publiques, dans le cadre d'une mission d'information conduite en 2020 par nos collègues Catherine Morin-Desailly, Max Brisson et Pierre Ouzoulias, des propositions structurantes.
Alors que le Gouvernement s'apprête à dévoiler le contenu d'un troisième texte tendant à déterminer le cadre général des restitutions d'oeuvres d'art, pourriez-vous nous indiquer la manière dont celui-ci permettra de garantir la transparence de la procédure de restitution et la prise en compte des enjeux scientifiques, mais également nous préciser quel sera le calendrier d'adoption de ce projet de loi par le Parlement ?
En matière d'industries culturelles, je ne peux m'empêcher d'évoquer la situation du secteur du cinéma, qui constate avec satisfaction le retour, voire le renouvellement du public dans les salles, mais doit aussi compter avec la multiplication des scandales.
À l'occasion du récent examen de la proposition de loi visant à conforter la filière cinématographique en France, que nous espérons voir inscrite à l'ordre du jour de l'Assemblée nationale, nos trois rapporteurs Jeremy Bacchi, Sonia de La Provôté et Alexandra Borchio Fontimp, en collaboration avec notre collègue Monique de Marco, ont fait adopter un amendement visant à responsabiliser les producteurs dans la lutte contre les violences sexuelles et sexistes dans le monde du cinéma.
L'intervention poignante de Judith Godrèche devant la délégation aux droits des femmes du Sénat le 29 février dernier a remis sous les projecteurs cette question, qui, pour être ancienne, n'en est pas moins scandaleuse. Ma collègue Dominique Vérien, présidente de la délégation sénatoriale aux droits des femmes, et moi-même vous avons écrit pour vous faire part de notre incompréhension face au maintien en fonctions du président du Centre national du cinéma et de l'image animée (CNC) dans ce contexte et alors même que ce dernier sera jugé en juin prochain dans une affaire de violences sexuelles et sexistes. Nous aimerions connaître votre position sur ce sujet.
Telles sont les premières questions que nous avons à vous poser. Mes collègues, à n'en pas douter, en auront bien d'autres. Je vous laisse à présent la parole pour un propos liminaire.
Mme Rachida Dati, ministre de la culture. - Je vous exposerai dans mon propos liminaire mes priorités en tant que ministre de la culture, avant de répondre précisément aux questions que vous m'avez posées.
Je vous remercie tout d'abord de votre invitation pour discuter de mon action en tant que ministre de la culture, que je résumerai ainsi : faire en sorte que l'accès à la culture, mais également aux métiers de la culture, soit une réalité vécue partout et par tous. Cela suppose de consolider notre modèle culturel et de soutenir les acteurs du secteur face aux bouleversements technologiques, l'irruption de l'intelligence artificielle ayant en effet de fortes conséquences, lesquels s'ajoutent à ceux de la crise économique assez inédite que nous connaissons. Tel est le contexte dans lequel je conduis un certain nombre de chantiers.
Le projet de loi sur les restitutions que nous préparons est cohérent avec la loi relative à la restitution des biens culturels ayant fait l'objet de spoliations et la loi relative à la restitution de restes humains appartenant aux collections publiques, sujets très sensibles.
Je crois profondément que le sujet des restitutions peut être un atout pour notre pays, dans un contexte international un peu agité. Je souhaite que ce texte, loin d'être un pseudo outil de repentance idéologique, soit orienté vers l'avenir, au bénéfice de nos politiques culturelles et de nos coopérations internationales. Pour construire des coopérations culturelles, nous avons besoin d'une politique partenariale sur le temps long. Je sais que ce projet de loi est très attendu par votre commission : nous laisserons à la chambre haute le temps d'effectuer un travail de fond.
Le texte qui vous sera présenté sera fidèle à nos échanges : il prévoit un périmètre universel et des bornes chronologiques. Par la mise en commun de nos expertises, de nos points de vue, nous parviendrons à un texte juste et équilibré.
L'avenir de l'audiovisuel public est sans surprise ma deuxième priorité. J'ai rencontré un certain nombre de parlementaires pour discuter de cette question, dont vous, monsieur le président. Vous m'avez fait part de votre volonté d'aller assez vite sur ce sujet, à l'instar des personnes et des institutions concernées.
Le secteur fait face à la concurrence très forte d'acteurs extra-européens, à l'évolution des publics, au bouleversement des pratiques, à l'irruption de l'intelligence artificielle et à la structuration de médias privés. Je constate aussi une dégradation d'ensemble de l'espace public et médiatique, des risques évidents d'atteinte à la liberté d'expression, mais aussi à la fiabilité de l'information, notamment du fait de la nouvelle concurrence des plateformes.
Dans ce contexte, notre audiovisuel public a un rôle prépondérant à jouer. Il doit être un véritable service public de qualité, accessible à tous, qui garantisse le pluralisme et la fiabilité de l'information, avec une vraie valeur ajoutée culturelle, d'intérêt général, propre au service public. Nous avons besoin d'un audiovisuel public puissant, qui rassemble ses forces.
À partir de vos travaux, et dans une logique de concertation, je souhaite que nous avancions sans aucun tabou. Cette réforme prévoit l'évolution de la gouvernance, mais aussi une réponse pérenne à la question du mode de financement.
L'audiovisuel public est l'un des seuls biens culturels accessible à 100 % de nos concitoyens, partout en France, sans aucune distinction.
Pour garantir l'accès de tous à la culture, j'ai lancé le Printemps de la ruralité. Cette consultation, organisée sur une plateforme dédiée, a suscité un véritable engouement et a permis à ce jour de recueillir plus de 30 000 contributions de la part d'élus, d'associations, d'habitants, d'acteurs culturels. Nous sommes en train d'analyser ces contributions, mais certains points se dégagent déjà. Il y est beaucoup question du patrimoine de proximité, qui est le premier accès à la culture, le plus simple. Il est très important de le préserver, de le valoriser et de mieux l'utiliser. Il y est aussi question de la préservation du patrimoine religieux, dont l'État est propriétaire, du réseau des bibliothèques, des médiathèques, des salles de cinéma, des salles de spectacles. Les contributeurs nous parlent également des difficultés à faire vivre les écoles d'art dans ces territoires.
Je rappelle, mais ce n'est pas à vous que je vais l'apprendre, que 22 millions de nos concitoyens vivent aujourd'hui en zone rurale. Leur vie culturelle est riche, mais souvent ignorée ou insuffisamment accompagnée. J'ai trop souvent entendu des élus locaux ou des associatifs porteurs de projets dire qu'ils étaient tous les ans obligés de bricoler pour maintenir une programmation utile à la collectivité. Ce que nous demandent ces élus locaux, c'est d'abord de pouvoir disposer d'une ingénierie culturelle dédiée.
Je vais donc demander aux directions régionales des affaires culturelles (Drac) de mettre en place de telles ingénieries, en lien d'ailleurs avec les dispositifs Village d'avenir. On connaît mieux qu'ailleurs, au Sénat, chambre des territoires, la richesse et les enjeux de la ruralité. L'accès à la culture dans ces territoires est un facteur de cohésion, de dynamisme et de vitalité. La culture permet souvent de maintenir des écoles, des commerces, bref une vie dans les petits villages.
Avant de passer à nos échanges, je dirai quelques mots sur l'intelligence artificielle générative (IA), qui suscite une crainte réelle, et légitime, chez nos acteurs culturels. Pour ma part, je considère que l'IA ne doit pas remettre en cause les droits d'auteur, cette exception culturelle française qui existe depuis 200 ans. À cet égard, mon point de vue diffère un peu de celui de Bercy. D'ailleurs, le dernier projet de règlement européen sur l'intelligence artificielle acte le principe de transparence de l'utilisation des données. Le Président de la République rappellera également ce principe lorsque lui sera remis, demain, un rapport sur l'IA.
Aujourd'hui, la dégradation de notre espace public médiatique, mais aussi l'intelligence artificielle et les grandes plateformes constituent de nouveaux défis. Au coeur de cette dégradation, il y a la question essentielle et première de la fiabilité de l'information. Il y a un déficit de confiance dans l'information que nous apportent les médias, et cela devient extrêmement dangereux.
Il faut évidemment redonner confiance dans l'information, en tenant compte de l'irruption de l'intelligence artificielle. À cet égard, je suis pour la certification de la manière dont l'information est produite, afin de garantir le travail et les méthodes des journalistes et des éditeurs de presse. La question de la fiabilité de l'information, dans le contexte de l'intelligence artificielle, va évidemment se poser.
Dernier sujet, certaines écoles d'art et de design sont en situation de crise, malgré l'engagement très fort de l'État et de certaines collectivités à leurs côtés. Notre pays dispose d'un maillage très dense de formations de haut niveau. C'est une chance pour nos jeunes. Pour autant, je voudrais renforcer la professionnalisation, notamment par l'alternance et l'apprentissage, qui n'existent pas, par exemple, dans les écoles des métiers d'art. Je vais donc demander qu'un programme en ce sens soit rapidement lancé. Ma priorité est claire : généraliser l'alternance à toutes les écoles, en plus de valoriser l'expérience professionnelle par le développement de stages obligatoires, mais aussi par la validation d'acquis de l'expérience.
Au-delà de ces priorités, je trouve que les collectivités territoriales et les élus locaux sont insuffisamment valorisés par le ministère de la culture. Je le rappelle, par rapport à l'État, les collectivités investissent plus du double dans la culture. Je souhaite que les Drac agissent vraiment en partenaires des élus locaux, en soutenant leurs projets et en les aidant à développer une action culturelle.
Je termine en évoquant l'aspect budgétaire. Chacun le sait, le contexte économique est extrêmement difficile. Mais je fais des choix. Pas un euro ne manquera aux territoires sur le spectacle vivant. De même, la quasi-totalité des investissements que nous avons initiés sur le patrimoine seront préservés. Nous continuerons les grands projets.
M. Cédric Vial. - Depuis votre prise de fonction, vous avez pris à bras-le-corps le dossier de l'audiovisuel public, qui traînait depuis environ sept ans.
Sur le financement, votre prédécesseure s'était déclarée favorable « à titre personnel » à l'affectation d'une part de TVA à l'audiovisuel public. Y êtes-vous également favorable ? Et, dans ce cas, qu'en est-il de la modification de la loi organique relative aux lois de finances (Lolf) que cela implique ? Avez-vous un calendrier à nous communiquer ?
Sur l'organisation, vous avez récemment pris position devant le Sénat en indiquant vouloir reprendre à votre compte la proposition de loi de notre collègue Laurent Lafon. Pouvez-vous nous le confirmer ? Avez-vous un calendrier à nous donner ? Avez-vous rencontré les patrons des différentes institutions publiques concernées pour avoir leur avis sur cette réorganisation ?
Incidemment, les contrats d'objectifs et de moyens (COM) sont déjà confrontés à une baisse des crédits avant même leur mise en place. Sont-ils suspendus ? Où en sont les discussions avec les différentes chaînes ou institutions publiques à ce sujet ?
La question du pluralisme des médias a défrayé la chronique au cours des dernières semaines. La loi de 1986 rappelle trois principes, qui ont d'ailleurs une valeur constitutionnelle : l'indépendance, la fiabilité de l'information et son pluralisme. Le recours de Reporters sans frontières contre CNews a suscité un certain nombre de craintes concernant la liberté d'expression ou la liberté éditoriale des différents médias. Selon vous, quelles sont les implications de la jurisprudence récente du Conseil d'État ? Pensez-vous que l'obligation de pluralisme interne soit compatible avec la diversité des lignes éditoriales ? Quelle est votre position sur la création de chaînes d'opinion sur la TNT ?
M. Jérémy Bacchi. - Vous avez exprimé votre volonté de favoriser une culture de proximité, notamment dans la ruralité. Avez-vous prévu des actions précises pour améliorer l'accessibilité des oeuvres dans les territoires sous-denses ?
Les négociations sur la chronologie des médias, maillon essentiel de notre exception culturelle française, devraient démarrer prochainement. Quelles grandes options et priorités comptez-vous défendre ?
Enfin, dans le cadre de l'examen de la proposition de loi visant à conforter la filière cinématographique avec les deux autres rapporteurs Sonia de La Provôté et Alexandra Borchio Fontimp, en lien avec notre collègue Monique de Marco, nous avons pu avancer sur la question des violences sexuelles et sexistes sur les plateaux de tournage, sur la question des violences sexuelles et sexistes sur les plateaux de tournage - j'ai notamment en mémoire l'intervention bouleversante de Judith Godrèche devant notre délégation aux droits des femmes -, par une responsabilisation accrue des producteurs. Mais, face à l'émotion légitime suscitée par de telles révélations, envisagez-vous des mesures pour aller plus loin ? Si oui, quel en serait le calendrier ?
M. Michel Laugier. - Je voudrais tout d'abord relayer les préoccupations du secteur de la presse sur l'ouverture à la publicité télévisée de certains secteurs comme la distribution, l'édition littéraire ou le cinéma. Même si les recettes sont en baisse, la publicité représente encore 25 % à 30 % des ressources d'une presse écrite, certes extrêmement fragilisée, mais qui demeure le principal cadre où se traite l'information. Quelle est votre position à cet égard ?
Votre prédécesseure avait indiqué son intention de lancer le vaste chantier de la réforme des aides à la presse. Le Sénat avait formulé des propositions pour aller vers une plus grande conditionnalité. Quelles options souhaitez-vous mettre en avant en la matière ?
Avez-vous reçu les conclusions de la mission sur la distribution de la presse dont le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique et votre prédécesseure avaient chargé l'inspection générale des finances et l'inspection générale des affaires culturelles ? Qu'envisagez-vous pour mettre fin au duopole « mortifère » entre les Messageries lyonnaises de presse (MLP) et France Messagerie ?
Mme Rachida Dati, ministre. - Sur l'audiovisuel public, nous avons une fenêtre de tir cette année, puisque les dirigeants des différentes instances, dont le président de l'Autorité de régulation de la communication audiovisuelle et numérique (Arcom), seront renouvelés à partir de 2025. La proposition de loi de M. Lafon est effectivement une bonne base de départ. L'objectif de la réforme est de rassembler des forces pour plus d'efficacité. Il faut une gouvernance unique, avec des coopérations et des synergies.
Je suis favorable à une modification de la Lolf si cela permet de sanctuariser le financement de l'audiovisuel public, y compris avec une part affectée de TVA, sous réserve de trouver tous ensemble un terrain d'entente.
Les COM ne sont pas suspendus et sont toujours en discussion. Nous attendons un retour de Bercy.
J'en viens à la question du pluralisme des médias. Dans sa décision, sur laquelle - vous l'avez sans doute noté - je n'ai pas réagi, le Conseil d'État rappelle simplement qu'il faut respecter la loi de 1986 : il y a un pluralisme externe et un pluralisme interne. Il ne dit pas que CNews ne respecte pas ses obligations ; il dit simplement qu'il appartient au régulateur d'y veiller. L'Arcom a d'ailleurs aussitôt indiqué qu'elle s'en chargeait.
Je suis pour la mobilité des oeuvres et la mobilité des spectateurs. Nous sommes en train de travailler avec les grands opérateurs pour savoir comment l'on peut faire voyager les oeuvres au plus près des territoires. Il y a, par exemple, des musées ambulants. Moi, je suis une enfant du bibliobus. J'ai donc l'ambition de travailler sur cette mobilité.
L'offre est très riche dans les zones rurales : cinémas, équipements culturels de proximité, etc. Le problème, ce sont les déplacements pour y accéder. J'ai donc souhaité faire financer par le ministère et les Drac des navettes pour amener, notamment le jeune public, vers ce type d'établissements. Financer une action culturelle, c'est bien ; permettre d'y accéder, c'est encore mieux !
Par exemple, il existe de nombreuses médiathèques de très grande qualité en milieu rural, mais comment fait-on pour que les livres circulent dans les établissements d'hébergement pour personnes âgées dépendantes (Ehpad) ou les écoles ? On peut compter sur la bonne volonté des bénévoles, mais c'est insuffisant. C'est ce que je disais : sans ingénierie culturelle dédiée, nous en resterons au stade du bricolage !
Selon moi, l'accès à la culture est une question d'égalité des chances, mais aussi de cohésion. L'école est la formation initiale, et la culture la formation tout au long de la vie. Il faut pouvoir y accéder de manière évidente et simple.
J'en viens au pass Culture. L'outil fonctionne très bien, mais vu sa cible d'âge, il participe encore à la reproduction sociale : celui qui l'utilise sait ce qu'il recherche.
Pour cette raison, j'ai invité au ministère les acteurs de l'éducation populaire, qui ne l'avaient pas été depuis plus de trente ans. Le maillage du territoire par ces acteurs, et Colombe Brossel ne me contredira pas, me paraît essentiel pour généraliser et populariser le pass Culture.
Nous sommes en train de travailler avec Noël Corbin pour revoir l'éditorialisation afin de mieux présenter les spectacles. Il s'agit de plus et mieux inciter à la culture. Il faut aussi tenir compte, au-delà de l'obstacle physique, de l'inhibition. L'adaptation du pass Culture permettrait de travailler aussi sur cet aspect.
À cet égard, je vous invite à écouter une émission récemment diffusée sur France Culture, qui entendait vérifier si ce que je disais était vrai - ce ne sera pas la première fois... Ils ont constaté qu'effectivement aller au théâtre n'était pas si simple pour certains jeunes, une expression comme « expérience assez violente » étant même employée. Pourquoi ? Ces jeunes n'ont été ni accueillis ni préparés au spectacle. La médiation, notamment par les acteurs de l'éducation populaire, est à cet égard essentielle.
C'est pourquoi je voudrais élargir la part collective du pass Culture, aujourd'hui réservée aux écoles. J'ai interrogé des enfants qui en avaient bénéficié : pour les deux tiers, c'était la première fois qu'ils accédaient à un événement culturel. Le pass collectif serait donc étendu aux maisons des jeunes et de la culture (MJC), aux maisons de quartier et aux centres sociaux. Nous sommes en train d'essayer de créer une dotation pour abonder cette part collective.
Je ne veux pas vous faire de grandes envolées lyriques : ce que je vous dis là, ce sont des retours du terrain, des collectivités, des associations.
Je reviens sur la réforme de l'audiovisuel. Pour moi, l'idéal serait que cette réforme soit opérationnelle pour le 1er janvier 2025, ce qui implique une première lecture avant l'été.
M. Laurent Lafon, président. - Sur les deux textes ?
Mme Rachida Dati, ministre. - Oui, je voudrais essayer d'avancer en parallèle sur l'organisation et sur le financement, afin que tout soit sur les rails au 1er janvier 2025. Je souhaite aussi demander aux dirigeantes de l'audiovisuel public, puisqu'elles sont favorables à cette réforme, de commencer à réaliser leur part de travail, puisque tout ne dépend pas de la loi.
Sur les violences sexistes et sexuelles, personne ne peut douter de mon engagement. Avant tout engagement politique, j'ai porté ce combat à titre personnel dès mon plus jeune âge. Ce sujet touche toutes les catégories sociales. J'ai reçu Judith Godrèche et nous sommes convenues qu'il fallait aller plus loin dans le cinéma. Ce qu'il s'est passé avec elle est non pas un fait divers isolé, mais un phénomène plus profond.
Aussi, je veux renforcer la conditionnalité des aides délivrées par le CNC à l'obligation de proposer des formations sur le sujet à tous les acteurs culturels qui participent à la réalisation d'un film, ce qui englobe les techniciens, les régisseurs, les maquilleurs, etc. Il faut que tout le monde soit en mesure d'identifier et de dénoncer des violences sexuelles et sexistes lorsqu'il en est le témoin.
Par ailleurs, je souhaite imposer sur tous les plateaux où tournent des mineurs un protecteur indépendant de la production pour garantir le respect et la protection de la dignité et de l'intégrité de ces mineurs.
Se servir de l'art pour commettre des infractions, ce n'est pas de l'art. Toutes les révélations qui se succèdent me confortent dans mon engagement. Le cinéma n'est pas le seul concerné, mais c'est dans ce secteur que se concentrent les phénomènes de domination.
Je me souviens d'un débat que j'avais eu avec Colombe Brossel sur les violences conjugales et la nécessaire éviction des conjoints violents. Nous avons beaucoup travaillé ensemble sur le sujet et, à l'époque, nous n'étions pas entendues.
M. Laurent Lafon, président. - Pouvez-vous nous parler de la situation du président du CNC ?
Mme Rachida Dati, ministre. - Entre sa mise en examen et aujourd'hui, il n'y a pas eu d'éléments nouveaux. J'attends les prochains actes de procédure dans les semaines à venir, mais je ne peux pas m'asseoir sur la présomption d'innocence. Le magistrat aurait pu, dans le cadre d'un contrôle judiciaire, l'empêcher d'exercer ses fonctions à titre préventif ; il ne l'a pas fait. Je n'ai pas le pouvoir aujourd'hui de mettre fin à ses fonctions. Imaginez qu'il soit relaxé au terme de la procédure...
M. Laurent Lafon, président. - Quid des aides à la presse ? Seront-elles revues ? Les segments de publicité réservés à la presse seront-ils ouverts à l'audiovisuel ?
Mme Rachida Dati, ministre. - Les enjeux financiers liés à la grande distribution sont considérables. On nous pousse sur le sujet, mais les risques de transfert de recettes sont de nature à déstabiliser encore plus le secteur de la presse écrite, déjà fort fragilisé. Il faut aussi prendre les plateformes en considération, car ce sont elles qui captent le plus de publicité. Il y a là un vrai problème d'égalité.
Des consultations sont en cours, mais ce problème gagnerait à être traité au niveau européen. J'ai une opinion personnelle, mais je ne veux pas que l'on me reproche un parti pris.
Le champ est large et les formes sont variées. Il faut sans doute plus de transparence, mais les aides à la presse doivent être maintenues. Telle est ma conviction de ministre.
Mme Karine Daniel. - Nous avons appris avec stupeur que le budget 2024 de la culture allait subir un coup de rabot de plus de 200 millions d'euros, dont 96 millions concerneraient le programme « Création ».
Au sein de celui-ci, quelles seront précisément les lignes budgétaires concernées par des annulations de crédits et à hauteur de quel montant pour chacune d'entre elles ? Quelles sont celles qui seront épargnées ?
Nous confirmez-vous que le programme « Transmission des savoirs et démocratisation de la culture » ne sera pas touché ?
Face à cette coupe budgétaire imposée par Bercy, qui semble être votre cadeau de bienvenue, vous avez notamment évoqué la réserve de précaution de votre ministère.
Concrètement, quel montant de cette réserve comptez-vous solliciter ? Est-ce bien l'objet de cette réserve ? Envisagez-vous d'activer d'autres leviers pour compenser intégralement les annulations ?
Vous avez déclaré que vous soutiendrez particulièrement le spectacle vivant, déjà très fragilisé, dont les professionnels craignent l'annulation de nombreux projets de création et de recrutement. Lors de l'examen du budget, j'avais, au nom de la commission, alerté sur la situation extrêmement préoccupante des scènes de musiques actuelles (Smac), qui ne parviennent plus à remplir les missions fixées dans le cahier des charges du label, faute de moyens suffisants. Sur ma proposition, le Sénat a été à l'initiative d'une revalorisation de la dotation globale de l'État aux Smac de 3,6 millions d'euros. Que va-t-il advenir de cette augmentation dans ce contexte de restriction budgétaire, et alors que le besoin de financement des Smac est estimé à 6,4 millions d'euros ?
Malgré cette situation budgétaire, vous voulez lancer le Printemps de la ruralité, qui, pour ne pas créer de déception, devra aussi être doté de crédits conséquents. Dégagerez-vous ces moyens de votre budget ou comptez-vous sur les collectivités locales ?
Lors de l'examen du budget, Nous nous avions également mis en avant la nécessaire évaluation du fonds d'initiative territoriale, censé répondre à ces enjeux. Qu'en est-il ?
Autre sujet d'inquiétude, madame la ministre, la situation des festivals de l'été prochain, compte tenu de l'organisation des Jeux Olympiques et Paralympiques. Certains organisateurs craignent toujours de se voir imposer une annulation de dernière minute pour des motifs de sécurité, tandis que d'autres redoutent un niveau de fréquentation plus faible. Quelle est votre appréciation de la situation ?
Pour finir, quelles suites comptez-vous donner au rapport de Pierre Oudart, qui met en lumière la situation financière très critique des écoles supérieures d'art ? Quelles pistes de réforme allez-vous proposer, sachant que vous avez déclaré que les métiers de la culture étaient aussi une priorité ?
Mme Sabine Drexler. - Les territoires ruraux, vous l'avez rappelé, font partie de vos priorités. Aussi, je voudrais vous alerter sur le risque très élevé de disparition progressive du petit patrimoine qui fait le charme et la diversité de nos régions, de nos petites villes, de nos villages, et dont la protection relève de votre ministère.
Cette disparition est déjà bien amorcée dans certains territoires, en raison de la mise en oeuvre de la politique de rénovation énergétique, certes nécessaire, mais qui n'est pas adaptée pour l'instant aux spécificités de ce type de bâti.
Cette alerte porte en particulier sur le diagnostic de performance énergétique, le DPE. Ce dispositif, obligatoire et opposable, ne tient pas compte des particularités du bâti ancien, qu'il classe de manière quasi systématique dans la catégorie de passoire énergétique. Je le rappelle, au premier trimestre de l'année 2023, 60 % du bâti antérieur à 1948 a été classé dans les catégories E, F et G.
L'inadaptation de cet outil conduit les propriétaires à effectuer des travaux d'isolation inopportuns dans la majorité des cas ou, pis, à délaisser leur bien qui, une fois à l'abandon et au nom de l'objectif de zéro artificialisation nette, sera démoli pour être remplacé par un immeuble.
La disparition de ce patrimoine aurait des conséquences culturelles, mais aussi sociales et économiques, absolument catastrophiques pour notre pays.
Votre prédécesseure était sensible aux préconisations de notre commission sur la nécessité de concilier les objectifs de transition énergétique et de conservation du patrimoine bâti. Un dialogue a été établi entre votre service et ceux du ministère de la transition écologique pour sortir de ces politiques en silo. Pour autant, beaucoup reste encore à faire ! Comptez-vous inscrire votre action dans la continuité de celle de votre prédécesseure ? Êtes-vous favorable à la mise en place d'un DPE spécifique pour le bâti patrimonial ?
La politique de l'architecture constitue un enjeu important : les Français sont attachés à leur cadre de vie et les architectes peuvent contribuer à la lutte contre le changement climatique ou contre le mal-logement, de même qu'ils favorisent le bien-vivre ensemble. Or les écoles nationales supérieures d'architecture (Ensa) ont connu, voilà un an, un important mouvement de grève. Même si le soutien de l'État a été revu à la hausse, leur situation reste fragile, avec un nombre d'étudiants insuffisant par rapport aux besoins et une absence de vision claire de la stratégie de l'État en matière d'architecture. Quand dévoilerez-vous une nouvelle stratégie nationale pour l'architecture ?
Mme Sonia de La Provôté. - Les festivals en régions jouent un rôle majeur dans l'accès à la culture, notamment dans les territoires ruraux, où ils foisonnent et concernent toutes les disciplines artistiques. Ils sont montés en étroite collaboration avec les acteurs locaux, les associations et structures culturelles du territoire. À l'issue des États généraux des festivals, de grands travaux ont été annoncés par votre prédécesseur, et un référent festival a été mis en place. Ce référent existe-t-il toujours ?
Par ailleurs, où en est l'accompagnement des festivals vers la transition écologique ? Quels sont les effets de la mise en oeuvre de l'arrêté du 17 avril 2023 précisant le décret du 7 août 2017 relatif à la prévention des risques liés aux bruits et aux sons amplifiés, dit « décret son » ?
Voilà des années que les organisateurs de festivals en régions se heurtent au problème de la perte de compétence technique ou à des difficultés budgétaires. Or ces sujets, de plus en plus complexes, conduisent à la disparition d'une offre diversifiée. Les États généraux aboutiront-ils à la rédaction d'une feuille de route opérationnelle pour les festivals ?
Par ailleurs, quelles seront les conséquences des jeux Olympiques et Paralympiques sur les festivals, en région parisienne, bien sûr, mais également dans l'ensemble des territoires ? Leur organisation mobilise des ressources humaines, notamment en matière de sécurité civile. Quels moyens seront mis en oeuvre pour accompagner ceux d'entre eux qui ne sont pas inscrits dans la liste élaborée par vos services, laquelle se limite aux grands festivals ? Nous avions demandé la mise en place d'un référent festival dans chaque préfecture, afin d'aider les festivals à maintenir leur programmation d'été et d'anticiper leur report à l'automne. Or, ces référents ne semblent pas avoir été désignés partout...
Enfin, faute de réponse, je me permets de réitérer la question sur la chronologie des médias, qui permet de maintenir la vivacité de notre création cinématographique.
Mme Rachida Dati, ministre. - Je commencerai par les questions budgétaires. Personne ne peut prétendre que le contexte économique est favorable, que la situation de nos finances publiques est bonne. Chacun, dans un esprit de responsabilité, doit contribuer au redressement : j'ai pris ma part à cet effort en procédant à des réductions budgétaires.
J'ai Je vais utilisé utiliser la réserve de précaution, mais, je vous le rappelle, celle-ci n'avait jamais pas été utilisée mobilisée auparavant, puisque le budget du ministère était en augmentation. Elle couvre va permettre aujourd'hui de couvrir plus de deux tiers des réductions budgétaires prévues.
Un élu se fixe toujours des priorités ; j'en ai, moi aussi, et je ferai en sorte que certains secteurs ne soient pas affectés par ces réductions budgétaires. Ainsi, il n'y aura pas un euro de moins pour la création et les spectacles vivants.
Ceux qui me connaissent le savent, je fais les réformes, j'accomplis mes missions et je tiens mes engagements ; quand j'ai un doute, je consulte, et je prends du temps avant de décider. Je le redis donc, nous maintiendrons le budget de la création, tout comme le soutien aux opérateurs du spectacle vivant, aux théâtres nationaux, aux opéras, et aux scènes nationales.
La baisse du budget consacré à la démocratisation de la culture est marginale, ce dernier passant de 824 à 808 millions d'euros. C'est également une politique que je souhaite maintenir. Je n'ai pas lancé des consultations et proposé de rencontrer les élus locaux pour leur dire, à la fin, que le Printemps de la ruralité ne se fera pas ! Ce serait nier la force de l'action politique.
Chaque fois que c'est possible, les festivals seront maintenus pendant les jeux Olympiques et Paralympiques. C'est le cas, cela a été rappelé, de tous les grands festivals. En revanche, pour tout maintien qui poserait une difficulté aux forces de l'ordre, je ne mettrai pas en péril la sécurité des Français. Les organisateurs de festivals travaillent en lien avec mes services sur ce point. En cas d'annulation ou de report, nous prendrons nos responsabilités.
Je rappelle d'ailleurs que, dans le cadre de l'Olympiade culturelle, de nombreux événements culturels, gratuits et accessibles à tous, seront organisés partout en France, s'ajoutant à ceux qui étaient déjà prévus. Mme Agnès Evren a mené une étude sur les petits festivals, les petites scènes et les résidences d'artistes, à partir de laquelle nous avons nous-mêmes travaillé au ministère. Toutes les actions menées dans le cadre de l'Olympiade culturelle pourront être pérennisées : je compte bien faire en sorte qu'il y ait un héritage culturel des jeux Olympiques et Paralympiques, pour Paris et dans tous les territoires.
Par ailleurs, le mécanisme de la chronologie des médias a deux objectifs : d'une part, assurer le préfinancement des films ; d'autre part, protéger et valoriser les salles de cinéma dans les premières semaines de la sortie d'un film. Le cadre en vigueur découle de l'accord pour le réaménagement de la chronologie des médias du 24 janvier 2022. Ce système est vertueux, et nous l'avons préservé.
Je suis fière de pouvoir dire que la France est la seule nation au monde à posséder autant de salles de cinéma. Au mois de mars prochain, nous aurons, en lien avec le CNC, des discussions pour mettre en place un nouvel accord dès l'expiration de l'accord en vigueur. L'engagement du ministère de la culture pour le cinéma n'est pas remis en cause, bien au contraire. Nous ne voulons pas mettre à terre un modèle comme celui du CNC, sur lequel certains pays étrangers nous interrogent.
S'agissant du patrimoine, nous maintenons nos engagements, notamment en matière d'investissement dans la restauration des monuments. D'ailleurs, plutôt que de restaurer notre patrimoine ancien en raison d'un drame, qu'il s'agisse d'un incendie, d'un dégât des eaux, ou autre dégradation, j'aimerais que soit mise en place une politique d'entretien au long cours.
Les sites sélectionnés pour le loto du patrimoine sont bien souvent de petits édifices situés dans de petites collectivités de zone rurale. L'enjeu est non seulement de restaurer ce patrimoine, mais également de le faire vivre. Ainsi dans certaines communes, l'église, toujours consacrée, devient parfois un tiers lieu ou accueille des concerts et des pièces de théâtre.
Nous travaillons à l'élaboration d'une norme applicable au bâti ancien et réfléchissons à une mesure fiscale permettant aux personnes privées de sauvegarder leur patrimoine, qui se trouve souvent en milieu rural, lorsqu'il est ouvert au public. Il ne faudrait pas que ce patrimoine soit détruit, dilapidé ou détourné de son objet premier, l'accueil du public. Des propriétaires de petits châteaux ont demandé à ce que leur bien soit restauré grâce au loto du patrimoine : c'est une politique que nous souhaitons poursuivre. Enfin, nous allons inviter les propriétaires à demander une protection, ce qui permettrait à l'État de les soutenir.
Pour ce qui est de l'architecture, je souhaite mettre en oeuvre une nouvelle politique architecturale, que j'annoncerai d'ici à l'été.
Les écoles supérieures d'art sont en difficulté, en raison de problèmes de gestion, de débouchés, mais aussi - dirais-je - de sens. L'État, les collectivités territoriales apportent un soutien financier, mais l'on ne peut pas subventionner des écoles qui ne fonctionnent pas. Ceux qui les ouvrent doivent avoir le sens des responsabilités et travailler sur les débouchés !
On dénombre aujourd'hui 10 écoles nationales, 34 écoles territoriales et 25 classes préparatoires publiques. Les écoles nationales sont très prisées, mais ne sont ouvertes ni à l'apprentissage ni à l'alternance, tout comme les classes préparatoires, d'ailleurs, dont je voudrais augmenter le nombre. Cela limite l'accessibilité pour des élèves qui sont méritants, mais n'ont pas forcément les moyens de payer les frais de scolarité. J'aimerais que cela change et j'envisage, notamment, des quotas de boursiers et des critères de diversité et d'inclusion.
Pour travailler encore plus sur ces sujets, j'aimerais d'ailleurs mettre en place au sein du ministère une direction de la formation et de l'enseignement. À ce jour, il n'y en a pas.
Mme Catherine Belrhiti. - Le secteur du spectacle vivant privé s'inquiète des conséquences de l'organisation des Jeux Olympiques et Paralympiques. Comment comptez-vous répondre aux inquiétudes suscitées par l'ampleur du manque à gagner ?
Mme Marie-Pierre Monier. - Vous avez indiqué que vous prendriez sur la réserve de précaution. Allez-vous prendre, aussi, sur le budget du patrimoine ? Stéphane Bern a alerté sur des gels de chantiers de préservation du patrimoine.
On pourrait aussi évoquer les travaux d'investissements dans certains musées ou l'enveloppe trop faible pour les politiques d'acquisition et d'enrichissement des musées. S'agissant du monde rural, l'enveloppe annuelle de 35 millions d'euros destinée aux musées en région sera-t-elle revue à la hausse ? Elle est bien faible, comparée à l'enveloppe destinée aux établissements parisiens.
Pouvez-vous nous confirmer l'information selon laquelle près de 700 millions d'euros seraient abondés par l'Arabie saoudite dans un fonds de dotation au patrimoine français ? Des monuments seraient-ils fléchés ?
Les effectifs des unités départementales de l'architecture et du patrimoine (Udap) sont insuffisants. Votre prédécesseure avait annoncé l'ouverture de nouveaux concours pour pourvoir en urgence les postes vacants. Qu'en est-il aujourd'hui ?
Nous avons lancé une mission d'information sur le périmètre et les compétences des architectes des bâtiments de France (ABF). Nous espérons pouvoir vous auditionner.
M. Pierre-Antoine Levi. - Je pose les questions de mon collègue Claude Kern.
L'Arcom n'a pas retenu les chaînes de télévision locales privées dans la liste des services d'intérêt général, alors qu'il s'agit d'acteurs culturels majeurs à l'échelle locale. Que comptez-vous faire pour garantir leur développement ?
Les offres sportives des plateformes numériques ne sont pas régulées par l'Arcom. Elles bénéficient donc toujours d'un régime asymétrique, alors même que les négociations de gré à gré sur les droits du football sont en cours.
Prévoyez-vous de reprendre les dispositions de l'article 10 de la proposition de loi relative à la réforme de l'audiovisuel public et à la souveraineté audiovisuelle déposée par le président Lafon, lesquelles visent à remédier aux asymétries entre les services de télévision et les plateformes numériques dans le cadre de la retransmission d'événements sportifs ? Si tel est le cas, à quelle date sera présenté le futur texte ?
M. Pierre Ouzoulias. - Avec Anne Ventalon, nous avons publié un rapport d'information sur l'état du patrimoine religieux. La grande difficulté des collectivités territoriales de petite taille, c'est l'ingénierie culturelle, que les Drac ne sont plus en mesure d'apporter. Nous préconisons de recourir aux conseils d'architecture, d'urbanisme et de l'environnement.
Par ailleurs, le fonds géré par la Fondation du patrimoine, qui bénéficie d'une exonération fiscale de 75 %, ne connaît qu'un succès relatif, puisque seulement 2,2 millions d'euros ont été récoltés.
J'ai lu que le montant de l'aide de l'Arabie saoudite à la France pouvait s'élever à 700 millions d'euros. Les Séoudiens réclament - c'est bien normal, il s'agit de leur argent - un droit de regard sur le patrimoine subventionné. Pourriez-vous nous en dire plus sur ce fonds ? Je serais surpris qu'il finance le patrimoine religieux, mais vous nous le confirmerez peut-être.
Mme Monique de Marco. - Je vous remercie de vos propos sur la généralisation des formations sur les violences sexistes et sexuelles dans le cinéma.
Quelles sont les avancées concrètes ayant suivi les États généraux de l'information, lancés en octobre dernier ? Comment comptez-vous prendre en compte les résultats de ces travaux ?
Quatre mois avant le début des jeux Olympiques et Paralympiques, des incertitudes demeurent sur l'organisation d'événements culturels, notamment à Paris. Beaucoup craignent des interdictions de dernière minute. Pouvez-vous prendre l'engagement de confirmer aux responsables de festivals et de salles de spectacles si, oui ou non, ils ont l'autorisation d'ouvrir ?
Mme Laure Darcos. - La proposition de règlement du Parlement européen relatif à l'intelligence artificielle oblige les acteurs du secteur à être transparents quant à l'utilisation de leurs sources pour entraîner leurs modèles. Or le texte conditionne cette obligation au secret des affaires. C'est étonnant, puisque la transparence des sources n'emporte aucunement la publication d'informations concurrentielles entre acteurs.
Comment faire pour qu'il n'y ait aucun obstacle à la négociation juste et équitable d'accords de licence entre l'industrie culturelle et le secteur de la tech à l'issue de ce vote, que nous souhaitons positif ?
Par ailleurs, avec Mme Sylvie Robert, nous avons fait voter deux lois, l'une relative aux bibliothèques et au développement de la lecture publique, l'autre visant à améliorer l'économie du livre et à renforcer l'équité entre ses acteurs. Nous poursuivons nos travaux sur le dialogue auteur-éditeur ; ces négociations ont été menées par votre service du livre. Je pense qu'au Sénat nous pourrions trouver un juste équilibre entre auteur et éditeur ; à l'Assemblée nationale, il y a eu des tentatives jusqu'au-boutistes.
M. Martin Lévrier. - Je vous remercie, madame la ministre, d'avoir parlé de l'alternance et d'avoir invité, voire obligé, les écoles d'art à s'inscrire dans cette démarche, en ouvrant des sections en alternance.
Comment faire entrer la culture et le théâtre dans les centres de formation d'apprentis (CFA) ?
Dans beaucoup de pays étrangers, des politiques publiques sont mises en place pour rendre la visite des musées plus interactive, afin d'attirer les plus jeunes. Nos musées peuvent-ils s'inscrire davantage dans une telle démarche, afin d'inciter les familles à venir avec leurs enfants ?
Je me pose la question des courts-métrages : c'est une jungle ; beaucoup de jeunes en école de cinéma ; pas de convention avec les écoles. Ne faudrait-il pas envisager la mise en place d'une personne de vigilance dans ce secteur, à l'instar de celle qui existe dans celui du long métrage, pour éviter que l'envie d'abus ne commence dès l'école de cinéma ?
M. Bernard Fialaire. - Je me réjouis de votre point sur la formation et l'enseignement. L'industrie du jeu vidéo, qui est performante, recrute beaucoup, mais aucune école publique de formation n'existe.
Par ailleurs, 59 % des aides sont accordées aux autrices, pourtant leur dotation est inférieure de 29 % à celle des hommes.
La presse quotidienne régionale, financée par les collectivités territoriales, concentre beaucoup les jeux d'influence. Près de cent citoyens ont travaillé sur la lutte contre la manipulation de l'information dans le cadre des États généraux de l'information, notamment pour savoir comment protéger la production d'information des intérêts économiques et des influences politiques. Dans leur rapport, paru le mois dernier, ils proposent de créer un ordre professionnel des producteurs d'information. Encouragez-vous cette piste ?
Mme Agnès Evren. - L'itinérance culturelle permet de corriger les inégalités d'accès à la culture ; or les écarts sont importants entre les métropoles et les zones rurales. La culture est vue comme une variable d'ajustement ou un luxe. Elle doit pourtant être, non pas une option, mais une obligation, compte tenu de la fracturation de notre société et des inégalités profondes entre les territoires. Comment entendez-vous assurer la massification et la pérennité de ce dispositif ?
Un travail très fin de terrain doit être réalisé en amont, dans une démarche partenariale avec les collectivités et les acteurs locaux. Je propose d'imposer, dans les cahiers des charges des structures labellisées, des projets d'itinérance rurale en partenariat avec des acteurs locaux, à l'image des bibliobus - j'y suis très attachée - existant dans certains départements.
Par ailleurs, qu'envisagez-vous en matière d'éducation artistique et culturelle (EAC) ?
Pensez-vous faire évoluer le droit du patrimoine pour permettre une meilleure protection des monuments et des ensembles patrimoniaux de Paris, même quand ils ne sont pas protégés ?
Mme Sylvie Robert. - Le Printemps de la ruralité sera soutenu financièrement, on l'a entendu. Mais le plan pour la création « Mieux produire, mieux diffuser », doté de 9 millions d'euros, est-il toujours d'actualité ?
Envisagez-vous de présenter un grand projet de loi de modernisation des médias ? Il y a une profusion d'initiatives parlementaires en la matière ; un tel texte commence à se dessiner et devient extrêmement important.
M. Bruno Le Maire a déclaré que les aides au cinéma feraient partie de la revue des dépenses publiques en cours, et donc de la deuxième salve de réductions. Que vous demande Bercy ? Les crédits d'impôt sont-ils dans son collimateur ?
M. Max Brisson. - Nous avons très bien travaillé avec votre prédécesseure et j'espère que nous travaillerons aussi bien avec vous. Vous avez beaucoup parlé de ruralité, j'ai dû revérifier votre décret d'attributions, car je finissais par croire que vous en étiez également chargée...
La réforme de la Lolf aura-t-elle bien lieu avant l'examen du projet de loi de finances pour 2025 ? Si tel n'est pas le cas, cela sera problématique pour la diffusion de France Médias Monde dans d'autres pays européens.
Quelle est votre position sur le comité scientifique indépendant, sur sa capacité à éclairer l'exécutif et le Parlement, qui est au coeur de la proposition de loi portée par Mme Catherine Morin-Desailly ?
Vous n'avez pas répondu à la question sur le rapport de Pierre Oudart relatif aux écoles supérieures d'art territoriales. Les étudiants boursiers de ces écoles territoriales ne sont pas exonérés des frais de scolarité. Comptez-vous remédier à cette anomalie ?
Une mission a été confiée à l'Arcom sur les services dits d'intérêt général. Comptez-vous élargir le champ de cette mission ?
Mme Colombe Brossel. - Le budget de l'éducation artistique et culturelle est trop faible. Je rappelle que la part collective du pass Culture - pour les élèves de 6e, 5e, etc.- s'élève à 2 millions d'euros du budget du pass Culture. Ce n'est pas à la hauteur de l'ambition du dispositif !
Vous souhaitez élargir à l'ensemble des acteurs de l'éducation populaire cette dimension collective du pass Culture, en instituant un fonds de dotation. Quand communiquerez-vous sur son montant et sur sa mise en oeuvre ?
Le pass Culture ne peut constituer à lui seul une politique d'éducation culturelle. Quelles autres actions comptez-vous mettre en oeuvre en matière d'éducation artistique et culturelle, laquelle est, j'en suis convaincue, un véritable levier de réduction des inégalités ?
Malgré l'importance de ce sujet, le budget pour l'éducation aux médias n'a pas augmenté en 2024. Comment lutter contre les fake news sans augmenter les moyens qui y sont consacrés ?
M. Aymeric Durox. - Le président Macron a récemment formulé le souhait de voir Mme Aya Nakamura chanter Edith Piaf lors de la cérémonie d'ouverture des jeux Olympiques de Paris en juillet prochain.
S'agit-il de favoriser le « choc des savoirs » voulu par le Premier ministre, en mettant en avant une artiste à la prose si travaillée, apparemment très appréciée par votre collègue madame Mme Amélie Oudéa-Castéra, qui a dit après avoir entonné un refrain, « j'aime bien Djadja, j'aime bien Doudou, j'aime bien SMS, j'aime bien VIP, il y a du rythme, il y a de la vitalité, c'est ça que j'adore ».
Est-ce pour promouvoir « la République exemplaire », chère à Emmanuel Macron, après que la chanteuse a été condamnée à 10 000 euros d'amende pour violences réciproques sur conjoint en février 2023 et alors même que l'on a retrouvé à leur domicile une arme factice, une carabine, 14 000 euros et trois pieds de cannabis ?
Est-ce un choix disruptif pour améliorer la cohésion de la nation, alors que 63 % des Français, selon un dernier sondage, ne veulent pas qu'elle représente notre pays lors de la cérémonie d'ouverture ?
Emmanuel Macron a déclaré publiquement en 2017 qu'il n'existait pas une culture française. Madame la ministre de la culture, est-ce une bonne idée qu'Aya Nakamura chante lors de cette cérémonie et qu'elle représente ce que la France a apparemment de meilleur à offrir au monde ? Quelles seraient vos propres idées ?
Par ailleurs, vous avez pris position en faveur du classement de la tour Eiffel, à la suite de la grève historique de six jours de son personnel, qui dénonçait le manque d'entretien de la Tour et partageait ses inquiétudes quant à sa gestion financière par la Ville de Paris.
Mme Anne Hidalgo, votre meilleure amie, a refusé d'en demander le classement en disant que la Tour était suffisamment protégée par le contrat de délégation, au travers duquel la Ville investit 360 millions d'euros pour l'entretien du monument. Elle vous a par ailleurs réclamé un arriéré de 1,4 million d'euros. L'État s'est-il acquitté de sa part dans l'entretien de la tour Eiffel ? Êtes-vous toujours favorable à son classement ? En quoi ce nouveau statut serait-il à privilégier ?
Mme Catherine Morin-Desailly. - Vous avez placé votre action au ministère sous le signe de l'accessibilité et de l'attention particulière aux jeunes publics. Serez-vous la ministre qui prendra enfin à bras le corps la question de l'enseignement artistique ?
Les élus se sentent bien seuls dans l'organisation de ces enseignements ; ils doivent porter une offre qui va de l'EAC aux enseignements, afin que chaque jeune, n'importe où, puisse suivre un parcours lui offrant les meilleurs choix. Ce secteur a été abandonné par les différents ministres qui se sont succédé avant vous. Je crois qu'il est temps d'engager cette réforme !
L'enseignement du théâtre va-t-il se faire au détriment de celui de la musique ou concomitamment avec celui-ci ? Les enseignants de musique sont inquiets !
Les secteurs de la musique, du patrimoine et de la création attendent toujours que le ministère prenne des engagements, à la suite des nombreux travaux réalisés ces dernières années. Vous avez fait part de votre soutien aux élus locaux, au travers d'un nouveau pacte lyrique et symphonique, et ils vous en remercient.
J'en viens à une question sur l'action extérieure du ministère de la culture. Quelle est votre vision et quels sont vos engagements en faveur de l'audiovisuel public extérieur : France Médias Monde, TV5 Monde, Arte ?
Avec Mme Else Joseph, nous avons commis un rapport sur l'expertise patrimoniale internationale française. Il témoigne des très nombreux atouts de votre ministère sur le sujet, mais il recommande d'en améliorer la coordination. Nous sommes prêts à vous en remettre les conclusions.
M. Jean-Gérard Paumier. - L'année 2024 sera marquée par la réouverture de Notre-Dame de Paris au public en décembre prochain, et nous nous en réjouissons tous. Toutefois, il semble rester un point d'achoppement : quel sort est réservé au surplus de dons, évalué à plus de 144 millions d'euros ? Votre prédécesseure a avancé la possibilité d'affecter ces crédits au financement d'une troisième phase de travaux et de rénovation du bâti, c'est-à-dire de l'entretien. Or cet entretien relève de l'État, non de généreux donateurs au travers d'une souscription nationale.
Aussi, quelle est votre position sur l'usage à donner à ce surplus ? Envisagez-vous d'impliquer les grands mécènes, les fondations et le Parlement à cette décision ?
Imaginez-vous régionaliser une partie de ces dons, en les versant aux Drac, afin de concourir à la rénovation des patrimoines religieux remarquables qui sont dans les territoires ? Ce serait l'occasion d'envoyer un message fort aux acteurs ruraux locaux qui se démènent pour tenter de sauvegarder notre patrimoine collectif.
Je souligne l'importance du patrimoine religieux rural, à savoir les églises qui ne sont ni classées ni inscrites, auquel les petites communes sont attachées. Les Drac ne peuvent pas intervenir en leur faveur, car elles ont déjà du mal à tenir leur calendrier de travaux pour les églises classées ou inscrites. Seriez-vous prête à intervenir pour construire une solution déconcentrée à l'échelle départementale ?
J'insiste sur l'importance de la restitution des restes humains. Le premier sujet qu'a abordé Mme l'ambassadrice d'Australie en France lors de notre rencontre est celui de la restitution des têtes maories.
Mme Rachida Dati, ministre. - Sur l'éducation artistique et culturelle, je vous répondrai que désormais le théâtre et l'histoire de l'art sont obligatoires, à la suite de la décision du Président de la République. Cette obligation sera mise en place par l'éducation nationale, c'est une avancée majeure pour la culture à l'école.
Pour faire rayonner la culture à l'école, nous avons mis en place de nombreux dispositifs, tels que les résidences d'artistes en milieu scolaire, qui se développent de plus en plus partout dans les territoires ; je rappelle que le montant de ce dispositif s'élève à plus de 4 millions d'euros.
Nous sommes partenaires de l'éducation nationale pour développer la culture à l'école, qui relève de l'éducation nationale, et ce partenariat, très actif, fonctionne bien aujourd'hui. Il va devenir obligatoire dès la prochaine rentrée.
L'apprentissage souffre encore d'un manque de considération. Les apprentis des CFA ne sont même pas éligibles au pass Culture ; ils vont le devenir !
Cela rejoint la question des écoles d'art et de leur accessibilité. Pour les élèves boursiers, les frais de scolarité doivent être réduits, voire gratuits. Je ne peux pas, à la fois, vouloir rendre accessibles au plus grand nombre les métiers de la culture et ne pas m'en donner les moyens.
D'ailleurs, à Lodève, où se trouve la manufacture nationale de la savonnerie, nous allons ouvrir un CFA pour former aux métiers de la tapisserie, aux métiers d'arts qui répondent aux besoins de cette manufacture de tapis. Voilà comment, par exemple, nous souhaitons développer l'accès à la culture et aux métiers d'art.
Si vous allez au Mobilier national, vous verrez combien il a changé ; c'est une révolution ! On y trouve tous les prototypes des jeunes créateurs. C'est tout le sens de la politique que je veux porter. Il y a des résistances, surtout de certaines écoles d'art, mais je ne céderai pas.
Le montant du pass Culture individuel, pour les jeunes de 18 ans, s'élève à 300 euros. Toute la question est d'éditorialiser les offres culturelles du pass Culture, afin de l'élargir aux maisons de quartier, aux centres sociaux, aux maisons des jeunes et de la culture. La médiation permet d'accéder à la culture dans de très bonnes conditions.
J'en viens au sujet de l'itinérance culturelle. Il soulève le problème du petit patrimoine en zone rurale qui, faute de protection, risque de disparaître. Aussi, nous allons solliciter les propriétaires pour qu'ils demandent une protection patrimoniale. Cela leur permettra d'être aidés par les Drac, afin de sauver le patrimoine dans ces territoires. Le patrimoine religieux a un véritable intérêt pour les Français.
D'ailleurs, des pays musulmans - une question m'a été posée sur l'Arabie saoudite - contribuent à la restauration du patrimoine religieux en France, de façon désintéressée.
Nous préférons, à la souscription générale, un financement de projets précis. Les gens donnent en fonction de l'église, de la cathédrale ou de la basilique qu'ils connaissent. Ils veulent soutenir l'église de leur village. Je pense qu'une contribution au patrimoine religieux permettra de solliciter bien plus de donateurs qu'une souscription générale.
La révolution des modalités d'acquisition des collections a permis à nos musées de devenir des musées mondiaux. Le Louvre a été construit pour accueillir 2,5 millions de visiteurs, mais il y a 10 millions de visiteurs chaque année. Nous devons nous engager à restaurer et reconstruire ce musée pour qu'il soit adapté à cette nouvelle réalité et qu'il soit encore à l'avenir l'un des plus grands musées du monde.
Les mécènes ont beaucoup apporté aux musées, même si le mécénat n'est pas dans la culture de la France, où l'on compte beaucoup sur l'État. Pour autant, il a contribué au rayonnement du musée du Louvre, du musée d'Orsay ou du centre Pompidou.
Je ne suis pas gênée que des pays nous aident à acquérir des oeuvres qui restent dans nos musées, bien au contraire. Nous n'avons pas à en avoir honte. Notre patrimoine, notre trésor national, notre culture ne sont pas délocalisables ; ils nous font rayonner.
Les télévisions locales ne sont pas dans la liste établie par l'Arcom, qui a été très difficile à réaliser. L'Arcom a choisi d'inscrire les chaînes TNT, nationales et gratuites, mais son choix n'est pas figé.
Je suis d'accord avec les positions de Mme Darcos sur la proposition de règlement du Parlement européen. La protection du droit d'auteur est un principe. C'est une exception culturelle française. On essaye de le déstabiliser, il faut le préserver. La notion de transparence est importante et le secret des affaires ne l'empêche pas. Nous travaillons sur cette question.
Nous aurons l'occasion d'échanger sur la question auteur-éditeur avant que le texte ne soit rédigé, bien sûr. Pour l'heure, nous en sommes aux travaux de concertation.
L'État ne doit rien à la tour Eiffel. J'ai vérifié cette question : sur les dossiers parisiens, vous ne me prendrez jamais en défaut. J'ai travaillé les dossiers parisiens, je les travaille encore, je les connais parfaitement. Il faudrait que la mairie de Paris demande cette protection pour la tour Eiffel, qui serait supérieure à celle qui existe aujourd'hui, car cela permettrait d'en protéger les abords, qui sont dégradés, on le sait. Roselyne Bachelot était d'accord pour accorder une telle protection, à condition que la maire de Paris la sollicite elle-même. Cette protection patrimoniale concerne la tour Eiffel et les abords ; cela permettrait de faire en sorte que le champ de Mars ne soit pas un lieu de prédation et d'agressions quotidiennes. Voilà pourquoi j'ai souhaité que la maire de Paris demande cette protection.
M. Aymeric Durox. - Et Aya Nakamura ?
Mme Rachida Dati, ministre. - Attention aux prétextes pour s'attaquer à quelqu'un par pur racisme !
M. Aymeric Durox. - C'est trop facile !
Mme Rachida Dati, ministre. - Non, s'attaquer à une artiste pour ce qu'elle est, ce n'est pas acceptable, c'est un délit. Chacun est libre de son appréciation. Vous n'aimez pas, d'autres aiment.
M. Laurent Lafon, président. - Il y avait tout de même deux autres questions, l'une sur le surplus des dons pour Notre-Dame et l'autre sur les suites données aux États généraux de l'information.
Mme Rachida Dati, ministre. - Je ne prends pas position sur un projet de loi sur les médias avant d'avoir reçu les conclusions des États généraux, dont les débats sont très intéressants. S'ils ne partent pas dans tous les sens, ils apporteront beaucoup de choses. Légiférer dès maintenant ne serait pas cohérent.
Monsieur le sénateur, ce qui est à Notre-Dame reste à Notre-Dame, si j'ose dire ! Plus concrètement, nous souhaitons réaliser un musée de Notre-Dame et un parcours alentour. C'est un joyau international. Son inauguration va attirer énormément de monde et la cathédrale va redevenir un lieu d'attractivité.
Je n'oppose pas le patrimoine religieux des territoires à Notre-Dame. En revanche, pour en faire de nouveau le plus bel édifice religieux et culturel de France, il vaut mieux avoir le maximum de fonds. Monsieur le sénateur, vous viendrez à l'inauguration, et vous ne le regretterez pas !
Les salles n'ont pas de raison d'être fermées à Paris, sauf si elles sont dans un périmètre de sécurité ou d'accès. On connaît mieux ces périmètres aujourd'hui ; aussi, celles qui vont fermer le savent déjà. D'ailleurs, certaines salles du 7e arrondissement, où je suis maire, seront affectées.
Si certains d'entre vous ont eu le sentiment de réponses imprécises, qu'ils n'hésitent pas à contacter mon cabinet, qui est là pour vous répondre.
Source https://www.senat.fr, le 21 mars 2024