Texte intégral
Merci, monsieur le président.
En France, nous sommes fiers, en tant que pays des droits de l'homme, de poursuivre la lutte contre l'antisémitisme sur la scène internationale. C'est pourquoi je voudrais remercier la présidence maltaise d'avoir accueilli cette conférence très importante. Nous sommes heureux de pouvoir célébrer avec vous le 20e anniversaire de la Déclaration de Berlin qui reste plus que jamais d'actualité. C'est important pour nous, les États, ainsi que pour l'OSCE et pour la sécurité de notre région.
La France condamne fermement le fait que la Russie continue d'invoquer de manière fallacieuse la lutte contre le nazisme pour justifier sa guerre d'agression contre l'Ukraine, ainsi que son utilisation inexacte et inappropriée du terme « dénazification ». Une telle distorsion érode notre compréhension de la Shoah, manque de respect aux victimes et aux survivants et porte atteinte à nos principes démocratiques.
Encore une fois, cette guerre d'agression à grande échelle de la Russie contre l'Ukraine n'a pas été provoquée et est injustifiable. Nous sommes aux côtés de l'Ukraine, aussi longtemps qu'il le faudra. Notre soutien à la souveraineté et à l'intégrité territoriale de l'Ukraine reste inébranlable.
Saper ce qu'était la Shoah et sa mémoire est insupportable.
En France, comme dans toutes nos démocraties, nous sommes très préoccupés par la recrudescence des attentats antisémites dans le monde depuis le 7 octobre, la plus importante tuerie de Juifs depuis la Seconde Guerre mondiale.
Une action et une coordination internationales sont nécessaires pour faire face à cette menace qui pèse sur notre sécurité commune. Cette coordination est cruciale pour le bien de nos démocraties. Et il devra être adapté à la nouvelle forme « numérisée » de l'antisémitisme. En effet, la plateforme française « PHAROS » enregistre depuis le 7 octobre une explosion de la haine en ligne.
Cette haine est alimentée par la désinformation et les théories du complot antisémites, avec des récits fallacieux, la négation de la Shoah et la négation des attentats du 7 octobre, prétendant dévoiler des « vérités cachées » sur la communauté juive.
Le détournement sémantique est une tactique insidieuse visant à masquer l'antisémitisme sous des termes moins évidents, par exemple en remplaçant le mot « juif » par « sioniste ». Cette stratégie de contournement complique les efforts de modération en exploitant les ambiguïtés linguistiques, rendant ainsi la lutte contre la haine plus complexe.
En tant que ministre de l'Égalité des genres, je suis profondément consternée par le déni de la violence contre les femmes, perpétrée par le Hamas le 7 octobre et depuis, y compris les viols, les abus et les féminicides, qui constituent une forme particulièrement insidieuse d'antisémitisme.
La cyberintimidation ciblée, en particulier contre les individus en raison de leur appartenance ou de leur soutien à la communauté juive, est une forme de harcèlement qui vise à intimider, isoler et faire taire les voix qui s'élèvent contre l'antisémitisme en ligne, créant ainsi un environnement hostile qui décourage la libre expression et la participation.
Malheureusement, ce qui est dit en ligne reste rarement en ligne. Les manifestations d'antisémitisme en ligne ont des répercussions directes et profondes sur notre réalité quotidienne. Elles aboutissent directement à des actes de violence physique. En France, après le 7 octobre, la plus importante tuerie de Juifs depuis la Seconde Guerre mondiale, on a assisté à une multiplication alarmante des actes antisémites, multipliés par quatre par rapport aux années précédentes.
Cette montée de la violence est un signal d'alarme qui ne peut être ignoré. Les autorités françaises continueront à le suivre de très près et à prendre des mesures énergiques contre ce phénomène.
C'est pourquoi, en France, j'ai annoncé l'organisation d'une convention nationale contre l'antisémitisme, qui débutera le 6 mai. Cette convention rassemblera des acteurs clés de notre société : des représentants politiques, des membres de la société civile, des représentants de la communauté juive et de toutes les religions, ainsi que de nos grandes associations impliquées dans la lutte contre le racisme et toutes les formes de haine.
Cette convention vise à créer un espace d'action et à adopter une charte commune répertoriant l'ensemble des engagements pris par les acteurs les plus importants de notre société.
Cette convention nationale marquera notre attachement aux valeurs universelles telles que la lutte contre les discriminations. Ce n'est pas seulement une position française, c'est une position européenne bien établie. Il s'agit de lutter contre toutes les formes de haine et de discrimination. Cela inclut la lutte contre toutes sortes de discriminations, fondées sur la religion, ou l'athéisme, le sexe, l'orientation sexuelle et l'origine ethnique.
Cet attachement de la France à l'universalité des droits de l'homme est également au cœur du mandat que j'ai reçu du Président qui combine, sous mon autorité, la lutte pour l'égalité entre les femmes et les hommes et la lutte contre les discriminations, notamment l'antisémitisme, le racisme et la La haine LGBT.
Enfin, rappelons notre plein soutien, ici à l'OSCE, au Bureau des institutions démocratiques et des droits de l'homme et au Bureau du Représentant pour la liberté des médias. Nous attachons un prix fort à la préservation de leurs mandats et ressources financières respectifs. Leur action est nécessaire, et d'autant plus indispensable après le 7 octobre. Nous devons continuer à renforcer la résilience de la région pour contrer la désinformation qui cible nos démocraties.
Permettez-moi de terminer par une citation d'un grand écrivain et journaliste, que l'on admire tous en France pour son humanisme, Vassili GROSSMAN. Dans sa quête de liberté, il s'inspire du grand écrivain russe Anton Tchekhov. Dans son ouvrage publié en 1980, Vassili GROSSMAN écrivait : « L'antisémitisme en soi n'est jamais un but, il n'est qu'un moyen. L'antisémitisme est le miroir des déficiences des individus, de l'ordre social et des systèmes publics. »
Alors unissons-nous aux forces démocratiques et libérales pour remédier à ces échecs. Car en fin de compte, ce qui est en jeu, ce ne sont pas les « valeurs occidentales » mais, tout simplement, notre humanité commune. Comme le disait Tchekhov : « Commençons par l'homme. Soyons gentils et attentifs à chaque homme. Sinon, rien ne fonctionnera jamais. Et c'est ce qu'on appelle la démocratie ». C'est ce que représente la France.
Merci pour votre attention.
Source https://osce.delegfrance.org, le 2 mai 2024