Texte intégral
M. le président. L'ordre du jour appelle le débat, organisé à la demande du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, sur la situation des urgences pendant l'été 2024.
(…)
M. le président. La parole est à Mme la ministre.
Mme Geneviève Darrieussecq, ministre de la santé et de l'accès aux soins. Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, je vous remercie de me donner l'occasion de débattre ce soir de la situation des urgences durant l'été dernier et des perspectives que nous devons emprunter.
Vous le savez, j'ai pris mes fonctions il y a quelques semaines, le 21 septembre 2024, c'est-à-dire le dernier jour de l'été. Je tâcherai néanmoins de répondre à vos questions le plus précisément possible, dans un dialogue que j'espère fructueux. Et je suis bien sûr à votre écoute.
Permettez-moi dans un premier temps de revenir sur la réalité des tensions qui ont existé cet été au sein des services d'urgence.
Quelques chiffres, tout d'abord. La fréquentation des urgences a été relativement stable entre l'été 2024 et le précédent, l'augmentation du nombre des passages étant de l'ordre de 1 %. La situation s'est améliorée par rapport à 2022, et le système de santé a pu s'organiser grâce à une meilleure anticipation sous la coordination des agences régionales de santé (ARS), grâce aussi à des mesures d'accompagnement et de soutien déployées par le Gouvernement, grâce, surtout, à la mobilisation conjuguée des professionnels, tant en ville qu'à l'hôpital, et des élus dans les territoires.
De même, grâce à cette mobilisation collective, l'impact des jeux Olympiques et Paralympiques sur les hôpitaux situés à proximité des sites de compétition a été maîtrisé ; il est resté relativement restreint.
Ces chiffres masquent évidemment la grande diversité des situations dans les territoires. Il reste encore des services pour lesquels la période estivale a été source de tensions. Les représentants des urgentistes nous l'ont dit, et vous serez certainement plusieurs ce soir à en faire également état.
Aussi, au plus fort de l'été, dans le courant du mois d'août, une cinquantaine d'hôpitaux ont été confrontés à des tensions importantes et une dizaine d'entre eux a déclenché un plan blanc. Je vous le rappelle, notre pays compte 620 services d'urgence.
Comme vous le savez, cet accroissement des tensions est dû à des raisons conjoncturelles propres à la période estivale, lors de laquelle certains services sont excessivement sollicités, notamment en raison de l'afflux de touristes et de la période de congés annuels de nos professionnels de santé.
Pour autant, partout, dans chaque territoire, des solutions ont été trouvées pour garantir l'accès de nos concitoyens aux soins non programmés. Les initiatives locales, confortées par les leviers ouverts par la récente réforme des autorisations, ont permis au cas par cas de stabiliser des organisations en s'appuyant sur tous les acteurs du système de santé – je tiens d'ailleurs à souligner ce soir leur grand professionnalisme.
Permettez-moi également de saluer l'engagement de l'ensemble de la communauté hospitalière, qui s'est organisée pour faire face aux tensions. Je pense évidemment à la mobilisation des médecins des urgences, mais aussi à celle des personnels d'accueil et d'orientation, ainsi qu'à celle de l'ensemble des soignants et personnels administratifs qui se sont engagés, quitte parfois à reporter, voire à annuler leurs congés.
Au-delà de l'aspect saisonnier, ces difficultés s'expliquent par un ensemble de facteurs structurels, notamment par l'augmentation des passages aux urgences ces dernières années.
En effet, l'activité des services d'urgence a augmenté d'environ 3 % par an depuis 1996. Depuis 2019, si l'on excepte la période de la covid-19, le nombre de passages annuels aux urgences est resté stable, autour de 21 millions par an – souvenez-vous que, en 1996, on ne comptait que 10 millions de passages par an.
Cette augmentation s'explique bien sûr par le vieillissement de la population et l'augmentation des maladies chroniques, mais aussi par l'organisation des professionnels de santé et des difficultés d'engagement sur la permanence des soins, notamment non programmés. Ces difficultés nous amènent à inverser notre perception et à penser de façon plus générale. Nombre d'initiatives ont été prises pour améliorer cette situation.
Au-delà de la gestion des situations estivales, il nous faut, à plus long terme, capitaliser sur ces expériences et ajuster nos organisations pour anticiper les périodes de tension. C'est le sens de l'action conduite depuis plusieurs années.
Les réformes entamées, parmi lesquelles se trouve la mission menée par François Braun, sont nombreuses. Elles se traduisent tout d'abord par un soutien financier continu. Depuis 2017, les gouvernements successifs ont augmenté tous les ans le montant de l'objectif national de dépenses d'assurance maladie (Ondam). Ces dernières années, le sous-objectif relatif aux établissements de santé a dépassé 100 milliards d'euros, quand il était de 80 milliards d'euros en 2017.
En 2025 encore, l'Ondam augmentera de 2,8 %, soit 9 milliards d'euros de plus qu'en 2024.
M. Mickaël Vallet. C'est le montant de l'inflation !
Mme Geneviève Darrieussecq, ministre. Il y a ensuite une politique d'attractivité des métiers sans précédent. Le Ségur de la santé a marqué une première étape historique pour rémunérer les personnels hospitaliers à la hauteur de leur engagement et susciter des vocations.
Nous avons depuis lors engagé la pérennisation des mesures de revalorisation du travail de nuit et du week-end, particulièrement importantes quand on exerce aux urgences.
En ce qui concerne plus spécifiquement les urgences, l'entrée en vigueur progressive de la réforme des autorisations de la médecine d'urgence du 29 décembre 2023 permettra de lutter contre l'engorgement des urgences et de donner davantage de souplesse aux services.
Je pense notamment à la création d'antennes de médecine d'urgence à la main des établissements, à l'intégration de la paramédicalisation des services mobiles d'urgence et de réanimation (Smur), mais aussi à la possible régulation à l'entrée des urgences ou à la réorientation vers la ville des patients ne relevant pas de la médecine d'urgence. Toutes ces mesures, très attendues des acteurs de terrain, sont accompagnées de guides et d'appuis à leur déploiement.
L'autre réforme d'ampleur qui permettra de transformer les soins non programmés consiste dans le déploiement des services d'accès aux soins. Avec ceux-ci, nous organisons le système de santé pour que, à toute heure de la journée, les citoyens puissent accéder à des soins non programmés, après un simple appel téléphonique. Une meilleure organisation de l'accès aux soins permet au bout de la chaîne de soulager les urgences.
Désormais, 94 % de la population est couverte par un SAS. Je remercie d'ailleurs tous les professionnels de santé qui ont élaboré ces solutions dans chaque département. Les six départements métropolitains qui n'en disposent par encore devront être couverts d'ici à la fin de l'année. En moyenne, les SAS actuels traitent 1,2 million d'appels par mois relatifs à ces demandes de soins non programmés.
Il s'agit d'un outil formidable pour améliorer l'accès aux soins, qui témoigne des nouvelles relations de confiance et de soutien qui se nouent entre la ville et l'hôpital, ce qui était absolument indispensable.
Évidemment, il n'est pas question de le nier, des difficultés persistent. Même si les SAS le permettent en partie, il faut réorganiser l'accès aux soins et certainement aussi les urgences. Il faut également, lorsque c'est possible, que ces services aient accès à des filières actives, comme celles qui ont été déployées dans certains hôpitaux pour la santé mentale ou la pédiatrie, par exemple.
En définitive, nous poursuivrons cette réorganisation avec les acteurs, dans les services et dans les territoires. Ce qui me semble le plus important, c'est de ne pas inventer d'en haut un système pour l'imposer en bas, mais de construire, à l'échelle de chaque territoire, les solutions opportunes pour que l'on améliore réellement, partout dans notre pays, l'accès aux soins.
- Débat interactif -
M. le président. Nous allons maintenant procéder au débat interactif.
Dans la suite du débat, chaque orateur dispose de deux minutes maximum, y compris l'éventuelle réplique.
Le Gouvernement dispose pour répondre d'une durée équivalente.
Le Gouvernement aura la faculté, s'il le juge nécessaire, de répondre à une réplique pendant une minute ; l'auteur de la question disposera alors à son tour du droit de répondre pendant une minute.
Dans le débat interactif, la parole est à M. Jean Sol. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. Jean Sol. Madame la ministre, en 2018 déjà, je prenais la parole devant la Haute Assemblée pour alerter le Gouvernement sur la situation de notre hôpital public ; en avril dernier, je décrivais les problématiques des services d'urgence dans les Pyrénées-Orientales.
Les services d'urgence, véritables vitrines des établissements hospitaliers, avaient alors décidé de baisser le rideau en nuit profonde à Perpignan. Quel symbole de leur dégradation !
L'été dernier, des personnes ont attendu vingt-quatre heures avant d'être prises en charge. C'est le résultat de l'équation suivante : un million de touristes pour sept ou huit médecins, soit une moyenne de 188 passages quotidiens aux urgences. Cherchez l'erreur !
Depuis lors, la situation semble s'améliorer grâce à la réouverture prochaine, après un an d'attente, des urgences de nuit de la clinique Saint-Pierre. Cependant, nos services d'urgence seront toujours à bout de souffle si rien ne s'améliore, en particulier durant l'été.
Les personnels sont toujours très éprouvés moralement et physiquement, les usagers sont toujours angoissés à l'idée de se rendre aux urgences et nos élus demeurent impuissants. Madame la ministre, cette vision n'est pas alarmiste : il s'agit malheureusement d'un cri d'alarme.
La réalité des urgences, c'est cet usager qui souhaite passer devant un enfant en situation d'urgence vitale. Ce sont ces familles qui attendent sans information pendant des heures et des heures. Ce sont, encore, ces personnes âgées qui restent parfois vingt-quatre, quarante-huit ou soixante-douze heures sur des brancards dans un couloir et que l'on renvoie à deux heures du matin chez elles, en raison du manque de place.
Le Samu-Centre 15 fait aujourd'hui face à l'incapacité de réguler l'augmentation exponentielle des appels, ce qui entraîne, vous en conviendrez, une perte de chance pour les patients et, dans le pire des cas, des décès, comme plusieurs exemples récents l'attestent.
En cause, la carence criante de lits d'aval, ainsi que le manque d'effectifs et de compétences d'un personnel qui croule sous une charge administrative chronophage tout en devant faire face à de multiples incivilités.
La désertification médicale amplifie naturellement cette situation inacceptable, qui rompt l'accès aux soins pour tous, vingt-quatre heures sur vingt-quatre, que devrait assurer le service public.
Madame la ministre, ces problèmes soulèvent de nombreuses questions. Je ne vous en poserai que deux. Envisagez-vous d'améliorer le partenariat entre l'hôpital public, le privé et la médecine de ville ? Et que pensez-vous faire pour améliorer la régulation des passages aux urgences ?
M. le président. La parole est à Mme la ministre.
Mme Geneviève Darrieussecq, ministre de la santé et de l'accès aux soins. Monsieur le sénateur, dans les Pyrénées-Orientales, on compte cinq services d'urgence, dont quatre cliniques et un Smur, ainsi qu'un service d'urgence et une antenne Smur à l'hôpital transfrontalier de Cerdagne, qui rend service à une population relativement isolée, selon un modèle intéressant. Cet été, deux cliniques de Perpignan ont en effet fermé la nuit, même si l'une d'entre elles a désormais rouvert.
Aux urgences de l'hôpital, la difficulté à recruter du personnel suscite de grands problèmes de prise en charge du flux des patients et de maintien des lignes de soin. De plus, comme il s'agit d'une région touristique, les difficultés sont plus importantes durant l'été.
Face à la récurrence des problèmes dans ce département, l'ARS Occitanie vient d'annoncer que l'Agence nationale d'appui à la performance des établissements de santé et médico-sociaux (Anap) conduira une mission d'appui au sujet des urgences pour établir un état des lieux des dysfonctionnements et des manquements, afin de définir un cadre de fonctionnement départemental favorisant la coopération entre les secteurs public et privé. L'objectif de ce travail sera notamment de redéfinir la répartition des filières de prise en charge de l'aide médicale urgente entre les acteurs.
Le partenariat appelé de vos vœux va se construire. Je ne puis vous préciser s'il existe un service d'accès aux soins dans votre département. Mais il faut construire une solution, avec les praticiens libéraux, pour décharger les urgences de patients qui n'ont rien à y faire et relèvent de la médecine générale.
J'espère que la mission d'appui produira rapidement des effets et permettra d'améliorer la situation.
M. le président. La parole est à Mme Solanges Nadille.
Mme Solanges Nadille. Madame la ministre, mes chers collègues, je tiens avant tout à remercier nos collègues du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain d'avoir demandé l'organisation de ce débat.
L'été 2024 a révélé une nouvelle fois la crise des urgences médicales en France, avec non seulement des fermetures perlées, le soir, la nuit et le week-end, mais aussi les terribles images de patients laissés sur les brancards de longues heures durant… Les plus sombres épisodes de la crise sanitaire nous sont ainsi revenus en mémoire.
J'axerai mon intervention sur la situation des urgences en outre-mer, laquelle est encore plus difficile que dans l'Hexagone.
En Nouvelle-Calédonie, par exemple, nombre d'hôpitaux ont fermé cet été leur service d'urgences la nuit et le week-end.
Dans plusieurs territoires ultramarins, les problèmes de continuité territoriale affectent l'accès aux soins. Ainsi, en Guadeloupe, l'île de Marie-Galante est actuellement un désert médical, situation dont le centre hospitalier de Marie-Galante subit les conséquences. La présence d'un médecin fait parfois défaut aux urgences. En outre, des rumeurs faisant état d'une fermeture des urgences ont circulé pendant les mois de juillet et d'août, alarmant toute la population.
Dans beaucoup de territoires ultramarins, en particulier insulaires, le bon fonctionnement des urgences souffre des insuffisances du transport maritime.
Les rotations, trop peu nombreuses, ne permettent pas aux médecins de regagner leur domicile à la fin de leur garde : en résultent pour les praticiens de graves pertes de temps qui compliquent leur vie personnelle, notamment familiale. Ceux qui seraient prêts à venir à Marie-Galante y assurer des gardes aux urgences s'en trouvent découragés.
Une collaboration avec des entreprises privées de transport autres que les compagnies maritimes connues pourrait améliorer cette situation. J'espère que l'État pourra œuvrer en ce sens de manière efficace.
Madame la ministre, quel regard portez-vous sur la situation des urgences outre-mer ? Êtes-vous prête à travailler à un plan d'action visant à y renforcer la continuité territoriale des soins ? (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)
M. le président. La parole est à Mme la ministre.
Mme Geneviève Darrieussecq, ministre de la santé et de l'accès aux soins. Madame la sénatrice, pour vous comme pour moi, la situation des urgences outre-mer est un sujet de préoccupation majeur.
Je suis pleinement consciente des difficultés particulières auxquelles ces territoires doivent faire face, notamment pour assurer la continuité territoriale des soins – vous insistez sur cet enjeu, qui exige bien entendu des réponses tout à fait spécifiques.
Le bon fonctionnement des urgences est essentiel pour garantir un accès aux soins de qualité, où que l'on se trouve, et je suis attentive à l'ensemble des défis que connaissent les régions ultramarines.
Sous l'impulsion du dernier comité interministériel des outre-mer (Ciom), mes prédécesseurs ont lancé des chantiers spécifiques pour retravailler le parcours de santé dans ces territoires. La mesure 23 dudit Ciom vise notamment à fluidifier les prises en charge, particulièrement pour les pathologies lourdes, comme les cancers.
Ces initiatives s'inscrivent dans une démarche plus large de réorganisation des soins, le but étant de mieux répondre aux besoins de santé des populations ultramarines. J'y insiste, chacun de ces territoires, chacune de ces populations a ses spécificités, dont il faut prendre compte.
Dans sa déclaration de politique générale, M. le Premier ministre a annoncé la tenue d'un nouveau comité interministériel des outre-mer, prévu pour le début de l'année prochaine. Ce sera là une autre occasion de réévaluer les priorités en matière de santé, tout particulièrement pour les urgences.
D'ici là, sachez que je resterai très mobilisée, auprès de vous et aux côtés de tous les élus locaux, pour nourrir cette réflexion. Les enjeux sanitaires, notamment liés aux urgences, doivent être au cœur des discussions et, à ce titre, nous devrons mener un travail extrêmement fin avec l'ensemble des partenaires concernés. Les solutions retenues pour l'Hexagone ne valent pas forcément outre-mer : il faut prendre en compte la situation spécifique de chaque territoire.
M. le président. La parole est à Mme Guylène Pantel. (Applaudissements sur les travées des groupes RDSE et RDPI.)
Mme Guylène Pantel. Je tiens à mon tour à remercier nos collègues du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, qui ont sollicité la tenue de ce débat.
Professionnels, élus locaux et usagers dressent un constat unanime : nos services d'urgences sont en difficulté. Les représentants des services déconcentrés de l'État le soulignent parfois eux-mêmes.
Dans un tel contexte, je tiens à relever l'exemple atypique de l'hôpital Lozère : depuis quatre ans, et malgré la crise covid, cet établissement n'a pas connu un seul jour de fermeture ou de régulation de l'accès au service. Il s'agit là d'un signal rassurant pour la population. Je remercie tout particulièrement les équipes de cet hôpital de leur engagement quotidien, qui contribue à un accompagnement de qualité.
À l'échelle nationale, les chiffres n'en sont pas moins alarmants : en France, selon l'enquête menée par une association professionnelle, 202 services d'urgences ont dû fermer au moins une ligne médicale cet été. Or – on le sait – lesdits services connaissent une recrudescence d'activité en cette saison. Prendre une telle mesure, c'est donc s'exposer au risque de ne plus assurer la sécurité sanitaire des patients.
Si la Lozère est relativement épargnée par ce problème, tel n'est pas le cas de certains départements voisins, comme l'Aveyron.
Par exemple, à Saint-Affrique, l'accès aux urgences de l'hôpital est régulé depuis juin dernier en raison d'un manque de médecins. Dans cet établissement, un seul médecin est en poste pendant vingt-quatre heures pour assurer l'accueil, la gestion des lits de courte durée ainsi que les sorties du service mobile d'urgence et de réanimation (Smur).
Là comme ailleurs en France, la médiatisation de ce fonctionnement en mode dégradé, à laquelle vient s'ajouter la rumeur publique, décourage les usagers de se rendre aux urgences. En résultent une baisse du taux de remplissage et une remise en question du maintien de ce service public pourtant essentiel, notamment en zone rurale. C'est, en somme, un cercle vicieux…
Dans les déserts médicaux, bon nombre de professionnels constatent un report de la patientèle dépourvue de médecin traitant vers les services d'urgences pour des soucis de santé qui relèvent plutôt de la « bobologie ». Enfin, les Padhue sont toujours confrontés à des procédures administratives qui compliquent leur intégration dans nos hôpitaux.
Madame la ministre, pouvez-vous nous indiquer s'il existe une évaluation régulière et qualitative du nombre d'usagers qui fréquentent les urgences faute de médecin traitant ? En outre, comptez-vous assouplir les conditions d'exercice des Padhue ? Ne serait-ce pas une piste à creuser ? (Applaudissements sur les travées des groupes RDSE et RDPI.)
M. le président. La parole est à Mme la ministre.
Mme Geneviève Darrieussecq, ministre de la santé et de l'accès aux soins. Madame la sénatrice, je vous remercie de votre question et je me réjouis que la Lozère ne soit pas trop touchée par ces problèmes, d'autant qu'il s'agit également d'un territoire très touristique. Toutefois, comme vous le rappelez, certains départements voisins sont plus en difficulté.
En ville aussi, la démographie médicale est fragile : nous en avons longuement parlé lors du débat de cette après-midi sur la formation des médecins.
Bien évidemment, le médecin traitant reste l'interlocuteur privilégié de ses patients pour la prise en charge des soins non programmés. Dans un monde idéal, les urgences se consacreraient aux seules situations d'urgence…
Une étude menée par Doctolib au printemps dernier indique que 41 % des consultations de médecine générale sont réalisées dans les quarante-huit heures suivant la prise de rendez-vous.
Trop souvent le passage aux urgences est allongé, car les services hospitaliers dédiés ne peuvent admettre les patients. À l'évidence, notre système hospitalier souffre d'un manque de fluidité entre lits d'hospitalisation. Je pense en particulier aux lits d'aval, qui sont très importants, notamment pour la gériatrie. Une autre gestion de ces lits permettrait aux urgences de travailler dans de bien meilleures conditions, en particulier pour accueillir les patients. Il s'agit là d'une véritable difficulté.
Madame la sénatrice, vous le savez : récemment encore, un très grand nombre de patients en affection de longue durée (ALD) n'avaient pas de médecin traitant. Depuis la fin de l'année 2023, ce problème a fait l'objet d'une action spécifique. Au total, 240 000 nouveaux patients en ALD disposent depuis d'un médecin traitant ; 472 000 en sont encore dépourvus, sur 13 millions de patients en ALD.
Enfin, beaucoup a été fait en faveur des Padhue, mais il nous reste de nombreuses situations à analyser qui exigent la plus grande attention : nous devons fluidifier les recrutements tout en préservant la qualité et la sécurité des soins. J'insiste sur le fait que ces médecins rendent des services inestimables à notre système de santé.
M. le président. La parole est à M. Olivier Henno.
M. Olivier Henno. Je me félicite à mon tour de la tenue de ce débat. L'état des urgences est évidemment une question de moyens, mais c'est aussi une question d'organisation et de stratégie.
En outre, je salue la décision du Premier ministre de faire de la santé mentale la grande cause nationale de l'année 2025.
On parle beaucoup en ce moment de coups de rabot budgétaires. Or, pour la psychiatrie – je parle d'expérience, ayant, en tant que maire, présidé le conseil d'administration, puis de surveillance d'un hôpital psychiatrique pendant près de vingt ans –, il s'agit plutôt d'un massacre à la tronçonneuse… Au cours des dix dernières années, les budgets ont été littéralement amputés.
Aujourd'hui, les regards tendent à changer : les patients comme leurs familles en sont désormais convaincus, la maladie mentale n'est pas une maladie honteuse. C'est, du reste, une maladie dont on peut guérir. Mais les soins de ville sont défaillants, notamment parce que le métier de psychiatre est de moins en moins attractif. Quand un patient est en crise, sa famille n'a d'autre choix que de s'adresser aux urgences. En résulte un cocktail assez détonnant, car ces services ne sont pas toujours organisés en conséquence.
Madame la ministre, ma question est double. Premièrement, comment comptez-vous adapter l'organisation des urgences afin de mieux traiter de la santé mentale ? Deuxièmement, que pensez-vous de l'expérimentation du Samu psy ? Envisagez-vous de le généraliser ?
M. le président. La parole est à Mme la ministre.
Mme Geneviève Darrieussecq, ministre de la santé et de l'accès aux soins. Monsieur le sénateur, vous le soulignez avec raison : la psychiatrie est un sujet à part entière et M. le Premier ministre entend faire de la santé mentale, enjeu bien plus large encore, la grande cause nationale de l'année 2025.
La psychiatrie exige une approche complète. Il faut agir à la fois à domicile, pour éviter les ruptures de prise en charge et donc le suivi des traitements médicamenteux, comme en hospitalisation dans des secteurs spécialisés, et en aval de l'épisode aigu.
Les financements de l'assurance maladie pour les activités de psychiatrie ont augmenté de près de 32 % entre 2020 et 2023. Ils atteignent désormais 12 milliards d'euros ; je ne puis donc pas vous laisser parler de massacre à la tronçonneuse…
J'ajoute que, depuis quatre ans déjà, la psychiatrie bénéficie d'un plan dédié assurant le déploiement de nouveaux moyens, même si nous devons maintenant fixer de nouveaux objectifs.
De nombreuses mesures ont été prises. Elles ont permis l'attribution de crédits pérennes, dans le cadre des assises de la santé mentale et de la psychiatrie, qui se sont tenues en septembre 2021.
Dans ce contexte, une réforme des autorisations a été accomplie, afin d'associer davantage le secteur privé à la prise en charge des urgences.
Dans le cadre du nouveau régime d'autorisations, les établissements doivent être à même de proposer trois formes de prise en charge : des séjours à temps complet, des séjours à temps partiel et des soins ambulatoires. Cette réforme prévoit également un fonctionnement en réseau, pour inciter les établissements autorisés en psychiatrie à réfléchir ensemble, dans une même zone d'intervention, aux modalités de prise en charge des patients en amont et en aval des urgences.
Pour soutenir ces actions, menées par des collectifs de soins, un fonds d'innovation a été mis en œuvre. Au total, 226 millions d'euros y ont été alloués pour l'ensemble de la période. Quant aux fameux services d'accès aux soins, ils peuvent inclure la prise en charge psychiatrique.
Enfin, je tiens à insister sur l'effort de prévention. Il faut éviter les crises aiguës conduisant les malades dans les services de psychiatrie. À ce titre aussi, de nombreuses mesures ont été prises – je pense notamment à Mon soutien psy.
Les deux minutes qui me sont imparties sont, hélas ! bien insuffisantes pour vous détailler les politiques de santé mentale que nous envisageons de mettre en œuvre. J'ai d'ailleurs déjà largement dépassé mon temps de parole… Mais nous poursuivrons bien sûr ce dialogue.
M. le président. La parole est à Mme Silvana Silvani.
Mme Silvana Silvani. Madame la ministre, mes chers collègues, pour les urgences, les étés se suivent et se ressemblent. Désormais, les gouvernements se déclarent satisfaits quand « seulement » 46 % des établissements ferment leurs services durant la période estivale.
Pour les élus locaux, les mois de juillet et d'août sont au contraire source de tensions et d'angoisses. Aux urgences, dans les services de soins et de réadaptation ou encore en psychiatrie les tensions sont maintenant généralisées.
Dans le département dont je suis élue, la Meurthe-et-Moselle, les urgences du centre hospitalier (CH) de Briey ont été temporairement fermées l'été dernier. La prise en charge des accouchements y a de même été suspendue un temps, faute de soignants.
Madame la ministre, faut-il inciter nos maires à prendre des arrêtés pour mettre en demeure l'État d'assurer l'égalité des soins ? On l'a observé dans au moins un département. Pardonnez-moi de rappeler une évidence : les femmes enceintes arrivant à terme en été ne peuvent attendre le mois de septembre pour accoucher…
Allez-vous déployer les moyens nécessaires via le prochain projet de loi de financement de la sécurité sociale (PLFSS) ?
Mme Cathy Apourceau-Poly. Bien sûr…
M. le président. La parole est à Mme la ministre.
Mme Geneviève Darrieussecq, ministre de la santé et de l'accès aux soins. Madame la sénatrice, le centre hospitalier de Briey rencontre des difficultés de recrutement depuis plusieurs années, que ce soit en gériatrie, en pédiatrie, en psychiatrie, en gynécologie ou encore en anesthésie. Ces difficultés se sont accrues plus particulièrement pour les urgentistes. Un travail est mené en étroite collaboration avec le centre hospitalier régional (CHR) de Metz-Thionville pour apporter un soutien à l'établissement dans ces disciplines.
Au regard de l'ensemble de ces difficultés, une organisation adaptée des urgences a été élaborée, en lien avec les professionnels de ce service, le Samu 57 – pour la Moselle –, le Samu 54 – pour la Meurthe-et-Moselle – et l'appui du service départemental d'incendie et de secours (Sdis) de la Moselle, avec les moyens médicaux disponibles.
Des mesures d'exception ont été prises occasionnellement cet été. Systématiquement, elles ont été retenues au terme d'une concertation avec le Samu 54, le Samu 57 et l'agence régionale de santé. Elles ont conduit à fermer l'accueil au public et à réorienter les patients vers d'autres sites. En pareil cas, la présence d'un infirmier a toujours été assurée pour accueillir les patients qui n'auraient pas eu connaissance de la mesure de fermeture. L'appui d'un médecin anesthésiste réanimateur a également été assuré en cas d'urgence vitale.
En outre, le centre hospitalier de Metz-Thionville a apporté un fort appui à la maternité. Une seule garde de médecin anesthésiste réanimateur de vingt-quatre heures, en juillet dernier, a posé problème, mais l'établissement avait anticipé ces difficultés : il avait pris les mesures nécessaires pour sécuriser les parturientes au cours de cette journée. Même si, in fine, l'établissement a pu résoudre les problèmes posés à sa ligne de garde, il a fait le choix de maintenir l'organisation validée et communiquée aux parturientes, afin d'éviter toute confusion.
Cet établissement bénéficie d'un suivi resserré des équipes de l'ARS. Un groupe de travail « urgences » a été constitué pour identifier toutes les organisations pertinentes, tous les leviers à même d'améliorer la situation.
En parallèle, le CHR de Metz-Thionville et le CH de Briey s'engagent, bien sûr, à renforcer leur collaboration. Leurs réflexions conjointes portent notamment sur la gradation des filières de soins et des équipes de territoires.
Madame la sénatrice, il s'agit là d'un véritable sujet d'attention. L'hôpital de Briey peut compter sur le soutien du territoire tout entier ; mais, dans cet établissement comme ailleurs, les médecins que nous attendons sont actuellement en formation. Je ne peux pas les inventer…
Pour l'heure, nous devons garantir des solutions sécurisées pour la prise en charge de nos patients, ce qui m'importe avant tout.
Soyez assurée que cet hôpital retient toute mon attention.
M. le président. La parole est à Mme Silvana Silvani, pour la réplique.
Mme Silvana Silvani. Madame la ministre, je vous remercie sincèrement de votre attention.
La position stratégique de l'hôpital de Briey a été reconnue, en particulier par l'ARS. Or les difficultés auxquelles cet établissement doit faire face datent de plus de quinze ans – vous voyez que je ne vous rends nullement responsable de la situation.
Le CHR de Metz-Thionville apporte certes un soutien bienvenu, mais ces deux villes sont assez éloignées de Briey, au nord du département.
En 2018, un audit a été engagé par l'ARS, mais on attend toujours la mise en œuvre de projets, de propositions ou encore de réflexions. Pendant ce temps, la situation de l'hôpital se dégrade. Les sommes évoquées il y a quinze ans ne sont plus d'actualité et il n'est plus du tout question de régulation.
Au moins avez-vous pris connaissance de cette situation. (Mme la ministre le confirme.) Je vous assure que, chaque été, les habitants du nord du département sont extrêmement inquiets.
Au cours de ce débat comme lors du précédent, dont je salue bien sûr l'organisation, vous avez rappelé que l'objectif national de dépenses d'assurance maladie devait progresser de 2,8 % en 2025. Mais, avec un taux si faible, on n'y arrivera pas. La Fédération hospitalière de France (FHF), précédemment citée, laquelle est présidée par un médecin par ailleurs membre du parti Horizons, demande, elle, une revalorisation de 6 %.
Les dépenses de santé ont certes augmenté, comme vous le soulignez, mais elles ne sont pas à la hauteur des besoins, si bien que les problèmes déplorés ici et là demeurent.
M. le président. Mes chers collègues, je vous prie de bien vouloir respecter votre temps de parole, y compris pour la réplique ; c'est tout simplement une question d'équité.
La parole est à Mme Anne Souyris.
Mme Anne Souyris. Madame la ministre, ma question porte sur la répartition des obligations de garde entre l'hôpital, les cliniques privées et les professionnels de ville.
Si les urgences sont saturées, c'est bien sûr faute de professionnels en nombre suffisant dans ces services vitaux et du fait de leurs conditions de travail extrêmement difficiles ; mais c'est aussi à cause de l'injuste répartition des efforts entre les diverses branches de notre système de santé pour la prise en charge des soins non programmés.
En 2023, selon l'inspection générale des affaires sociales (Igas), la permanence des soins en établissement était assumée à 82 % par les hôpitaux publics, quand le secteur privé n'en assurait que 13 %. De plus, seuls 39,34 % des médecins libéraux participaient à la permanence des soins ambulatoires.
Je souhaite connaître la position de votre gouvernement sur deux points. Premièrement, comptez-vous rendre obligatoire la participation des médecins libéraux à la permanence des soins ou, à tout le moins, renforcer l'incitation de ces professionnels à y prendre part ? Deuxièmement, quelles mesures comptez-vous mettre en œuvre pour que les établissements privés prennent leur juste part à la permanence des soins ?
M. le président. La parole est à Mme la ministre.
Mme Geneviève Darrieussecq, ministre de la santé et de l'accès aux soins. Madame la sénatrice, vous posez là des questions importantes.
Comme vous le soulignez, l'engagement des médecins de ville est non seulement nécessaire, mais indispensable à l'accès aux soins dans l'ensemble de notre territoire.
La permanence des soins s'organise sur la base du volontariat. Toutefois, le code de déontologie médicale précise qu'il est du devoir du médecin d'y participer ; et, si la carence est constatée, les textes en vigueur permettent déjà au préfet de réquisitionner les médecins sur proposition de l'ARS. On enregistre même une hausse du nombre de réquisitions : au total, 1 019 médecins ont été réquisitionnés en 2023.
La dernière étude annuelle de l'ordre des médecins sur la permanence des soins ambulatoires indique que 39 % des médecins généralistes ont participé à la permanence des soins en 2023 – vous l'avez rappelé vous-même. Ainsi, 26 065 praticiens se sont portés volontaires sur un total de 66 257 médecins susceptibles de prendre une garde. Un médecin réalise en moyenne vingt-huit gardes chaque année et l'âge moyen des effecteurs de gardes est de 45 ans.
En la matière, nous sommes face à deux enjeux principaux : premièrement – nous sommes tous d'accord sur ce point –, assurer la permanence des soins ambulatoires en évitant l'engorgement des services d'urgences par des soins pouvant être assurés en ville – et, à mon sens, ces derniers sont majoritaires ; deuxièmement, faciliter le parcours des patients en soirée, les week-ends et jours fériés.
Il faut lancer une campagne d'information pour que les services en question soient mieux connus des patients eux-mêmes.
En parallèle, nous devons construire des ponts avec tous les établissements médico-sociaux et renforcer ceux qui existent entre l'hôpital, d'une part, et ces établissements, de l'autre, toujours au nom de la permanence des soins. Il faut à tout prix éviter que les personnes âgées qui arrivent aux urgences n'y restent des heures sur des brancards. De telles situations, profondément insatisfaisantes, peuvent mettre en péril la santé des intéressés.
Nous allons continuer à travailler en ce sens. Tous les acteurs sont animés d'un esprit de responsabilité et, à l'heure actuelle, de plus en plus de partenariats se nouent. Nous allons les encourager et les faciliter, dans une logique d'adaptation aux besoins des territoires.
M. le président. La parole est à Mme Anne Souyris, pour la réplique.
Mme Anne Souyris. Madame la ministre, je vous remercie de votre réponse. Néanmoins, vous parlez toujours d'incitation et n'abordez jamais la piste de l'obligation. Or, vous le reconnaissez, plus de 60 % des médecins de ville ne participent pas à la permanence des soins : c'est tout de même beaucoup.
En vertu d'un amendement adopté au titre de la loi du 27 décembre 2023, l'ARS, qui autorise l'installation des médecins, doit s'assurer à ce moment-là que le praticien participe bien à la permanence des soins. Cette mesure a-t-elle été appliquée et, le cas échéant, évaluée ?
M. le président. La parole est à Mme la ministre.
Mme Geneviève Darrieussecq, ministre. Sauf erreur, c'est l'ordre des médecins qui autorise l'installation.
Pour ma part, j'ai connu toutes les périodes. J'ai été praticien, j'ai siégé au conseil de l'ordre et j'ai vu les médecins se désengager peu à peu de la permanence des soins, tout simplement parce que les urgences clamaient haut et fort qu'elles accueillaient tout le monde, urbi et orbi.
Nous devons aujourd'hui assurer un nouvel équilibre. Je ne sais pas si la coercition peut être une solution. Ce que je sais, c'est que l'enjeu, à moyen et long termes, c'est de conclure des partenariats de confiance et de modifier la structuration de notre système de santé.
Au préalable, nous avons besoin de solutions d'urgence, mais je crois que nous pouvons faire avec les outils dont nous disposons. Je le répète, les réquisitions sont possibles.
Bien sûr, nous devrons évaluer régulièrement cette politique afin de la réorienter autant que nécessaire. C'est une question d'efficacité.
M. le président. La parole est à M. Jean-Luc Fichet.
M. Jean-Luc Fichet. Madame la ministre, les urgences sont, par définition, le lieu où les Français se rendent en cas de nécessité immédiate, qu'ils subissent un accident de santé ou un accident de la vie. C'est l'endroit réflexe pour sauver des vies.
Il faut résoudre le problème des urgences dans les meilleurs délais : en témoignent un certain nombre d'exemples observés dans le département dont je suis l'élu.
Une étude menée par l'AP-HP souligne qu'une nuit passée sur un brancard aux urgences augmente de plus de 40 % la mortalité des patients de plus de 75 ans.
Cet été, les personnels du centre CHU de Brest ont présenté à l'entrée des urgences ce qu'ils appellent un mur de la honte. Y étaient affichés des prénoms de patients, leur âge et le nombre d'heures passées sur un brancard. On pouvait par exemple y lire : « M. S., 89 ans, a passé trente heures sur un brancard. »
À Carhaix, les urgences sont toujours régulées par le 15, malgré un accord signé en octobre 2023 par l'État, les collectivités territoriales du centre-ouest Bretagne et les partenaires sociaux. Cette année, à Morlaix, le service des urgences a été mis en très grande difficulté par l'afflux d'estivants.
Madame la ministre, la population et les élus des territoires vous demandent d'agir efficacement. Nous n'attendons pas de miracle : nous exigeons simplement ce qui est dû.
Comment comprendre que les cliniques privées refusent de prendre en charge certains actes jugés non lucratifs, les renvoyant aux urgences de l'hôpital public ? Comment comprendre que les groupements hospitaliers de territoires (GHT) en soient réduits à gérer des pénuries par un système de reconcentration des moyens autour des métropoles, alors qu'ils devaient servir de leviers de bonne répartition des moyens sur l'ensemble du territoire ?
À la désertification de la médecine de ville vient s'ajouter celle des urgences hospitalières. Accepterez-vous de voir rogner le budget alloué aux hôpitaux publics, ce qui serait, pour ces derniers, une quasi-condamnation à mort ? Ou bien, à l'inverse, défendrez-vous fermement l'hôpital public en lui garantissant, via le budget pour 2025, les moyens qui lui sont nécessaires ?
M. le président. La parole est à Mme la ministre.
Mme Geneviève Darrieussecq, ministre de la santé et de l'accès aux soins. Monsieur le sénateur, bien sûr que nous défendrons l'hôpital public. C'est à dessein que j'ai rappelé tout à l'heure que, sur nos 620 services d'urgences, une soixantaine ont rencontré des problèmes aigus : on trouve donc également des services d'urgences qui fonctionnent, même avec des listes d'attente ou des personnes sur des brancards. (Protestations sur les travées du groupe SER.)
Je voudrais que nous donnions aussi une image positive de l'hôpital de France, qui est un bel hôpital. (Mme Annie Le Houerou et M. Mickaël Vallet s'exclament.) On y trouve des services spécialisés et hyperspécialisés, qui prennent en charge des pathologies de manière tout à fait exceptionnelle. L'accès aux soins de base, la permanence des soins et les soins non programmés posent problème, mais ne ternissons pas l'image de notre hôpital, des professionnels qui y travaillent et des prises en charge qui y sont faites.
Monsieur le sénateur, nous les soutiendrons. Vous avez raison de dire que les établissements privés doivent participer à la permanence des soins. Les conventions qui ont été passées doivent s'appliquer. Des établissements privés reçoivent des budgets particuliers : en contrepartie, ils doivent participer à la permanence des soins.
Je ferai tout pour bâtir des ponts entre l'hospitalisation privée et l'hôpital public, ce qui est absolument nécessaire à la bonne prise en charge des patients.
Quant aux problèmes que vous décrivez dans votre département, je ne puis me réjouir que des personnes restent des heures sur un brancard et que des soignants dressent un mur de la honte dans un hôpital. Cela me navre et ne fait que renforcer ma détermination à agir.
M. le président. La parole est à M. Daniel Chasseing.
M. Daniel Chasseing. Madame la ministre, pendant l'été 2024, la situation des urgences a été difficile dans de nombreux territoires, notamment en Nouvelle-Aquitaine, que vous connaissez bien, et qui comprend l'ancienne région du Limousin, avec la fermeture perlée des services d'urgences et des Smur dans de nombreux départements.
En Corrèze, les services ont tenu, fonctionnant jour et nuit tout l'été. Je tiens à en féliciter les médecins et tous les personnels, qui ont été très solidaires et très professionnels.
Ces fermetures et difficultés sont dues à un manque de médecins urgentistes, à des tensions sur le personnel et à une hausse de la fréquentation des urgences pendant cette période, de 10 % en Corrèze. La mise en place des SAS a parfois été une solution pour assurer des soins non programmés, mais elle se heurte au manque de médecins de ville. De plus, beaucoup se rendent directement aux urgences, sans composer le 15. Il convient toutefois de poursuivre la mise en place de communautés professionnelles territoriales de santé en complément des SAS.
Il faut former plus de médecins, généralistes et urgentistes. En novembre 2026, l'arrivée de médecins juniors permettra de renforcer les effectifs.
La mise en place de deux dispositifs pourrait améliorer la prise en charge aux urgences : premièrement, généraliser le triage à l'entrée, afin que les urgences mineures soient prises en charge dans une salle différente par un médecin généraliste ; deuxièmement, disposer de davantage de lits d'aval pour les personnes qui, sans urgence aiguë, doivent rester à l'hôpital pour effectuer un bilan approfondi et qui, souvent, encombrent les urgences et attendent sur des brancards.
Madame la ministre, ne faudrait-il pas mettre en œuvre rapidement ces deux dispositifs ?
M. le président. La parole est à Mme la ministre.
Mme Geneviève Darrieussecq, ministre de la santé et de l'accès aux soins. Monsieur le sénateur, vous soulevez des problèmes organisationnels. Certains hôpitaux ont déjà peu ou prou un fonctionnement proche de celui que vous venez de décrire.
Les établissements doivent s'efforcer de travailler avec les ARS et les GHT à des organisations plus logiques, à même de fluidifier les parcours.
Vous avez raison de souligner que la présence d'une personne pour accueillir et orienter les patients facilite les choses.
La question des lits d'aval est cruciale. Nous avons besoin de bien davantage de lits de soins médicaux et de réadaptation (SMR) afin de libérer des places pour ceux qui arrivent aux urgences avec des besoins aigus.
Cela suppose de mettre en place une organisation hospitalière et des financements et de satisfaire aux besoins en personnel, infirmiers et médecins pour gérer ces lits. Nous continuons d'y travailler.
M. le président. La parole est à M. Daniel Chasseing, pour la réplique.
M. Daniel Chasseing. Les lits d'aval sont très importants. Aux urgences, nous voyons des personnes sur des brancards. Bien souvent, une infirmière est désignée pour chercher des lits dans tout l'hôpital – et c'est un travail à plein temps. Je n'ignore rien des coûts induits par ces lits supplémentaires, mais c'est une question essentielle.
En outre, les services spécialisés ne souhaitent pas accueillir de patients souffrant d'une affection ne relevant pas de leur domaine et qui ont besoin d'un bilan. L'ouverture de lits de médecine polyvalente en aval est plus que jamais nécessaire.
Mme Geneviève Darrieussecq, ministre. Je suis d'accord !
M. le président. La parole est à Mme Florence Lassarade. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
Mme Florence Lassarade. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, dès 2014, la Cour des comptes nous alertait sur l'augmentation continue des recours aux urgences, souvent pour des cas ne nécessitant pas d'hospitalisation. Cette situation est en grande partie le résultat d'une prise en charge insuffisante par la médecine de ville. La Cour soulignait également l'existence de tensions au sein des hôpitaux et une inadéquation des soins prodigués.
Le constat reste inchangé : les effectifs – infirmiers, aides-soignants, médecins – demeurent insuffisants pour répondre à la demande croissante des patients. Cette pénurie se traduit par un engorgement des services d'urgences, par des conditions de travail de plus en plus difficiles et par une fatigue accrue des équipes. En somme, nous sommes toujours face à une situation critique.
En 2020, par exemple, 77 % des structures d'urgences étaient publiques. Elles ont pris en charge 18 millions de passages, même si l'on a observé une baisse de 17 % par rapport à l'année précédente, en raison notamment de la pandémie.
Au fil des années, les problèmes persistent. Le manque de ressources, tant humaines que matérielles, maintient les services d'urgences dans une crise permanente. Pour tenter de limiter l'afflux, des mesures de régulation ont été instaurées. Celles-ci, bien que nécessaires, sont souvent mal perçues par les patients et engendrent de l'incompréhension.
Le triage, ou la qualification, est devenu une pratique courante. Ce procédé consiste à évaluer rapidement l'état d'une personne arrivant aux urgences afin de l'orienter vers le parcours de soins le plus approprié. Il s'agit d'un outil essentiel pour assurer une prise en charge rapide et efficace, mais encore faut-il que les personnels chargés de l'évaluation soient correctement formés et soutenus. Madame la ministre, qu'en est-il ?
M. le président. La parole est à Mme la ministre.
Mme Geneviève Darrieussecq, ministre de la santé et de l'accès aux soins. Madame la sénatrice, ce sont les assistants de régulation médicale (ARM) qui sont au bout du fil lorsque l'on appelle les centres 15. Ils orientent leurs interlocuteurs vers les SAS et sont les premiers maillons de la chaîne des secours médicaux français par téléphone. Ils travaillent en collaboration avec des médecins hospitaliers et libéraux.
Depuis 2019, afin de sécuriser la régulation médicale, le ministère de la santé a instauré une certification de la formation. D'une durée d'un an, celle-ci est assurée dans vingt et un centres agréés – l'ouverture récente de nouveaux centres a permis de mailler encore davantage notre territoire. Elle s'adresse aux bacheliers et aux personnes ayant au moins trois ans d'expérience professionnelle à temps plein. Elle est aujourd'hui obligatoire pour exercer ce métier.
En pratique, cette assistance de régulation médicale réceptionne tous les appels, les priorise et les oriente soit vers une prise en charge sans délai par les Samu, dans les situations d'urgence vitale, soit vers la régulation de médecine ambulatoire, lorsque la demande relève de besoins de soins non programmés.
En revanche, les missions importantes que sont l'accueil et l'orientation des patients aux urgences reposent sur un infirmier organisateur de l'accueil – dans certains établissements, en binôme avec un médecin organisateur de l'accueil. Ce rôle constitue plus que jamais un pivot de l'organisation et de la gestion des flux internes des structures d'urgences : il s'agit d'accueillir, d'évaluer rapidement le degré d'urgence et d'organiser le début du parcours dans une structure adaptée aux besoins du patient.
Les outils existent ; il est essentiel que chaque établissement s'en empare et les adapte aux besoins de son territoire.
M. le président. La parole est à Mme Brigitte Devésa.
Mme Brigitte Devésa. Madame la ministre, mes chers collègues, ce n'est plus un secret pour personne : notre système d'urgences est sous tension et à bout de souffle. Cet été, comme chaque été malheureusement, il a connu de graves difficultés dont les plus vulnérables de nos concitoyens ont été les premières victimes.
Je prendrai pour exemple l'hôpital d'Aix-en-Provence, dans le département des Bouches-du-Rhône. Cet été, le service d'urgences de cet établissement clé pour notre territoire a dû régulièrement fonctionner de nuit avec quatre urgentistes, alors que six sont nécessaires. Par ailleurs, la fermeture régulière des services d'urgences d'autres hôpitaux situés à proximité, comme ceux de Digne-les-Bains et de Manosque, a provoqué des reports vers l'hôpital d'Aix, qui avait donc trop de patients à traiter et pas assez de médecins.
Cette situation est bien évidemment néfaste pour les patients, qui subissent des délais d'attente de plus en plus longs et donc, parfois, des pertes de chance. Elle l'est aussi, madame la ministre, pour les soignants, dont le dévouement a pour limite leur capacité physique à supporter une charge de travail toujours plus lourde. Il devient d'ailleurs de plus en plus difficile de recruter dans certaines professions paramédicales, et même dans certaines spécialités de médecine.
Certes, c'est un problème de long terme, car former un médecin prend des années. Nous ne pourrons le régler d'un claquement de doigts. Toutefois, nos concitoyens doivent pouvoir accéder dès maintenant à des services d'urgences de qualité. Apporter des réponses intermédiaires semble donc indispensable.
Madame la ministre, quelles solutions envisagez-vous à court terme pour soulager nos services d'urgences et permettre à l'ensemble des Français d'y être pris en charge dans de bonnes conditions ?
M. le président. La parole est à Mme la ministre.
Mme Geneviève Darrieussecq, ministre de la santé et de l'accès aux soins. Nous avons déjà évoqué de nombreuses solutions – SAS, articulation avec les services d'urgences, coopération avec les établissements privés des territoires manquant de services d'urgences… Cependant, la clé réside dans les ressources humaines, qu'il s'agisse de former de nouveaux professionnels ou de convaincre ceux qui ont quitté le système d'y revenir.
Nous savons que nous devons travailler à l'attractivité des métiers et à la prise en compte de la pénibilité, afin de favoriser le maintien dans leur domaine d'activité des professionnels de l'urgence. Les accords du Ségur de la santé représentent un effort historique dans la reconnaissance de l'engagement de ces professionnels.
À l'été 2022, les mesures dérogatoires pour les urgences et soins non programmés ont permis la reconnaissance rapide des sujétions que sont le travail de nuit, le travail du dimanche et le travail des jours fériés. À l'été 2023, ces mesures d'attractivité ont été pérennisées pour permettre une meilleure rémunération des professionnels médicaux et non médicaux. C'est en effet sur ces plages horaires que se concentrent les plus grandes difficultés de recrutement.
La reconquête progressive de l'attractivité des métiers de la santé et la fidélisation des professionnels est notre priorité. Ces métiers restent attractifs, nous l'avons souligné : les études de santé sont sur le podium des formations les plus demandées sur Parcoursup en 2024.
Nous devons continuer d'investir pour accroître les capacités de formation et avancer sur les conditions de travail, en sus des efforts déjà accomplis en matière de rémunération, pour rendre ces métiers encore plus attractifs. N'oublions pas l'évolution des carrières, élément essentiel dans les services d'urgences comme ailleurs.
M. le président. La parole est à Mme Brigitte Devésa, pour la réplique.
Mme Brigitte Devésa. J'entends vos propos, madame la ministre, notamment sur tout ce qui a été mis en place au travers du Ségur.
Toutefois, sans une réforme en profondeur, la situation que connaissent les services d'urgences risque non seulement de mettre en danger la santé de nos concitoyens, mais aussi de provoquer une véritable rupture dans l'accès aux soins. Madame la ministre, il y a urgence !
M. le président. La parole est à Mme Audrey Bélim.
Mme Audrey Bélim. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, je souhaite tout d'abord, en notre nom à toutes et tous, envoyer un message de solidarité aux Calédoniens, pour qui la crise politique a de graves conséquences sanitaires.
Il a été difficile, voire impossible, d'accéder au centre hospitalier territorial, en raison des barrages. Depuis le 2 septembre dernier, les lits d'hospitalisation sont fermés à Poindimié et à Koumac, faute d'infirmiers et de médecins. Il n'y a plus eu de services d'urgences de nuit durant de nombreuses semaines, et peut-être est-ce encore le cas aujourd'hui. Le nombre de décès a presque doublé.
Permettez-moi d'évoquer les problèmes que nous avons connus à La Réunion, non pas cet été, mais durant notre hiver austral. Certes, ils ne sont pas aussi dramatiques, mais ils n'en restent pas moins graves pour notre population.
Ainsi, le 3 octobre dernier, un patient de 90 ans, qui s'était rendu aux urgences pour une détresse respiratoire, a dû attendre pas moins de dix-sept heures avant d'être pris en charge. Il s'agit, mes chers collègues, vous qui représentez les collectivités territoriales, de l'ancien maire de Salazie, Jean-Claude Welmant. Vous en conviendrez, une si longue attente est inacceptable pour tout citoyen, ancien maire ou non. Cette grave défaillance reflète la situation fragile de notre CHU, et ce malgré l'engagement remarquable des équipes.
Au-delà des spécificités liées à l'insularité, le service des urgences du CHU de La Réunion, hôpital de référence de l'océan Indien, accueille de nombreux Mahorais par évacuation sanitaire (Évasan), car les infrastructures de Mayotte ne sont pas adaptées à tous les actes. En 2012, ils étaient 400 ; en 2023, 1 600. Je rappelle que nous comptons 40 % de patients non affiliés, au sujet desquels le CHU doit se battre avec la caisse générale de sécurité sociale (CGSS) pour obtenir l'ouverture de l'aide médicale de l'État (AME), puisque celle-ci n'existe pas à Mayotte.
Je rappelle aussi qu'un tiers des Évasan concernent des étrangers. C'est l'honneur de notre CHU, c'est l'honneur de La Réunion, mais il y va aussi de l'image de la France dans son bassin régional. Cela suppose toutefois un soutien de l'État. Le précédent gouvernement avait annoncé une revalorisation de trois points du coefficient géographique, ce que l'ensemble des acteurs avaient accueilli avec satisfaction.
Madame la ministre, confirmez-vous cette hausse ? Irez-vous plus loin, au regard des nombreuses Évasan prises en charge par le CHU de La Réunion, au nom de la solidarité nationale ? (Applaudissements sur les travées du groupe SER. – Mme Solanges Nadille applaudit également.)
M. le président. La parole est à Mme la ministre.
Mme Geneviève Darrieussecq, ministre de la santé et de l'accès aux soins. Madame la sénatrice, je vous remercie de vos mots relatifs à la situation en Nouvelle-Calédonie. À mon tour, je veux avoir une pensée pour tous ceux qui œuvrent en faveur de l'apaisement, notamment nos forces de l'ordre, les fonctionnaires de l'État, mais aussi les responsables politiques et syndicaux ainsi que les acteurs de la société civile, qu'ils soient issus du monde économique, religieux ou coutumier.
La situation financière des hôpitaux ultramarins, et particulièrement celle du CHU de La Réunion, est une préoccupation que je partage pleinement. Je suis consciente des contraintes spécifiques, que vous avez décrites, auxquelles cet établissement est confronté, sans oublier l'éloignement géographique, les surcoûts logistiques et la forte demande de soins, dans un contexte sanitaire plus complexe que celui de l'Hexagone.
Face à une dégradation de la situation financière de ce CHU, l'État a poursuivi, ces dernières années, un accompagnement spécifique de plusieurs dizaines de millions d'euros – dont quelque 42 millions d'euros de crédits en 2023. Ce soutien financier important va de pair avec un travail mené par la gouvernance du CHU sur le fonctionnement de l'établissement et la fluidité des parcours.
Vous évoquez le coefficient géographique, rehaussé de 31 % à 34 %. Cette réévaluation s'applique sur les tarifs et dotations perçus par les établissements réunionnais et entrera en vigueur progressivement sur les exercices 2024 et 2025.
Mayotte a été confrontée à une succession de crises ces dernières années, notamment sociale, hydrique et même épidémique, avec le choléra. S'y ajoute la crise structurelle de l'attractivité, qui se traduit par d'importantes difficultés à pourvoir des postes durablement vacants au centre hospitalier de Mamoudzou. Mes prédécesseurs s'y sont engagés et je m'inscris dans cette approche : nous devons aider le territoire mahorais à se doter de leviers d'attractivité et de fidélisation de ses professionnels de santé.
Pour l'heure, je sais que le territoire de La Réunion s'est particulièrement engagé pour appuyer son voisin mahorais. Je salue la mobilisation de tous les Réunionnais qui agissent en ce sens et leur dis ma reconnaissance, ainsi qu'à la centaine de réservistes sanitaires engagés en permanence sur le territoire de Mayotte.
M. le président. La parole est à M. Alain Milon. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains. – Mme Brigitte Devésa applaudit également.)
M. Alain Milon. Madame la ministre, le fonctionnement des urgences reste un sujet de préoccupation pour nos concitoyens, pour les élus du territoire et pour le Gouvernement. La raréfaction des ressources médicales amène à recentrer les services d'urgences sur leur mission première : la prise en charge de patients relevant d'une pathologie qui requiert l'expertise et le plateau technique hospitaliers. Dans certains cas, cela conduit même à suspendre leur fonctionnement.
Nous observons ainsi les services d'urgences de plusieurs territoires modifier leur organisation, sans pour autant se coordonner entre eux. Cette situation engendre un manque de lisibilité sur les modalités de fonctionnement, des mises en procédure adaptée non coordonnées et, possiblement, des difficultés d'accès.
Or les GHT apportent souvent, via le projet médico-soignant partagé (PMSP) et l'élaboration du parcours de soins, complémentarité et lisibilité dans les territoires qu'ils desservent. Afin de renforcer l'organisation territoriale des urgences, ne faudrait-il pas demander aux groupements hospitaliers de territoire de proposer à l'ARS une organisation concertée au travers de la création d'une structure juridique de type pôle inter-établissement ou fédération médicale inter-hospitalière (FMIH) ?
M. le président. La parole est à Mme la ministre.
Mme Geneviève Darrieussecq, ministre de la santé et de l'accès aux soins. Je suis d'accord, monsieur le sénateur : les GHT, qui agissent souvent à l'échelle départementale, se situent au bon niveau d'action. À mon sens, ils devraient disposer d'une certaine autonomie pour l'organisation et l'architecture de l'accès aux soins et aux urgences.
Je souhaite avancer sur ce sujet, mais n'oublions pas qu'il existe des disparités selon les territoires, souvent liées à des personnes. Les élus locaux doivent montrer leur volonté politique de soutenir ces groupements, qui agissent à la bonne échelle en termes d'organisation de l'accès aux soins. Je vous propose que nous y travaillions.
M. le président. La parole est à M. Alain Milon, pour la réplique.
M. Alain Milon. Nous sommes d'accord, madame la ministre, mais ce groupement n'est pas doté de la personnalité morale et juridique. Dans ces conditions, l'établissement support ne dispose pas de levier réel pour agir en la matière.
Nous devons donc travailler sur cette question pour aboutir enfin à une organisation d'ensemble sur le territoire.
Mme Geneviève Darrieussecq, ministre. Je suis d'accord.
M. le président. La parole est à M. Franck Montaugé.
M. Franck Montaugé. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, un vendredi, à la fin de l'été, dans la belle ruralité gersoise, une personne âgée est orientée par son médecin généraliste vers le service des urgences de l'hôpital de Condom, à vingt-cinq kilomètres de sa commune de résidence.
Arrivé vers dix-sept heures trente aux urgences, le patient ne peut être pris en charge, faute de personnel médical – premier manquement grave au service public de la santé. À vingt-deux heures, il décide de rentrer chez lui.
Le lendemain, samedi, l'un de ses amis s'enquiert de la situation et n'arrive pas à le joindre. À dix-sept heures trente, après intervention du maire et des pompiers, il est retrouvé inanimé dans les toilettes de son appartement, où il vient de passer huit heures. Nouvelle hospitalisation à Condom à dix-huit heures et, à vingt-trois heures, nouveau retour au domicile après une prise en charge qui, pour le moins, pose question. Le dimanche, un proche atteste que la personne était totalement incapable de se déplacer, de s'alimenter et de satisfaire à ses besoins naturels – deuxième manquement grave au service public de la santé.
Le lundi, nouvelle hospitalisation en urgence, cette fois à Auch, où est diagnostiquée une grave infection, avec insuffisance pulmonaire et prescription de dialyse tous les deux jours. À l'heure où je vous parle, cette personne est toujours hospitalisée, très affaiblie, sous oxygène, et a délivré à l'un de ses proches ces quelques mots : « Que c'est long, l'agonie. »
Madame la ministre, cette situation est inacceptable. Quelles dispositions prendrez-vous pour que, de manière systémique et systématique, un service d'urgences, indispensable dans la ruralité, soit doté, vingt-quatre heures sur vingt-quatre, d'un médecin ? Comment peut-on transporter de la sorte un patient vers un service d'urgences qui n'en est pas doté ?
Mme Émilienne Poumirol. Très bien !
M. le président. La parole est à Mme la ministre.
Mme Geneviève Darrieussecq, ministre de la santé et de l'accès aux soins. Monsieur le sénateur, je ne connais pas la suite du parcours médical de ce patient. Ce qui est certain, cependant, c'est que des manquements ont eu lieu, le premier consistant à renvoyer une personne chez elle sans accompagnement, alors qu'elle est malade. Que cela relève du sanitaire ou du sanitaire et social, les structures doivent se coordonner et s'organiser pour éviter aux patients de se retrouver dans de telles difficultés.
Dans votre département du Gers, la coopération entre acteurs est bonne. Depuis environ un an, les urgences du centre hospitalier d'Auch ont une équipe mutualisée avec le CHU de Toulouse, sous la forme d'un pôle inter-établissement, afin de sécuriser le fonctionnement du service. Je tiens à saluer ce type de coopération, qui est formidable.
Le Smur de Condom, qui est aujourd'hui une antenne d'Auch, a vocation à devenir une ligne autonome, directement rattachée au centre hospitalier de Condom. En outre, l'ARS accompagnera les travaux de modernisation du service des urgences d'Auch, sachant qu'un projet de modernisation est également prévu à Condom.
L'ARS Occitanie révisera prochainement le volet urgences de son plan régional de santé. Le 15 octobre prochain, elle lancera la consultation sur les urgences, qui a été précédée d'une phase de concertation de six mois. La réflexion sur le département du Gers doit en faire partie.
La Landaise que je suis sait que nous accueillons des Gersois à Aire-sur-l'Adour, lorsque le service des urgences fonctionne, et à l'hôpital de Mont-de-Marsan.
M. le président. La parole est à M. Franck Montaugé, pour la réplique.
M. Franck Montaugé. Je salue les soignants, qui se dévouent corps et âme pour la santé de nos concitoyens. Je vous redis, madame la ministre, notre besoin urgent de mesures ponctuelles et structurelles opérationnelles pour le premier des services publics, celui de la santé.
M. le président. La parole est à M. Khalifé Khalifé.
M. Khalifé Khalifé. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.) Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, j'ai côtoyé les urgentistes durant mes quarante années d'urgences cardiologiques. C'est aussi un président de commission médicale d'établissement (CME) qui vous parle ce soir.
J'ai vu s'opérer bien des changements à l'hôpital, dont la création des urgences. Tout en acceptant la volonté des urgentistes de s'universaliser, nous étions alors nombreux à leur dire qu'ils ne pourraient pas tout faire – autrement, à quoi servirait-il d'avoir des spécialistes ? Et pourtant, tous ceux qui arrivaient à l'hôpital passaient par les urgences : même un malade sortant de chimiothérapie devait passer aux urgences pour être transfusé. Nous en étions là, d'où les dysfonctionnements relevés par toutes et tous et les conséquences qui en ont découlé sur l'image de marque de certains hôpitaux.
Beaucoup de médecins urgentistes, rapidement épuisés, sont partis ailleurs, parfois pour financiariser des centres de proximité.
Plus grave encore, cette centralisation des urgences a complètement éloigné les médecins qui étaient auparavant appelés pour avis en consultation et qui triaient les patients en quelques instants.
Aujourd'hui, d'autres l'ont souligné avant moi, les malades restent dix ou douze heures aux urgences pour attendre leur bilan : on les oublie, on les récupère, on les revoit plus tard, on les soumet à d'autres examens alors qu'ils ont déjà attendu pour passer un scanner… Les personnes souffrant d'une rage de dents patientent huit heures aux urgences pour un simple diagnostic, ce n'est pas une anecdote !
Pour ces raisons, je souhaiterais, comme beaucoup de mes collègues, que les services d'urgences soient cogérés par des médecins généralistes dans les mêmes locaux. L'expérience, je peux en témoigner, montre qu'il n'est pas dans l'habitude des urgentistes d'envoyer un malade dans un service situé en face de l'hôpital – ils préfèrent le faire patienter dans les couloirs sur un brancard…
Ces services cogérés, dont je souhaite la mise en place, devraient être de préférence universitaires. À cet égard, madame la ministre, que sont devenus les 250 postes de praticiens universitaires territoriaux créés récemment ?
M. le président. La parole est à Mme la ministre.
Mme Geneviève Darrieussecq, ministre de la santé et de l'accès aux soins. Je ne retracerai pas l'histoire des urgences, monsieur le sénateur, vous la connaissez bien mieux que moi.
Aujourd'hui, la situation est complètement différente, marquée par une hyperspécialisation et par l'apparition d'un diplôme d'études spécialisées (DES) de médecine d'urgence. Il en résulte que les médecins ayant d'autres spécialités interviennent moins au sein des services d'urgences.
Certains hôpitaux possèdent tout de même des filières d'urgences spécialisées, en pédiatrie ou en psychiatrie, par exemple, pour assurer un accueil particulier des patients. En dehors de ces cas, les patients ont un parcours de soins quelquefois complexe…
En 2023, 495 postes ont été proposés à l'internat pour le DES de médecine d'urgence. Cette filière profite d'une très forte attractivité puisque 100 % des postes offerts sont pourvus, ce qui est loin d'être le cas dans d'autres spécialités, notamment la psychiatrie. Ce DES bénéficie en outre du « droit au remords » pour les étudiants ayant choisi initialement une autre spécialité, avec quelque 150 internes recrutés en plus sur les cohortes des années 2017-2021. Il faut donc continuer de privilégier cette voie.
Pour le reste, il s'agit surtout d'une question organisationnelle à l'échelle de chaque établissement.
Votre proposition de cogestion des services d'urgences a déjà été mise en place dans certains hôpitaux, mais elle est impossible à appliquer dans d'autres établissements, faute de médecins généralistes désireux d'exercer dans ces structures. Dans ce dernier cas, il n'y a aucun intérêt à développer ces services, qui doivent être communs par essence. Il faut donc construire avec les praticiens du territoire, en fonction de ce qu'ils sont capables d'apporter.
Les services d'accès aux soins se révèlent très utiles pour éviter qu'un grand nombre de patients n'encombrent les urgences pour des problèmes relevant de la médecine générale, sans aucun caractère d'urgence.
En somme, on ne peut appliquer les mêmes solutions partout. Il existe des hôpitaux où des services de soins sont accolés aux urgences et fonctionnent très bien. En revanche, ce dispositif est inapplicable dans d'autres établissements, faute de praticiens volontaires pour y exercer.
Il faut réfléchir à construire autre chose. J'y insiste, l'idée est d'éviter que des malades n'ayant rien à faire aux urgences ne s'y rendent.
M. le président. La parole est à Mme Sabine Drexler. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
Mme Sabine Drexler. Je souhaiterais faire entendre la voix singulière du sud de l'Alsace, région où trois frontières s'entremêlent, ce qui complique encore la situation dans laquelle se trouve notre système de soins.
Dans ce territoire, comme partout ailleurs, une frange importante de la population est vieillissante et les maladies chroniques sont en constante augmentation. Comme ailleurs encore, la médecine de ville est carencée. Les listes d'attente chez les rares spécialistes s'allongent, décourageant bon nombre d'habitants qui finissent par renoncer à se faire soigner.
Dans les hôpitaux du sud de l'Alsace, les urgences peinent à accueillir des patients qui se présentent régulièrement, faute de trouver à se soigner ailleurs dans la durée. Je pense tout particulièrement aux personnes âgées, notamment aux plus isolées d'entre elles.
Dans le secteur des trois frontières, le phénomène d'aspiration des personnels de santé vers les pays voisins aggrave encore les choses : chaque jour, 250 soignants traversent le Rhin pour travailler en Allemagne et 1 850 rejoignent la Suisse.
L'attractivité des pays transfrontaliers a augmenté d'un tiers depuis 1999 pour des raisons non seulement salariales, puisqu'une infirmière diplômée gagne entre 5 500 et 8 000 francs suisses bruts par mois, mais aussi qualitatives, en raison de meilleures conditions de travail et de formation.
L'hôpital de Saint-Louis, à quelques mètres de la frontière, est à cet égard particulièrement affecté. La Collectivité européenne d'Alsace a mis en place une politique spécifique pour valoriser ce secteur géographique, le rendre plus attractif et favoriser l'installation des personnels de santé. Toutefois, dans un contexte de forte concurrence entre les territoires, les capacités de cette collectivité atteignent leurs limites.
Alors que des leviers ont été identifiés pour limiter les conséquences de ce phénomène de fuite, comment le Gouvernement compte-t-il rendre effectives les conventions de coopération sanitaire, notamment celles de 2016, pour répondre aux besoins particuliers de ce territoire ?
M. le président. La parole est à Mme la ministre.
Mme Geneviève Darrieussecq, ministre de la santé et de l'accès aux soins. Madame la sénatrice, la question de l'attractivité des métiers de santé est un sujet d'importance qui affecte aussi les départements de l'Ain et de la Haute-Savoie.
Le niveau de salaire offert de l'autre côté de la frontière aspire nos professionnels de santé, ce qui complique la prise en charge des personnes résidant sur le territoire national. Jean Castex, lorsqu'il était Premier ministre, avait confié une mission au préfet de Haute-Savoie sur la mise en œuvre d'un plan d'action spécifique.
Dans ce cadre, deux axes principaux de réflexion se dégagent : premièrement, l'identification de leviers d'action nationaux permettant d'accroître l'attractivité des métiers de santé dans les territoires frontaliers et de réduire les départs ; deuxièmement, l'identification des coopérations possibles entre, d'une part, les régions et départements français et, d'autre part, la Confédération et les cantons suisses frontaliers pour contribuer au même objectif et développer une meilleure intégration transfrontalière de l'offre de soins.
Il nous faut identifier et développer une véritable politique transfrontalière. Ce n'est pas chose facile, mais il y va de l'intérêt des Suisses et des Français habitant de part et d'autre de cette frontière.
Les données de l'Observatoire statistique transfrontalier (OST) mettent en évidence un important déséquilibre entre le lieu de résidence et le lieu de travail des soignants exerçant en Suisse. Les départements de l'Ain et de la Haute-Savoie sont particulièrement affectés : respectivement 10 % et 41 % de leurs soignants exercent en Suisse, soit 7 000 professionnels au total. Ils pourvoient ainsi près de 30 % des besoins en équivalents temps plein (ETP) des cantons de Genève et de Vaud.
Au-delà des tensions sur les ressources humaines dans ces zones frontalières, des mesures d'attractivité salariale sont mises en place. Ainsi, le Gouvernement a institué une indemnité de résidence spécifique, tandis que l'ARS déploie largement des contrats d'allocation d'études, accompagne financièrement les étudiants en formation et les incite à s'engager dans le territoire où ils ont été formés.
Il est indispensable de construire une politique transfrontalière de santé, même si cela exige beaucoup de temps.
M. le président. La parole est à Mme Laurence Muller-Bronn. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains. – Mme Solanges Nadille applaudit également.)
Mme Laurence Muller-Bronn. À mon tour de parler de l'Alsace, mais il s'agit cette fois-ci du Bas-Rhin. (Sourires.)
L'enquête réalisée par Samu-Urgences de France a montré que deux services d'urgences sur trois ont fonctionné de nouveau en mode dégradé durant l'été 2024. En Alsace, nous avons franchi un nouveau stade dans l'inacceptable cet été, en particulier dans le département du Bas-Rhin.
Dans les hôpitaux de Strasbourg, de Sélestat, de Haguenau et de Wissembourg, l'attente durant des heures, voire des jours, sur un brancard augmente les risques de mortalité des patients.
En reportant toujours plus le risque sur les malades, nous atteignons les limites de la maltraitance institutionnelle. À Strasbourg, le 10 avril dernier, un syndicat a décidé de porter plainte pour non-assistance à personnes en danger.
De crise en crise et de plan blanc en dispositif provisoire, la vision court-termiste des services hospitaliers nous conduit à un échec certain et mortifère. Pourtant, les causes sont largement connues et des solutions existent. Le Sénat avait d'ailleurs fait un certain nombre de préconisations à la suite de la commission d'enquête sur la situation de l'hôpital et le système de santé en France dans son rapport Hôpital : sortir des urgences, publié en mars 2022.
Les centres de soins non programmés sont l'une des réponses opérationnelles possibles. Ces quarante-trois structures, qui prennent en charge 820 000 patients chaque année, peuvent assurer un service d'urgences de proximité.
Toutefois, des freins demeurent : il faudrait décloisonner les statuts et les missions et permettre à différents types d'interventions ou d'établissements – publics et privés – de coexister sur le terrain.
Madame la ministre, allez-vous vous engager dans cette voie ? Quelles mesures d'organisation sur le long terme proposerez-vous aux professionnels de santé ainsi qu'aux patients ?
M. le président. La parole est à Mme la ministre.
Mme Geneviève Darrieussecq, ministre de la santé et de l'accès aux soins. Madame la sénatrice, je reconnais que certains établissements de votre département ont rencontré des difficultés.
Des mesures législatives ou réglementaires peuvent créer des entraves. Aussi, je souhaiterais qu'un travail de simplification soit engagé. Des règlements, qui relèvent de l'ordre des médecins lui-même, empêchent certains professionnels de se regrouper pour travailler ensemble.
Il n'est plus l'heure d'empêcher, mais de faciliter. Je vais donc m'y atteler, aux côtés des directions concernées et des parlementaires. Les remontées du terrain nous permettront d'identifier toutes les difficultés.
Nous poursuivons un objectif prioritaire, celui de toujours assurer la sécurité et la formation des médecins pour leur permettre d'apporter les services qui leur sont demandés.
J'y insiste, simplifions les choses ! Les médecins doivent pouvoir travailler ensemble, qu'ils viennent du public ou du privé. Arrêtons de mettre des entraves, surtout quand il est possible d'aider les hôpitaux à fluidifier les services d'urgences.
Encore une fois, il faut décharger les urgences des patients qui n'ont rien à y faire et qui devraient être pris en charge avant.
Source https://www.senat.fr, le 16 octobre 2024